Chapitre 1. Révélations -Je vais te faire flamber! Tel était le cri de fureur de Nikita adressé à sa demi-sœur qui venait de commettre le délit très grave, le crime terrible d'avoir osé lui dérober son journal intime. La jeune adolescente aux longs cheveux noirs poursuivait la fillette à travers toute la villa, avec une envie furieuse de la réduire en chair à pâté. La petite alla se réfugier dans les bras de sa mère en pleurant. Comme elle ne pouvait pas anéantir sa demi-sœur en présence de la mère de celle-ci, elle remonta dans sa chambre, son journal sous le bras. Soudain, alors qu'elle réfléchissait à une nouvelle cachette pour son cahier secret, un bruit inhabituel attira son attention. toc-toc-toc! La jeune fille s'arrêta net dans son mouvement et tendit l'oreille. toc-toc-toc! Le bruit venait de la fenêtre. La brunette se retourna, en pensant que personne ne pouvait venir là, puisque sa chambre se trouvait à l'étage de la villa. Aussi ne fut-elle pas très étonnée quand elle aperçut un chat. Elle se souvint du rêve qu'elle avait fait la nuit précédente, puis haussa les épaules en se disant que ce n'était qu'une coïncidence. Ses mains ne brillaient plus quand elle s'était de nouveau réveillée ce matin-là. Pensant qu'elle avait sûrement rêvé, ou eu une hallucination à cause de la fatigue, elle n'en avait parlé à personne. C'était un chat ordinaire, noir avec les yeux dorés et le bout des pattes blanc. Il fouettait la vitre avec sa queue et la grattait de ses griffes.
Elle le trouvait drôlement mignon. «Maman ne voudra jamais que je le laisse entrer, il mettrait des poils partout, pensa-t-elle. Et si Élisa arrive... Oh là là, c'est fatigant une petite sœur...» Elle s'approcha de la fenêtre, en espérant le faire partir, mais il restait là en la regardant dans les yeux, et elle avait l'impression que, plus elle s'approchait, plus il avait envie de rester. Sans comprendre, elle fut poussée par le besoin irrésistible d'ouvrir la fenêtre. Elle regarda ses mains agir malgré elle. Quand la fenêtre fut ouverte, Nikita passa sa main pour caresser le chat mais celui-ci sauta sur le lit de la jeune fille. L'adolescente alla vite fermer la porte et la fenêtre de sa chambre, puis elle s'approcha de l'animal, tout doucement, pour ne pas l'effrayer. Elle s'assit à son côté, sur le lit, et posa la main sur son dos. Le félin se laissa caresser pendant quelques minutes en ronronnant doucement. Soudain, la jeune fille entendit une voix masculine, celle d'un jeune garçon qu'elle ne connaissait pas : Nikita... Elle sursauta, et se leva d'un bond. Le chat, lui, ne bougea pas. Elle fit un tour de la pièce en cherchant d'où pouvait provenir la voix. Elle vérifia son téléphone portable pour s'apercevoir qu'il n'était pas allumé. Elle ne trouva pas la source de la voix. Paniquée, elle bégaya : C'est... c'est qui? Qui parle? La voix répondit d'un ton rassurant : Nikita, n'aie pas peur, c'est moi, le chat! Abasourdie, elle regarda le chat et pensa : «C'était dans mon rêve, ça! Je rêve. Ou je deviens folle, un chat ne peut pas parler, tout le monde sait ça! Et la magie n'existe pas, tout le monde sait ça aussi! Et moi je dis qu'un chat qui parle, c'est de la magie. Je deviens folle!» Et elle se frappa la tête avec son journal, qu'elle avait toujours dans la main. Inutile de te faire mal, Nikita, dit la voix en riant, je suis vraiment le chat, tu n'es pas folle! Cette fois, la jeune fille avait regardé le chat en écoutant la voix, et elle avait bien vu que c'était lui qui parlait. Elle en était sûre, à présent. «Ça alors! pensa-t-elle.» Pour en être sûre, elle lui demanda : C'est toi qui parles?
