ESTIMATION DE LA CONSOMMATION



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Transcription:

LICIT Laboratoire d Ingénierie Circulation Transport Unité mixte de recherche INRETS/ENTPE ESTIMATION DE LA CONSOMMATION ENERGETIQUE D UN VEHICULE DANS UN FLUX DE TRAFIC Application au cas d un autobus EL HAGE Abdallah Master Recherche Génie Civil École doctorale MEGA Avril-Septembre 2006 Président du jury : Maître de stage : Rapporteur : Expert : Rémi FONDACCI Jean-Baptiste LESORT Vincent HENN Sylvie BARRAUD

NOTICE ANALYTIQUE NOM PRENOM AUTEUR EL HAGE Abdallah SUJET DU STAGE Estimation de la consommation énergétique d un véhicule dans un flux de trafic ORGANISME D'AFFILIATION ET LOCALISATION NOM PRENOM MAITRE DE STAGE LICIT(ENTPE/INRETS) LESORT Jean-Baptiste COLLATION Nbre de pages du rapport 59 Nbre d'annexes aucune Nbre de réf. biblio. 46 MOTS CLES TERMES GEOGRAPHIQUES RESUME SUMMARY Flux Trafic Trajectoire Véhicule Autobus Consommation énergétique Les préoccupations énergétiques et environnementales font aujourd hui partie des principaux enjeux pour l avenir de notre planète. Les transports routiers sont de gros consommateurs d énergie et particulièrement en termes de produits pétroliers. Afin de mieux évaluer cette part de responsabilité, il devient nécessaire de pouvoir estimer de manière plus fine les consommations des véhicules. Cela permettrait également d optimiser le fonctionnement de véhicules hybrides, qui constituent à moyen terme une alternative intéressante aux véhicules classiques. L objet de cette étude est donc d établir un modèle capable d estimer la consommation d un véhicule sur un trajet donné en tenant compte des interactions entre ce véhicule et le flux dans lequel il évolue. Pour réaliser ce projet, nous établissons un couplage entre un modèle de trafic et un modèle de véhicule. Dans le cadre de cette étude, nous nous limiterons à une application aux véhicules de transport public. Energy and environmental questions are today major concerns for the future of our planet. The road transport is highly energy consuming, particularly in terms of petroleum products. In order to better evaluate this share of responsibility, it becomes necessary to be able to estimate more accurately vehicles consumptions. That would also make it possible to optimize the operation of hybrid vehicles, which constitute in the medium term an interesting alternative to the traditional vehicles. The object of this study is thus to establish a model able to estimate the consumption of a vehicle on a given path by holding account of the interactions between this vehicle and the flow in which it moves. To carry out this project, we establish a coupling between a traffic model and a model of vehicle. Within the framework of this study, we will focus on an application to public transport vehicles.

Sommaire SOMMAIRE 1 INTRODUCTION 9 2 CONSOMMATIONS ENERGETIQUES 11 2.1 Enjeux 11 2.2 Nouveaux types de véhicules 13 2.2.1 Les véhicules électriques 13 2.2.2 Les véhicules hybrides 15 2.3 Moyens de mesures et d estimations des consommations énergétiques 16 2.3.1 Mesures en situation réelle 16 2.3.2 Mesures normalisées 17 2.3.2.1 Les cycles 17 2.3.2.2 Estimation après simulation de trafic 20 2.3.3 Le modèle de véhicule VEHLIB (Trigui et al., 2004) 22 2.4 Pourquoi prendre en compte le trafic? 23 2.5 Exigences d une interface modèle de trafic modèle de véhicule 25 2.5.1 Notion de Gabarit 25 2.5.2 Variables d entrée du modèle de véhicule 26 3 PRESENTATION DES MODELES DE TRAFIC 30 3.1 Modèles microscopiques 30 3.2 Modèles macroscopiques 32 3.2.1 Définitions préalables 32 3.2.2 Modèles du premier ordre 33 3.2.3 Résolution analytique des modèles du premier ordre (problème de Riemann) 34 3.2.4 Modèles du deuxième ordre (ou d ordre supérieur) 35 3.2.5 Résolution analytique des modèles du deuxième ordre 35 3.3 Comparatif et choix du modèle 36 3.4 Exemples de résolutions numériques 38 3.5 Particularités du modèle 42 3.6 Étude de la décélération du bus 43 4 IMPLEMENTATION ET RESULTATS 45 5

