Les possibilités de prévention nutritionnelle des cancers sont réelles mais attention à l interprétation abusive des données scientifiques

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Transcription:

Les possibilités de prévention nutritionnelle des cancers sont réelles mais attention à l interprétation abusive des données scientifiques Il est aujourd hui démontré que notre manière de nous alimenter et la pratique de l activité physique ont des effets sur notre santé et notamment le risque de cancer. Il est toutefois faux d affirmer que la consommation d un aliment, d un nutriment ou d un complément alimentaire en particulier puisse prévenir l apparition d un cancer, surtout lorsque l alimentation dans son ensemble est déséquilibrée. L efficacité de la prévention nutritionnelle des cancers implique la diffusion de messages clairs et validés informant le consommateur ainsi que les professionnels de l alimentation et de la santé sur les facteurs nutritionnels réellement capables d augmenter ou de réduire le risque de cancer.. Il s agit d un enjeu de santé publique important compte-tenu de la diversification des modes de vie et de consommation. De plus, la diffusion de messages approximatifs et controversés, reposant sur des données scientifiques souvent exactes mais mal interprétées ou sporadiques, contribue à la difficulté d éclairer et d orienter le consommateur dans ses choix. Ces questions-réponses rappellent les messages essentiels et clarifient certaines idées fausses. Pour en savoir plus : - Voir sur le site de l Anses le rapport 2011 «Nutrition et cancer» - Voir sur le site de l INCa et du ministère de la santé la synthèse du PNNS NACRe/INCa/DGS 2009 «Nutrition et prévention des cancers» validée par l Afssa, l INPES et l InVS Questions-réponses 1. La nutrition (l alimentation et l activité physique) peut-elle influencer le risque de développer un cancer? Les cancers sont des maladies multifactorielles dont l apparition et le développement font intervenir des facteurs individuels (génétiques,), comportementaux (tabac, alcool, nutrition, exposition solaire ) et environnementaux (polluants, agents infectieux). Les effets de ces facteurs ne sont pas spécifiques la plupart du temps (un même cancer peut être causé par plusieurs substances) mais peuvent être synergiques. Les connaissances sur les causes et les facteurs de prédisposition restent encore incomplètes et font l objet de travaux de recherche (préconisation du plan cancer). On estime que l ensemble des facteurs nutritionnels (alimentation, consommation de boissons alcoolisées, surpoids/obésité et activité physique insuffisante) intervient dans l apparition d un tiers des cancers les plus communs. (voir aussi le plan cancer 2009-2013 mesure 11 «promouvoir des actions de prévention sur les liens entre l alimentation, l activité physique et les cancers»). 2. Quels sont les modes d action des principaux facteurs nutritionnels sur le risque de cancer? Le lien entre cancer et nutrition est assez complexe et peut, de façon schématique, se décomposer en plusieurs modes d actions : 1. Des effets directs de l alimentation : - par un apport en excès de certains nutriments ou aliments dont on a mis en évidence la relation avec le cancer : l alcool, les acides gras trans, ou encore la viande rouge, le sel, - par un déficit en certains nutriments ou aliments, reconnus pour leurs rôles protecteurs contre certains cancers (fruits et légumes, vitamine C, fibres, sélénium ) 2. Des effets indirects de l alimentation qui peuvent être liés à des dérèglements notamment hormonaux induits par le surpoids ou l obésité. 3. Des effets de l exercice physique, notamment hormonaux, mais aussi sur son rôle sur l équilibre énergétique qu il favorise.

