LE FOOTBALL PROFESSIONNEL CONTRE LE DOPAGE
Le football professionnel contre le DOPAGE L AFLD : la nouvelle arme fra La loi du 5 avril 2006 relative à la lutte contre le dopage et à la protection de la santé des sportifs est entrée en vigueur le 1er octobre 2006. Elle a confié à une nouvelle autorité indépendante, l Agence française de lutte contre le dopage (AFLD), la responsabilité des contrôles, de la recherche, de la prévention et des sanctions. Comment fonctionne l AFLD? Quelles sont ses missions? Explications. Par Vanessa Caffin Dopage : que dit la loi? La nouvelle loi relative à la lutte contre le dopage et à la protection de la santé des sportifs a été adoptée le 5 avril 2006. Elle est entrée en vigueur le 1er octobre 2006 avec la parution du premier de ses décrets d application, relatif à l organisation et au fonctionnement de l Agence française de lutte contre le dopage (AFLD), qui s est substituée au Conseil de prévention et de lutte contre le dopage (CPLD), créé par la Loi Buffet de 1999. l article 2 de la loi du 5 avril définit le champ d action et les compétences de l AFLP : I. - L'Agence française de lutte contre le dopage, autorité publique indépendante dotée de la personnalité morale, définit et met en oeuvre les actions de lutte contre le dopage. A cette fin, elle coopère avec l'organisme international chargé de la lutte contre le dopage reconnu par le Comité international olympique et avec les fédérations sportives internationales. A cet effet : 1 Elle définit un programme national annuel de contrôles. - A cette fin, les administrations compétentes, les fédérations, groupements sportifs et établissements d'activités physiques ou sportives, ainsi que, sur sa demande, les sportifs, lui communiquent
Composition de l AFLD Le Collège de l Agence française de lutte contre le dopage, comme celui de l ancien CPLD, est composé de trois membres des juridictions administratives et judiciaires, de trois représentants du monde de la médecines, de deux personnes qualifiées dans le domaine du sport et d un sage. Les juristes : Un Conseiller d Etat (Pierre Bordry, président) et deux magistrats de la Cour de Cassation (Daniel Farge et Laurent Davenas). Les scientifiques : Trois membres désignés par les présidents des Académies de médecine, de pharmacie et des sciences. Les sportifs : Un ancien sportif de haut niveau (Sébastien Flute) et un membre du conseil d administration du CNOSF (Claude-Louis Gallien) désignés par le président du CNOSF. Le sage : Un médecin (Jean-François Bloch-Laine) désigné par le président du Comité consultatif national de l éthique. çaise antidopage toutes informations relatives à la préparation, à l'organisation et au déroulement des entraînements, compétitions et manifestations sportives ; elle est informée des décisions prises par les fédérations en application de l'article L. 3634-1. - Le programme national annuel de contrôles comprend des contrôles individualisés, mis en oeuvre dans les conditions prévues à l'article L. 3632-2-3 ; 2 Elle diligente les contrôles dans les conditions prévues aux articles L. 3632-2, L. 3632-2-1, L. 3632-2-2 et L. 3632-2-3 : a) Pendant les compétitions mentionnées à l'article 17 de la loi n 84-610 du 16 juillet 1984 relative à l'organisation et à la promotion des activités physiques et sportives à l'issue desquelles sont délivrés des titres nationaux, régionaux ou départementaux ; b) Pendant les manifestations autorisées en vertu de l'article 18 de la même loi lorsque la fédération sportive délégataire décide que seuls ses règlements sont applicables au déroulement des épreuves ; c) Pendant les entraînements préparant aux compétitions ou manifestations sportives ; 3 Elle peut, en coordination et avec l'accord de l'organisme international chargé de la lutte contre le dopage reconnu par le Comité international olympique ou d'une fédération sportive internationale, diligenter des contrôles dans les conditions prévues à l'article L. 3632-2-4. 4 Elle est informée des faits de dopage portés à la connaissance de l'administration ou des fédérations sportives ; 5 Elle réalise ou fait réaliser l'analyse des prélèvements effectués lors de contrôles ; 6 Elle exerce un pouvoir disciplinaire dans les conditions prévues aux articles L. 3634-2 et L. 3634-3 ; 7 Elle délivre les autorisations prévues par l'article L. 3622-3 ; 8 Elle est consultée sur tout projet de loi ou de règlement relatif à la lutte contre le dopage ; 9 Elle participe aux actions de prévention, d'éducation et de recherche mises en oeuvre en matière de lutte contre le dopage ; 10 Elle est associée aux activités internationales dans le domaine de la lutte contre le dopage et apporte son expertise au ministre chargé des sports, notamment lors de l'élaboration de la liste des produits interdits mentionnée à l'article L. 3631-1 ; 11 Elle peut être consultée par les fédérations sportives sur les questions relevant de sa compétence ; 12 Elle adresse aux fédérations sportives des recommandations dans les matières relevant de sa compétence ; 13 Elle remet chaque année un rapport d'activité au Gouvernement et au Parlement. Ce rapport est rendu public. 3
