LE VOYAGE VERS MARS 1- LES MOTEURS A IONS



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Transcription:

LE VOYAGE VERS MARS Pour des voyages aussi importants, l équipage devrait emmener avec lui une grande quantité de vivres, et faire totalement confiance à des systèmes de support de vie pour le recyclage de l air et de l eau. Les astronautes devraient également lutter contre les multiples méfaits de l apesanteur (atrophie musculaire, décalcification des os, etc) et les dangers du milieu spatial (rayons cosmiques et tempêtes solaires) vus dans la 2eme partie-. Confinés dans un espace restreint pendant de no mbreux mois, les membres de l équipage seraient de plus soumis à des tourments psychologiques, qui pourraient finir par atteindre des niveaux désastreux. Pour minimiser ou éliminer tous ces inconvénients, la solution serait de diminuer considérablement la durée du voyage. Pour pouvoir faire ceci, nous sommes obligés d utiliser des nouveaux types d engins que nous détaillerons dans cette partie. 1- LES MOTEURS A IONS Des moteurs à ions similaires à celui de la petite sonde américaine Deep Space 1 pourraient être utilisés lors d'un voyage vers Mars. Ces moteurs, dont la puissance est bien supérieure à celle des moteurs chimiques classiques, consomment des gaz neutres comme le xénon. Les atomes sont ionisés et noyaux atomiques produits (ions chargés positivement) sont séparés des électrons avant d'être accélérés puis éjectés par un champ magnétique, ce qui produit en retour une poussée. En sortie de tuyère et pour éviter qu'ils ne reviennent en arrière, les ions positifs sont neutralisés par un flux d'électrons. Les atomes fêtent ces retrouvailles en émettant une belle lueur bleue. Si un moteur à ions ne consomme que très peu de carburant (ce qui allège considérablement le vaisseau) et s'il peut fonctionner de manière continue, sa poussée est cependant très faible. Un vaisseau propulsé par un moteur ionique met très longtemps à prendre de la vitesse et il ne révèle sa puissance que lors des vols de très longues durées. Jour après jour le vaisseau accélère d'un poil et à terme, il peut atteindre des vitesses stupéfiantes, mais pour des trajets très courts, ce n'est même pas la peine d'y penser. Dans le cas d'un voyage vers Mars, les moteurs ioniques seraient donc surtout utilisés par des vaisseaux cargos inhabités placés sur des trajectoires lentes. Le dessin d'artiste ci-dessus représente l'un de ces vaisseaux cargos, capable de transporter 130 tonnes de fret en 6 mois et demi. Ses moteurs ioniques nécessitent une puissance électrique de 10 mégawatt, fournie par des panneaux solaires ou par un réacteur nucléaire.

2-LES MOTEURS NERVA Pour ramener la durée du trajet à quelques mois, on pourrait utiliser un moteur nucléaire de type NERVA. Dans un vaisseau de ce type, on réalise la fission de combustible nucléaire (uranium, plutonium) dans un réacteur, la chaleur produite étant utilisée pour chauffer à 2500 C de l'hydrogène qui est ensuite éjecté à haute vitesse dans l'espace. Les vitesses d'éjection atteintes sont trois à cinq fois supérieures à celles d'un moteur chimique classique, ce qui permet de raccourcir considérablement la durée d'un voyage interplanétaire. Seul inconvénient du système, la nécessite de conserver l'hydrogène à l'état liquide (-217 C) à l'aide d'unités cryogéniques qui consomment énormément d'énergie. Heureusement, le réacteur nucléaire est lui-même une source d'énergie bien plus efficace que les traditionnels panneaux solaires. Il peut non seulement servir à refroidir l'hydrogène, mais il est également capable d'alimenter à lui tout seul les principaux systèmes du vaisseau (moteurs, dispositifs de communication, système de gravité artificielle). Ce type de vaisseau représente la solution idéale pour entreprendre un voyage vers la planète Mars, mais l'envoi d'un réacteur nucléaire dans l'espace sera vraisemblablement très mal perçu par l'opinion publique, pour qui la manipulation de l'atome est un sujet tabou. Le système serait pourtant très sûr. Le moteur nucléaire ne serait allumé que durant la phase de croisière entre Mars et la Terre. Lors du décollage proprement dit, assuré par un moteur chimique conventionnel, le réacteur nucléaire serait inerte. 3- LES MOTEURS A PLASMA Autre solution pour aller plus vite : le moteur à plasma. Considéré comme le quatrième état de la matière. C'est un milieu gazeux très chaud, que l'on peut comparer à une soupe de particules. Electriquement neutre, le plasma est constitué par des électrons qui baignent librement aux côtés des noyaux atomiques auxquels ils ont été arrachés. L'efficacité d'un moteur dépend notamment de la température du gaz qui s'échappe de la tuyère, et avec le plasma, on atteint des sommets. La température d'un plasma atteint les dizaines de milliers de degrés, voire le million de degrés, quand les moteurs chimiques traditionnels atteignent à peine les quelques milliers de degrés. Maîtriser pareille fournaise n'est pas chose aisée et aucun métal, même le plus résistant, ne pourrait contenir du plasma. Dès que le fluide brûlant toucherait les parois métalliques de la tuyère, cette dernière serait instantanément pulvérisée. Pour confiner cet e nfer, les ingénieurs sont contraints à utiliser des champs

