Clémence Ferdinande Coucher de soleil au premier matin 2
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«Trop tard, je t ai aimé.» Saint Augustin 2 3
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A Théodore, mon ami, pour son soutien inconditionnel et ses couchers de soleil ; A Marie-Emeline qui m a patiemment corrigé et donné son amitié ; A Sophie pour m avoir dit un jour que la beauté sauvera le monde 2 5
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N Chapitre 1 Vol pour les Alpes ous entrons dans l aéroport. Azylis ne lâche pas la main de Maman. Devant les bornes d embarquement, Maman me murmure d une voix coupée par l émotion : Je crois que c est le moment Azylis se retient de pleurer. Je la vois lutter contre les larmes. Tu embrasses ton père de ma part, Lili! Ma sœur hoche la tête avec conviction. Maman enchaîne en lâchant un chapelet de recommandations. Azylis acquiesce à chaque nouvel ordre de prudence. Elle aura sept ans dans quelques jours et notre mère a trouvé l occasion suffisamment importante pour nous envoyer chez notre père. Ils ont divorcés lorsque ma sœur avait deux ans, et mis à part quelques contacts vidéo de temps en temps, des textos et des mails, nous n avons pas eu beaucoup d échanges avec lui. Maman nous serre une dernière fois et me dit : Mathilde tu n éteindras ton téléphone qu au dernier moment, d accord? 2 7
Je la rassure d un sourire, j attrape la main de ma petite sœur et m avance vers le lieu d embarquement. Notre semaine dans les Alpes promet d être mémorable. Azylis et moi n avons jamais skié. Etant donné que j ai douze ans, on peut me laisser voyager seule. Azylis par contre, ne peut être laissée sans accompagnateur. J embarque avec elle, dans la partie de l avion prévue pour les enfants. Je suis la plus âgée. Mais je suis avec ma petite sœur. Nous ne sommes assises que depuis cinq minutes, mais maman m a déjà envoyé six messages. Le commandant de bord prend la parole, en nous annonçant que, de l autre côté des hublots, le temps est au beau fixe : Mesdames et messieurs, bienvenue. Je suis votre commandant de bord. Vous êtes à l aéroport Charles De Gaulle à Paris en direction de l aéroport d Annecy. Il fait 14 à l extérieur. Merci d avoir choisi notre compagnie, et bon voyage! Azylis sort sa Nintendo DS de son sac. Je coupe mon téléphone. L avion commence à rouler. Je trouve sa prise de vitesse impressionnante. D un coup l avion se soulève, tel un oiseau d acier. Il prend un peu plus de vitesse et s élève Je prends mon ipod et branche la playlist que je me suis préparée. Nous n avons qu une heure de vol. Les enfants sont calmes, les personnes âgées font des mots croisés, les adultes travaillent sur ordinateurs, les jeunes écoutent de la musique ou regardent des films. J ai hâte de revoir mon père, de retrouver nos souvenirs, sa barbe qui pique, son parfum Tant de petites choses que j ai perdues. La journée s annonce splendide. Papa nous a promis de nous apprendre à skier. Nous allons tous les jours aller au restaurant, assister à une descente au flambeau, faire les boutiques, et vivre les plus belles vacances de notre vie. 82
Nous avons préparé notre départ pendant des jours et des jours, pour ne rien oublier. Papa, de son côté, a pensé aux skis et aux équipements. Nous avons choisi nos combinaisons, nos après skis, nos gants Tout! Et tout est rentré dans les deux minuscules valises qui se trouvent audessus de nos têtes. Les chansons défilent. Un vent de panique parcours d un coup les rangs de devant. Une secousse me propulse en avant. Le voyant des ceintures de sécurité s allume. Je réveille Azylis qui s était endormie et lui attache, presque de force, sa ceinture puis boucle la mienne. Le commandant de bord s adresse de nouveau à nous : Mesdames, messieurs, nous avons un problème technique. Et Euh Une des ailes de l avion s est embrasée. Nous allons tenter d atte Les lumières s éteignent d un coup. C est un vrai cauchemar. Azylis s agrippe du mieux qu elle peut à mon bras. J appréhende le moment où l avion va se poser. Une nouvelle secousse se fait ressentir. La ceinture me compresse le ventre, ma tête tape sur le siège avant Autour de moi tout flambe. Je me sens soulevée et emmenée. Je murmure : Azylis * * * Je sens la neige contre mes bras nus. J ouvre les yeux. Ma sœur est là. Juste à côté de moi. Elle grelotte. Un jeune homme s avance vers moi et me dit d une voix brisée : Il ne reste que nous Juste nous trois Le silence s installe. Il nous tend un plaid. Ma sœur se blottie dans mes bras et je nous enrobe toutes les deux dans 2 9
les pans protecteurs de la couverture. Le garçon se lève et cours jusqu à l avion en flamme. Mon téléphone a brulé. Comme toutes mes affaires. Il revient tenant à bout de bras un morceau d avion à moitié calciné : Je m appelle Yaël. J ai dix-huit ans. Moi c est Mathilde et j ai douze ans. Et ma sœur s appelle Azylis et elle en a six. Fièrement, la petite fille se redresse et dit : Demain, j aurais sept ans. Un long silence s installe entre nous trois, derniers survivants du vol. Un long silence auquel seul le sombre manteau de la nuit qui tombe répond. Yaël reprend la parole : Je n ai plus mon téléphone. Tout a brûlé. Je viens de Bretagne et j allais rendre visite à une amie Yaël attise notre curiosité. Azylis demande avec la simplicité des jeunes enfants : Une amie ou ta petite amie? Yaël esquisse un sourire. Il ne répond pas tout de suite. Seulement, ma petite sœur insiste tant et tant qu il n a pas d autre choix que d accéder à la demande de cette petite fille. Et puis, il se dit surement qu elle n a pas conscience de ce qu il vient de se passer Je ne vais pas te raconter ma vie, Azylis, elle n est pas passionnante. Ma petite sœur s indigne : On risque d attendre longtemps! Et puis, j aime bien les histoires Yaël sourit à nouveau. J avais treize ans lorsque j ai rencontré Amélia. Je n avais aucun intérêt pour les études. Je ne comprenais pas vraiment ce que je faisais là. Les cours me passaient au- 10 2