Le football professionnel contre le DOPAGE Nous allons renforcer les contrôles inopinés Le Conseiller d Etat Pierre Bordry a été nommé président de l AFLD. Il nous dévoile les premiers résultats de l activité de l agence depuis sa création, le 1er octobre 2006, et la politique de lutte contre le dopage qu il mettra en oeuvre en 2007. Par Vanessa Caffin INTERVIEW Pierre BORDRY, président de l Agence française de lutte contre le dopage De quel statut l Agence française de lutte contre le dopage est-elle dotée? C est l'une des rares agences au monde qui rassemble dans le même organisme les contrôles, les analyses et les sanctions. C est une Autorité publique indépendante dotée de la personnalité morale. Elle a le même statut que trois autres autorités en France, l Autorité des Marchés Financiers, la Haute Autorité de Santé, la Commission de Contrôle des Assurances. L AFLD est indépendante du Ministère des Sports et ne reçoit d instructions de personne. Quelles actions avez-vous menées depuis votre entrée en fonction, le 1er octobre 2006? Pour le dernier trimestre de l année 2006, l AFLD a repris le programme des contrôles prévus par le Ministère chargé des Sports. Il fallait qu elle soit immédiatement opérationnelle. En accord avec les Fédérations sportives concernées, elle a cependant ciblé certaines disciplines, en particulier le rugby, où 378 contrôles ont été réalisés contre 475 sur l ensemble de l année 2005, et le football. Nous sommes en contact avec les présidents des fédérations et des ligues professionnelles pour mieux organiser les contrôles. La FFF et la LFP se sont déclarées prêtes à s'engager aux côtés de l'agence. L AFLD compte travailler en étroit partenariat avec les fédérations. Nous leur avons demandé de nommer un correspondant dopage pour nous aider à mieux définir les cibles et mener ensemble la lutte contre le dopage. Pour être efficace, l AFLD est dotée d un Conseil scientifique composé de professeurs de médecine particulièrement réputés, dont un nombre important d étrangers proches des sociétés savantes médicales. Ce Conseil est notamment chargé de recueillir des projets de recherche, de les sélectionner et éventuellement de les soutenir. Quels sont les résultats des premiers contrôles que vous avez menés à la fin de l année 2006? Pour le football, nous avons eu 15 résultats positifs pendant le mois de décembre, en National et plus particulièrement dans le monde amateur (CFA, CFA 2 et niveau régional). Il s agit souvent d usage de cannabis. Dans toutes les disciplines, nous avons le sentiment qu il existe une automédication qui rejoint un phénomène de société. Les sportifs ne semblent pas se rendre compte que certaines substances qu ils prennent notamment dans
549 contrôles en trois mois, le football passé au crible En trois mois, entre octobre et décembre 2006, l Agence française de lutte contre le dopage a réalisé près de 2000 contrôles, dont 549 dans le football, donnant un véritable coup d accélérateur à la lutte antidopage dans certaines diciplines. Chez les footballeurs, 18 cas positifs ont été constatés, mais aucun dans le monde professionnel. Des contrôles ciblés 1915 contrôles ont été effectués lors du dernier trimestre 2006 par l AFLD, toutes disciplines confondues. Les compétitions nationales ont fait l objet de 2/3 des contrôles. 549 prélèvements ont été réalisés dans le football, ce qui le place au premier rang des disciplines contrôlées devant le rugby (378), l athlétisme (208) et le cyclisme (109). Une augmentation des contrôles hors compétition 1 contrôle sur 5 a eu lieu hors compétition lors du quatrième trimestre 2006 afin de développer les contrôles inopinés. Cette initiative peut également expliquer le nombre assez faible d échantillons positifs en raison de la liste restreinte des produits interdits durant ces périodes. Aucun footballeur professionnel positif sur 549 contrôles Sur l ensemble des contrôles réalisés par l AFLD lors du dernier trimestre 2006, 65 cas positifs, 4 constats de carence et 2 obstructions au contrôle ont été constatés, soit 3,7% d infractions. Le rugby arrive en tête des contrôles positifs (22 cas positifs et 1 obstruction) devant le football (18 cas positifs et un constat de carence. Les substances les plus souvent détectées sont des cannabinoïdes). Le cyclisme compte 9 cas positifs (bêta-2-agonistes) pour 109 contrôles et l athlétisme 5 cas positifs et 1 constat de carence, la substance la plus détectée étant les corticoïdes. Enfin, des cas positifs ont également été relevés dans le handball (3), la natation (3), la course camarguaise (2), le basket, la boxe, le golf, le surf, le tir à l arc, le triathlon et la voile (1). Contrôles antidopage : vers une procédure type En 2007, l AFLD souhaite renforcer la professionnalisation des préleveurs. Une attention particulière sera ainsi portée à la formation des préleveurs, définie par l Agence et réalisée dans chaque région par les médecins coordonnateurs contre le dopage. Une procédure