Glorieux Sud Si l'architecture des temples indiens vous intéresse, allez dans le sud admirer les plus fins. Car bien qu'il y ait une forte concurrence, le consensus s'accorde pour dire que la Dynastie des Hoysala a bâti les temples les plus élaborés. Suivez Sudharak Olwe, à Belur Photo et texte par Sudharak Olwe
52 Indes l novembre-decembre 2006 L'Inde du sud abonde en superbes exemples d'architecture religieuse de plus de 1000 ans. C'est un peu comme si les dynasties réparties à travers la péninsule et à travers les siècles s'étaient fait concurrence pour laisser derrière elles les plus belles empreintes pour l'avenir. Parmi ce vaste choix, de l'extrême pointe sud de l'inde à la rivière Godavari au Maharashtra et à l'andhra Pradesh, et englobant plusieurs grandes dynasties telles les Chola, Pandya, Chera et Vijayanagara, c'est un véritable défi pour un architecte ou un historien de sélectionner la meilleure architecture religieuse du sud de l'inde. Et pourtant la plupart s'accordent que la dynastie Hoysala du Karnataka a bâti certains des plus beaux temples. Les Hoysala ont pris le pouvoir avec leur victoire sur les Chalukya en 1187, gagnant en puissance jusqu'à devenir les souverains suprêmes du sud de l'inde, dominant même les Chola et les Pandya. La dynastie Hoysala installa sa capitale à Halebid, à 17 km de Belur, d'où elle régna pendant plus de 150 ans. Mais attaquée à plusieurs reprises par les envahisseurs au 14ème siècle, autrefois importante, la capitale fut réduite à la pauvreté et laissée en ruines. Les Hoysala déplacèrent donc le siège de leur pouvoir à Belur qui, dès lors, allait s'enorgueillir d'être un puissant empire. Les Hoysala bâtirent plus de 100 grands temples, d'un style nouveau, avec des sanctuaires conçus sous une forme étoilée et non plus cubique, et ornés de la manière la plus exquise, dont le temple principal de Belur, en particulier, qui s'impose par sa splendeur. Presque tous les souverains Hoysala ont encouragé l'art, mais ses principaux bâtisseurs furent Vishnuvardharna, Veera Ballala I et II. Vishnuvardhana fit construire le temple de Channakeshava à Belur, l'une des
principales structures de la région. Selon la légende, le temple fut construit pour commémorer sa conversion du jaïnisme au vaishnavisme, qu'il proclama en faisant construire un grand nombre de temples dans tout son royaume. Ces temples ne servaient pas seulement de lieu de culte. Ils étaient aussi affectés à des causes sociales ou politiques. Ils servaient notamment de cour, de maison du Trésor, d'école pour l'éducation, l'enseignement de la danse et de la musique. Le temple de Channakeshava comporte un vaste Gopuram ornemental, ou hall principal, de la taille d'une cour de souverain,
décoré d'un Garuda, le véhicule du Seigneur Vishnou, d'un cheval doré et d'un char de temple. Le temple, de forme étoilée, est magnifiquement décoré de toute part. Le moindre centimètre de la surface est sculpté. Ses frises relatent les histoires des Upanishads, des Puranas, du Ramayana et du Mahabharata. Sont également représentées diverses variétés de plantes grimpantes et les corniches sont décorées de rangs de perles. La frise inférieure des murs dévoile 650 éléphants, tous différents, qui chargent. Symbolisant la stabilité et la force énorme, ils sont considérés comme les haltérophiles du temple. Viennent ensuite des lions qui symbolisent le courage tandis que les chevaux au-dessus représentent la vitesse. Les plantes grimpantes symbolisent la beauté. En haut, 42 statuettes de nymphes célestes, ou Madanikas, typiques de Belur, font la spécificité de ce temple. Chacune d'elles reflèterait un type particulier : La Beauté au miroir, La dame au perroquet, La Chasseresse. La beauté intérieure du temple est stupéfiante. Au centre, l'idole de Krishna haute de 1,83 m fut installée en 1117. On compte 48 piliers de tailles, de formes et de motifs différents, qui attestent d'un remarquable savoir-faire artisanal. A l'intérieur, même dans l'obscurité, on aperçoit les piliers brillants, chacun unique et splendide, le plus populaire étant celui de Narasimha dans le Navaranga, unique par sa splendeur en filigrane. Un petit espace y a été laissé vierge pour celui qui a assez de talent pour le sculpter. Personne n'y a touché. Le pilier de Mohini mérite aussi qu'on s'y attarde. Il a été sculpté avec beaucoup de soin et dans le souci des proportions. Ici encore, ce sont les 4 Madanikas au plafond qui attirent l'attention. Le temple le plus imposant est entouré d'une demi-douzaine d'autres temples, plus petits, dédiés à d'autres divinités et bâtis en honneur de Vishnuvardhana et de ses reines. C'est à Halebid que se trouvent les temples ornés de Hoysaleshwara et de Kedareswara datant du 12ème siècle, mis à sac par les armées de Malik Kafur au début du 14ème siècle puis tombés dans l'oubli et non entretenus. Ils abritent des représentations Indes l novembre-decembre 2006 57
de Hoysaleswara et Satelswara, nommés respectivement d'après leur constructeur Vishnuvardhana Hoysala et de sa femme, la reine Santala. Les sanctuaires sont bâtis selon un plan étoilé, avec un sukhanasi, un navaranga et un Nandi Mandapa. Leurs plans ressemblent à celui du temple de Channekesava. Le temple de Hoysaleswara est un chefd'œuvre débordant de sculptures. Des milliers de représentations habillent les murs. Son soubassement possède les frises les plus richement sculptées représentant des files de cavaliers, d'éléphants de guerre, tous en pierre. Des scènes du Ramayana et du Mahabharata ajoutent à sa grandeur. Le temple de Kedareswara construit par le roi Ballala II, à Halebid, aujourd'hui en ruines, est considéré comme un joyau d'architecture. Tout comme le temple de Hoysaleswara, ce temple présente des frises classiques et des scènes tirées des épopées. 180 images apparaissent ainsi sous des toranas fleuris dans les parties supérieures des murs. A proximité se trouvent également des temples jaïns dédiés à Parsvanatha, Santhanatha et Adinatha.