- 2 - Cette décision est entrée en force, l'intéressée n'ayant pas fait opposition.



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IIIe Cour administrative. Séance du 16 février 2000. Statuant sur le recours interjeté le 24 mars 1999 (3A 99 54) par X, représentée par Me Y, avocat, contre la décision rendue le 4 février 1999 par la Commission des mesures administratives en matière de circulation routière (CMA), à Fribourg, (retrait du permis de conduire / inobservation de la signalisation lumineuse) En fait: A. X circulait au volant d'une voiture, le 22 octobre 1998, vers 23h30, à Lausanne. A la route de Berne, elle ne respecta pas la phase rouge de la signalisation lumineuse. Par courrier du 7 janvier 1999, la CMA a avisé X de l'ouverture d'une procédure et l'a informée qu'une mesure administrative (avertissement ou retrait du permis de conduire) devrait vraisemblablement être prise. L'intéressée a déposé ses observations le 15 janvier 1999. Elle a invoqué son besoin professionnel à la possession du permis: habitant à Farvagny mais travaillant à Fribourg, elle a besoin de son véhicule compte tenu de ses horaires irréguliers. B. Par décision du 4 février 1999, la CMA a prononcé le retrait du permis de conduire de X pour la durée de deux mois. Elle a retenu qu'en ne respectant pas la signalisation lumineuse et en mettant en danger le trafic, elle avait gravement compromis la sécurité de la route. Au sens de l'art. 16 al. 3 let. a de la loi fédérale sur la circulation routière (LCR; RS 741.01), la CMA a estimé que son permis devait lui être retiré. Elle a également relevé que l'intéressée était au bénéfice de ce document depuis le 21 octobre 1994. C. Par mémoire posté le 24 mars 1999, X a saisi le Tribunal administratif. Elle conclut, sous suite de frais et dépens, à l'annulation de la décision et à la réduction de la durée du retrait de son permis de conduire, ainsi qu'à la diminution de l'émolument afférent à la procédure de première instance. A l'appui de son recours, elle conteste que son permis devait obligatoirement être retiré, en application de l'art. 16 al. 3 let a LCR, en l'absence d'une négligence grossière. La sanction doit, selon elle, se fonder sur l'art. 16 al. 2 LCR et le retrait ne doit pas s'écarter de la durée minimale légale d'un mois. Elle invoque également sa bonne réputation en qualité d'automobiliste et rappelle son besoin professionnel à la possession du permis.

- 2 - D. Dans ses observations du 8 avril 1999, la CMA conclut au rejet du recours et se réfère à sa décision contestée ainsi qu'aux autres pièces du dossier. Elle relève cependant que, par son comportement, la recourante a fait preuve d'une grande imprudence et, partant, de négligence grave même si elle n'a pas envisagé le danger abstrait accru provoqué. Enfin, elle dit ne pas se sentir liée par l'appréciation faite par l'autorité pénale des questions de droit touchant à la violation des règles de la circulation. E. Par décision du 14 décembre 1998, la Commission de police, à Lausanne, a condamné X à une amende de 360 francs ainsi qu'aux frais. Elle l'a reconnue coupable d'inobservation de la phase rouge de la signalisation lumineuse et de mise en danger de la sécurité des autres usagers. Cette décision est entrée en force, l'intéressée n'ayant pas fait opposition. En droit: 1. Le recours interjeté le 24 mars 1999 contre une décision notifiée le 22 février de la même année été formé dans le délai et les formes prescrits (cf. art. 79 à 81 du code de procédure et de juridiction administrative; CPJA; RSF 150.1). Il est ainsi recevable à la forme. 2. a) Selon la doctrine (cf. Michel Perrin, Délivrance et retrait du permis de conduire, Fribourg 1982, p. 212 à 214; Blaise Knapp, Précis de droit administratif, IVe édit., Bâle 1991, n 38), l'autorité administrative jouit vis-àvis du juge pénal d'une totale indépendance. Toutefois, compte tenu du principe de l'unité et de la sécurité du droit, elle ne peut pas s'écarter sans motifs impérieux des constatations de fait contenues dans le jugement pénal si celles-ci sont le fruit d'une enquête approfondie avec rapport de police et auditions de témoins et s'il n'y a pas de raison de penser qu'elles sont inexactes ou incomplètes, si aucun moyen de preuve nouveau et pertinent n'est produit ou si aucun fait nouveau que le juge pénal ignorait ou a omis de prendre en compte, au moment où il a pris sa décision, n'est établi ou allégué. Le Tribunal fédéral a précisé que l'autorité administrative en matière de circulation routière est en principe tenue d'attendre le jugement pénal avant de rendre sa décision car, fondamentalement, il appartient d'abord au juge