de prélèvement type sera mise en plce par le Département des contrôles de l AFLD. des compléments alimentaires acquis sur Internet sont interdites et souvent dangereuses. Comment ciblez-vous les contrôles? L efficacité des contrôles n est pas une simple question de nombre mais aussi de ciblage. Quand on lutte contre le dopage, il faut aller chercher le sportif dopé là où il est et quand il est détectable. Notre objectif n est pas de faire du chiffre mais de tenter d éradiquer cette plaie. Chaque contrôle coûte environ 300 euros. C est un coût élevé. On ne va donc pas contrôler quand on pense que c est inutile. Pour l organisation des contrôles, nous faisons appel aux directions régionales du Ministère chargé des Sports. Nous élaborons des conventions avec chaque direction régionale afin de définir les modalités des contrôles. La politique est fixée par l Agence, mais une marge de manœuvre est laissée aux directions régionales qui peuvent souhaiter, par exemple, contrôler plus particulièrement certains sports. Quelle politique de lutte anti-dopage allez-vous mener en 2007? Le collège de l AFLD s est fixé des objectifs qualitatifs et quantitatifs : 8500 prélèvements urinaires et 200 prélèvements sanguins seront effectués en 2007. Nous initierons également à titre expérimental des prélèvements capillaires et des ongles afin de mettre en évidence un éventuel comportement dopant. Ces techniques sont très employées dans la lutte contre les stupéfiants : nous verrons si les personnes contrôlées prennent des produits de façon habituelle ou non. Nous allons également renforcer la professionnalisation des préleveurs pour qu il existe une harmonie sur l ensemble du pays et que la même procédure soit parfaitement respectée partout. Qu en sera-t-il des contrôles inopinés? Nous allons augmenter de façon significative les contrôles inopinés à l entraînement et en compétition. La priorité sera également donnée à la mise en place de contrôles plus nombreux dans les différentes disciplines professionnelles (football, rugby, handball, volley-ball et cyclisme). Pour les amateurs, nous mettrons notamment l accent sur les critériums, pour le cyclisme, et le niveau Elite des différentes disciplines. Enfin, nous allons définir des groupes cibles de sportifs professionnels et amateurs de haut niveau, assujettis à une obligation de localisation, qui pourront être contrôlés à n importe quelle période de l année. 5
Le football professionnel contre le DOPAGE Une saison de lutte antidopage : tous les résultats A la demande de Frédéric Thiriez et Jean-Pierre Escalettes, Jacques Liénard, médecin fédéral national et président du Panel dopage de l UEFA, a effectué un bilan des contrôles antidopage réalisés au cours de la saison 2005-2006. 16 cas positifs ont été recensés. Aucun n a concerné de joueur professionnel. Par Vanessa Caffin INTERVIEW Jacques LIENARD, médecin fédéral national La plupart des cas positifs sont liés au cannabis Aucun joueur professionnel n a été contrôlé positif la saison dernière. Cela signifie-t-il qu il n y a pas de dopage dans le championnat de France? On ne peut pas dire ça car cela voudrait dire que nous serions en mesure de contrôler tous les joueurs 24h sur 24, ce qui n est pas le cas. Et l on ne peut jamais présager de ce qui se passe dans la tête des gens. Néanmoins, ce résultat est une vraie satisfaction. Cela signifie que les joueurs font attention à ce qu ils prennent. Ils sont sensibilisés, plus méfiants qu il y a une dizaine d années car ils ont conscience des conséquences que peut avoir le dopage sur leur carrière. Néanmoins, il reste encore des gros efforts à faire en termes d information sur les produits interdits, les procédures à respecter, la nécessité de ne prendre que des médicaments prescrits sur ordonnance. Dans le football amateur, 16 cas positifs ont été enregistrés la saison dernière. Est-ce inquiétant? Tout cas de positivité est un cas de trop, une tâche pour le football. Néanmoins, c est un chiffre équivalent à ce que nous enregistrons chaque année. Sur ces seize cas, quatorze sont dus à la prise de cannabis. C est un risque réel lorsque l on descend dans le milieu des jeunes. Le cannabis est un produit de la société civile qui ne touche pas que les sportifs. Les adolescents n ont pas conscience qu en fumant, ils risquent d être contrôlés positifs. Ils ne font pas toujours la relation. Cette saison, la LFP a mis en place un suivi médical longitudinal auprès des joueurs professionnels afin de mieux surveiller leur santé. Un premier bilan? Ce suivi a été adopté grâce aux efforts du professeur Rochcongar. Les examens effectués permettent de dépister les anomalies, cardiaques ou sanguines. Ils sont plus complets que par le passé et permettent d offrir un meilleur suivi médical des joueurs. L objectif est d être sûr que la pratique du football n altère pas la santé. A terme, nous serons capable d établir un profil cardiaque et biologique du joueur professionnel, ce qui nous permettra d optimiser les entraînements et de mieux adapter la préparation physique.
