Processus dynamiques aux interfaces Sol-atmosphère et Océan-atmosphère. Philippe Bougeault Valéry Masson Fleur Couvreux



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Processus dynamiques aux interfaces Sol-atmosphère et Océan-atmosphère Philippe Bougeault Valéry Masson Fleur Couvreux

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Table des matières 1 Présentation générale 9 1.1 Caractéristiques de la surface terrestre et rôle sur la CLA........... 9 1.2 Caractéristiques de la Couche Limite Atmosphérique.............. 11 1.2.1 hauteur de la CLA............................. 12 1.2.2 phénomènes importants.......................... 12 1.2.3 Le rôle de la turbulence.......................... 12 1.2.4 Autres phénomènes importants...................... 12 1.2.5 Notion de Couche Limite Planétaire (CLP)............... 14 1.3 Caractéristiques de la CMO............................ 14 1.4 Pourquoi étudier la CLA et la CMO....................... 15 1.4.1 Raisons pratiques.............................. 15 1.4.2 Raisons énergétiques............................ 15 1.4.3 Raisons scientifiques............................ 16 1.5 Quelques références bibliographiques....................... 17 2 Introduction à la turbulence 19 2.1 Les propriétés de la turbulence.......................... 19 2.1.1 Caractère diffusif.............................. 19 2.1.2 Caractère dissipatif............................. 21 2.1.3 Imprévisible................................. 21 2.2 L origine de la turbulence............................. 21 2.2.1 L instabilité hydrodynamique....................... 22 2.2.2 L instabilité thermique........................... 25 2.3 Observation de la CLA et la CMO........................ 26 2.3.1 Mesures in-situ depuis le sol........................ 26 2.3.2 Mesures in situ de la CMO........................ 27 2.3.3 Mesures de télédétection.......................... 29 2.3.4 Moyens aéroportés............................. 30 2.4 Conclusions..................................... 32 3 Dérivation du système de Boussinesq 33 3.1 Le système de Boussinesq pour la CLA sèche.................. 33 3.1.1 Construction d un état de référence.................... 34 3.1.2 Linéarisation................................ 34 3.1.3 Equation thermodynamique........................ 35 3.1.4 Equation d état et définition de θ..................... 35 3

4 TABLE DES MATIÈRES 3.1.5 Equation de continuité........................... 36 3.1.6 Equation du mouvement.......................... 36 3.1.7 Système de Boussinesq........................... 37 3.1.8 Remarques................................. 38 3.2 Généralisation à l air humide........................... 38 3.2.1 L humidité spécifique............................ 38 3.2.2 Equation d état du mélange........................ 39 3.2.3 Equation thermodynamique du mélange................. 39 3.2.4 Système d équations général pour l air humide (sans nuage)...... 39 3.2.5 Système de Boussinesq pour l air humide (sans nuage)......... 40 3.3 Système de Boussinesq pour l océan....................... 41 3.3.1 Equations générales pour l océan (eau salée)............... 41 3.3.2 Etat de référence.............................. 42 3.3.3 Equation de la thermodynamique..................... 42 3.3.4 Equation d état............................... 42 3.3.5 Equation de continuité........................... 43 3.3.6 Equation du mouvement.......................... 43 3.3.7 Equations de Boussinesq pour l océan salé................ 43 3.4 Notations...................................... 44 4 L opérateur de moyenne 45 4.1 Valeur moyenne et fluctuation........................... 45 4.2 Axiomes de Reynolds................................ 45 4.2.1 linéarité................................... 45 4.2.2 Commutativité avec la dérivation et l intégration............ 46 4.2.3 Idempotence généralisée.......................... 46 4.3 Choix de l opérateur de moyenne......................... 46 4.4 Le théorème ergodique............................... 48 4.5 Temps de moyenne nécessaire pour un paramètre moyen............ 49 4.6 Temps de moyenne nécessaire pour un moment d ordre 2............ 50 4.7 Généralisation au cas d un processus non stationnaire............. 51 4.8 Transposition aux processus dépendant de l espace............... 51 4.9 Lien entre mesures spatiales et temporelle : l hypothèse de Taylor....... 52 5 Equations d évolution des paramètres moyens de la CLA 55 5.1 Objectif....................................... 55 5.2 Notations...................................... 55 5.3 Système de Boussinesq en cartésien........................ 56 5.4 Méthodologie pour dériver les équations moyennes............... 56 5.5 Equations de Reynolds (1895)........................... 57 5.6 Flux turbulents................................... 57 5.6.1 Interprétation physique.......................... 57 5.6.2 Dimensions et unités des flux turbulents................. 58 5.7 Comparaison des flux turbulents et moléculaires................. 58 5.8 Les conditions à la limite des équations de Reynolds.............. 59

TABLE DES MATIÈRES 5 6 Les équations de la CLA homogène horizontalement 61 6.1 Hypothèse d homogénéité horizontale....................... 61 6.2 Equations de la CLA barotrope......................... 61 6.2.1 Equation de continuité........................... 61 6.2.2 Equations du mouvement......................... 62 6.2.3 La CLA barotrope............................. 62 6.3 Exemple....................................... 63 6.4 Assouplissement de l hypothèse d homogénéité horizontale........... 63 6.5 Le problème de fermeture............................. 64 7 Analyse dimensionnelle et similitude 65 7.1 Contexte....................................... 65 7.2 De l utilisation de maquettes........................... 65 7.3 Notion de dimension physique........................... 66 7.4 Théorème Π de Vaschy-Buckingham....................... 66 7.5 Exemple : période du pendule........................... 67 7.6 Mise en œuvre pratique du théorème Π dans le cas général........... 68 7.7 Exercice : vidange d une cuve........................... 68 8 Les modèles conceptuels historiques de la CLA 71 8.1 La méthode des coefficients d échange turbulent................. 71 8.2 Propriétés des coefficients d échanges turbulents................. 71 8.3 La longueur de mélange de Prandtl (1925).................... 72 8.4 La couche limite de surface (CLS) neutre.................... 73 8.4.1 Phénoménologie physique......................... 73 8.4.2 Application du modèle de Prandtl.................... 73 8.5 La couche d Ekman dans la CLA (1905)..................... 75 8.5.1 Description................................. 75 8.5.2 Résolution analytique avec un modèle simple de turbulence...... 75 8.5.3 Forme du profil de vent.......................... 77 8.6 La couche d Ekman dans l océan......................... 78 8.6.1 Courant de surface............................. 78 8.7 Interaction dérive d Ekman - courant géostrophique.............. 78 8.8 Couplage entre couches d Ekman dans la CLA et la CMO........... 79 9 Equations pour les moments d ordre 2 et l énergie cinétique turbulente 81 9.1 Méthodologie.................................... 81 9.2 Construction de l équation pour u i u j....................... 81 9.3 Equations pour les moments d ordre 2 pour température et humidité..... 83 9.4 Equation d évolution de l énergie cinétique turbulente............. 84 9.5 Les différents régimes de turbulence....................... 85 9.5.1 Si R f = 0.................................. 86 9.5.2 Si R f << 1................................ 86 9.5.3 Si R f < 0.................................. 86 9.5.4 Si R f > 0.................................. 86 9.6 Le nombre de Richardson de gradient...................... 86 9.7 Influence de l humidité sur le flux de flottabilité................. 87