- 3 - pénal de se prononcer sur la réalisation d'une infraction; elle est ensuite liée par le jugement pénal entré en force, à moins qu'elle soit en mesure de fonder sa décision sur des constatations de fait inconnues du juge pénal, s'il existe des preuves nouvelles dont l'appréciation conduit à un autre résultat, si l'appréciation à laquelle s'est livré le juge pénal n'a pas élucidé toutes les questions de droit, en particulier celles qui touchent à la violation des règles de la circulation (ATF 119 Ib 158 = JdT 1994 I 676). Enfin, si la qualification juridique d'une situation dépend essentiellement de l'appréciation de l'état de fait, qu'en principe le juge pénal est mieux à même de connaître que l'autorité administrative, celle-ci est alors liée par les règles de droit que le juge pénal a appliquées (ATF 124 II 103 consid. 1 c-aa et bb, p. 106 et 107; 104 Ib 359; 102 Ib 196). b) En l'espèce, la Commission de police compétente a reconnu X coupable de violation des règles de la circulation routière pour n'avoir pas observé la signalisation lumineuse et pour avoir mis en danger les autres usagers. c) Le prononcé pénal a été rendu le 16 décembre 1998, soit quelque deux mois avant la sanction administrative. La CMA ne s'y réfère pourtant pas dans sa décision. Elle a néanmoins retenu, pour fonder le retrait du permis de conduire de l'intéressée, le même état de fait que celui établi par l'autorité pénale dont le jugement est entré en force faute d'avoir été contesté. La recourante, pour sa part, n'a invoqué aucun fait nouveau et pertinent qui justifierait de se distancier de l'état de fait tel qu'il ressort de cette décision. En particulier, son affirmation selon laquelle elle n'a pas remarqué que le feu était passé au rouge parce qu'elle cherchait la direction d'ouchy et que son attention était portée sur les panneaux de signalisation, est bien plutôt de nature à confirmer qu'elle n'a pas respecté de manière stricte les règles de la circulation routière en matière de signalisation. Il est en tous cas manifeste que cette explication ne constitue pas un élément sérieux et pertinent qui imposerait, dans le cas d'espèce, une remise en cause de l'appréciation de l'autorité pénale. Elle ne le prétend d'ailleurs pas. Dans de telles conditions, il faut considérer les faits comme établis. 3. L'art. 27 LCR oblige chacun à se conformer aux signaux et aux marques de la police. Cette règle revêt une importance toute particulière, car le respect absolu des signaux est nécessaire à la sauvegarde de la sécurité et de la fluidité du trafic. Cette disposition est complétée par l'art. 68 de l'ordonnance sur la signalisation routière (OSR; RS 741.21), selon lequel le feu rouge signifie "arrêt" et le feu vert signifie "route libre". Par ailleurs, l'art. 3 al. 1 de

- 4 - l'ordonnance sur les règles de la circulation (OCR; RS 741.11), exige du conducteur qu'il évite toute occupation qui rendrait plus difficile la conduite du véhicule. Il est en l'occurrence établi à satisfaction de droit que la recourante n'a pas respecté la signalisation lumineuse en phase rouge et qu'elle a ainsi violé le prescrit des dispositions précitées. A lui seul, ce comportement justifiait le prononcé d'une mesure administrative. 