Par ailleurs, au delà des facteurs nutritionnels stricto sensus, des effets potentiels peuvent être liés à l apport de contaminants par l alimentation. C est la raison pour laquelle la réglementation a fixé des limites maximales de résidus (LMR) pour tous les contaminants susceptibles de présenter un risque pour la santé (résidus de pesticides, métaux lourds, ). Des contrôles sont très régulièrement effectués par les autorités publiques pour s assurer du respect de ces valeurs limites. 3. La pratique d activité physique a-t-elle un effet sur le risque de développer un cancer? Il existe une relation entre activité physique*, sédentarité et le risque de plusieurs cancers, en particulier les cancers du côlon, du sein et de l endomètre. L effet bénéfique de l activité physique sur le risque de cancers pourrait être lié à la diminution des taux circulants de diverses hormones (notamment les œstrogènes) et facteurs de croissance. L activité physique a par ailleurs un effet sur l accélération du transit intestinal, réduisant ainsi l exposition des voies digestives aux cancérogènes d origine alimentaire, ainsi que sur la stimulation de l immunité. De plus, l activité physique contribue à diminuer le risque de prise de poids, de surpoids et d obésité, eux-mêmes facteurs de risque de plusieurs cancers. Cet effet bénéfique peut être obtenu par la pratique régulière (au moins 30 minutes par jour, 5 jours par semaine) d une activité physique d intensité modérée comparable à la marche rapide. En France, selon les études, il est estimé que 21 à 37 % des adultes n atteignent pas cette recommandation. * L activité physique recouvre l activité physique professionnelle (travail en exploitation agricole, manutention ), domestique (travaux ménagers, jardinage ), de loisir (jogging, danse ) et celle liée aux transports (à pied, à vélo ). 4. L obésité et même le surpoids peuvent ils favoriser l apparition d un cancer? Le surpoids et l obésité augmentent le risque d apparition de nombreux cancers (notamment œsophage, pancréas, côlon, rectum, endomètre, rein, sein après la ménopause), notamment par le biais de dérégulations métaboliques et hormonales. En France, le surpoids (obésité exclue) concerne 31,4 % des adultes et l obésité 11,6 % (données issues de l étude INCA 2). Une alimentation trop riche en énergie et le manque d activité physique contribuent fortement au développement du surpoids et de l'obésité. Ainsi, pour prévenir le surpoids et l obésité il est notamment recommandé de pratiquer au moins 30 minutes d activité physique (de même intensité qu une marche rapide) 5 jours par semaine et de limiter les activités sédentaires (comme celles pratiquées en face d un écran). Il est également recommandé d avoir une alimentation équilibrée et diversifiée (conforme aux repères nutritionnels du Programme national nutrition santé). 5. La consommation de fruits et de légumes contribue-t-elle à diminuer le risque d apparition de cancers? L effet protecteur des fruits et des légumes vis-à-vis de certains cancers est lié à leur composition en constituants qui présentent des effets bénéfiques sur la santé, notamment certains nutriments comme les fibres, les vitamines et les minéraux et d'autres microconstituants comme les polyphénols. Ainsi, la consommation de fruits et de légumes est associée à une diminution du risque de cancers. De plus, la consommation de légumes contribue à diminuer le risque de surpoids et d obésité. Il est recommandé de consommer 5 portions de fruits et légumes par jour (PNNS), soit environ 400 g/jour. En France, 57 % des adultes n atteignent pas cette recommandation et la consommation moyenne de fruits et légumes en France pour un adulte est de 283 g/j, soit 3,5 portions (INCA 2). Par ailleurs, il convient de mentionner que pour prévenir les risques liés aux résidus de pesticides, la réglementation européenne fixe des limites maximales de résidus (LMR) pour tous les contaminants susceptibles de présenter un risque pour la santé. 6. Existe-t-il des fruits ou des légumes ou des aliments «anticancers»? Certains aliments sont mis en avant pour leur richesse en molécules (ex : vitamines, minéraux, antioxydants ) dont l effet sur le cancer a été observé expérimentalement chez l'animal ou in vitro sur des cellules isolées. Il s agit notamment de certaines baies (myrtille, cassis, ), la grenade, l oignon, le brocoli, qui sont ainsi parfois qualifié d aliments «anticancers».