6 TABLE DES MATIÈRES 10 Approche spectrale de la turbulence 89 10.1 Définition d un spectre d énergie cinétique turbulente.............. 89 10.2 Equation d évolution de E(k)........................... 89 10.3 La cascade d énergie vers les petites échelles................... 90 10.4 Forme universelle du spectre d énergie...................... 91 10.5 La zone inertielle.................................. 91 10.6 Cas particulier du grand nombre de Reynolds.................. 92 10.7 Nombre de Reynolds de l écoulement aux grandes échelles........... 92 10.8 Estimation pratique de la dissipation....................... 93 10.9 Le spectre en k 1.................................. 94 11 La couche limite de surface 95 11.1 Phénoménologie................................... 95 11.2 La théorie de similitude de Monin-Obuhkov................... 96 11.2.1 Forme universelle du gradient de vent.................. 96 11.2.2 Forme universelle du gradient de température.............. 97 11.2.3 Généralisation aux autres grandeurs................... 97 11.3 Détermination théorique des fonction φ u et φ θ.................. 97 11.3.1 Régime neutre............................... 97 11.3.2 Régime quasi-neutre............................ 98 11.3.3 Régime très instable............................ 99 11.3.4 Régime très stable............................. 99 11.4 Détermination expérimentale des fonctions φ u et φ θ.............. 100 11.5 Utilisation d un modèle numérique pour déterminer φ u et φ θ......... 101 11.6 Prise en compte de l humidité........................... 101 11.7 Application pratiques des fonctions universelles................. 101 11.7.1 Mesure indirecte des flux dans la CLS.................. 101 11.7.2 Paramétrisation des flux dans les modèles numériques......... 102 11.7.3 Conclusion................................. 103 12 Les flux de surface et leur détermination 105 12.1 La rugosité..................................... 105 12.1.1 Mesure de la rugosité........................... 105 12.1.2 Hauteur de déplacement.......................... 106 12.1.3 Paysages complexes et régions de collines................ 106 12.1.4 Rugosité sur mer.............................. 107 12.2 Bilan d énergie en surface............................. 107 12.2.1 Formalisation du bilan d énergie en surface............... 108 12.2.2 Les flux radiatifs.............................. 109 12.2.3 Flux d énergie et caractéristiques dans le sol............... 110 12.3 Les flux turbulents vers l atmosphère....................... 112 12.3.1 Partition flux de chaleur sensible/ flux de chaleur latente....... 112 12.3.2 Du rôle de la végétation.......................... 112 12.4 Le bilan hydrique de surface............................ 113

TABLE DES MATIÈRES 7 13 Les couches convectives dans la CLA 115 13.1 Evolution diurne du profil de température potentielle virtuelle......... 115 13.2 Profils d humidité et de vent............................ 118 13.3 Phénoménologie de la couche convective..................... 118 13.3.1 Dans la CLS................................ 118 13.3.2 Les thermiques dans la couche mélangée................. 119 13.3.3 La zone d entraînement.......................... 121 13.3.4 Rouleaux et cellules............................ 121 13.4 Propriétés de la turbulence dans les couches convectives............ 123 13.4.1 La normalisation convective........................ 123 13.4.2 Modélisation du fonctionnement de la couche convective........ 123 13.4.3 Bilan de l énergie cinétique turbulente dans une couche convective.. 125 13.4.4 Bilan da la variance de température θ 2 dans une couche convective.. 126 13.5 La vitesse d entraînement............................. 127 13.5.1 Définition.................................. 127 13.5.2 Paramétrisation de la vitesse d entrainement (couches convectives).. 128 13.5.3 Applications................................ 131 13.6 Retour au problème atmosphérique général................... 132 14 Couche limite nuageuse 133 14.1 Nouvelles variables................................. 133 14.2 les stratocumulus.................................. 135 14.3 les cumulus..................................... 137 15 Couches limites nocturnes 139 15.1 Paramètres thermodynamiques moyens...................... 139 15.1.1 Profil de température........................... 139 15.1.2 Profil d humidité.............................. 141 15.1.3 Profil de vent moyen............................ 141 15.2 Le profil de turbulence............................... 143 15.2.1 Origine de la turbulence.......................... 143 15.2.2 Par vent fort................................ 144 15.2.3 Par vent faible............................... 144 15.2.4 Interaction avec les ondes de gravité................... 144 15.3 Problème de la hauteur de la couche limite nocturne.............. 145 16 La couche active de l océan 147 16.1 Phénoménologie................................... 147 16.1.1 Cycle saisonnier de la profondeur de la CMO.............. 147 16.1.2 Profils typiques dans la CMO....................... 148 16.2 Intérêt de la CMO................................. 149 16.2.1 Impact sur l atmosphère.......................... 149 16.2.2 Impact sur l océan............................. 149 16.3 Mise en équations du problème océanique.................... 149 16.3.1 La CMO homogène horizontalement................... 149 16.3.2 L énergie cinétique turbulente....................... 150 16.4 Echanges entre l atmosphère et l océan...................... 150

8 TABLE DES MATIÈRES 16.4.1 Le flux solaire................................ 150 16.4.2 Bilan d énergie de surface......................... 151 16.4.3 Bilan de sel................................. 152 16.4.4 Bilan de quantité de mouvement..................... 152 16.5 Les modèles de numériques de la CMO...................... 152 16.6 Les modèles de intégraux de la CMO....................... 153