Sommaire 4.1 Le tronçon d étude 45 4.2 Scénarii d étude et remarques préalables 46 4.3 Résultats et comparatif 47 4.3.1 Cycle SORT1 47 4.3.2 Cycle SORT2 49 4.3.3 Cycle SORT3 52 5 CONCLUSION 54 6 BIBLIOGRAPHIE 56 6

Liste des illustrations LISTE DES ILLUSTRATIONS Figure 1 - Consommations de produits pétroliers dans le monde en 2002...12 Figure 2 - Comparatif des différentes technologies de batteries (extrait de (Clavel,2006))...14 Figure 3 - Banc moteur...17 Figure 4 - Cycle FTP...18 Figure 5 - Cycle US06...18 Figure 6 - Cycle SC03...18 Figure 7 - Cycle MVEG...19 Figure 8 - Exemple de table d'émission/consommation (extrait de (Barth et al., 2001))...21 Figure 9 - Un modèle de véhicule de la bibliothèque VEHLIB...23 Figure 10 - Trajectoires de bus contraint et non contraint...24 Figure 11 - Comparaison entre trajectoire et gabarit...26 Figure 12 - Courbe Vitesse-Temps...28 Figure 13 - Courbe Vitesse-Distance...29 Figure 14 - Exemples de diagrammes fondamentaux...33 Figure 16- Nouvelle classification des modèles (extrait de (Bourrel, 2003))...37 Figure 17 - Courbes de débits cumulés...39 Figure 18 - Résolution du modèle LWR dans le ca d'un feu tricolore (extrait de (Bourrel, 2003))...41 Figure 19 - Relations fondamentales d'un moving bottleneck (extrait de (Giorgi et al., 2002))...42 Figure 21 - Trajectoire pour une consigne SORT1...47 Figure 22 - cycle SORT1...48 Figure 23 - comparaison des courbes de vitesse sur un cycle SORT1...48 Figure 24 - Consommation du bus sur un cycle SORT1...49 Figure 25 - Trajectoires pour une consigne SORT2...50 Figure 26 - Cycle SORT2...50 Figure 27 - Consommation du bus sur un cycle SORT2...51 Figure 28 - Trajectoire pour une consigne SORT3...52 Figure 29 - cycle SORT3...52 Figure 30 - Comparaison des courbes de vitesse sur un cycle SORT3...53 7

Introduction 1 INTRODUCTION Dans un document très récent dénommé Critical Issues in Transportation (2006), le Transportation Research Board américain a défini dix problèmes majeurs liés au développement des transports. Dans cette liste figurent notamment les questions énergétiques et environnementales. Cela souligne l importance de ces dernières non seulement pour les pays américains et européens mais également pour l Asie où le développement des transports routiers se poursuit à un rythme problématique à très court terme. En conséquence, à l heure où les questions d économie d énergie se posent à l échelle mondiale, il devient essentiel de connaître la part de responsabilité des transports dans notre consommation d énergie. Les émissions de polluants et de gaz à effet de serre liées aux transports routiers sont tout aussi préoccupantes et constituent un enjeu prioritaire pour l avenir de notre planète. C est pourquoi les politiques élaborées au niveau européen cherchent à développer une stratégie d intégration des questions d environnement et de développement durable dans la politique commune des transports. Parmi les pistes de progrès, celle de l optimisation énergétique des véhicules en condition réelle d utilisation, sans être déterminante, représente un enjeu important. Elle rend nécessaire en revanche de pouvoir estimer de manière assez fine les consommations d énergie ainsi que les émissions de polluants des véhicules parcourant les autoroutes et les réseaux urbains. Actuellement, on peut modéliser de manière assez précise les émissions de polluants ou la consommation d énergie d un véhicule lorsqu on lui impose un cycle-type. Ces derniers peuvent être établis de plusieurs façons. À l INRETS, le LTE (Laboratoire Transports et Environnement) utilise des cycles à usage réel. Ce sont les résultats d études statistiques de trajectoires qui sont analysées et découpées afin d en extraire des morceaux de trajets cinématiques qui sont ensuite mis bout à bout afin d obtenir un cycle. L inconvénient principal de ces cycles est que ce ne sont pas des trajectoires réelles ni même réalistes. De plus, il leur manque l information sur les conditions de trafic qui affectent la trajectoire. Le problème est donc d établir de la façon la plus réaliste possible, une trajectoire type de véhicule prenant en compte l environnement dans lequel il évolue, c est-à-dire le flux de véhicules. Or les outils dont nous disposons actuellement sont encore assez pauvres de ce point de vue. Une meilleure connaissance des trajectoires peut également permettre d optimiser la gestion de l énergie par un véhicule. Ceci est particulièrement vrai pour les véhicules hybrides, qui représentent une voie d avenir dans la réduction des consommations, mais dont la gestion énergétique est complexe. D après l évaluation faite par le LTE dans le cadre du projet HYBRID, ces véhicules permettent un gain de 30 à 40% sur la consommation en milieu urbain. Ce gain est le résultat d une optimisation réalisée par l ordinateur du véhicule, programmé à l aide des connaissances actuelles, c est-à-dire à l aide de cycles. Or, en milieu urbain, l impact du flux sur la trajectoire des véhicules est capital. On peut donc légitimement penser qu une meilleure connaissance de cet impact permettrait une meilleure optimisation de la consommation énergétique pour ces véhicules hybrides, par exemple sur des trajets urbains connus à l avance. De plus, qu il s agisse de bus ou de voitures particulières, ces véhicules ont un gros avantage sur le plan environnemental : ils peuvent ne pas produire de pollution localement. Améliorer les performances de ces véhicules les 9