magnétiques extrêmement puissants, générés par des matériaux supraconducteurs. Le moteur VASIMR (Variable Specific Impulse Magnetoplasma Rocket ) comporte trois cellules magnétiques montées les unes à la suite des autres. La première cellule reçoit de l'hydrogène - dont la légèreté n'a pas d'égale dans l'univers (si on veut accélérer un gaz dans un moteur, autant prendre celui qui pèse le moins lourd). L'hydrogène est chauffé violemment par des ondes radio, comparables à celles qui réchauffent les aliments dans nos fours à micro-ondes. Excité par le rayonnement radio, l'unique électron de l'atome d'hydrogène se sépare de son noyau et le gaz ionisé se transforme en plasma. Une deuxième cellule amplifie le processus et permet de porter le plasma à la température et à la densité désirée. La troisième cellule fait office de tuyère magnétique en servant d'exutoire au fluide surchauffé, dont la température atteint alors les 50 000 C. Une boite de vitesse, analogue à celle des automobiles, permet de commander le moteur et de choisir le régime le plus approprié. En jouant des manettes, il est possible de faire varier la poussée et la vitesse des particules rejetées par la tuyère. La puissance du moteur VASIMR est telle qu'elle permettrait à un vaisseau de 100 tonnes de rejoindre Mars en moins de trois mois. Le voyage serait réparti en deux phases de durée égale. Pendant la première phase dite d'accélération, le vaisseau prendrait progressivement de la vitesse. L'accélération continue à laquelle l'équipage serait soumis donnerait naissance à une gravité artificielle, faible mais toujours bienvenue pour lutter contre les effets de l'apesanteur. Au milieu du trajet Terre - Mars, le vaisseau effectuerait un demi-tour pour placer son moteur vers sa destination. La deuxième phase dite de décélération, pourrait alors débuter. Il peut sembler étonnant de freiner au beau milieu du trajet, mais le vaisseau est obligé de perdre une bonne partie de sa vitesse afin de pouvoir se placer en orbite autour de la planète. Les chercheurs du centre Johnson de la NASA qui sóccupent de ce project doivent faire face à de nombreux challenges. La production et le chauffage du plasma est l'un d'eux. L'énergie mise en jeu dans le processus de fabrication du plasma est colossale, et les panneaux solaires, habituellement utilisés pour fabriquer de l'électricité sur les vaisseaux actuels, devront être remplacés par des réacteurs nucléaires embarqués. La surveillance du moteur impose également la mise au point de sondes capables de mesurer les principales caractéristiques du plasma tout en supportant son incroyable température. Le fonctionnement du moteur est actuellement étudié grâce à des programmes informatiques qui simulent le comportement de plusieurs millions de particules virtuelles. Les ingénieurs espèrent dépasser rapidement le stade de la simulation, en construisant un petit prototype qui pourrait éter mis en orbite orbite terrestre en

2004. D'après les ingénieurs, si le moteur à plasma ne fonctionne pas trop mal au démarrage, il pourrait être opérationnel pour la prochaine décennie. 4- UN MOYEN DE PROPULSION ECONOMIQUE: LA VOILE SOLAIRE Les voiles solaires représentent un dispositif élégant et original de propulsion. Le soleil émet en permanence des photons (particules composant la lumière), que l'on peut utiliser pour faire avancer un vaisseau. Pour profiter du vent solaire, il suffit de déployer des voiles sur lesquelles s'exercera la poussée infime des photons solaires. Lentement mais sûrement, le voilier spatial se mettra à accélérer. L'accélération sera minime au départ mais cumulée sur des dizaines d'années, elle pourra atteindre des valeurs phénoménales. Ce dispositif est extrêmement économique, puisqu'il ne nécessite ni moteur ni réservoirs de carburant (bien que l'on puisse aussi pousser artificiellement ces voiles solaires avec de puissants lasers basés au sol ou dans l'espace). Mais deux challenges restent à résoudre avant de pouvoir sillonner le système solaire à bord de ces papillons célestes. Les voiles devront être taillées dans un matériau à la fois très léger (pour pouvoir bénéficier au maximum de la poussée des photons solaires) et très résistant (pour éviter les déchirures). Ces structures gigantesques et fragiles, dont l'envergure atteindra facilement la centaine de mètres, devront également être déployées grâce à un mécanisme adéquat, qui pourrait facilement constituer un véritable casse tête pour les ingénieurs. 5- LE MOTEUR A PHOTONS Si les photons émis par le soleil peuvent propulser des voiles solaires, on peut aussi tirer parti du vent solaire, qui est lui constitué de particules chargées. Pour utiliser ces dernières, il faudra déployer une bulle magnétique. La bulle va dévier les particules du vent solaire en recevant en contrepartie une poussée. La création d'un champ magnétique permet de s'affranchir de l'épineux problème de déploiement des voiles

solaires. Une source d'énergie sera cependant requise pour créer et maintenir le champ magnétique porteur. Voyageant à la vitesse phénoménale de 300 à 800 km/s, les particules du vent solaire pourraient transmettre à terme cette vitesse à tout vaisseau doté d'une bulle ou d'un bouclier déflecteur magnétique (qui protégera de surcroît l'équipage des éruptions solaires).