Chapitre 1 Présentation générale On définit la Couche Limite Atmosphérique (CLA) comme la partie de l atmosphère où la présence de la surface terrestre (continentale ou océanique) est directement sensible. En fait, la totalité de l atmosphère est influencée par la surface, mais il apparaît clairement (par l observation) que l on peut dégager une zone où cette influence est rapide. Cela veut dire que l atmosphère réagit avec des constantes de temps courtes (de l ordre de la journée au maximum) aux sollicitations de la surface. Le reste de l atmosphère (la troposphère libre, la stratosphère et au dessus) réagit avec des temps beaucoup plus longs (figure 1.1). Cette couche limite atmosphérique est en quelque sorte l analogue pour l atmosphère des couches limites en mécanique des fluides classique ; cependant, cette analogie est assez faible. De même, la Couche de Mélange Océanique (CMO) est la couche superficielle de l océan qui répond rapidement aux sollicitations de l atmosphère sus-jacente. Les temps de réponses caractéristiques sont de l ordre de la semaine au mois. L océan profond, par la circulation générale océanique, a un temps de réponse bien plus long. 1.1 Caractéristiques de la surface terrestre et rôle sur la CLA De part le rôle primordial de la surface dans la définition même de la CLA, il est nécessaire de se pencher sur les caractéristiques de cette surface, et en quoi elle va avoir un impact sur l atmosphère. 1. Elle est immobile (évident pour les continents, pour la mer, vis à vis du vent, on peut négliger la vitesse des courants). Ainsi, par condition d adhérence, elle va produire un ralentissement du vent près de la surface, et donc un gradient de vent dans les basses couches. Ce ralentissement est lié à une dissipation d énergie cinétique. 2. Elle est le lieu d échanges énergétiques importants : elle absorbe le rayonnement solaire la journée et se refroidit par émission infra-rouge la nuit. Si ce cycle est négligeable pour les surfaces maritimes, il est très important pour les surfaces solides, qui conduit à un cycle diurne très fort de la température du sol. Ce cycle diurne prononcé se propage alors à l air dans la CLA. Par opposition, au dessus, le cycle diurne du reste de l atmosphère est très faible. Cette transmission de température par conduction des surfaces vers l air est une des principales caractéristiques de la CLA. 9

10 CHAPITRE 1. PRÉSENTATION GÉNÉRALE Fig. 1.1 Variations sur 4 jours de la température observée à 250m et 1500m en Oklahoma. Les variations sont plus rapides à 250m qu à 1500m.

1.2. CARACTÉRISTIQUES DE LA COUCHE LIMITE ATMOSPHÉRIQUE 11 3. Elle est source d humidité. C est évident pour la mer, mais c est aussi vrai pour les surfaces continentales, du fait du stockage d eau dans le sol. Cette eau est évaporée vers l atmosphère, ou éventuellement transpirée par les plantes présentes (via leurs stomates au niveau des feuilles en ayant puisé l eau dans le sol par leur système racinaire). Par conséquent la CLA est souvent très humide comparée à la troposphère libre au dessus, avec une forte discontinuité entre les deux. De fait, il y a aussi beaucoup de nuages dans la couche limite (cumulus, strato-cumulus, stratus, brouillard). Ces nuages ont ensuite un rôle radiatif important (par exemple via les zones persistantes de stratocumulus au dessus des océans). 4. Elle est source de pollution (et de composés minoritaires). L essentiel de la pollution est émis en surface ou dans la CLA (cheminées) : pollution gazeuse, aérosols, poussières. Deux exceptions notables : les volcans et les avions. La majeure partie de la pollution se retrouve ainsi piégée dans la CLA, et les concentrations observées en surface dépendent principalement de la hauteur de la CLA, hauteur sur laquelle sont répartis les polluants. On peut voir la CLA à sa couleur. 1.2 Caractéristiques de la Couche Limite Atmosphérique Fig. 1.2 Couche Limite Atmosphérique (CLA) et de Couche de Mélange Océanique (CMO)

12 CHAPITRE 1. PRÉSENTATION GÉNÉRALE 1.2.1 hauteur de la CLA Elle est très variable, avec une forte influence du cycle diurne. de jour, elle varie de 1 à 2km, en fonction de l ensoleillement et de la saison. Elle est plus basse en hiver qu en été. Exceptionnellement elle peut atteindre 4 à 5km (Sahara) (figure 1.3). de nuit, elle varie entre 100 et 300m, en fonction du vent et du refroidissement en surface. au dessus de l océan, elle est plus régulière, sans cycle diurne prononcé, en général épaisse de 500m et 1000m, en fonction de la position des premiers nuages. On considère qu en moyenne sur la globe, elle fait environ 1000m. De plus, il n y a pas de loi générale quant à la transition entre CLA et troposphère libre. Elle est parfois brutale, parfois graduelle. 1.2.2 phénomènes importants Comme mentionnées précédemment, ils sont le reflet des caractéristiques de la surface terrestre (figure 1.2) : vent en général plus faible qu en altitude, tendant vers zéro en surface fort cycle diurne de température et d humidité fort cycle diurne de la concentration en polluants et espèces minoritaires, en fonction des sources (figure 1.4) présence fréquente de nuages présence permanente de turbulence 1.2.3 Le rôle de la turbulence C est en fait la turbulence de l air dans la CLA qui permet de répercuter rapidement dans cette zone de l atmosphère les caractéristiques variables de la surface terrestre. On pourrait donner une définition alternative de la CLA : zone où l écoulement est turbulent. C est une définition pratique, qu on constate en avion lors de l atterrissage. le cours va être essentiellement axé sur la description de la turbulence dans la CLA. Cet aspect est aussi celui qui rend l étude de la CLA difficile : la turbulence fluide est un des grands problèmes physiques mal maîtrisés à l heure actuelle. Les mouvements turbulents dans la CLA sont de l ordre de quelques mètres par seconde. 1.2.4 Autres phénomènes importants Il peut exister des circulations induites par la variabilité des surfaces sous-jacentes. Ces phénomènes ne seront guère étudiés dans ce cours. contraste océan/continent : phénomènes de brise de mer, de terre contraste zone sèche/ zone humide : phénomènes de brises vallées et montagnes : vents de pentes, circulations particulières contrastes de rugosité îlot de chaleur urbains, etc...

1.2. CARACTÉRISTIQUES DE LA COUCHE LIMITE ATMOSPHÉRIQUE 13 Fig. 1.3 Mesures de la hauteur de couche limite par un satellite CALIPSO sur l océan (Sud-est du Pacifique) et sur le désert (péninsule arabique).