L expression «aliment anticancer» est trompeuse : elle peut laisser croire que la consommation d un aliment en particulier peut empêcher le développement d un cancer, voire le guérir, ce qui est totalement faux et infondé. En effet, aucun aliment, quelle que soit sa composition nutritionnelle, ne peut, à lui seul, s opposer au développement d un cancer ou de toute autre maladie. Du point de vue de la prévention des cancers, il est nécessaire de raisonner de manière globale et ainsi, seule une alimentation équilibrée et diversifiée avec un apport calorique adapté aux dépenses énergétiques jointe à une activité physique régulière peut contribuer à réduire le risque. En outre, le développement des pathologies, et en particulier celui du cancer, fait intervenir un très grand nombre de facteurs, dont certains sont indépendants de notre alimentation. 7. Peut-on parler d un «régime anticancer»? Cette expression, largement utilisée dans les média et certains ouvrages, sous-entend que les aliments que nous consommons agiraient comme des médicaments. Cette affirmation est fausse, scientifiquement infondée, voire dangereuse. En effet, aucun régime alimentaire ne peut se substituer à un traitement médical, quelle que soit la maladie. Pour les facteurs nutritionnels, seuls une alimentation et une activité physique régulière conformes aux repères nutritionnels du PNNS et une réduction de la consommation d alcool, (contribuant aussi à la prévention de l excès de poids et des pathologies cardio vasculaires) peuvent réduire le risque de développer un cancer, sans le supprimer totalement. Le développement des cancers fait en effet intervenir d autres facteurs comportementaux (tabac, exposition au UV), des facteurs individuels (génétiques, hormonaux ) et environnementaux (polluants, agents infectieux ) indépendants de notre alimentation. 8. Plus généralement, existe-t-il des fruits ou des légumes dont il faut privilégier la consommation dans le cadre de la prévention nutritionnelle des cancers? Certains légumes ou fruits contiennent des microconstituants (comme certains composés soufrés de l ail ou les indoles des légumes crucifères tels que le choux et le brocoli) dont les propriétés antitumorales ont été observées expérimentalement chez l animal ou sur des cellules isolées. Cependant, en l état des connaissances, il est impossible d extrapoler ces résultats au développement des cancers chez l Homme. L'approche dite «portfolio» qui évalue l ensemble des données issues de différentes méthodologies (études épidémiologiques d observation ou d intervention, études sur animaux ou sur cellules) confirme qu'il n'existe pas d'aliment ou de nutriment qui puisse être directement impliqué de façon isolée dans la prévention d'un cancer. Tous les fruits et légumes, compte tenu de leur composition variée, présentent un intérêt car ils permettent de diversifier le régime tout en apportant l ensemble des micronutriments dont l organisme a besoin. 9. Certaines plantes aromatiques ou épices, comme le curcuma, le thé, le thym, le persil, l ail, ont-elles un intérêt particulier vis-à-vis de la protection du cancer? Comme pour les fruits et les légumes, certains microconstituants des plantes aromatiques et épices (comme les flavones du thym et du persil, les catéchines du thé, les polyphénols du curcuma) présentent des propriétés potentiellement intéressantes, mais les effets n ont été observés qu expérimentalement chez l animal ou sur des cellules isolées. En l état actuel des connaissances, on ne peut pas affirmer que la consommation de ce type de plantes ou d épices présente un intérêt spécifique dans la prévention des cancers chez l Homme. 10. La consommation d alcool favorise-t-elle l apparition des cancers? Toutes les boissons alcoolisées (vin, bière, spiritueux ) contiennent de l alcool qui dans l organisme se transforme en un composé génotoxique. La consommation de boissons alcoolisées augmente le risque d apparition de cancers de la bouche, du pharynx, du larynx, de l œsophage, du côlon-rectum, du sein

