Couplage chaleur-force (CCF)



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Transcription:

Couplage chaleur-force (CCF) Document connaissances de base, état: janvier 2014 1. Synthèse Près de la moitié de la consommation d énergie primaire est aujourd hui destinée à la production de chaleur, la plupart du temps par la combustion directe de mazout ou de gaz naturel dans des chaudières. Pour des raisons liées à la protection de l environnement et en du climat, à l évolution incertaine des coûts et à la dépendance vis-à-vis de l étranger, le maintien de ce modèle sur le long terme ne semble pas raisonnable. Même en mettant en œuvre des mesures d efficacité énergétique, par exemple en améliorant l isolation thermique des bâtiments, les besoins en chaleur resteront considérables et atteindront en 2050, selon la politique énergétique, 50 à 70 % de leur niveau actuel. Une part non négligeable de ces besoins devra être couverte par l utilisation de combustibles fossiles. Dans la mesure où les besoins en chaleur sont importants et pratiquement constants, et où des températures relativement élevées sont nécessaires, le recours à des installations de couplage chaleur-force pourrait s envisager. Si certaines conditions-cadre sont mises en place, la production d électricité par des installations CCF pourrait représenter, selon un scénario de l Office fédéral de l énergie (OFEN) jusqu à 11,5 TWh. Le couplage chaleur-force n est pas nécessairement la solution la plus économique, mais c est un principe énergétiquement plus efficace que la production séparée de chaleur et d électricité à partir de combustibles fossiles. Dans l hypothèse où les installations CCF devraient jouer à long terme un rôle important dans l approvisionnement énergétique, il convient de créer des conditions-cadre favorables afin de dépasser les obstacles qui se présentent aujourd hui sur les plans technique et économique. Le développement du CCF nécessite des mesures d encouragement. 2. Situation actuelle en Suisse 2.1 Remarque préliminaire Les installations de couplage chaleur-force (CCF) sont des systèmes produisant à la fois de l électricité et de la chaleur. L électricité est générée grâce à un moteur ou à une pile à combustible, et la chaleur résiduelle est utilisée en même temps à des fins de chauffage (chaleur confort) ou pour des processus de production (chaleur de processus). Par rapport à une production entièrement séparée de chaleur et d électricité à partir de combustibles fossiles, les installations CCF atteignent un rendement total plus élevé et rejettent donc moins de CO 2. Cela suppose cependant que les deux produits de l installation, c est-à-dire la chaleur et l électricité, soient entièrement utilisés. Alors que l électricité est injectée dans le réseau de distribution général, la chaleur doit, elle, pouvoir être utilisée localement. A la différence des centrales thermiques produisant uniquement de l électricité, les installations CCF visent donc d abord à satisfaire les besoins en chaleur. C est la raison pour laquelle l approvisionnement en chaleur doit systématiquement être pris en compte lorsque l on évalue de futures stratégies de production d électricité à partir de combustibles fossiles. Une alternative au CCF serait notamment la combinaison d une centrale à cycle combiné gaz-vapeur (CCC) et d une pompe à chaleur (PC). Les centrales à cycle combiné permettent de produire de l électricité avec un rende- Hintere Bahnhofstrasse 10, Postfach, 5001 Aarau, Telefon +41 62 825 25 25, Fax +41 62 825 25 26, info@strom.ch, www.strom.ch