Oui, c'est moi, répondit le chat comme si c'était évident. Elle hésita un instant, se dit qu'elle rêvait. C'était tout simplement impossible! Elle était une adolescente normale, qui menait une vie banale depuis toujours, et voilà qu'un chat à première vue ordinaire arrivait chez elle pour lui parler, comme dans son rêve, comme par hasard. Elle avait donc fait un rêve prémonitoire, le jour de son anniversaire? Allons bon. Qu'est-ce que tu fais là? demanda-t-elle. Je s... Et pourquoi es-tu venu chez moi? Parce qu... Comment connais-tu mon prénom? Tu... Et comment se fait-il que tu saches parler? Je s... Si tu parles, la magie existe vraiment, n'est-ce pas? Oui et... Tu viens d'où? De... Et... Comme elle ne trouvait plus rien à lui demander, estomaquée, elle écouta enfin le chat qui la gronda gentiment : Vas-tu me laisser parler, oui? Comment veux-tu que je réponde à tes questions si tu me coupes la parole à chaque fois? Je vais tout t'expliquer, attends un peu, rit-il. Elle n'osa plus l'interrompre. Il se mit à lui expliquer de nombreuses choses, toutes plus absurdes les unes que les autres. Exactement comme dans son rêve. Sauf que cette fois, elle écouta attentivement afin de s'en souvenir. Il lui dit qu'il s'appelait Félix et qu'il était un être humain comme elle. Ah bon? Il lui semblait pourtant qu'il avait tout d'un chat. Quand elle lui en fit la remarque, il éclata de rire elle trouva vraiment étrange de voir rire un chat, mais préféra se taire et lui expliqua ce qu'il voulait dire par «un être humain normal, comme elle». Il lui expliqua que leur planète (elle fut soulagée d'apprendre que c'était bien la Terre) était composée de neuf mondes parallèles, appelés Dimensions. Elle se demanda pourquoi elle ne le savait pas, puisque c'était quand même sa planète, mais ne fit aucun commentaire et le laissa parler.
Elle apprit que toutes les Dimensions comportaient les mêmes continents, que la Première Dimension abritait les Sans-Pouvoirs, les personnes qui ne possédaient aucun pouvoir magique. Ah, parce que certains en avaient, des pouvoirs magiques? Elle refusa de le croire quand il lui expliqua qu'elle était une sorcière. Et pourquoi pas un Martien vert à deux têtes génétiquement modifié, tant qu'il y était? Il lui expliqua que la Deuxième Dimension était d'après ce qu'elle comprit une sorte d'aquarium géant qui abritait le monde marin, comme les poissons, mais aussi les tritons et les sirènes. Ah, parce que ça aussi, ça existait? Mais pourquoi n'était-elle au courant de rien? Il lui apprit que la Troisième Dimension était surnommée «les Ténèbres», car elle abritait les dangereux sorciers qui pratiquaient la Magie Noire, et les démons (les méchants, comprit Nikita). Que sur la Quatrième Dimension, surnommée «le Minimonde», vivaient toutes les petites créatures tels des gnomes, des elfes, des fées... Ah, ça aussi, ça existait? Elle avait du mal à le croire. Il ajouta que la Cinquième Dimension abritait les Géants, la Sixième Dimension, nommée Goldenia, les Goldeniens, des êtres semblables aux humains munis d'antennes et dont le corps était constitué d'or pur chose totalement impossible, s'était dit Nikita, la Septième Dimension, les Sorciers, comme lui (un chat-sorcier? Ah bon?), la Huitième Dimension, les monstres, la Neuvième Dimension, la faune et la flore magique où les êtres vivants avaient des pouvoirs magiques et parlaient dans un langage humain, et la Dixième Dimension, l'au-delà, celle où partaient les âmes des morts. Cette dernière n'était pas considérée comme une Dimension car, d'après ce que disait le chat, les morts pouvaient en sortir même si c'était extrêmement rare mais les vivants de chair ne pouvaient pas y entrer. Félix se tut un instant et regarda Nikita. La jeune fille arborait une moue incrédule. Je suis obligée de te croire? demanda-t-elle après un court silence, en croisant les bras. Non, mais ce serait idiot de ta part. Parce que c'est la vérité! Et qu'est-ce qui me le prouve? Je suis un chat, et je parle. C'est bizarre, mais c'est vrai, n'est-ce pas? Hmm... Eh bien tout ce que je t'ai dit, c'est bizarre, mais c'est vrai. Rien ne me le garantit, répliqua la jeune fille. Le fait que tu sois un chat parlant et bizarre n'exclut pas le fait que tu puisses être un chat parlant et menteur! rit-elle. C'est vrai, admit le chat. Et tu as dit qu'on est tous les deux des sorciers. Je n'ai pas de pouvoirs magiques, et un chat-
sorcier, ça n'existe pas. Peut-être parce que je suis un sorcier tout court! Ah oui? Si tu parviens à me convaincre, je te donnerai des croquettes, promit-elle avec un sourire amusé. Des croquettes? Ce n'est pas bon, les croquettes. Je préfèrerais des biscuits au chocolat. D'accord! Le chat sauta du lit, se dressa sur ses pattes arrières, prit une profonde inspiration et ferma les yeux. Il se passa alors une chose incroyable : son corps s'allongea, ses oreilles et son museau rétrécirent, les poils disparurent pour laisser place à un beau garçon, apparemment du même âge et de la même taille que la jeune fille, aux cheveux noirs ébouriffés, en jean et baskets. Il était dans la même position qu'avant la transformation, debout, les poings serrés, les yeux fermés. Puis il se détendit, desserra les poings, et ouvrit les yeux. Il avait les mêmes que Nikita, d'un beau noir profond. On aurait vraiment pu croire qu'ils étaient jumeaux!