et du foie. De plus, la consommation d alcool modifie la perméabilité des muqueuses (au niveau de la bouche, du pharynx, du larynx et de l œsophage), ce qui favorise l absorption d autres molécules cancérogènes, notamment celles de la fumée du tabac. Enfin, une consommation élevée d alcool entraîne des déficits nutritionnels en certaines vitamines, notamment les folates, qui jouent un rôle capital dans l'intégrité de l'adn. En matière de prévention des cancers, il est recommandé aux buveurs de réduire leur consommation de boissons alcoolisées, l'augmentation du risque étant significative dès une consommation moyenne d'un verre par jour. 11. La consommation en excès de viandes rouges et de charcuteries favorise-t-elle l apparition de cancers? La viande rouge contient du fer héminique et la charcuterie contient des sels nitrés dont la consommation en excès favorise l apparition des cancers du côlon et du rectum. Il est recommandé de limiter la consommation de viandes rouges à moins de 500 g/semaine et de réduire la consommation de charcuteries. Il est conseillé d alterner avec des viandes blanches, des œufs, du poisson et des légumineuses associées à des céréales. En France, la consommation moyenne de viandes rouges chez l adulte est de 370 g par semaine (53 g par jour) et celle de charcuteries est de 270 g par semaine (38 g par jour). Un quart des adultes (39 % des hommes et 13 % des femmes) consomment plus de 500 g de viande rouge par semaine. 12. Une alimentation riche en sel favorise-t-elle l apparition du cancer de l estomac? Le sel, consommé en excès, peut provoquer des altérations de la muqueuse gastrique et agir en synergie avec d autres facteurs de risque de cancer de l estomac. L Organisation mondiale de la santé (OMS) recommande de ne pas dépasser un apport quotidien de 5g/jour. En France, les apports moyens en sel sont chez l adulte de 8,5 g/jour (INCA 2) ; 67 % des hommes et 26 % des femmes ont des apports supérieurs à 8 g/jour, L objectif du PNNS est de réduire dans un premier temps ces apports à moins de 8g/j chez les hommes et moins de 6,5g/j chez les femmes et les enfants. Il est recommandé de limiter ses apports de sel, notamment issus de la consommation d aliments transformés salés (charcuteries, fromages, snacks divers, plats préparés) et de l ajout de sel à la cuisson ou dans l assiette. 13. Le mode de préparation des aliments a-t-il un effet sur le risque de développer un cancer? La transformation culinaire, même domestique, peut entraîner la formation de substances potentiellement cancérogènes, essentiellement lors de cuissons intenses et prolongées (fritures, grillades, barbecue ). Ce n est pas le cas dans des conditions correctes d utilisation des divers modes de cuisson. Toutefois, les données chez l Homme sont encore limitées. 14. Une supplémentation du régime en microconstituants végétaux ou en nutriments antioxydants peut-elle prévenir l apparition d un cancer? L effet protecteur des antioxydants a été suggéré dans certaines études d observation et des études mécanistiques (in vitro ou sur un modèle animal). Cependant, cet effet est rarement retrouvé dans les études en population générale, car il a été principalement observé dans des sous-populations particulières (populations carencées ou déficitaires). Au contraire, dans certaines conditions, la supplémentation en antioxydants peut augmenter le risque de cancer. Par exemple, la supplémentation en bêta-carotène chez les fumeurs augmente le risque de développer un cancer du poumon. Dans une perspective plus globale, il est donc important de souligner que la supplémentation en antioxydants, microconstituants ou micronutriments pourrait présenter plus de risques que de bénéfices. De plus, les besoins nutritionnels en microconstituants, micronutriments et antioxydants peuvent être satisfaits par une alimentation équilibrée et diversifiée, et ne nécessitent pas la prise de compléments alimentaires.