ment particulièrement élevé et de faire fonctionner des pompes à chaleur pour la production de chaleur confort. On trouvera un comparatif complet de l ensemble des systèmes dans le document connaissances de base «Chaleur et électricité à partir de combustibles fossiles». Le présent document s intéresse aux installations CCF alimentés par des combustibles fossiles. Les installations CCF fonctionnant à partir de la biomasse sont présentées dans le document connaissances de base «Electricité à partir de la biomasse». Les installations basées sur l hydrogène fonctionnent avec des piles à combustible. Ces dernières transforment les combustibles fossiles en hydrogène, qui est utilisé comme un vecteur énergétique. 2.2 Le couplage chaleur-force en Suisse Les installations CCF sont définies en Suisse comme des centrales thermiques alimentées par des agents fossiles ou biogènes avec une production couplée, donc simultanée, d électricité et de chaleur. Il faut également qu elles remplissent les critères suivants: au moins 5 % de l énergie utilisée doit être transformée en électricité, et le rendement total (chaleur et électricité) doit atteindre au moins 60 %. 1 Afin de pouvoir regrouper les technologies et les domaines d application comparables, une distinction est faite entre petites et grandes installations CCF. Fig. 1. Répartition des technologies et domaines d application de CCF en petites et grandes installations CCF. Source: OFEN 2011. 1 Thermische Stromproduktion inklusive Wärmekraftkopplung (WKK), édition 2012, Office fédéral de l énergie (OFEN), Berne, 2013 2/11

La Suisse comptait en 2012 un total de 957 installations CCF en exploitation, pour une puissance électrique installée de 540 MW (combustibles renouvelables ou non). Ces installations ont produit 1981 GWh d électricité, ce qui représente 3 % de la production totale, et un tiers de la production provenait de sources renouvelables. Fig. 2. Evolution de la puissance électrique des installations CCF selon les technologies. Source: OFEN 2013. Sur la période 2000-2008, la production d électricité des installations CCF en Suisse a stagné aux alentours de 1600 GWh, ce qui correspond à 3200 heures à pleine charge. Entre 2006 et 2012, la puissance électrique installée a augmenté de 9 MW el /a et la production d électricité de 51,3 GWh el /a. Cette hausse s explique principalement par la mise en service à Monthey d une installation de production de chaleur de processus pour un usage industriel. On note par ailleurs un recul du nombre et de la production des petites installations. La plupart des installations étant commandées par le besoin en chaleur, elles atteignent environ 4500 heures d exploitation par an. Les installations CCF sont soumises à différentes dispositions légales: constitution fédérale, loi sur l énergie, ordonnance sur l énergie et ordonnance sur la taxe sur le CO 2. L Office fédéral de l énergie (OFEN) a publié à ce sujet un document précisant l ensemble des articles de loi concernant le couplage chaleur-force. 2 L existence de législations strictes et différentes aux niveaux national, cantonal et communal aboutit en Suisse à des conditions-cadre complexes. En revanche, les installations CCF ne rencontrent généralement pas de problème d acceptation au sein de la population. 2 Gesetzliche Grundlagen zum Thema WKK, Office fédéral de l énergie (OFEN), Berne, 2010 3/11

2.3 Analyse des obstacles par l OFEN A l heure actuelle, le couplage chaleur-force et ses applications n ont pas véritablement percé en Suisse. Les raisons de cette situation ont été analysées dans le cadre d une étude de l OFEN 3, qui a souhaité identifier les obstacles à l utilisation de différentes technologies CCF dans plusieurs domaines d application en Suisse. L OFEN a relevé la présence d obstacles sur différents plans: Juridique: plusieurs textes législatifs, notamment les lois sur le CO 2, dispositions définies par la Confédération, le canton et la commune Technique: technologies relativement récentes pour les installations alimentant un seul bâtiment d habitation; image de la technique Economique: prix de l énergie (mazout, gaz naturel, électricité); tarifs de rachat de l électricité; compétences de l exploitant de petite installation; coûts du transport de chaleur pour les grandes installations Politique: acceptation auprès des acteurs de la politique énergétique (grandes