Estimation de la consommation énergétique d un véhicule dans un flux de trafic rendrait plus attractifs et permettrait sans doute de réduire les pics de pollution que nos grandes métropoles connaissent de plus en plus régulièrement. L enjeu environnemental qui se cache derrière la connaissance des effets du trafic sur la trajectoire d un véhicule est donc considérable. L objectif de ce travail est le suivant : à partir des modèles de trafic existants, en déterminer un qui modélise les interactions entre flux et véhicule afin de l appliquer à l estimation des consommations énergétiques d un bus. Cette estimation sera réalisée par un modèle de véhicule développé au LTE, VEHLIB. Par conséquent, pour coupler ces deux modèles, il faudra s intéresser aux exigences liées à une telle interface. Aussi, après avoir replacé le problème dans son contexte général, on dressera un rapide état de l art concernant l estimation des consommations énergétiques ainsi que les modèles de trafic, ce qui nous permettra alors de choisir les modèles à coupler. Enfin, on s intéressera à la mise en pratique et aux premiers résultats d un tel couplage. 10

Application au cas d un autobus 2 CONSOMMATIONS ENERGETIQUES 2.1 Enjeux L augmentation de la consommation des carburants issus du pétrole est fortement liée à l essor des transports routiers. En effet, si le XXe siècle a connu un développement spectaculaire de l automobile et de l aviation, le XXIe verra le transport routier se développer dans des proportions toutes aussi impressionnantes, puisqu on devrait assister dans les trente prochaines années à une hausse du nombre de véhicules en circulation de 80 %. Cet accroissement de la consommation par le secteur des transports est préoccupant. En effet, il s'agit d une source d'énergie fossile limitée dont les réserves ne sont pas renouvelables. De plus, cette consommation s accompagne de l émission de divers polluants ayant des impacts aussi bien localement qu à l échelle de la planète. Divers phénomènes socio-économiques viennent s additionner pour expliquer cette hausse. Le développement économique, le libre-échange et la pratique du flux tendu dans l'industrie entraînent une croissance du transport routier de marchandises au détriment du rail, dont les infrastructures ne sont pas encore assez développées pour qu il soit concurrentiel. L'accès à la civilisation automobile d'un plus grand nombre, notamment dans les pays émergents, est aussi à l'origine de l'augmentation de la demande de transport. C est cette augmentation qui sera le principal moteur de la croissance de la consommation pétrolière dans le monde dans les prochaines années (site Internet IFP 2002). Voici quelques chiffres intéressants, selon l IFP : 97 % des consommations d énergie du secteur des transports sont assurées par le pétrole. Les transports utilisaient un tiers de la production mondiale de pétrole en 1973, contre plus de 50 % aujourd hui. Le parc automobile, de plus de 800 millions de véhicules (voitures particulières et véhicules utilitaires) aujourd'hui, va doubler dans les deux ou trois prochaines décennies. La part des énergies alternatives dans les transports devrait progresser de 3% aujourd'hui à 10-15% à horizon 2030. En France, 79% des transports intérieurs de marchandises sont effectués par la route. 11