15. Un apport en vitamines et/ou en minéraux supérieur aux apports nutritionnels conseillés peut-il prévenir l apparition des cancers? Les vitamines (vitamines A, C, E, folates ou vitamine B9, béta-carotène, etc.), les minéraux (fer, calcium, magnésium, sodium, potassium, chlore, phosphore) et les oligoéléments ou éléments trace (cuivre, iode, sélénium, etc.) sont impliqués dans diverses fonctions de l organisme. Pour chacun de ces micronutriments, les besoins de l organisme sont connus et peuvent être couverts par une alimentation diversifiée et équilibrée, privilégiant la consommation d aliments riches en vitamines et minéraux (tels les fruits et les légumes). Un apport supplémentaire par des compléments alimentaires est donc inutile et peut présenter des risques, d autant plus qu il s agit souvent de cocktails de substances pour lesquelles ni l interaction, ni la synergie ne sont connues. Ainsi, il n est pas recommandé d avoir recours à des compléments alimentaires, sauf dans certaines situations particulières de déficit ou de besoin accru, objectivées par un suivi médical. 16. L allaitement diminue-t-il le risque d apparition de cancers du sein chez la femme? L allaitement diminue le risque d apparition du cancer du sein par le biais de mécanismes hormonaux et par l élimination des cellules potentiellement cancéreuses à la fin de l allaitement. Il est recommandé d allaiter son enfant idéalement pendant 6 mois et si possible de façon exclusive. 17. Peut-on établir un lien entre la consommation d'un type d'aliment ou de nutriment et un cancer à partir d une seule étude? La relation entre un facteur nutritionnel et le risque de cancer est difficile à mettre en évidence, pour diverses raisons liées : - à la complexité de la maladie ; - à la complexité et la diversité des facteurs nutritionnels et de leurs mécanismes d'action ; - aux interactions entre les facteurs nutritionnels au sein d'un aliment et au sein d'un régime global ; - aux interactions entre les facteurs nutritionnels et les autres facteurs environnementaux ou individuels. Ainsi, il est nécessaire de disposer de résultats issus de nombreuses études, réalisées avec des approches complémentaires (épidémiologique, mécanistique). Ensuite seule l évaluation de l ensemble des résultats disponibles permet d établir un lien entre un facteur nutritionnel et l apparition d un cancer. 18. Que doit-on retenir de l analyse des relations entre la nutrition et l apparition des cancers? Les liens entre l alimentation et les cancers sont complexes et ne peuvent être mis en évidence que par l accumulation de données issues de divers types d études : expérimentales chez l animal et in vitro, épidémiologiques, cliniques. Une seule étude, quelle qu en soit la méthodologie, ne suffit pas à établir l existence d une relation causale entre un facteur nutritionnel et le risque de cancer. Il existe des relations entre la façon dont nous nous alimentons et le risque de développer un cancer, mais il n existe pas d aliment ou de nutriment «anticancer». Seule une alimentation équilibrée avec un apport calorique adapté aux dépenses énergétiques, et diversifiée peut diminuer le risque d apparition d un cancer. De façon plus précise, il est recommandé de limiter la consommation d aliments denses énergétiquement favorisant le risque de développer un surpoids. De plus, les consommations de viandes rouges, de charcuteries, de sel et d aliments salés, impliquées dans l apparition de certains cancers doivent être limitées et la consommation des boissons alcoolisées doit être réduite. Il est par ailleurs recommandé de privilégier la consommation de fruits et légumes qui contribuent fortement à la couverture des besoins en micronutriments et à diminuer la densité énergétique du régime alimentaire.

Enfin, une activité physique, de même intensité qu une marche rapide, d au moins 30 minutes par jour et 5 jours par semaine permet de limiter la prise de poids et le risque d apparition d un cancer. 19. La consommation de poissons a-t-elle un impact sur le risque de développement d un cancer? Les poissons représentent une source importante d acides gras oméga 3 et de vitamine D et le PNNS en recommande une consommation au moins 2 fois par semaine. Toutefois, certaines espèces de poissons peuvent par ailleurs, selon leur provenance géographique, contenir des substances, dues à la pollution des eaux, pouvant représenter un risque cancérogène. Afin de profiter des bienfaits de la consommation de poissons sur la santé d'une manière générale, l'anses recommande la consommation de 2 portions de poisson par semaine, dont une d un poisson riche en oméga 3, en variant les espèces et les lieux d approvisionnement. Cette consommation permet une couverture optimale des besoins en nutriments tout en limitant le risque de surexposition aux contaminants chimiques. 20. Une alimentation riche en lipides favorise-t-elle l apparition de cancers? Le lien entre une alimentation riche en lipides et l apparition des cancers du sein, colorectal et de l endomètre est parfois évoqué. Toutefois, cette relation pourrait n être due qu au déséquilibre énergétique lié à une consommation en excès de lipides et à son impact sur le surpoids. L Anses rappelle ses dernières recommandations d apport en lipides que compris entre 35 et 40 % des apports énergétiques totaux en privilégiant les acides gras polyinsaturés. En France, 43% des adultes ont des apports lipidiques supérieurs à 40 % des apports énergétiques totaux.