installations); programme de la Confédération en matière de politique énergétique; information des habitants et acceptation pour les grandes installations Etant donné le nombre et la diversité des obstacles constatés, l analyse conclut qu aucune application du couplage chaleur-force ne semble en mesure de s implanter d elle-même sur le marché au cours des prochaines années. Il est cependant probable que la technologie continue de se développer, car le potentiel technique est important et le prix de revient de l électricité produite est plus bas que dans le cas des énergies renouvelables. En outre, les installations CCF présentent un bon rendement énergétique total. Le recours à des installations CCF pourrait se justifier dans les cas où une température d entrée élevée est nécessaire, par exemple afin de produire de la chaleur destinée à des processus industriels ou de la chaleur confort pour des bâtiments dont l assainissement énergétique n est pas envisagé, ou encore pour remplacer une chaudière brûlant directement du gaz naturel ou du mazout. Mais tant qu on ne disposera pas sur le marché de piles à combustibles peu onéreuses et éprouvées, le développement du couplage chaleur-force se cantonnera sans doute d abord aux grandes installations. 3. Etat de la technologie et développement futur La plupart des installations CCF sont des centrales à énergie totale équipées (CETE), qui sont composées d un moteur à combustion et d un générateur. Le moteur produit de l énergie mécanique utilisée pour entraîner le générateur et produire de l électricité. La chaleur résiduelle utilisée provient du refroidissement du moteur et des gaz d échappement. Les installations CCF peuvent être utilisées dans le secteur de l industrie pour alimenter les entreprises en électricité et en chaleur de processus. 4 Une autre des applications possibles concerne les habitations. Les installations peuvent produire de la chaleur (chauffage à distance et de proximité) pour des zones entières d habitation, pour des immeubles collectifs d une taille minimale de 10 logements environ, ou même pour des habitations individuelles. 3 4 Beseitigung von Hemmnissen bei der Verbreitung von Wärmekraftkopplung (WKK) in der Schweiz, Office fédéral de l énergie (OFEN), Berne, 2009 Pour la part d électricité que le client consomme (pour l exploitation de ses propres installations) sur le même site que l installation CCF (même point de raccordement), il n a pas à verser de rémunération pour l utilisation du réseau (LApEI, art. 14): cela peut constituer pour lui un intérêt économique. 4/11

A l heure actuelle, les plus grandes installations CCF suisses sont des usines d incinération des ordures ou des installations industrielles dans lesquelles la combustion d un combustible produit de la vapeur utilisée pour entraîner une turbine à vapeur (centrale à gaz à cycle combiné avec production couplée de chaleur voir également le document connaissances de base «Centrales à cycle combiné gaz-vapeur (CCC)»). Le générateur d électricité peut être entraîné par des moteurs à combustion, c est-à-dire des moteurs diesel ou à gaz, mais aussi par des turbines à gaz ou des moteurs Stirling. Les moteurs Stirling et les piles à combustible appartiennent vraisemblablement aux technologies de l avenir. Le moteur Stirling est une machine thermique à deux cylindres, dans lequel un gaz de travail confiné est tour à tour réchauffé et refroidi en deux endroits différents, depuis une source extérieure. Le gaz se détend et se comprime en actionnant un piston, ce qui produit de l énergie mécanique. Le moteur fonctionne en circuit fermé. C est un exemple de transformation d une forme d énergie difficilement utilisable (l énergie thermique) en énergie plus exploitable (l énergie mécanique). Les piles à combustible permettent également le couplage chaleur-force. Une pile à combustible est une cellule galvanique qui transforme en électricité l énergie dégagée par la réaction chimique entre un combustible et un oxydant. Le combustible est généralement de l hydrogène provenant de gaz naturel, de biogaz, d acide formique ou d alcool, l oxydant étant de l oxygène. A moyen terme, seul un développement des piles à combustible semble possible. Bien que l on annonce depuis un certain temps leur utilisation à de petites puissances pour des maisons individuelles ou mitoyennes, une production de masse n est pas encore envisageable. D autres développements pourraient être réalisés concernant de nouveaux combustibles. 