14 CHAPITRE 1. PRÉSENTATION GÉNÉRALE Fig. 1.4 Exemple de CLA hivernale. La majeure partie de la pollution reste piégée dans la CLA en basses couches, sauf le panache principal qui parvient, ce qui est rare, à traverser le couvercle thermique au sommet de la CLA. 1.2.5 Notion de Couche Limite Planétaire (CLP) En fait, on remarque que très souvent, les variations verticales sont très supérieures aux échelles de variations sur horizontale. On fera donc l hypothèse d homogénéité horizontale des phénomènes. C est pratique pour saisir l essentiel du rôle météorologique de la CLA et faciliter son étude. Apparaît ainsi la notion de couche Limite Planétaire (CLP), qui est définie comme une CLA homogène horizontalement. On se limitera à cela. Toutefois, un grand nombre de concepts qui seront abordés pourront se généraliser à des cas plus complexes. Enfin, on peut noter que dans certains cas, il est impossible de définir une CLA, la surface intéragissant directement avec la troposphère libre ou même la stratosphère : cas de cumulonimbus (jusqu à la tropopause) et cas d ondes de relief déferlante (déferlant en général dans la stratosphère). 1.3 Caractéristiques de la CMO La Couche de Mélange Océanique est influencée par la CLA, tout comme la CLA est influencée par les surfaces sous-jacentes. Ainsi : Elle est le siège de courants importants, certains étant dus aux ondes de marées, mais d autres étant dus au vent dans la CLA. Sa structure verticale (thermocline saisonnière) et sa température varient en fonction

1.4. POURQUOI ÉTUDIER LA CLA ET LA CMO 15 des échanges d énergie avec l atmosphère et du rayonnement solaire. La profondeur de la CMO varie : de quelque dizaines de mètres en été à environ 100m en hiver. Elle est soumise à des variations de salinité, suite aux précipitations, apports d eau douce par les fleuves et à l évaporation. Elle est, tout comme la CLA, soumise à des phénomènes turbulents (de l ordre de 10 cm/s au maximum) importants, qui permettent de véhiculer rapidement les perturbations auxquelles la surface de l océan est soumise. Elle est source de composés organiques et riche en poissons, du fait de l apport par les fleuves et le contact avec les côtes. 1.4 Pourquoi étudier la CLA et la CMO Il y a trois raisons principales pour cette étude. On tentera dans ce cours d aborder ces trois aspects de manière équilibrée. On se donnera des outils de travail, en insistant sur les raisonnements et le sens physique, afin de fournir une introduction à la recherche. 1.4.1 Raisons pratiques La raison la plus évidente est que ces zones sont le lieu des activités humaines. Des connaissances sur la CLA sont nécessaires pour répondre à de nombreuses questions pratiques : Prévision de la température, de l humidité, du vent, du brouillard, du verglas, des gelées, etc... Effet mécanique du vent sur les structures (dépend non seulement de la force du vent mais aussi des rafales et de leur périodicité). Problèmes de dispersion des polluants Problèmes de prévision de consommation énergétique (nuages de basses couches et température) Sécurité des moyens de transport (avions, bateaux) Propagation des signaux acoustiques et Hertziens La CMO joue aussi un rôle important dans certaines activités humaines. Sa connaissance est nécessaire par exemple pour : la pêche (fonction des courants, du plancton) la discrétion des sous-marins (fonction de la structure thermique) la prévision des trajectoires des cyclones (température de surface de la mer et son évolution) 1.4.2 Raisons énergétiques La CLA et la CMO jouent un rôle clé dans les machines énergétiques atmosphérique et océanique. Les surfaces sont en effet à la source des échanges d énergie de l atmosphère et de l océan, puisqu une majorité du rayonnement solaire est piégée en surface (figure 1.5). Cette énergie solaire est de plus interceptée sur des épaisseurs relativement faibles (quelques mètres dans la CMO), quelques millimètres seulement sur les continents. Dans ce dernier cas, l énergie est très rapidement transférée à l atmosphère.

16 CHAPITRE 1. PRÉSENTATION GÉNÉRALE Fig. 1.5 Devenir du rayonnement solaire reçu au sommet de l atmosphère. De par les contrastes en surface et les différences d exposition au rayonnement solaire, il y a formation de vents, et donc transformation d énergie potentielle en énergie cinétique. Celle-ci est ensuite dissipée, à hauteur de 50% rien que dans la CLA, du fait du frottement et de la dissipation visqueuse associée. De plus, le couplage entre océan et atmosphère est essentiel pour comprendre les grands équilibres de la planète, et leurs paramétrisations sont actuellement le maillon le plus important de la physique des modèles de prévision et de climat. 1.4.3 Raisons scientifiques La CLA est un laboratoire naturel pour la recherche en turbulence (qui a attiré un certain nombre de grands savants). La micrométéorologie est l autre nom souvent donné à la météorologie de la CLA. En effet, elle se concentre sur les phénomènes de micro-échelle (inférieur au kilomètre en gros). C est essentiellement une science pratique : description statistique de la turbulence de basses couches, méthodes pratiques de détermination des flux de chaleur, quantité de mouvement et humidité entre la surface et la CLA, règle pratique de dispersion des polluants...

1.5. QUELQUES RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES 17 1.5 Quelques références bibliographiques Malardel, S., 2005 : Fondamentaux de Météorologie, Editions Cépaduès. Dans cet ouvrage général, les rappels mathématiques et physiques nécessaires à ce cours sont développés. Stull, R., 1988 : An introduction to boundary layer meteorology, Kluwer Academic. Garratt, J. R., 1992 : The atmospheric boundary layer, Cambridge Atmospheric and Space science series. Ces deux derniers ouvrages font référence dans l étude de la couche limite. Ils permettent d approfondir les différents chapitres abordés en cours.

18 CHAPITRE 1. PRÉSENTATION GÉNÉRALE

Chapitre 2 Introduction à la turbulence Supposons que l on observe en un point d un système fluide un des paramètres qui décrivent l état du fluide (par exemple température, pression, vitesse, etc...). Il y a 3 possibilités (figure 2.1) : (a) Fig. 2.1 Types d écoulement 1. l écoulement est laminaire 2. l écoulement est ondulatoire 3. l écoulement est turbulent Ce qui distingue la turbulence, c est la variation rapide dans le temps, mais aussi le caractère irrégulier et surtout aléatoire. On n arrive pas à relier les fluctuations à des causes au niveau des forçages extérieurs exercés sur le fluide. En cela, la turbulence diffère d autres phénomènes rapides, comme les ondes. Le fluide turbulent génère par lui-même un écoulement chaotique. Il paraît totalement impossible de décrire le détail de ces fluctuations. On aura recours à une description statistique : on représentera les fluctuations par leurs moyennes, leurs variances, leurs corrélations, etc... 2.1 Les propriétés de la turbulence 2.1.1 Caractère diffusif La turbulence aboutit rapidement à l homogénéisation d un milieu. en ceci, elle s oppose aux ondes, qui laissent le milieu identique après leur passage. Ce caractère diffusif est 19

