PIRATAGE INFORMATIQUE ET DROITS D AUTEUR



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Transcription:

PIRATAGE INFORMATIQUE ET DROITS D AUTEUR Quelles solutions face à l illicéité?

1. LA SITUATION DE DÉPART Le droit d auteur fait partie du droit de la propriété intellectuelle. On entend par droit de la propriété intellectuelle l ensemble des règles juridiques protégeant la créativité. Les droits de propriété intellectuelle sont, en principe, exclusifs et absolus. En droit d auteur, ils existent jusqu à 70 ans après le décès de l auteur. Mais il y a des exceptions, qui résultent de la mise en balance des différents droits constitutionnels mis en jeu.

1. LA SITUATION DE DÉPART En Suisse, la mise à disposition de fichiers musicaux ou audiovisuels par les internautes tombe sous le coup de l art. 10 al. 2 lit. c LDA. En revanche, le téléchargement est couvert par l exception d usage privé (art. 19 al. 1 lit. a LDA) dans la mesure où il est effectué à des fins personnelles. Le législateur suisse a renoncé à distinguer entre le téléchargement légal et illégal. En effet, le Conseil National a refusé d adopter un art. 19 al. 6 LDA, qui aurait exclu l application de la licence légale aux copies provenant d une source manifestement illicite (BO CN 2007, 1202 ss). L une des raisons de cette décision était l impossibilité de contrôler les copies privées avec des moyens raisonnables.

1. LA SITUATION DE DÉPART Exemples de situations illégales: Échanges peer to peer (p2p) Téléchargement direct Mais aussi: Un texte est chargé sur un site web personnel sans les autorisations nécessaires Une photographie est placée sur un mur Facebook sans les autorisations nécessaires Il y a beaucoup de méconnaissance sur le droit d auteur et les infractions sont faciles à commettre!

1. LA SITUATION DE DÉPART De plus, la responsabilité civile ou pénale du fournisseur d un logiciel de partage sera rarement engagée d après les règle juridiques ordinaires. Enfin, dans un arrêt du 8 septembre 2010 (affaire Logistep, 1C_285/2009, ATF 136 II 508), le TF a estimé que des sociétés privées contreviennent à la protection des données en débusquant les infractions au droit d auteur commises sur le web, et en transmettant ensuite aux ayants droit les informations nécessaires à la poursuite en justice des contrevenants (notamment leurs adresses IP). Le piratage est donc difficile à éradiquer avec les moyens légaux actuels.

1. LA SITUATION DE DÉPART Le 10 juin 2010, le Conseil des Etats a accepté un postulat de Mme Géraldine Savary intitulé «La Suisse a-t-elle besoin d une loi contre le téléchargement illégal de musique?» (http://www.parlament.ch/f/suche/pages/geschaefte.aspx?gesch_id=20103263). Celui-ci demandait au Conseil fédéral de faire un rapport sur l état du piratage de musique sur Internet, et d étudier les mesures permettant d y remédier. Le rapport du Conseil fédéral, publié le 30 novembre 2011, minimise le problème du piratage! Mais un groupe de travail a été formé en août 2012 (AGUR12), qui a eu notamment pour mandat d étudier ce problème. Composition de l AGUR12: artistes et représentants des sociétés de gestion, de l industrie du divertissement, des milieux de la presse et du livre, de l économie et des utilisateurs d œuvres, des consommateurs et de l administration.

2. QUELLES SOLUTIONS AU PIRATAGE? 2.1 La riposte graduée Ce système, de nature répressive, a été adopté en France (Loi Création et Internet, HADOPI). Il repose sur la participation des fournisseurs d accès à Internet : ces derniers sont tenus d appliquer des sanctions contre les pirates, qui vont du simple avertissement à la transmission du dossier au parquet. Les avertissements sont ordonnés par la Haute Autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur Internet (HADOPI). A l origine, l ultime étape de la riposte graduée était constituée d une suspension de l abonnement à Internet. Cette sanction a toutefois été supprimée en 2013.

2. QUELLES SOLUTIONS AU PIRATAGE? 2.1 La riposte graduée Le Conseil constitutionnel français avait en effet estimé que la résiliation de l abonnement Internet devait être prononcée par une autorité judiciaire. Vu l ampleur du piratage sur Internet, le système était difficilement praticable. Selon un propre bilan de ses activités, 17 mois après son introduction, HADOPI aurait cependant: considérablement réduit les échanges P2P illégaux; favorisé le développement de nouvelles offres culturelles en ligne.