4. a) Selon l'art. 16 al. 2 LCR, le permis de conduire peut être retiré au conducteur qui, par des infractions aux règles de la circulation routière, a compromis la sécurité de la route ou incommodé le public. Par cette disposition, la loi fixe les motifs du retrait dit facultatif (art. 31 al. 1 de l'ordonnance réglant l'admission des personnes et des véhicules à la circulation routière; OAC; RS 741.51) De son côté, l'art. 16 al. 3 let. a LCR prescrit que le permis de conduire doit être retiré, notamment si le conducteur a compromis gravement la sécurité de la route. Ce motif de retrait obligatoire du permis de conduire est précisé par l'art. 32 al. 2 OAC, lequel dispose que compromet gravement la sécurité de la route, le conducteur qui, par une violation grave d'une règle de la circulation, crée un sérieux danger pour la sécurité d'autrui ou en prend le risque. Le Tribunal fédéral a précisé que le retrait obligatoire du permis est subordonné à la double gravité de la faute commise et de la mise en danger (concrète ou abstraite accrue) qui en est résultée (ATF 120 Ib 312; 105 Ib 118). b) La précision contenue dans l'art. 32 al. 2 OAC correspond à la définition de l'infraction réprimée sur le plan pénal par l'art. 90 ch. 2 LCR. Le Tribunal fédéral tient aujourd'hui ces deux notions pour identiques à tous les égards (ATF 120 Ib 285). L'élément constitutif de l'art. 90 ch. 2 LCR est réalisée en cas de violation grossière d'une règle fondamentale de la circulation routière et de mise en danger abstraite ou concrète de la sécurité d'un autre usager de la route. Subjectivement, l'art. 90 ch. 2 LCR exige un comportement sans scrupules ou gravement contraire aux règles de la circulation, découlant à tout le moins d'une négligence grossière (ATF 118 IV 84 consid 2a). 5. a) En l'occurrence, la faute commise par la recourante doit être qualifiée de grave. En en ne respectant pas un feu rouge, elle a violé une règle élémentaire de prudence qui, dans les mêmes circonstances, se serait imposée à tout conducteur raisonnable (Perrin, op. cité, p. 73 ss et 145).

- 5 - En effet, selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, l'inobservation des signaux et des marques constitue, de manière générale, une faute grave, car le respect absolu des signaux est nécessaire à la sauvegarde de la sécurité et de la fluidité du trafic. Il a été ainsi jugé que compromet gravement la sécurité de la route celui qui n'observe pas un "cédez le passage" (JdT 1975 397 no 23), un feu rouge (JdT 1975 I 397 no 24; 1977 I 411 no 20; 1980 I 396 no 11a; 1981 I 399 no 10) ou un "stop" (JdT 1975 I 398 no 25; 1980 I 396 no 11b). L'inobservation d'un feu rouge a également été qualifiée de faute grave par rapport au droit des assurances (JdT 1979 I 452 no 47) ou sous l'angle pénal (art. 90 ch. 2 LCR; JdT 1982 I 759 no 53). De plus, le Tribunal fédéral a précisé que les signaux et marques existants doivent être observés tels qu'ils sont, car en principe ils expriment la force obligatoire de la décision de réglementation qui en est la base. Les signaux doivent être respectés même s'ils n'ont pas été placés régulièrement et valablement; leur aspect extérieur ne permet pas aux usagers de vérifier leur validité et ceux-ci doivent pouvoir compter qu'un signal ou qu'une marque correspondant à la situation juridique créée par la décision. Autrement dit, le respect d'une signalisation s'impose aux conducteurs, dans tous les cas (ATF 99 IV 164). b) Concernant, la mise en danger de la circulation qui est résultée de l'infraction commise, elle doit également être qualifiée de grave. En ne respectant pas la signalisation lumineuse, la recourante a pris le risque très sérieux de causer un accident qui ne s'est heureusement pas concrétisé. Ce facteur ne saurait cependant diminuer la gravité de la mise en danger. En effet, selon la jurisprudence, la violation d'un feu rouge constitue, comme telle, une mise en danger abstraite accrue, car ce comportement entraîne un risque d'accident beaucoup plus élevé en raison de la confiance que les usagers de la route ont toutes raisons d'accorder à ce genre de signalisation (JdT I 399 no 10; 1977 I 411 no 20). c) La double gravité de la faute commise et de la mise en danger qui en est résultée étant démontrée, c'est à juste titre que la CMA a fondé sa décision sur l'art. 16 al. 3 let. a LCR. Cela étant, la Commission de police de la municipalité de Lausanne a infligé à la recourante une amende sans cependant préciser si elle l'a fait en application de l'art. 90 ch. 1 ou ch. 2 LCR. D'après la recourante, l'autorité pénale a sanctionné son comportement à l'aune de l'art. 90 ch. 1 LCR. Cela semble effectivement vraisemblable mais n'est d'aucune importance, car cette appréciation n'a, en l'espèce, pas de portée quant à la décision administrative.