4. Potentiel Le potentiel théorique du couplage chaleur-force est important. La part de cette technologie dans la production électrique atteint 76 % au Danemark, 58 % au Pays-Bas, 38 % en Finlande, 31 % en Italie et 13 % en Allemagne. 5 Dans ces différents pays, les centrales thermiques sont rentables car elles sont raccordées à des réseaux étendus de chauffage à distance. Ce modèle n est cependant pas transposable à la Suisse, bien que les besoins en chaleur soient comparables. Les besoins suisses en électricité peuvent en effet être couverts à un coût bien moindre par l hydraulique (env. 55 %) et le nucléaire (env. 40 %). En 2009, la Suisse a consommé 271 PJ d énergie pour le chauffage domestique et 45,4 PJ pour la production d eau chaude (hors énergie auxiliaire pour la commande et les pompes de circulation) 6, tandis que la consommation d énergie finale en chaleur de processus s élevait à 100,1 PJ. Sur ce total de 417 PJ, près de 300 PJ ont été produits à partir de combustibles fossiles. Si l ensemble des combustibles utilisés en Suisse pour le chauffage domestique et la production d eau chaude étaient exploités dans des installations CCF, il serait théoriquement possible de produire environ 21 TWh sans émission supplémentaire de CO 2. En brûlant le combustible dans des installations CCF plutôt que dans des chaudières, une partie de la chaleur fait défaut: cela peut être compensé par des pompes à chaleur, et l électricité nécessaire a déjà été prise en compte dans le chiffrage (hypothèse: rendement électrique du CCF = 0,35, coefficient de performance (COP) annuel de la pompe à chaleur = 3,0). 5 6 Statistics and prospects for the European electricity sector (Eurprog 2007), Eurelectric, Bruxelles, 2007 Infras, TEP, Prognos «Analyse des schweizerischen Energieverbrauchs 2000 2009 nach Verwendungszwecken», Office fédéral de l énergie (OFEN), Berne, décembre 2010 5/11

Le scénario «Nouvelle politique énergétique» élaboré par l OFEN en mai 2011 7 suppose que la mise en place de conditions-cadre plus strictes amèneront ces prochaines décennies à une diminution de la consommation énergétique liée au chauffage domestique et à la chaleur de processus (amélioration de l efficacité, meilleure isolation thermique), de l ordre de 31 % environ d ici 2035 et 43 % d ici 2050. La contribution des combustibles fossiles s élève dans ce scénario à 137 PJ en 2035 et 108 PJ en 2050. L utilisation d installations CCF pourrait théoriquement permettre de produire environ 13,5 TWh d électricité en 2035 et 15 TWh en 2050 (hypothèses pour 2035: η el CCF = 0,45, COP annuel PC = 4,0; hypothèses pour 2050: η el CCF = 0,6, COP annuel PC = 5,0). Dans les Fondements pour la stratégie énergétique du Conseil fédéral (printemps 2011), la production envisagée pour 2050 s élève à 13,45 TWh el, ce qui correspond pratiquement au potentiel théorique et technique. 8 La réduction des besoins énergétiques des bâtiments, causée par une meilleure isolation, limitera à l avenir l utilisation d installations CCF. En effet, plus la puissance est faible et plus le rendement et la rentabilité des installations diminue. Dans l hypothèse d un essor massif du CCF, les bâtiments et les installations de chauffage existant devraient être transformés, et dans certains cas les réseaux de gaz naturel devraient être étendus. Même si des progrès techniques permettent d augmenter le rendement des installations CCF et le coefficient de performance annuel de pompes à chaleur au cours des 40 prochaines années, il semble qu en l absence d encouragement, seulement 40 % du potentiel théorique sera exploité. Potentiel (TWh) 2013 2035 2050 Potentiel total, théorique 21 13,5 15 Potentiel de construction (OFEN 2011a) 7,24 11,53 Potentiel attendu 1,5 3,8 6 Tableau 1. Potentiel de la production d électricité par CCF d ici 2050. 