Estimation de la consommation énergétique d un véhicule dans un flux de trafic Figure 1 - Consommations de produits pétroliers dans le monde en 2002 Pour répondre aux enjeux du développement durable dans l automobile, il est donc nécessaire de chercher à limiter les émissions et donc la consommation des véhicules, problème qui se posent à l échelle urbaine et à l échelle du globe : «La pollution urbaine, particulièrement sensible dans les zones de circulation denses ou mal ventilées, est provoquée par les polluants émis à l échappement des moteurs à la suite du processus de combustion : le monoxyde de carbone (CO), les oxydes d azote (NOx), les hydrocarbures imbrûlés (HC) et les particules de suie. Ces émissions font l objet d une réglementation grâce à laquelle l industrie automobile a démontré sa capacité à générer des véhicules de plus en plus propres. Mais des marges de progrès existent pour continuer de réduire les émissions de polluants, et en particulier de NOx et de particules diesel. La pollution globale imputable à l automobile est liée à l émission de gaz carbonique (CO2), mise en cause dans l effet de serre et sa conséquence climatique : le réchauffement de la planète. Les transports routiers représentent à eux seuls 23 % des émissions de CO2 en Europe. L industrie automobile européenne s est fixé pour objectif d abaisser les rejets à 140 g de CO2/km en 2008, avec 120 g/km en perspective pour 2012. La moyenne de l Europe est actuellement de 164 g/km. Les voitures françaises se situent à un rang honorable avec 155 g/km en moyenne, voire 110 g/km pour les meilleures d'entre elles.» (site Internet IFP 2002) Outre l amélioration des techniques existantes, les carburants alternatifs (GPL, gaz naturel, éthanol, hydrogène) et les véhicules à motorisation hybride constituent des solutions technologiques alternatives. Pour ces derniers, il en existe différents types, mais quels qu ils soient, il paraît utile de pouvoir optimiser l usage des deux motorisations en fonction des avantages et inconvénients de chacune. Ainsi, cela permettrait aux constructeurs de maintenir un niveau de performance acceptable par la 12

Application au cas d un autobus clientèle tout en réduisant la consommation des véhicules. Il ne faut cependant pas oublier que pour réussir à s imposer, ces différentes solutions devront faire face aux contraintes propres au marché automobile (concurrence très forte, réglementation, fiscalité) et représenter un coût économique acceptable par le consommateur. Parallèlement à ces solutions technologiques, il existe d autres solutions plus socioéconomiques, visant à agir sur les comportements individuels, la gestion du trafic, la diversification des modes de transport et la mobilité des personnes et des marchandises. On peut par exemple chercher à réduire la mobilité des personnes ou des marchandises, en aidant au développement des services de proximité ainsi qu en favorisant l implantation de logements plus proches des lieux de travail. Des politiques d incitation au choix modal permettraient de développer la part des transports en commun. Actuellement, dans la plupart des grandes villes françaises, les enquêtes-ménage déplacements révèlent que la voiture occupe toujours plus de 50% des déplacements contre moins de 20% pour les transports en commun (chiffres enquête-ménage agglomération lyonnaise 1995). Enfin, sur chaque réseau, une réorganisation afin d optimiser les flux pourraient permettre de réduire les consommations. En effet, la congestion a un effet non négligeable sur les véhicules. Il existe donc de multiples solutions qui peuvent être liées ou combinées. C est le cas par exemple lorsque la décision est prise de remplacer la flotte d une ligne de bus par des véhicules hybrides en y augmentant la fréquence. Afin de pouvoir évaluer de manière plus réaliste les conséquences d une telle décision, il est important de connaître les conséquences que cela aura sur la circulation et les contraintes que celle-ci pourra apporter, mais aussi d analyser comment optimiser l usage d un véhicule hybride dans ces conditions. 2.2 Nouveaux types de véhicules Parmi les solutions technologiques que nous avons citées précédemment, il y a, outre les améliorations apportées aux motorisations actuelles, de nouveaux types de véhicules et notamment, les véhicules électriques et les véhicules hybrides. 2.2.1 Les véhicules électriques Depuis les premières expérimentations de bus électriques dans les années 80, les véhicules électriques ont beaucoup évolué, notamment grâce aux progrès réalisés dans le domaine des batteries. Ces véhicules disposent d un unique moteur électrique alimenté par des batteries. Le moteur électrique est un élément fiable, silencieux et fournissant un couple régulier sur toute la gamme de vitesse. Il a un rendement très 13