- 6-6. a) En effet, ainsi que déjà développé ci-dessus (cf. consid 2a), l'autorité administrative est liée par la qualification juridique des faits du jugement pénal en appliquant le droit lorsque l'appréciation juridique de l'infraction dépend étroitement de l'appréciation des faits que le juge pénal connaît en principe mieux que l'autorité administrative. L'autorité administrative ne doit pas s'écarter de la décision pénale fondée sur l'art. 90 ch. 1 LCR et prononcer un retrait du permis de conduire sur la baser de l'art. 16 al. 3 let. a LCR si le juge pénal a établi de manière claire les questions de fait et de droit au terme d'une procédure ordinaire et non pas seulement sur la base des pièces du dossier (cf. Schaffhauser, Grundriss des schweizerischen Strassenverkehrsrechts, T. III, Berne 1995, no 2642). En revanche, lorsque les autorités administrative et pénale se sont toutes deux fondées uniquement sur le dossier, l'autorité administrative n'est pas liée par la qualification juridique donnée par le juge pénal et peut apprécier plus sévèrement les fautes commises et fonder sa mesure sur l'art. 16 al. 3 let. a LCR (ATF 120 Ib 312). Tel est bien le cas en l'espèce, de sorte que l'on ne peut reprocher à l'autorité intimée de s'être écartée de la qualification juridique, très clémente, que semble avoir donnée la Commission de police de la municipalité de Lausanne à l'infraction commise par la recourante. b) Par conséquent, l'application de l'art. 16 al. 3 let. a LCR imposait le retrait du permis de conduire. La seule question qui se pose dès lors est celle de savoir si l'autorité intimée a abusé de son pouvoir d'appréciation en fixant à deux mois la durée du retrait. 7. a) L'art. 17 al. 1 let. a LCR dispose que l'autorité qui retire un permis de conduire fixera selon les circonstances la durée du retrait; cependant, elle sera d'un mois au minimum. L'art. 33 al. 2 de l'ordonnance réglant l'admission des véhicules et des personnes à la circulation routière (OAC; RS 741.51) précise que la durée du retrait d'admonestation est fixée surtout en fonction de la gravité de la faute, de la réputation de l'intéressé en tant que conducteur de véhicules automobiles et de la nécessité professionnelle de conduire de tels véhicules. L'autorité administrative doit en outre se réserver la possibilité de réprimer toutes les fautes, des plus bénignes aux plus graves. Pour se conformer à ce principe, elle doit adopter la règle selon laquelle la durée habituelle du retrait d'admonestation est, dans chaque hypothèse visée à l'art. 17 al. 1 LCR, supérieure au minimum légal prescrit par cette norme. Elle peut ainsi, en appréciant les circonstances particulières d'un cas d'espèce, réduire la période ordinaire de retrait et s'en tenir au minimum légal lorsque la gravité

- 7 - de la faute commise, la nécessité professionnelle de conduire un véhicule automobile, les bons antécédents du contrevenant ou ses besoins personnels commandent que l'on s'écarte de la mesure normale de la pénalité (cf. Perrin, op. cité, p. 190 et la jurisprudence citée). b) En ne respectant pas la signalisation lumineuse en phase rouge, la recourante a passagèrement oublié les règles élémentaires de prudence. Ce faisant, elle a commis une faute grave qui a mis en danger la sécurité des autres usagers. Un tel comportement justifie que l'on s'écarte de la durée minimale du retrait. c) La recourante est titulaire du permis de conduire depuis le 21 octobre 1994. Depuis cette date