5. Estimation de la puissance disponible et de la qualité de l énergie Les installations CCF peuvent théoriquement être exploitées de deux manières. Lorsque la priorité est donnée au besoin en chaleur et que l on considère comme un sous-produit la production d électricité et son injection dans le réseau, on parle d installation commandée par le besoin en chaleur. Ce mode de fonctionnement permet de se servir de l ensemble de l énergie utile. A l inverse, l installation peut être commandée par le besoin en électricité. Mais la chaleur, à la différence de l électricité, ne peut être utilisée que localement: on ne peut donc se servir de l ensemble de l énergie utile qu en stockant le surplus de chaleur produite. Une installation commandée par le besoin en électricité doit disposer d un accumulateur de chaleur ou d une source de chaleur supplémentaire pour pouvoir utiliser la chaleur excédentaire ou compenser la chaleur manquante. Même avec un dispositif de taille suffisante, les pertes de chaleur diminuent le rendement total de l installation. Pour atteindre des rendements élevés atteignant jusqu à 90 %, il faut en règle générale que l installation CCF soit commandée par le besoin en chaleur. Le prix de revient de l électricité est cependant plus élevé 7 Fondements pour la stratégie énergétique du Conseil fédéral, actualisation des perspectives énergétiques 2035 (printemps 2011) Office fédéral de l énergie (OFEN), Berne, 2011 (tableau 49) 8 Dans sa publication «Wärme und Strom effizient kombinieren» (printemps 2011), l association V3E évoque un potentiel de 12 % en 2030, ce qui correspond à 7 TWh. 6/11

dans cette configuration que pour une centrale commandée par le besoin en électricité, car les investissements nécessaires à l installation sont répartis sur une production d électricité moins importante. Une installation commandée par le besoin en chaleur atteint typiquement 3000 à 4500 heures d exploitation par an. 9 Certaines installations parviennent certes à un nombre d heures à pleine charge plus élevé (5000 heures par an et plus), mais il s agit de cas s tels que des hôpitaux ou des maisons de retraite, dans lesquels les besoins en chaleur sont plus importants (chaleur confort et éventuellement chaleur de processus). Les installations situées dans des lotissements résidentiels, dans des immeubles de services ou sur des sites industriels atteignent environ 4000 heures à pleine charge par an lorsque l essentiel des besoins en chaleur est couvert par le CCF. Puissance disponible (MW) 2013 2035 2050 Charge moyenne 10 500 1000 1500 Tableau 2. Puissance disponible de la technologie durant le semestre hivernal, jusqu en 2050. 11 Du point de vue de l exploitation journalière, on peut se baser sur la répartition suivante: 12 Période estivale 25 % dont exploitation en journée (6h-22h) 75 % dont exploitation de nuit (22h-6h) 25 % Période hivernale 75 % dont exploitation en journée (6h-22h) 60 % dont exploitation de nuit (22h-6h) 40 % 6. Prix de revient Pour les nouvelles installations dont la puissance électrique dépasse 200 kw, les coûts d investissement s élèvent actuellement à 2500 CHF/kW. D ici 2035, on peut s attendre à une diminution des coûts en raison de l amélioration du rendement électrique de 0,35 à 0,42, et de l augmentation de la puissance moyenne des nouvelles installations, qui devrait attendre 400 kw el ou 400 kw th. Il est très probable que les piles à combustible atteignent d ici 2050 un rendement électrique de 60 %. On peut supposer que les coûts d investissement diminuent proportionnellement à l augmentation du rendement. Des puissances plus élevées contribuent également à réduire les coûts d exploitation et de maintenance. En outre, les piles à combustible ne contiennent aucune pièce en mouvement, ce qui signifie qu il n y a aucune usure mécanique ou pneumatique. 