Estimation de la consommation énergétique d un véhicule dans un flux de trafic supérieur au moteur thermique : respectivement supérieur à 80% et inférieur à 30%. Ces chiffres sont cependant à relativiser par le fait que la production et le transport d énergie électrique jusqu à la batterie ne se font pas sans perte. Le véhicule tout électrique alimenté par batteries présente de gros avantages au niveau des nuisances sur site : il n émet pas de polluants et le bruit est très réduit. De plus, le véhicule électrique est caractérisé par une conduite plus souple et sécurisante ce qui diminue les risques d accident. Cependant, en dépit des progrès récemment réalisés, les batteries présentent des performances limitées aussi bien en termes d autonomie que d accélération pour un temps de recharge de quelques heures par jour et une durée de vie de quelques années. Figure 2 - Comparatif des différentes technologies de batteries (extrait de (Clavel,2006)) Aussi, cela peut poser problème si l on s intéresse par exemple à l exploitation d un bus électrique par un réseau. En effet, les paramètres d accélération, de vitesse, d aptitude à monter les côtes et de temps de charge sont importants pour permettre le transport de personnes dans des conditions acceptables par la collectivité. Aussi pour des raisons pratiques et économiques, l utilisation de la traction électrique pure est actuellement limitée à des véhicules de gabarit réduit et plutôt à des dessertes de centreville (application type navette). L utilisation de batterie au Lithium pourrait permettre une plus grande autonomie, mais actuellement, leur durée de vie est encore limitée, ce qui pose également le problème du recyclage de ces batteries. 14

Application au cas d un autobus 2.2.2 Les véhicules hybrides La notion de véhicule hybride est assez complexe à définir. Car même si chacun se représente assez bien ce que cette expression désigne, il n est pas évident d en donner une définition précise. Selon (Scordia, 2004), on peut en proposer deux définitions : «Un véhicule hybride est un véhicule disposant d au moins deux sources d énergies et dont au moins deux participent à la traction» «Un véhicule hybride est un véhicule disposant d au moins deux sources d énergies et disposant d au moins une des fonctionnalités suivantes : optimisation de la gestion énergétique des accessoires, start/stop, récupération au freinage, «boost» et mode tout électrique». Ces définitions permettent de distinguer les véhicules conventionnels, qui embarquent deux sources d énergie (batterie et carburant), des véhicules hybrides. La première définition exclut cependant de considérer comme hybride les véhicules pourvus d une fonctionnalité de récupération d énergie au freinage et dont le moteur électrique ne participe pas à la traction. La deuxième définition s accorde mieux avec le monde industriel où un véhicule réalisant simplement un start/stop est qualifié de «micro-hybride». En règle générale, un véhicule hybride désigne un véhicule disposant d un moteur thermique alimenté par du carburant et un moteur électrique alimenté par une batterie pouvant stocker et restituer l énergie qui lui a été fournie. La nuance intervient ensuite selon que le moteur principal est le moteur thermique ou le moteur électrique. Cela permet ainsi de combiner les avantages de deux motorisations. Chaque moteur étant exploité dans ses meilleures zones de rendement, le véhicule peut être zéro émission en ville en utilisant le mode électrique pur, et sur route, ses rejets sont limités. Sur ce dernier point, les véhicules hybrides bénéficient en outre des avancées technologiques actuelles dans le domaine des véhicules thermiques conventionnels (carburants reformulés, post-traitements, etc). En outre, l hybridation, contrairement à la motorisation électrique pure, n est pas limitée à un certain type de véhicules et/ou à des conditions d utilisation. En combinant les avantages des deux motorisations de manière adéquate, elle permet également une réduction de consommation des véhicules. On comprend alors tout l intérêt de chercher à optimiser cette combinaison. Pour un bus hybride en usage urbain, on pourrait atteindre une consommation d énergie comparable à un bus sur circuit routier, soit 40% d économie, ce qui n est pas négligeable pour la société. 15