et jusqu'aux faits qui lui sont reprochés, elle n'a pas fait l'objet de sanction administrative. Or, passée la période de jeune conducteur, il faut admettre qu'au fur et à mesure que les années passent sans commission d'infractions aux règles de la circulation routière, un automobiliste acquiert progressivement une réputation de bon conducteur. Aussi, amenée à faire une appréciation globale des critères de fixation de la durée du retrait, l'autorité doit-elle accorder au critère des antécédents un poids progressif au fil de l'écoulement du temps et ne pas retenir abstraitement un seuil fixe d'années à partir duquel seulement ce critère est pris en considération. Sur la base de cette indication, il faut reconnaître néanmoins que les antécédents d'un conducteur, examinés sur une période de quatre ans, ne peuvent être pris en considération comme facteur de pondération des fautes commises au point de justifier, dans le cas d'espèce, une réduction de la durée du retrait du permis de conduire au minimum légal d'un mois d) Selon la doctrine et la jurisprudence, le besoin professionnel ne peut être pris en considération dans le cadre de la fixation de la durée d'un retrait de permis que si la privation de ce document revient à interdire au contrevenant tout exercice de son activité lucrative ou entraîne pour lui une perte de gain importante (cf. Bussy & Rusconi, op. cité, ad art. 17 LCR, no 1. 2 et les arrêts cités; JdT 1978 I 416 no 20; 1984 I 393 no 10 consid. 3a). La recourante, qui habite à Farvagny, travaille à Fribourg comme sommelière. Les horaires irréguliers lui interdisent, affirme-t-elle, l'utilisation des transports publics. Cet argument ne permet toutefois pas de considérer que la recourante a un besoin professionnel de disposer du permis de conduire, au sens restrictif que donne la jurisprudence à cette notion (comme un chauffeur professionnel de bus, de poids lourd ou de taxi par exemple). Certes, la Cour est bien consciente des inconvénients qu'aura à subir la recourante en raison de son retrait de permis. Ceux-ci sont inévitablement

- 8 - liés à la mesure admonitoire et ils participent à la fonction éducative de celleci. Durant la période de retrait, la recourante devra utiliser les transports publics, lorsque ses horaires de travail le lui permettront. Sinon, elle devra faire appel à une connaissance, voire à un tiers, pour se rendre à son lieu de travail. 8. Pour les motifs qui précèdent et au regard de l'ensemble des circonstances du cas, le Tribunal estime qu'un retrait d'une durée de deux mois paraît justifié, compte tenu de la gravité de la faute commise par la recourante. La décision attaquée est conforme aux principes de la légalité et de la proportionnalité et, partant, elle doit être confirmée. Elle devrait en outre permettre d'atteindre les buts recherchés par une mesure d'admonestation qui sont d'amender le conducteur et d'éviter les récidives (art. 30 al. 2 OAC). 9. La décision de la CMA étant confirmée, rien ne justifie de réduire l'émolument de première instance qui est d'ailleurs conforme au tarif appliqué en pareil cas par l'autorité intimée 10. Mal fondé, le recours doit être rejeté. Il appartient à la recourante qui succombe de supporter les frais de procédure, conformément à l'art. 131 CPJA et aux art. 1 et 2 du tarif du 17 décembre 1991 des frais de procédure administrative (RSF 150.12). Pour cette même raison, aucune indemnité de partie ne sera octroyée (art.137 al. 1 CPJA a contrario). 301.20.27