9 10 11 12 Untersuchung Wirtschaftlichkeit von BHKW-Anlagen, Gruneko Schweiz AG, Bâle, juillet 2010 Pour le CCF: 100 % de la puissance installée Perspectives énergétiques 2035 tome 5, Analyse et évaluation de l offre d électricité, Office fédéral de l énergie (OFEN), Berne, juin 2007 (Tableau 2.44) Perspectives énergétiques 2035 tome 5, Analyse et évaluation de l offre d électricité, Office fédéral de l énergie (OFEN), Berne, juin 2007 (Tableau 7.17) 7/11

Le tableau 3 présente les estimations de l AES concernant le prix de revient des installations neuves ou transformées. Le calcul des coûts d investissement se base sur un mix d installations neuves et transformées. Le prix de revient est calculé avec un taux d intérêt de 5 % et 10 %, pour une durée de vie de l installation de 20 ans, ce qui aboutit aux fourchettes ci-dessous. On suppose que l essentiel de la chaleur produite est utilisé et revendu à un prix de 10 cts/kwh. Coûts 2013 CCF 200 kw el 2035 CCF 400 kw el 2050 Pile à combustible 400 kw el Investissement (CHF/kW) 2500 1900 1250 Rendement électrique (%) 35 42 60 Exploitation et maintenance, fixe Exploitation et maintenance, variable (cts/kwh) Heures d exploitation à pleine charge (h/a) 3,5 à 5 % de l investissement / an 2,5 3500 3800 4000 Prix de revient (cts/kwh) 11-15 13-15 11-13 Tableau 3. Coûts des installations CCF en 2012, en 2035 et en 2050, d après les estimations de l AES. 7. Environnement et climat Les émissions de CO 2 du couplage chaleur-force sont calculées pour l ensemble de l énergie utile (chaleur et électricité). On ne répartit généralement pas ces émissions entre les formes d énergie produite. La production d 1 kwh d électricité et de 1,8 kwh de chaleur produit: CETE 50 kwel: 336 g CO 2 / kwh 13 CETE 160 kwel: 314 g CO 2 / kwh CETE 1000 kwel: 325 g CO 2 / kwh En comparaison: CCF biogaz 14 : aujourd hui 77 g CO 2 /kwh, en 2030 et 2050 37 g CO 2 /kwh. Une comparaison complète des différents systèmes (CCF, centrale à cycle combiné gaz et pompe à chaleur) est disponible dans le document connaissances de base «Production de chaleur et d électricité à partir de combustibles fossiles». 13 14 PSI, Axpo: Systemvergleich von Strom- und Wärmeversorgung mit zentralen und dezentralen Anlagen, Energie Trialog Schweiz, mai 2009 (conversion de la fig. 5.4) Electricité durable: vœu pieux ou bientôt réalité?, Institut Paul Scherrer (PSI): Le Point sur l Energie n 20, juin 2010 8/11

8. Conditions-cadre Dans les conditions-cadre actuelles et avec le prix de l énergie que nous connaissons à ce jour (gaz, CO 2, chaleur, tarifs de rachat de l électricité), les installations CCF fonctionnant avec des combustibles fossiles ne devraient se développer que dans certains domaines d application spécifiques présentant des besoins continus en chaleur, tels que les hôpitaux, les industries avec un cycle vapeur ou les centrales de chauffage à distance ou de proximité. Le remplacement de plus de 10 000 chaudières au mazout, à la puissance thermique élevée et anciennes de plus de 20 ans, pourrait cependant constituer une opportunité de développement du CCF. L option d une installation CCF devrait donc être examinée dans tous les cas d utilisation de combustibles fossiles. Un véritable essor de cette technologie ne pourrait vraisemblablement se produire qu avec un encouragement relativement important (lois ou ordonnances, tarifs de rachat, exemptions de taxes, fonction de modèle lors de la transformation de bâtiments officiels, etc.). 