Estimation de la consommation énergétique d un véhicule dans un flux de trafic 2.3 Moyens de mesures et d estimations des consommations énergétiques Il existe plusieurs moyens de mesurer les consommations énergétiques d un véhicule mais également plusieurs raisons de le faire. Et selon le but de la mesure, on emploiera une méthode et pas une autre. Un des premiers intérêts de mesurer la consommation d un véhicule aujourd hui est commercial. Il s agit en effet de dire à l acheteur potentiel combien consomme tel véhicule et dans ce dessein, les constructeurs automobiles utilisent des cycles communs normalisés que nous allons présenter. Mais ces cycles ne représentent pas nécessairement la variabilité du monde réel et c est pourquoi ceux qui souhaitent connaître la consommation réelle d un véhicule à titre d information pour d éventuelles prévisions par exemple utilisent des moyens de mesure en situation réelle. Ces mesures étant très variables d un conducteur à un autre, on peut alors utiliser des estimations après simulation de trafic pour ceux qui souhaitent connaître les consommations d un véhicule en situation réelle mais pour un conducteur plus représentatif de la moyenne. 2.3.1 Mesures en situation réelle La mesure «instantanée» de la consommation est très séduisante mais sur une majorité de véhicules, la mécanique du carburateur impose de mesurer selon des pas de temps de 10 à 20 secondes afin d éviter certains phénomènes d à-coup instantané. (Roumegoux & al., 1979) Pour que les mesures soient significatives, il convient de choisir soigneusement les tronçons sur lesquels elles s effectuent. Outre le tronçon retenu qu il faudra parcourir plusieurs fois, il faudra tenir compte du mode de conduite propre à chaque conducteur, ainsi que des différentes conditions de circulation qui ne sont pas aisément reproductibles. C est probablement pour toutes ces raisons que les mesures normalisées sont plus fréquemment utilisées, car elles définissent précisément quel trajet doit emprunter le véhicule, à quels instants ont lieu les changements de rapport, quelles sont les conditions de trafic. 16

Application au cas d un autobus 2.3.2 Mesures normalisées On peut distinguer deux principales façons de procéder : La reproduction de cycles sur un banc moteur ou banc à rouleaux L estimation après simulation de trafic 2.3.2.1 Les cycles Un cycle est un enchaînement de diverses séquences de conduite (accélération, décélération, plateau à vitesse constante, etc.). Les cycles sont généralement élaborés à des fins de certification ou de tests des véhicules, notamment en termes d émission de polluants. Leur but est donc d être représentatif d un mode de conduite moyen déterminé sur un type de réseau choisi (autoroutier ou urbain). Aussi, leur élaboration se fait bien souvent de manière statistique et leur mise en œuvre se déroule sur des bancs moteur ou banc à rouleaux. Cela présente l avantage de pouvoir réaliser les tests en laboratoire. Figure 3 - Banc moteur Aux Etats-Unis, l Agence pour la Protection de l Environnement (USEPA) a défini un cycle référence : le Federal Test Procedure (FTP) cycle. Conçu dans les années 70 pour représenter les conditions de conduite sur les autoroutes et les grandes axes simultanément, ce cycle se décompose en 3 phases : une phase de démarrage à froid de 505 secondes, suivie d une phase de transition à chaud de 870 secondes puis après un arrêt de 10 minutes du moteur, d une phase de démarrage à chaud, similaire à la première. 17

Estimation de la consommation énergétique d un véhicule dans un flux de trafic Figure 4 - Cycle FTP Dans les années 90, il a été montré que ces cycles ne décrivaient plus complètement les conditions de conduite réelles et depuis 2000, de nouveaux cycles ont été introduits : l US06 afin de décrire les conduites agressives sur autoroute et le SC03 afin de quantifier le surplus de consommation et donc d émission de polluants liées à l utilisation de la climatisation. Figure 5 - Cycle US06 Figure 6 - Cycle SC03 18