20 CHAPITRE 2. INTRODUCTION À LA TURBULENCE entièrement lié au transport des quantités par l air turbulent (notion de brassage). On peut mettre en évidence la caractère diffusif de la turbulence par l exemple suivant : Exemple du radiateur : on veut chauffer une pièce avec un radiateur dont la température est de 10K supérieure à celle de la pièce. Combien de temps cela prendra t il? (a) Air immobile : chauffage moléculaire (b) Air en mouvement : chauffage turbulent Fig. 2.2 Problème du radiateur premier cas : l air ne peut pas se déplacer (figure 2.2(a)). Le chauffage se fait par conduction moléculaire. L équation de la chaleur s écrit : T t = ν θ 2 T. x 2 Donc, en ordre de grandeur : T τ = ν θ T L 2 τ = L2 ν θ La diffusivité moléculaire thermique de l air ν θ τ = 52 m 2 2 10 5 m 2 /s 106 s 10 jours. est très faible (2 10 5 m 2 /s), donc Ce qui montre que l air est un bon isolant quand on l empêche de se déplacer. D ailleurs, on réalise l isolation thermique des fenêtres en maintenant une couche d air entre deux vitres. La couche d air est suffisamment fine de telle sorte que des mouvements ne peuvent pas s y déclencher facilement. deuxième cas : l air peut se déplacer librement (figure 2.2(b)). La vitesse de déplacement va être déterminée par l échauffement de l air au contact du radiateur. La circulation dans toute la pièce peut être considérée comme un modèle très simple de turbulence. L équation du mouvement vertical s écrit : ρ dw dt = p ρg. On suppose que l air juste à côté du radiateur est immobile et a les caractéristiques de l air dans la pièce (température T, densité ρ, pression P ). Par contre, l air dans le radiateur est chauffé, et subit donc une accélération vers le haut. Ses caractéristiques thermodynamiques sont modifiées (température T + T, densité ρ + ρ, pression P + P ). De plus, on suppose que la pression s équilibre instantanément ( P = 0). En comparant ces deux particules à côté et dans le radiateur, on a donc :

2.2. L ORIGINE DE LA TURBULENCE 21 0 = P ρg et (ρ + ρ) dw dt = (P + P ) (ρ + ρ)g. Donc, par soustraction et utilisation de la relation des gaz parfait (via P P = ρ ρ + T T ) : dw dt = ρ ρ + ρ g ρ ρ g T T g Et ceci sur toute la hauteur du radiateur. On intègre de bas en haut du radiateur, en supposant la vitesse négligeable en bas et l état stationnaire : D où Donc w 2 10 10 300 1 = 0.8m/s. dw dt = w t + w w w w = T T g w 2 = 2g T T H On peut écrire une équation de continuité globale pour la pièce : U(L D) UL = W D (U étant la vitesse moyenne dans la pièce). Donc U = W D/L = 0.8 0.1/5 = 1.6 10 2 m/s (soit 1.6 cm/s ce qui est plausible). Le temps pour l air pour traverser toute la pièce est donc : τ = L U = 5 1.3 10 2 = 300s, soit 5 minutes, ce qui est beaucoup plus réaliste que le résultat précédent. D ailleurs, si on veut chauffer une pièce encore plus vite, on met un ventilateur qui accélère le mélange de l air. C est ce que fait, en substance, la turbulence. 2.1.2 Caractère dissipatif La turbulence consomme de l énergie cinétique, car elle favorise l existence de gradients élevés (à toute petite échelle spatiale), sur lesquels s exerce la dissipation visqueuse. Si l on communique à un fluide enfermé dans une enceinte une certaine quantité d énergie cinétique, le fluide mettra d autant plus de temps à arriver au repos total que l écoulement n est pas turbulent. 2.1.3 Imprévisible Bien sûr, l écoulement suit les équations déterministes de Navier-Stockes. Il faut comprendre imprévisible ici au sens de l effet papillon. C est à dire, que même si dans l absolu on pourrait connaître le devenir de fluide, le problème vient du fait que l on ne connait pas assez bien l état initial du fluide pour le faire. Ainsi, de petites perturbations s amplifient rapidement avec le temps, ce qui rend l écoulement imprévisible de manière pratique. 2.2 L origine de la turbulence Il y a deux causes classiques de turbulence : l instabilité hydrodynamique et l instabilité thermique.

22 CHAPITRE 2. INTRODUCTION À LA TURBULENCE 2.2.1 L instabilité hydrodynamique C est l instabilité la plus fondamentale. On constate que dans un écoulement, faiblement visqueux, des zones où la vitesse varie rapidement dans la direction transverse à l écoulement (cisaillement) ne peuvent se maintenir dans le temps : elles sont sujettes à des instabilités. Les petites perturbations y croissent rapidement, donnant lieu à une géométrie différente de l écoulement, qui est elle-même instable, et ainsi de suite. On peut imaginer un écoulement turbulent comme une succession d instabilités hydrodynamiques se développant les unes sur les autres (figures 2.3 et 2.4). (a) (b) Fig. 2.3 Instabilité hydrodynamique de Kelvin-Helmholtz visible par les nuages au sommet de la CLA. (a) Fig. 2.4 Instabilité hydrodynamique provoquée dans la CLA par le fort cisaillement sous des ondes de reliefs. La turbulence dans les rotors (nom donné à ce phénomène) est visibles dans les nuages. Comme ce mécanisme est entièrement contenu dans les équations de Navier-Stockes incompressibles, on peut faire une analyse dimensionnelle de ces équations, pour rechercher le