9. Evaluation et analyse SWOT Critère d évaluation 2013 2035 2050 Investissement et prix de revient Prix de revient supérieur au prix du marché, dépendant des recettes liées à la chaleur. Généralement moins onéreux que les énergies renouvelables Coûts proches du prix du marché attendu, dépendant des progrès techniques Coûts proches du prix du marché attendu, dépendant des progrès techniques Compatibilité avec l environnement Emissions de CO 2 supérieures à celles du mix énergétique suisse Emissions de CO 2 supérieures à celles du mix énergétique suisse Emissions de CO 2 supérieures à celles du mix énergétique suisse Disponibilité de l énergie Charge de base et charge moyenne, particulièrement en hiver Charge de base et charge moyenne, particulièrement en hiver Charge de base et charge moyenne, particulièrement en hiver Potentiel de production Env. 1,1 TWh (1,9 % de la consommation électrique) Env. 3,8 TWh Env. 6 TWh Acceptation sociale Acceptation politique Tableau 4. Evaluation de la production d électricité par couplage chaleur-force suivant différents critères en 2012, en 2035 et en 2050. Vert: bon niveau, orange: niveau satisfaisant, rouge: niveau médiocre 9/11

internes externes Opportunités Volonté politique de ne pas poursuivre l exploitation du nucléaire Besoin de remplacer des chaudières à mazout (plus de 10 000) à la puissance thermique élevée et anciennes de plus de 20 ans Meilleure compatibilité environnementale du gaz par rapport au mazout (dans l optique du remplacement des chaudières à mazout) Développement des piles à combustible Efficacité énergétique globale élevée Simple autorisation nécessaire Points forts Technologie mature, pas de surprises Intérêt pour les fournisseurs d énergie en raison du «contracting» Savoir-faire important des fournisseurs d énergie Possibilité pour les industries de payer leur consommation électrique dans l enceinte de l entreprise, pas de rémunération pour l utilisation du réseau Risques Forte augmentation de la taxe sur le CO 2 Problème de bruit Diminution des besoins en chaleur en raison de l amélioration de l isolation thermique Incertitude concernant les coûts de transformation des installations de chauffage existantes Modification de la loi sur le CO 2, coûts du CO 2 plus élevés avec des répercussions sur les prix de l électricité et de la chaleur Points faibles Faible possibilité de réglage en cas d installation commandée par le besoin en chaleur Dépendance des besoins en chaleur Prix de revient encore élevé Technologie émettrice de CO 2 Nécessité de développer le réseau de gaz, primauté du CCF et densification des raccordements au gaz Fort développement uniquement possible sur le marché du renouvellement, avec des coûts d adaptation élevés Tableau 5. Analyse SWOT 10/11

10. Sources Eurelectric 2007 Statistics and prospects for the European electricity sector (Eurprog 2007), Eurelectric, Bruxelles, 2007 Gruneko 2010 OFEN 2007 OFEN 2009 OFEN 2010 Untersuchung der Wirtschaftlichkeit von BHKW-Anlagen, Gruneko Schweiz AG, Bâle, 2010 Perspectives énergétiques 2035 tome 5, Analyse et évaluation de l offre d électricité, Office fédéral de l énergie (OFEN), Berne, juin 2007 Beseitigung von Hemmnissen bei der Verbreitung von Wärmekraftkopplung (WKK) in der Schweiz, Office fédéral de l énergie (OFEN), Berne, 2009 Gesetzliche Grundlagen zum Thema WKK, Office fédéral de l énergie (OFEN), Berne, 2010 OFEN 2010a Infras, TEP, Prognos, Analyse des schweizerischen Energieverbrauchs 2000 2009 nach Verwendungszwecken, Office fédéral de l énergie (OFEN), Berne, décembre 2010 OFEN 2011 Fondements pour la stratégie énergétique du Conseil fédéral, actualisation des perspectives énergétiques 2035 (printemps 2011), Office fédéral de l énergie (OFEN), Berne, 2011 OFEN 2013 Thermische Stromproduktion inklusive Wärmekraftkopplung (WKK), édition 2012, Office fédéral de l énergie (OFEN), Berne, 2013 PSI 2009 PSI 2010 V3E 2011 PSI, Axpo: Systemvergleich von Strom- und Wärmeversorgung mit zentralen und dezentralen Anlagen, Trialogue Energie Suisse, mai 2009 Electricité durable: vœu pieux ou bientôt réalité?, Institut Paul Scherrer (PSI): Le Point sur l Energie n 20, juin 2010 Wärme und Strom effizient kombinieren, Association pour une production efficace de l énergie (V3E), Sarnen, 2011 11/11