L HISTOIRE DU SYSTÈME ÉDUCATIF FRANÇAIS



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Chapitre 1 L HISTOIRE DU SYSTÈME ÉDUCATIF FRANÇAIS Antoine Prost, dans son Histoire de l enseignement en France (Armand Colin, coll. U), fait remarquer qu on ne peut comprendre le processus de création d un système éducatif qu en l examinant au regard «de la société qui l engendre et qu elle contribue à façonner». Et de citer le célèbre sociologue Durkheim, père fondateur de la sociologie française qui, dans «Éducation et sociologie» (1934), écrivait : «lorsqu on étudie historiquement la manière dont se sont formés et développés les systèmes d éducation, on s aperçoit qu ils dépendent de la religion, de l organisation politique, du degré de développement des sciences, de l état de l industrie, etc. Si on les détache de toutes ces causes historiques, ils deviennent incompréhensibles». Dans ce premier chapitre, nous allons vous présenter deux siècles de construction de l actuel système éducatif français. Nous n avons évidemment pas la prétention, en si peu de pages, et pour une présentation historique d une telle envergure, de faire un véritable travail d historien, au sens où les auteurs précédemment cités l entendent. C est pourquoi nous ne pouvons que vous conseiller, si cette dimension du sujet vous intéresse fortement, de compléter cette lecture inévitablement réductrice par celle d ouvrages historiques à proprement parler (voir bibliographie page 20). La difficulté fut de décider d une date de démarrage de ce survol historique. Fallait-il remonter jusqu à Charlemagne, voire avant? Après tout, le système éducatif français procède, dans sa constitution actuelle, d éléments qui lui viennent de décisions prises à ces époques reculées, et même avant. Par souci de simplification, autant que parce que l école française d aujourd hui est le fruit de politiques dont les plus significatives datent du début du XIX e siècle, nous avons convenu d ouvrir le champ de cette brève étude historique à l aube des années 1800. 9

1 GENÈSE DU SYSTÈME ÉDUCATIF FRANÇAIS (1802-1850) Les révolutionnaires avaient chassé l Église des écoles, détruit de nombreux édifices scolaires religieux et rêvé d une école du peuple entièrement contrôlée et prise en charge par la Nation. Or, au sortir de ces années de terreur, l État ne disposait ni des hommes, ni des moyens financiers nécessaires. L ENSEIGNEMENT PRIMAIRE Le Consulat prend acte de l impossibilité, pour l État, d assurer seul la charge de l enseignement primaire. La loi du 11 floréal an X (11 mai 1802) en confie donc la charge aux communes. Un peu plus tard, le gouvernement impérial, conscient que cette mesure ne suffit pas, décide d encourager les initiatives privées, ce qui permet le retour de l Église dans ce domaine. Plus tard, le ministre François Guizot crée, par une ordonnance du 26 février 1835, une inspection de l enseignement primaire, puis un réseau d inspections académiques : désormais, les instituteurs, qu ils exercent en école communale ou privée, sont tous contrôlés par des fonctionnaires d État. Cette évolution est couronnée par la loi Falloux du 15 mars 1850 qui octroie à un «conseil académique» le soin de dresser les «listes d aptitude pour la fonction d instituteur», renforce l inspection, soumet toutes les écoles primaires à une plus grande tutelle de l État. Entre 1810 et 1850, le nombre d élèves de l enseignement primaire a été multiplié par quinze, mais ne concerne encore que 380000 enfants sur plus de quatre millions en âge d aller à l école primaire. L ENSEIGNEMENT SECONDAIRE Jusqu à plus de cent élèves par classe L objectif de tendre vers 100 % d enfants scolarisés en école primaire fut long à atteindre. Pour s en rapprocher, compte tenu du trop petit nombre d écoles créées, on n hésita pas à constituer des classes pouvant compter jusqu à cent élèves! On estime qu en 1830, en moyenne, les classes de l enseignement primaire des grandes villes comptaient soixante élèves. Dans les campagnes, il était fréquent que les classes soient «géminées», c est-à-dire regroupent les enfants de l ensemble des niveaux de l enseignement scolaire confiés à un seul instituteur. Napoléon voulait que l enseignement secondaire soit le premier pilier (l autre étant l enseignement supérieur) d un édifice scolaire destiné à former les élites du pays. q La création des lycées publics La loi du 11 floréal an X crée les lycées publics qui doivent tous comporter un internat. Au nombre de 45 dans une première étape, ces établissements sont administrés par des proviseurs et contrôlés par une institution nouvelle : l Inspection générale. Parallèlement, l État encourage les initiatives privées en autorisant la création d «écoles secondaires» 10