2005-2006 : 666 prélèvements auprès des pros et des amateurs Entre l été 2005 et le printemps 2006, 666 prélèvements ont été effectués auprès des footballeurs professionnels et amateurs : En match 75 % des contrôles En entraînement 25 % des contrôles 37 % des contrôles ont concerné des équipes professionnelles participant aux championnats de Ligue 1 et de Ligue 2. Ligue 1 22 % des contrôles Ligue 2 15 % des contrôles 666 joueurs contrôlés, aucun pro positif Sur l ensemble de la saison 2005-2006, 666 joueurs professionnels et amateurs ont été contrôlés par le Ministère des Sports, le nombre variant de 2 à 14 lors de chaque contrôle. 650 joueurs ont eu un résultat négatif et 16 joueurs ont été sanctionnés à l issue d un résultat positif (12 joueurs 4 joueuses) : 14 au cannabis, 1 au salbutamol et 1 à l heptaminol. Aucun de ces joueurs, ou joueuses, n était professionnel. 7
Le football professionnel contre le DOPAGE La LFP à la pointe de la prévention En 2004, la LFP a mis en place un suivi biologique et cardiologique obligatoire auprès des footballeurs professionnels. Préserver la santé des joueurs professionnels, détecter les anomalies, élaborer des profils médicaux Depuis 2004, la LFP a mis en place au niveau des clubs de Ligue 1 et Ligue 2 un suivi biologique et cardiologique obligatoire auprès des joueurs professionnels. Ce suivi comprend, deux fois par an -en août et en janvier- un examen médical, un électrocardiogramme, une épreuve d effort, une échocardiographie et un bilan biologique. L objectif? S assurer de la santé des joueurs de haut niveau. Une précaution pour laquelle le rugby et le basket professionnel ainsi que le cyclisme de haut niveau ont également opté. Soucieuse d optimiser la bon respect de ce suivi médical, la LFP s est engagée à prendre à sa charge la remontée et le traitement des informations par un collège de spécialistes placés sous la responsabilité du Professeur Rochcongar, représentant des médecins au sein du Conseil d administration de la LFP. En cas d anomalie détectée, le dossier est soumis à ce groupe d experts, sous réserve de l anonymat, ainsi qu au médecin du club qui est le seul à disposer des bilans des joueurs de façon non anonyme. A terme, l objectif de ce suivi médical est de disposer d une connaissance du profil endocrinologique, biologique et cardiologique du footballeur de haut niveau et de permettre de mieux cerner les éventuelles anomalies médicales, souligne le Professeur Rochcongar. Ce dernier espère disposer de ce profil d ici la fin de l année. V.C. Le suivi médical des joueurs, c est quoi? - Un électrocardiogramme - Une échocardiographie - Un bilan biologique deux fois par an Le bilan biologique concerne les aspects : -hématologie (numération formule, plaquettes sanguines, CRP, fer sérique, ferritine) -Métabolisme : glycémie, azotémie, uricémie, créatinémie, bilan lipide, transaminases, gamma GT, ionogramme, magnésium, calcium. -Hormonologie : cortilosémie, testostéronémie, LH, IGF1. Les résultats sont centralisés à la LFP sous forme anonyme pour étude par le collège d experts piloté par le Professeur Rochcongar.