Application au cas d un autobus Ces cycles ont cependant le défaut de ne pas être facilement reproductible, ce qui peut être problématique lorsqu on cherche à comparer les performances de différents véhicules. Pour pallier ce problème, l Union Internationale des Transports Publics a adopté les cycles SORT (Standardised On-Road Tests Cycles) pour comparer les différents types de bus en termes de consommation et d émission de polluants. Ces cycles sont au nombre de trois et constituent chacun une combinaison différente à partir de cinq trapèzes de base. La structure trapézoïdale du cycle de base représente une accélération pour atteindre une vitesse de consigne puis le palier à cette vitesse constante suivi d un freinage. Les trois combinaisons retenues représentent des conditions de trafic urbain dur (SORT1), urbain léger (SORT2) et suburbain (SORT3). Ces cycles comprennent des temps d attente entre les cycles de base. Ces temps sont déterminés de manière à correspondre avec la vitesse moyenne désirée en exploitation. Plus généralement, les cycles utilisés en Europe à des fins de certification par les industries automobiles sont les cycles MVEG (Motor Vehicle Emission Group), essentiellement pour les émissions de polluants. Ces cycles consistent en une phase de ralenti de 40s suivi d une première phase représentant des conditions de trafic urbain puis d une seconde phase représentant des conditions extra-urbaines. Figure 7 - Cycle MVEG Les dernières évolutions en matière de normes européennes ont conduit à modifier légèrement ce cycle en supprimant les quarante premières secondes de démarrage à froid. 19

Estimation de la consommation énergétique d un véhicule dans un flux de trafic 2.3.2.2 Estimation après simulation de trafic Il s agit donc de réaliser dans un premier temps une simulation de trafic sur un tronçon retenu afin d obtenir les trajectoires des véhicules. Cette méthode permet de tenir compte des effets de l environnement dans lequel le véhicule évolue (flux, pente). Elle permet également de faire varier les paramètres de cet environnement afin d en connaître les influences sur la consommation. Mais cela dépend aussi du modèle de trafic utilisé. On trouve très peu de traces dans la littérature d utilisation de modèles autre que microscopiques pour ce type d utilisation. Les différences entre modèles microscopiques et macroscopiques seront explicitées dans la partie suivante. L avantage principal des modèles microscopiques pour ce type d application est que l intégration d un module de calcul des consommations peut se faire très aisément sous la forme d une fonction intégrée dans le modèle. On a ainsi un outil tout-en-un qui est de ce fait plus simple d utilisation. Mais on peut également utiliser l évolution de la vitesse et de l accélération calculée par le modèle de trafic en entrée d un modèle de véhicule qui calculera alors les consommations et les émissions de polluants des véhicules. Ainsi dans (Barth&al. 2001), cette équipe de l université de Californie-Riverside réalise l intégration d un modèle de consommation d énergie et d émission de polluants dans le modèle microscopique Paramics. Outre le choix d avoir un modèle de trafic séparé du modèle de consommation/émission, il y a également le choix de la nature du modèle de consommation/émission. Il peut en effet s agir simplement d une table de référence qui à chaque couple vitesse-accélération indique la consommation ou le taux de polluants émis. La table de référence est établie au préalable par une batterie de tests la plus exhaustive possible. Cette solution est très économique en termes de temps de calcul et permet d obtenir la consommation «en temps réel». Elle présente cependant le gros inconvénient de ne pas tenir compte de l historique du véhicule. Or un moteur froid n a pas les mêmes émissions ou consommations qu un moteur chaud. Pour pallier ce problème, il est donc préférable d utiliser un modèle qui traite a posteriori les vitesses et accélérations des véhicules pour déterminer les émissions et consommations des véhicules. Pour calibrer leur modèle, l équipe de Barth utilise un calibrage statistique des caractéristiques d émission/consommation sur chaque route en fonction de la géométrie et vitesse. Mais selon (Younglove&al 2006), le calibrage de modèles d émission à partir de données issues d appareils de mesure mobile (PEMS) ne permet pas d obtenir des seuils de confiance suffisant pour des utilisations «agressives». Ces modèles de post-traitement doivent également tenir compte des différents types de véhicules qui composent la flotte simulée. Cela pose le problème des critères selon lesquels les véhicules sont différenciés. L USEPA dans son modèle MOBILE a retenu les catégories suivantes : les véhicules légers essence ou diesel, les véhicules utilitaires essence ou diesel et différentes catégories de poids lourds. Pour chaque catégorie, il faut établir les performances moyennes ce qui n est pas chose aisée. C est pourquoi dans leurs études, l équipe de Barth, dans un premier temps, n a pas différencié les 20