communales ou particulières (religieuses par exemple), mais fortement contrôlées par l État, au point qu on peut considérer que l enseignement privé d alors n est pas libre. Par un décret impérial du 10 mai 1806, Napoléon crée un corps «chargé de l enseignement et de l éducation publics dans tout l Empire» et, en 1821, l agrégation qui, en 1830, devient un concours national de recrutement d enseignants spécialisés. q Un doublement des effectifs Après la chute de l Empire, ce monopole de l État concernant l enseignement secondaire fut confirmé sous la Restauration, puis par la Monarchie de juillet. Cependant, dès les années 1830, cette tutelle de l État est de plus en plus mal acceptée, notamment par l Église qui réclame le droit de gérer des écoles secondaires librement tout en continuant d en créer. Cette demande fut partiellement satisfaite par la loi Falloux du 15 mars 1850. Durant la période considérée, les effectifs d élèves scolarisés dans les établissements secondaires ont doublé (la progression fut donc beaucoup plus lente que dans le primaire), passant de 45000 environ en 1815 à près de 100000 en 1850, soit 2 % à peine de la population scolarisable. Parallèlement, le nombre des bacheliers passe de 2000 en 1810 à 4000 en 1850. À noter : l année 1848 verra également la naissance de l enseignement agricole (voir fiche 11). L ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR Napoléon prôna un «cursus» allant des lycées jusqu à la vie active en passant par un enseignement supérieur composé d universités (pour la préparation aux hautes carrières médicales, juridiques, littéraires, artistiques, scientifiques ) et d «écoles spéciales» (les ancêtres de nos actuelles «grandes écoles») pour les carrières du commerce, militaires, politiques, de l enseignement, etc. q La formation des élites Cette organisation, qui a survécu au régime impérial, présentait aux yeux du pouvoir et des classes dominantes l avantage de former efficacement les élites dont le pays avait besoin. Le développement de ce système d enseignement supérieur s est accompagné d une grande volonté de contrôle centralisé avec l instauration d un véritable monopole de l État sur la majeure partie des établissements. L objectif était non seulement de Napoléon Premier et les grandes écoles Une légende tenace attribue à Napoléon Premier la paternité des grandes écoles. Or, s il en a indéniablement encouragé le développement, c est au XVIII e siècle donc sous l Ancien Régime que l on assista à une expansion véritablement significative de ce genre d établissements : écoles spéciales des Ponts et Chaussées en 1715, d Artillerie en 1720, des Mines en 1783, etc. Ainsi, avant la Révolution, la France s était dotée d un petit nombre d établissements supérieurs de taille restreinte, dispensant un enseignement très centré sur les besoins professionnels. s assurer que ces établissements dispensent les formations dont le pays avait véritablement besoin, mais aussi de réduire le risque qu ils puissent devenir le creuset d une quelconque forme de contestation du pouvoir en place. 11