2.2. L ORIGINE DE LA TURBULENCE 23 facteur qui va contrôler ce phénomène. Soit le système :.u = 0 u t = u.u 1 ρ p + ν u Où p est la pression hydrodynamique, ρ la masse volumique (supposée constante), ν la viscosité du fluide et u le vecteur vitesse. Supposons que l échelle caractéristique des variations spatiales dans l écoulement soit L, et U l échelle caractéristique des variations de vitesse associée. Alors : u.u U 2 L ν u νu L 2 Dans un tel système, la pression se trouve à partir de( l équation ) de continuité (propriété des fluides incompressibles)..u = 0 t.u = 0. u t = 0. Donc. u.u 1 U 2 ρ p = 0. en analysant l ordre de grandeur des termes, l on a : p L 2 ρl 2 p ρu 2. Donc, dans l équation du mouvement, on obtient : 1 ρ p U 2 L u.u On regroupe les termes d advection et de pression dans la même catégorie, dite termes d inertie. Ces termes ont tendance à créer des inhomogénéités de petite échelle, car ils sont non linéaires (une onde de longueur d onde donnée engendre des ondes de longueur d onde deux fois plus courtes par un terme non linéaire). Ce sont des termes déstabilisateurs, créateurs de turbulence. Le terme de viscosité, au contraire, correspond par nature à un lissage des inhomogénéités de petite échelle par les échanges moléculaires. Il a un effet stabilisateur. Le rapport de ces deux termes est un nombre sans dimension qui va caractériser la plus ou moins grande tendance de l écoulement à évoluer vers la turbulence. C est le nombre de Reynolds. R e = U 2 /L νu/l 2 = UL ν C est par ailleurs une quantité fondamentale en mécanique des fluides à bien des égards. Pour toute famille d écoulements, on peut définir un nombre de Reynolds approprié (en choisissant bien U, L et ν). On peut alors affirmer avec certitude qu il existe une valeur critique du R e au delà de laquelle l écoulement sera turbulent. Expérience de Reynolds (1883) : Reynolds a mis en évidence cette valeur critique expérimentalement, en étudiant la vidange d une cuve par une conduite horizontale (figure 2.5). Le diamètre du tube de vidange est d, la viscosité du fluide ν, la vitesse le long de l axe U. On obtient divers régimes en faisant varier

24 CHAPITRE 2. INTRODUCTION À LA TURBULENCE le débit (U). Le caractère laminaire ou turbulent est visualisé par du colorant émis dans la partie centrale du tube. L écoulement est toujours turbulent si Re = Ud ν > 10 5, et dans la plupart des cas si il est supérieur à 3000. D où Fig. 2.5 Expérience de Reynolds (1883) R ecr 3000 Interprétation : il y a instabilité hydrodynamique de l écoulement cisaillé qui se développe dans la conduite. Reynolds de la CLA Dans un fluide de viscosité très faible comme l air, tout champ de vitesse montrant un cisaillement significatif est intrinsèquement instable (en dehors de tout effet thermique éventuellement stabilisateur), si le nombre de Reynolds du problème est supérieur à quelques milliers. On peut calculer une valeur du Reynolds représentatif de la CLA : U 10m/s (variation entre le vent au sommet de la CLA et le vent au sol) ; h 1000m (hauteur de la CLA) et ν = 10 5 m 2 /s (viscosité de l air). Donc R ecla = Uh ν 10 1000 10 5 = 10 9 Il est donc inévitable que la CLA soit turbulente.

2.2. L ORIGINE DE LA TURBULENCE 25 2.2.2 L instabilité thermique On peut trouver dans la nature de la turbulence même dans des écoulements où la vitesse moyenne est nulle, si il existe des contrastes thermiques. On en fait l expérience chaque matin en chauffant l eau pour son café. La quantité de mouvement moyenne dans la casserole est nulle (principe de conservation de la quantité de mouvement), mais une turbulence vigoureuse se développe avant même que l eau ne s évapore. L expérience classique en mécanique des fluides est l expérience de Bénard. Expérience de Bénard : On soumet un fluide au repos, maintenu entre deux plaques séparées d une distance h, à un contraste de chaleur T entre ces deux plaques, en présence de la gravité g (figure 2.6). Fig. 2.6 Expérience de Reynolds (1883) Si la plaque supérieure est plus chaude, le fluide se dilate vers la haut. Le fluide est donc stable, et il n y a pas de mouvement. Le flux de chaleur vers le bas est de nature moléculaire, égal à ρc p ν θ T h. Si la plaque du bas est chauffée, au contraire, des instabilités se déclenchent dès que la différence température dépasse une température critique ( T > T cr ). Il y a création de mouvement. L existence d un gradient de densité positif, en présence de la gravité, crée une situation intrinsèquement instable. Les phénomènes observés dépendent alors à nouveau d un nombre sans dimension formé à partir des paramètres du problème, le nombre de Rayleigh.

26 CHAPITRE 2. INTRODUCTION À LA TURBULENCE R a = αgh3 T νν θ α étant le coefficient de dilatation thermique du fluide. On peut aussi noter que les phénomènes dépendent aussi du nombre de Prandtl, P r = ν ν θ, qui est une caractéristique du fluide utilisé, et non de l écoulement. On constate les régimes suivants : R a positif : cas stable, pas de mouvement, flux moléculaire seulement R a compris entre 0 et -1700 : pas de mouvement, flux moléculaire seulement R a compris entre -1700 et -50000 : mouvements convectifs réguliers (rouleaux puis cellules hexagonales) R a inférieur à -50000 : mouvements convectifs turbulents, nommés thermiques Ces résultats expérimentaux ont été retrouvés par la théorie. Rayleigh de la CLA On peut caractériser une valeur du nombre de Rayleigh caractéristique de la CLA. Admettons que la surface ait une température supérieure de 1K à l air dans la CLA (ce qui sousestime la réalité observée en journée). On a : ν = 10 5 m 2 /s ; ν θ = 2 10 5 m 2 /s ; g = 10m/s 2 ; α = 1 T = 3 10 3 K 1 (gaz parfait) ; h = 10 3 m. Donc : R acla = 3 10 3 10 (10 3 ) 3 1 10 5 2 10 5 = 1.5 10 17 On est, là encore, dans le régime pleinement turbulent. 2.3 Observation de la CLA et la CMO Du fait de la nature complexe, et en particulier turbulente, de la CLA, de nombreux moyens de mesures expérimentaux ont été développés pour mesurer expérimentalement ses caractéristiques. Ces moyens sont fréquemment déployés lors de campagnes de mesures, allant de l initiative locale à de grandes campagnes internationales, afin toujours de mieux comprendre la physique et la phénoménologie de ces couches. On peut noter 4 grandes catégories d instruments. 2.3.1 Mesures in-situ depuis le sol Ces mesures sont d une part les plus anciennes, d autre part les plus précises et souvent les moins coûteuses. Par contre, elles sont limitées dans l espace. On peut noter, en ce qui concerne l étude de la CLA, on peut noter en particulier : la station météo classique : elle mesure, parfois depuis plus d un siècle, les paramètres près de la surface : température et humidité à 2m, le vent à 10 m de haut, la pluviométrie... le mât instrumenté : afin d étendre les mesures de la surface en altitude, il est commun d utiliser des mâts de mesures (figure 2.7) sur lesquels sont fixés des instruments à différents niveaux. De tels mâts ont été installés à partir des années 20 afin de mesurer