2. QUELLES SOLUTIONS AU PIRATAGE? 2.2 Projets de lois SOPA et PIPA aux Etats-Unis Le procureur général des Etats-Unis peut exiger des opérateurs, des moteurs de recherche ou des services de transaction (Paypal) qu ils cessent toute relation commerciale avec des sites pirates, y compris situés en dehors des Etats-Unis (déréférencement, suspension des paiements, etc.). Le procureur général peut également ordonner des mesures de blocage envers ces sites. Les ayants droit eux-mêmes peuvent s adresser aux services de paiement en ligne et aux réseaux publicitaires pour qu ils suspendent les revenus à verser aux sites pirates. Finalement, les travaux sur ces projets de loi ont été suspendus au début 2012.

2. QUELLES SOLUTIONS AU PIRATAGE? 2.3 La licence globale Selon ce système, la mise à disposition d œuvres dans des réseaux d échange serait légalisée en contrepartie d un supplément payé par les internautes sur leur abonnement Internet. Cette idée est séduisante en apparence, mais elle équivaut à une certaine expropriation des titulaires de droits immatériels. Elle coupe aussi l herbe sous les pieds aux nouvelles offres légales. De plus, il est à craindre que les internautes, désormais habitués à la gratuité, ne soient prêts à payer qu une rémunération symbolique, insuffisante pour dédommager équitablement les ayants droit et pour les inciter à continuer d investir dans la création d œuvres artistiques.

2. QUELLES SOLUTIONS AU PIRATAGE? 2.4 La gestion collective obligatoire Les sociétés de gestion sont des organismes en position de monopole créés par les auteurs pour défendre leurs droits (SUISA, Suissimage, ProLitteris, etc.). La gestion collective obligatoire est une institution, prévue par la loi, qui permet de simplifier la situation juridique des utilisateurs d une part, et d assurer une rémunération aux titulaires de droits d autre part. On pourrait donc songer à soumettre obligatoirement à la gestion collective les droits mis en jeu par le partage de fichiers d œuvres protégées sur Internet. Parallèlement, il faudrait clarifier la question de la responsabilité des intermédiaires (fournisseurs d accès à Internet, exploitants de plateforme d échanges, ), de sorte que ces derniers soient tenus de régler les droits auprès des sociétés de gestion, sans aucun doute possible. On aboutirait ainsi à une légalisation par les contrats de licence passés entre les sociétés de gestion et les intermédiaires, cela pour l intégralité du répertoire.

2. QUELLES SOLUTIONS AU PIRATAGE? 2.5 Une contribution financière des fournisseurs d accès Une telle contribution ne légaliserait pas les échanges d œuvres protégées. Elle repose sur la constatation que les fournisseurs d accès à Internet sont les bénéficiaires du piratage d un point de vue économique (dans la mesure où ils vendent davantage d abonnements à haut débit, plus coûteux). Partant, on leur demanderait de payer une compensation pour les dommages causés par le piratage, tout en espérant que cette mesure les incite aussi à prendre des mesures pour diminuer les actes illicites réalisés grâce à leurs services. Une telle contribution aurait toutefois un caractère fiscal et serait vraisemblablement répercutée sur les internautes. Ces derniers comprendraient-ils qu ils doivent supporter une charge, sans bénéficier d une légalisation en contrepartie?

2. QUELLES SOLUTIONS AU PIRATAGE? 2.6 «Notice and take down» Il s agirait de permettre aux ayants droit, selon une procédure décrite par la loi, de s adresser directement aux intermédiaires (notamment aux fournisseurs d accès à Internet) pour demander le retrait d un contenu illicite ; si l intermédiaire ne s exécute pas, il engagerait sa responsabilité.

2. QUELLES SOLUTIONS AU PIRATAGE? 2.7 Responsabilité causale des intermédiaires Il s agirait de créer un régime de responsabilité civile objective (sans faute) des intermédiaires, avec possibilité de preuve libératoire, si l intermédiaire démontre avoir pris toutes les mesures commandées par les circonstances pour éviter les violations du droit d auteur. Un régime de responsabilité objective se rapprocherait de la «Störerhaftung» du droit allemand (applicable à YouTube: voir Landesgericht de Hambourg, 20 avril 2012, GEMA c. YouTube; voir aussi: BGH I ZR 18/11 du 12 juillet 2012).

2. QUELLES SOLUTIONS AU PIRATAGE? 2.8 Les licences libres et de libre diffusion Une licence «libre», au sens large du terme, est une déclaration publique, souvent donnée par Internet, par laquelle le titulaire des droits d auteur autorise à l avance toute personne à accomplir des utilisations de l œuvre. Une licence de libre diffusion confère certaines des possibilités suivantes : La possibilité d'utiliser l'œuvre, pour tous les usages; La possibilité d'étudier l'œuvre; La possibilité de redistribuer des copies de l'œuvre; La possibilité de modifier l'œuvre et de publier ces modifications. La licence est dite «libre» (au sens strict du terme) si ces quatre libertés sont données en totalité. La licence libre est animée par une volonté éthique d égalité, ce qui ne vaut pas forcément pour la libre diffusion.