2 L ÉMERGENCE DE L ÉCOLE RÉPUBLICAINE (1850-1914) Les révolutionnaires de 1789 en avaient rêvé. Les républicains de la deuxième moitié du XIX e siècle l ont fait : les années 1850-1914 furent avant tout celles de l émergence d une école laïque, obligatoire et gratuite, mais aussi celles d un enseignement supérieur autonome par rapport au second degré. DE LA LOI FALLOUX AUX LOIS FERRY La loi Falloux du 15 mars 1850 n avait donné que partiellement satisfaction à ceux qui, du côté de la droite catholique, réclamaient une liberté absolue en matière scolaire. Le gouvernement pensait que ni l État et les communes d une part, ni l Église d autre part, ne disposaient à eux seuls de moyens suffisants pour se charger de toute l école. Par ailleurs, on désirait créer une situation d équilibre politique. q Une multiplication des établissements Cette loi fut donc un modèle de compromis, donnant aux congrégations et aux particuliers plus de possibilités de libre initiative en matière de création d établissements scolaires, mais sans supprimer l école publique. On assista à un important développement des écoles confessionnelles et à l émergence d écoles privées laïques. Cet effort était cependant freiné par la difficulté à trouver des personnels compétents, tout particulièrement dans l enseignement secondaire. Il était en outre inégalement réparti dans le pays, laissant aux marges de la scolarité près d un million d enfants en âge d aller à l école primaire. q Une réforme en profondeur au début des années 1880 Le gouvernement du second Empire se montra soucieux de contenir la puissance du parti «clérical-légitimiste» qui s opposait à lui. Il était en outre soucieux de généraliser l école primaire, et désireux d une forte extension du secondaire et du supérieur. Il revint donc au ministre Victor Duruy de porter cette politique (par la loi du 10 avril 1867), consolidée, après la guerre de 1870, par les républicains parvenus au pouvoir. Jules Ferry, trois fois ministre entre février 1879 et novembre 1883, fut chargé de porter une grande réforme de l ensemble du système éducatif. Toute une série de lois vinrent rendre l école obligatoire de 7 à 13 ans, imposèrent de profondes réformes des programmes et de La fin de l enseignement religieux obligatoire «L enseignement religieux ne fera plus partie des matières obligatoires de l enseignement primaire. L instruction religieuse sera donnée en dehors des heures de classe aux enfants des écoles primaires publiques par les ministres des différents cultes, conformément au vœu des familles. Le conseil départemental pourra, sur l avis des conseils municipaux, autoriser les ministres du culte qui en feront la demande à donner l instruction religieuse dans les locaux scolaires.» Source : Loi du 21 décembre 1880 instituant les externats de jeunes filles. Journal Officiel du 22 décembre 1880. 12

l organisation scolaire allant dans le sens d une généralisation du principe de laïcité, permirent un important développement des Écoles normales en vue de faciliter le recrutement et la formation d enseignants, firent de la scolarisation des filles une nouvelle priorité, créèrent le principe de gratuité de la scolarité primaire, le certificat d études primaires en 1882, etc. Tout ceci fut ensuite consacré par la loi de séparation de l Église et de l État du 9 décembre 1905. q L essor de l école laïque Le résultat ne se fit pas attendre : entre 1850 et 1914, le nombre d enfants fréquentant des écoles primaires publiques laïques est passé de 1,9 à 4,6 millions, celui des écoles congréganistes s est effondré, passant de 950000 à 50000, tandis que celui des écoles privées laïques doublait, passant de 470 000 à un million. Dans l enseignement secondaire : on assista à un triplement du nombre d élèves entre 1850 et 1914, mais la croissance fut équilibrée entre établissements publics et confessionnels. LA NAISSANCE DE L ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR Jusque vers 1860, ce qu on nommait «l université» incluait la majeure partie des enseignements secondaires et supérieurs. Il fallut attendre le second Empire libéral pour que, progressivement, un véritable enseignement supérieur se constitue, bien différencié du secondaire, principalement porté par quelques grands universitaires qui, tels Marcellin Berthelot, Claude Bernard, Louis Pasteur, Ernest Renan, Victor Cousin, réclamaient «un petit nombre de grands foyers d études» supérieures, avec «des professeurs éminents et beaucoup d élèves». q La création des premières licences C est sous la houlette du ministre Victor Duruy que furent prises les premières mesures significatives : forte augmentation des moyens octroyés, relance des facultés de sciences, des bibliothèques universitaires, création (en 1868) de l École pratique des hautes études pour développer la recherche universitaire, etc. Plus tard s ajoutèrent une politique généreuse de bourses et, surtout, une rationalisation de l organisation des études supérieures par les décrets des 25 décembre 1880, 28 et 29 juillet 1886 qui refondent les examens, créent les premières spécialisations des licences (lettres, histoire, philosophie, sciences, droit), de nouveaux diplômes (tels les diplômes d études supérieures), ajoutent une réforme de l agrégation et la multiplication de ses spécialités, lancent une politique L ÉVOLUTION DE LA POPULATION ÉTUDIANTE Vers 1850 environ 4000 Vers 1865 environ 10000 Vers 1885 environ 17000 Vers 1895 environ 23000 1905 31500 1913 41400 Source : Histoire de l enseignement en France, Antoine Prost, Colin, coll. U, 1979. active de formation et de recrutement d enseignants du supérieur, prévoient un gros effort en matière de logements étudiants (alors nommés «palais universitaires») et de rénovation des bâtiments universitaires, etc. 13