2.3. OBSERVATION DE LA CLA ET LA CMO 27 (a) Mât de mesures (b) Mât sur bateau (c) Mât de mesures en ville Fig. 2.7 Mâts de mesures le profil de vent dans la basse CLA. Les champs observés dépendent de l instrumentation (cela va de l instrumentation opérationnelle classique à des moyens de recherche pour la turbulence ou la chimie). Les plus hautes tours météorologiques instrumentées sont situées à Pékin et Moscou, et font plus de 300 m de haut. les stations chimiques : déployées en routine autour des agglomérations pour quantifier la qualité de l air, certaines sont ajoutées ou complétées lors de campagnes de mesures ponctuelles. les stations de flux turbulents : ces stations sont dédiées à la mesure de la turbulence, et en particulier des échanges turbulents entre la surface (surchauffée en journée) et l atmosphère (qui reçoit cette chaleur). Les flux sont de nature turbulente, et différentes méthodes existent pour les estimer : les stations de flux à partir des profils moyens (figure 2.8(a)) : ces stations mesurent les échanges radiatifs et les gradients de température (et éventuellement humidité) au dessus de la surface (entre 2 et 5m typiquement), afin de déterminer, par des lois classiques, les flux turbulents donnant naissance à de tels profils (méthode indirecte). Elle a l avantage d être peu coûteuse. les stations par corrélations turbulentes (figure 2.8(b)) : ces stations mesurent directement avec des appareils à temps de réponse très rapides les fluctuations turbulentes. connaissant ainsi avec précision la turbulence locale en ce point, on en déduit les flux turbulents qui y transitent. Pour le vent, on utilise des anémomètres soniques, qui permettent d avoir accès à la fois au vent 3D et à la température (en mesurant la vitesse du son). Pour mesurer la turbulence en vapeur d eau, on peut utiliser des krypton (mesure par laser dans la bande lyman-α de l hydrogène, signature dans l atmoshère d eau) ou des analyseurs chimiques déportés (l air étant pompé près de l anémomètre sonique). 2.3.2 Mesures in situ de la CMO Ces mesures sont le pendant des mesures au sol pour la CLA.

28 CHAPITRE 2. INTRODUCTION À LA TURBULENCE (a) Station de mesures de flux turbulents par (b) Anémomètre sonique (haut gauche), krypton méthode des gradients (à droite) (haut droit) et tuyau de prélèvement de l air et analyseur rapide (au centre) Fig. 2.8 Mesures de flux turbulents (a) Bouée ancrée (b) Localisation de bouées ancrées Fig. 2.9 Bouée ancrée Elles sont effectuées le plus couramment par des bouées ou des bateaux. Les bouées sont de deux types : fixes (figure 2.9) ou dérivantes (figure 2.10). Ces instruments mesurent le plus souvent quelques paramètres atmosphériques (pression, température, vent, humidité), et des paramètres de la CMO : houle, température de surface, courant. Les bouées dérivantes permettent un suivi lagrangien de la particule d eau échantillonnée, alors que les bouées fixes

2.3. OBSERVATION DE LA CLA ET LA CMO 29 donnent une vision eulérienne, en un point fixe, au cours du temps. En plus de ces divers paramètres près de l interface océan/atmosphère, les bouées sont souvent équipées d un câble sur lequel sont fixés des capteurs de température et éventuellement salinité, afin de mesurer les profils verticaux de ces paramètres au sein de la CMO (figure 2.10(c)). Il existe aussi des sondes dérivantes automatiques, qui effectuent des mesures à une profondeur fixée en suivant le courant à ce niveau, et qui remontent à la surface périodiquement afin d envoyer leurs données par satellite. (a) Bouée dérivante (b) Principe de la bouée (c) Câble de capteurs sous la bouée Fig. 2.10 Bouée dérivante 2.3.3 Mesures de télédétection Les moyens de télédétections ont un avantage énorme sur les instruments in-situ au sol : ils permettent d observer la structure verticale de tout ou partie de la CLA. De plus, ces mesures sont en général continues dans le temps, en particuliers pour les profileurs les plus simples. Evidement, ces moyens de mesures sont en général moins précis que les moyens in-situ équivalents, et sont plus complexes à mettre en œuvre. On peut noter : les radars profileurs de vent (VHF, UHF, figures 2.11(a) et 2.12 respectivement). Ces radars donnent une vision en continu du profil de vent au dessus (dans la CLA pour l UHF, avec une résolution verticale d environ 100m, sur toute la troposphère pour le VHF). les sodars (figure 2.11(a)). Ces appareils sont similaires à des radars, sauf qu il envoient une onde acoustique au lieu d une onde électromagnétique. Ils permettent de mesurer en continu (dans la limite de la gêne sonore) le profil de vent dans la basse CLA (environ 1km). le RASS : système couplant UHF et sodar, permettant, en mesurant la vitesse du son, d en déduire le profil de température. le lidar : similaire au radar, mais en onde lumineuse (laser en général) au lieu d onde radio. Ils permettent de mesurer divers paramètres, suivant la longueur d onde utilisée :

30 CHAPITRE 2. INTRODUCTION À LA TURBULENCE (a) Profileurs : radar VHF (câbles ; arrière plan) et Sodar Fig. 2.11 Radars, sodars (b) Radar Doppler vent (par effet doppler), vapeur d eau, aérosols, ozone. le radar doppler (figure 2.11(b)) : ces radars permettent de mesurer la vitesse radiale vers le radar. Associés en couple, ils permettent de retrouver le champ de vent 3D. Certains permettent aussi de caractériser les hydrométéores (pluies, neige, grêle, etc...). le télémètre à nuages : moyen de télédétection spécialisé dans la détection de la base des nuages. Modifié, il permet aussi de mesurer la hauteur de la CLA (en détectant les intenses inhomogénéités dans les aérosols au sommet de la CLA). le radar micro-onde : il permet de mesurer des profils de température en continu, jusqu à environ 1km. les scintillomètres : ces instruments à visée horizontale, quelques dizaines de mètres au dessus du sol, mesurent les flux (turbulent) de chaleur (et pour certains d humidité) en provenance de la surface vers l atmosphère. 2.3.4 Moyens aéroportés Les mesures aéroportées sont bien sûr de première importance pour l étude de la CLA, car elles permettent d avoir accès à des quantités et une précision non accessibles par les moyens de télédétection. Par contre, elles sont limités dans l espace et dans le temps, et sont très coûteuses. Un moyen d étendre la zone spatiale couverte par les observations est d embarquer un moyen de télédétection à bord d un avion (lidar, radar). Le vecteur le plus connu pour les mesures aéroportées est l avion, mais il n est pas le seul : montgolfière et ballon habité (juste pour l histoire, ce furent les premiers moyens de mesure aéroporté de l atmosphère). ballons de radio-sondages (figure 2.12) : ce sont les mesures aéroportées de référence. Le ballon et la sonde montent jusqu à ce que le ballon éclate, en général dans la stratosphère. Sont mesurés température, pression, humidité, vent (par suivi GPS de la trajectoire), éventuellement ozone. les ballons plafonnants (figure 2.13) : ces ballons sont lestés de manière à voler à une altitude donnée, par exemple au milieu de la CLA. Ils fournissent alors un suivi lagrangien de la masse d air, en mesurant les mêmes paramètres que les radio-sondages (les sondes sont identiques).