2. QUELLES SOLUTIONS AU PIRATAGE? 2.8 Les licences libres et de libre diffusion Les licences Creative Commons contiennent des clauses juridiques complètes et détaillées, dont l essentiel est résumé par des pictogrammes. On trouve ainsi sur Internet des œuvres sous licences Creative Commons (photographies, textes) qui pourront être utilisées dans le cadre d un site Internet ou d un compte Facebook, à condition de respecter les conditions imposées par la licence. Il s agit d un moyen de légalisation pour certains types d œuvres (par exemple scientifiques), mais les licences Creative Commons ne permettent pas aux auteurs d être rémunérés!

3. RECOMMANDATIONS DE L AGUR12 3.1 Un paquet de mesures équilibrées L AGUR12 a publié son rapport final en décembre 2013. Il propose un paquet de mesures ayant fait l objet d un consensus, qui représente un compromis équilibré. La présidence de l AGUR12 a joué un grand rôle pour parvenir au consensus. Tous les milieux concernés ont un intérêt à la mise en œuvre de ces mesures.

3. RECOMMANDATIONS DE L AGUR12 3.2 Avantages pour les ayants droit Les auteurs et l industrie du divertissement bénéficieraient de plus de moyens pour lutter contre les cas graves de piratage : Les fournisseurs d hébergement qui orientent manifestement leur modèle économique vers les violations du droit d auteur devraient, sur demande des ayants droit, non seulement supprimer le contenu chargé illicitement («take down»), mais aussi empêcher que ce contenu soit à nouveau mis à disposition («stay down»).

3. RECOMMANDATIONS DE L AGUR12 3.2 Avantages pour les ayants droit Les auteurs et l industrie du divertissement bénéficieraient de plus de moyens pour lutter contre les cas graves de piratage : A la demande de l autorité, les fournisseurs d accès basés en Suisse devraient bloquer l accès aux sites Internet qui violent gravement le droit d auteur ; mais, dans la mesure du possible, l autorité devrait éviter l «overblocking», c est-à-dire le blocage de contenus légaux conjointement au blocage de contenus illicites.

3. RECOMMANDATIONS DE L AGUR12 3.2 Avantages pour les ayants droit Les auteurs et l industrie du divertissement bénéficieraient de plus de moyens pour lutter contre les cas graves de piratage : A la demande des ayants droit ou de l autorité, les fournisseurs d accès devraient envoyer des messages explicatifs aux titulaires de connexions Internet utilisées pour violer gravement les droits d auteur, messages qui leur expliquent la situation légale ; à réception, la personne concernée devrait prendre les mesures nécessaires pour sécuriser sa connexion, sous peine d engager sa responsabilité.

3. RECOMMANDATIONS DE L AGUR12 3.3 Avantages pour les consommateurs et les utilisateurs Les consommateurs continueraient de bénéficier d un droit d auteur libéral, qui ne les criminalise pas et qui met l accent sur l information: Vu les mesures de lutte contre le piratage qu il préconise, l AGUR12 considère que le téléchargement devrait rester autorisé, même s il provient de sources illégales. Il pense aussi qu une vaste campagne d information devrait être organisée afin de lever les incertitudes sur la situation légale, qui nuisent aussi bien aux ayants droit qu au public.

3. RECOMMANDATIONS DE L AGUR12 3.3 Avantages pour les consommateurs et les utilisateurs Les consommateurs continueraient de bénéficier d un droit d auteur libéral, qui ne les criminalise pas et qui met l accent sur l information: Le groupe de travail recommande d examiner si la mise à disposition d œuvres dans des réseaux sociaux ne devrait pas être assujettie à la gestion collective, afin de sortir les internautes de l illégalité tout en procurant une rémunération aux ayants droit. A ce sujet, il faut toutefois tenir compte des obligations internationales de la Suisse, ne pas vider de leur substance les mesures anti-piratage, éviter les doubles paiements pour les consommateurs et garantir la primauté de la gestion individuelle lorsqu elle est autorisée

3. RECOMMANDATIONS DE L AGUR12 3.3 Avantages pour les consommateurs et les utilisateurs Les fournisseurs d Internet seraient associés à la lutte contre le piratage: mais, en contrepartie, ils disposeraient de sécurité juridique et seraient exonérés de responsabilité lorsqu ils mettent en application les mesures anti-piratage.