2.3. OBSERVATION DE LA CLA ET LA CMO 31 (a) Fig. 2.12 Radar UHF (à droite) et lâcher de radiosondage (a) Ballon plafonnant avec sa sonde (b) Ballon plafonnant en vol (c) Ballon plafonnant en vol Fig. 2.13 Ballon plafonnant les ballons captifs (figure 2.14(a)) : ces ballons sont retenus au sol par un câble, et permettent des mesures de profils entre le sol et quelques centaines de mètres. Les sondes et le ballon étant récupérés après usage, des mesures plus pointues peuvent être envisagées (par exemple taux de dissipation de la turbulence). Des charges jusqu à 100 kg ou plus peuvent être utilisées (en fonction du ballon). Le ballon captif ne peut cependant être utilisé que par vent faible.

32 CHAPITRE 2. INTRODUCTION À LA TURBULENCE les planeurs : ce sont les premiers avions à avoir été utilisés dans l observation de l atmosphère, dans les années 20. Ils sont parfois utilisés aujourd hui, en complément d autre avions. Leur avantage principal est le faible coût, mais ils ne sont pas maître de leurs trajectoires et la charge utile est limitée. les avions de recherche (figure 2.14(b)) : les avions sont les seuls vecteurs permettent des mesures in-situ de quasiment n importe quel paramètre (description fine des gouttelettes de nuage, chimie complexe, nombreux paramètres turbulents, etc...), car certains sont de véritables laboratoires volants. les avions de ligne : certains avions de ligne sont équipés de capteurs de vent, pression et température, permettant, au dessus des aéroports importants, de connaître la structure de la CLA. (a) Ballon captif (b) Vol avion en basses couches Fig. 2.14 Ballon captif, avion 2.4 Conclusions On va être obligé de se donner les moyens théoriques d étudier ces écoulements turbulents de la CLA. la technique de l analyse dimensionnelle, générale en physique mais particulièrement utile dans le cas de la turbulence pour simplifier le problème (peu d équations) la méthode statistique, pour étudier des valeurs moyennes. C est ce que l on fera dans les prochains chapitres. Dans un premier temps, on simplifiera le système qui gouverne les fluides géophysiques afin d obtenir un système qui suffit pour la physique de la CLA ou la CMO (système de Boussinesq).

Chapitre 3 Dérivation du système de Boussinesq L objectif est ici de simplifier le système d équations des fluides géophysiques. En effet, ce système peut décrire des écoulements dans de très grandes gammes d échelles, des vents violents dans la haute atmosphère aux écoulements à très forte pression au fond des océans. Que ce soit pour l étude de la CLA et la CMO, une telle généralité n est pas de mise, ces couches étant relativement fines comparées aux épaisseurs totales de l atmosphère et de l océan. Une simplification physiquement raisonnable de ces équations va permettre d aboutir à un système plus simple : le système de Boussinesq. 3.1 Le système de Boussinesq pour la CLA sèche On va d abord travailler sur l air sec, sans vapeur d eau, afin de simplifier l approche. On part des équations générales pour l atmosphère sèche : dρ dt = ρ.u du dt = 1 ρ p + g +ν u 2Ω u dθ dt = ν θ θ + θ T Q p = ρrt T = θ (p/p 0 ) R/Cp Où θ est la température potentielle (i.e. la température corrigée des effets de dilatation ou compression dus à la pression). 33

34 CHAPITRE 3. DÉRIVATION DU SYSTÈME DE BOUSSINESQ 3.1.1 Construction d un état de référence On veut tenir compte du fait que les variations de p, T, θ et ρ sont beaucoup plus faibles que ce qui est permis par ces équations. On va donc linéariser les variations de ces quantités thermodynamiques autour d un état de référence supposé au repos (u = 0), hydrostatique, en équilibre adiabatique (θ = C ste ), sans source externe de chauffage ( Q = 0). L état de référence est indicé r. Il ne dépend que de l altitude z. Il doit vérifier les équations : 0 = 1 ρ r p + g p = ρrt T = θ (p/p 0 ) R/Cp On trouve facilement : { } T r (z) = θ r 1 g C pθ r (z h 0 ) θ r = Constante arbitraire { } Cp p r (z) = p 0 1 g R C pθ r (z h 0 ) { } Cv ρ r (z) = ρ 0 1 g R C pθ r (z h 0 ) p 0 est une pression de référence arbitraire (on peut prendre 1000 hpa), h 0 est l altitude correspondante à p 0, T 0 = θ r et ρ 0 est définit { par p 0 = ρ 0 RT 0. } On peut déja remarquer que le facteur 1 g C pθ r (z h 0 ) varie très peu sur la profondeur { de la CLA. } Par exemple, si z varie de 0 m à 1000 m, ce facteur varie de 1 à 10 1 1000 300 1000 = 0.97. Donc, entre le sol et le sommet de la CLA : la température diminue de 3% (10K), la pression diminue de Cp R 3% = 7 2 3% = 10% (100hpa) la densité diminue de Cv R 3% = 5 2 3% = 7% (0.08 kg/m3 ) 3.1.2 Linéarisation On développe en perturbations par rapport à l état de référence. T = T r (z) + T 1, θ = θ r + θ 1, p = p r (z) + p 1, ρ = ρ r (z) + ρ 1. Les perturbations par rapport à l état de référence, T 1, θ 1, ρ 1 et p 1 dépendent de x, y, z et t. On négligera les termes d ordre 2 faisant entrer en jeu ces quantités. Les composantes du vent seront notées u, v, w. Les termes d advection n étant pas négligeables, ceux-ci seront conservés.