3. RECOMMANDATIONS DE L AGUR12 3.4 Critiques entendues Certains ont critiqué la composition du groupe de travail, en particulier le fait que les fournisseurs d Internet n étaient pas présents: En réalité, ces fournisseurs ont été entendus à plusieurs reprises comme experts par l AGUR12. De plus, leurs intérêts ont clairement été représentés par les associations économiques.

3. RECOMMANDATIONS DE L AGUR12 3.4 Critiques entendues Certains dénoncent une censure d Internet: En réalité, l AGUR12 insiste à plusieurs reprises sur la nécessité d instaurer des voies de recours contre les mesures anti-piratage prises par l autorité ou demandées par les ayants droit. Il relève aussi que les fournisseurs d Internet ne doivent avoir aucune obligation de surveiller les informations qu ils transmettent ou hébergent, ou de rechercher activement des violations du droit d auteur. Et finalement : une échoppe qui pratique un commerce illicite risque aussi de se faire fermer par l'autorité, même si elle a des activités légales en parallèle. Pourquoi devrait-il en aller différemment sur Internet?

3. RECOMMANDATIONS DE L AGUR12 3.4 Critiques entendues L AGUR12 demande au législateur de veiller à ce qu il n y ait pas de restrictions d accès au marché non voulues pour les nouvelles offres, mais il ne propose pas de mesures concrètes. De même, on ne trouve guère de trace d une revendication pourtant centrale des créateurs, celle d être rémunérés de manière équitable aussi à l ère numérique: C est vrai. Mais, dans une matière aussi controversée et discutée que le droit d auteur, le compromis trouvé doit être salué: un consensus a été trouvé entre des milieux aussi différents que les créateurs, les producteurs, les consommateurs, les utilisateurs de biens culturels et les représentants de l économie en général.

3. RECOMMANDATIONS DE L AGUR12 3.5 Et maintenant? Le Département fédéral de justice et police (DFJP) va élaborer, d ici à la fin 2015, un projet destiné à être mis en consultation. Il s appuiera sur les recommandations de l AGUR12, mais va aussi tenir compte des conclusions d un groupe de travail qui examine actuellement la responsabilité civile des fournisseurs Internet sous un angle général. Parallèlement, il est important de mettre en œuvre sans tarder ce qui peut être fait sans révision législative.

4. APPRÉCIATION PERSONNELLE Les recommandations de l AGUR12 sont dignes d intérêt. En particulier parce qu elles reposent sur un consensus de tous les milieux intéressés. Mais elles n offrent des solutions que pour les cas graves de piratage. Parallèlement, il existe toute une série de comportements moins graves, pour ainsi dire «socialement acceptés», qui sont pourtant des violations claires de la loi actuelle. Pour ces cas, la gestion collective obligatoire est une mesure envisageable. Parallèlement, il est nécessaire de redéfinir les règles concernant l usage privé. La notion de sphère privée est en évolution : elle ne peut plus être limitée à la famille ou aux amis proches, vu l accroissement des contacts sociaux que permet Internet.

4. APPRÉCIATION PERSONNELLE Dans le cadre de la réforme des règles sur l usage privé, le droit de reproduction devrait être soumis au même régime juridique que le droit de mise à disposition. Tous deux devraient être légalisés ou facilement «légalisables», contre paiement d une redevance. Les rémunérations forfaitaires comme la redevance sur les supports vierges sont toutefois remises en cause. Alternative: ceux qui utilisent ces droits à des fins privées pourraient avoir la possibilité d obtenir une licence de manière simple, par le biais des sociétés de gestion collective. Ceux qui ne veulent ni télécharger des œuvres à des fins privées, ni en mettre à disposition dans un cercle privé, pourraient renoncer à demander une licence.

4. APPRÉCIATION PERSONNELLE Mais un tel modèle serait lié à une surveillance accrue! Il n est pas sûr que cela soit plus accepté par l opinion publique que les redevances forfaitaires. Une licence légale accompagnée d une redevance forfaitaire sur les appareils connectés à Internet, couvrant le téléchargement et la mise à disposition à des fins privées, ainsi qu une redéfinition de ces fins privées tenant compte de l accroissement des contacts sociaux que permet Internet, nous paraissent être des moyens adéquats pour réconcilier le droit d auteur et les mentalités actuelles.

MERCI DE VOTRE ATTENTION! Prof. Vincent Salvadé Faculté de droit - Pôle [PI] 2 Avenue du 1 er -Mars 26 CH-2000 Neuchâtel Vincent.Salvade@unine.ch www.unine.ch