Prédication du pasteur Gordon Margery à Faremoutiers, le 9 février 2014 1 Introduction La conversion de Saul Actes 9 Après la Pentecôte, c'est certainement l'événement le plus important dans toute l'histoire de l Église. Il est raconté cinq fois dans la Bible, une fois dans la lettre de Paul aux Galates, une fois dans 1 Corinthiens 15, avec peu de détails, et pas moins de trois fois dans les Actes des Apôtres. Je parle bien sûr de la conversion de Paul. On trouve le récit pour la première fois dans les Actes des Apôtres, au chapitre 9. Ce livre, on pourrait presque l'appeler les Actes de Jésus volume 2. Volume 1 : l'évangile de Luc. Volume 2, du même auteur, ce que Jésus a continué de faire à travers les apôtres. Et, en écoutant le récit, vous remarquerez qu'il parle non seulement de ce persécuteur de l Église qui se convertit et de deux chrétiens qui ont joué un rôle remarquable au début de sa vie chrétienne : le passage parle aussi de ce que le Seigneur Jésus fait lui-même. Lecture Actes 9.1-30 Je suis curieux. Je me pose donc la question : pourquoi donner tant de place à cette conversion, alors qu'il y en a eu tant d'autres? Une réponse facétieuse, ce serait de dire que Luc et Paul étaient amis et que Luc lui fait une fleur. Tous les deux étaient des hommes cultivés. Ils ont ont beaucoup voyagé ensemble, ils ont fondé des Églises ensemble, ils ont souffert ensemble pour le nom de Christ. Ça suffit comme réponse, l'amitié? Bien sûr que non. Nous avons affaire à un auteur sérieux qui a récolté énormément d'informations et qui a choisi les éléments les plus importants pour raconter une histoire suivie. C'est l'histoire de ce qui s'est passé après l'ascension de Jésus, c'est le récit qui va porter l'évangile de Jérusalem en Judée, de la Judée en Samarie, de la Samarie sur la terre des Grecs et jusqu'à Rome. Et dans la deuxième partie de cette immense aventure, celui qui deviendra l'apôtre Paul jouera un rôle primordial. Et le Saint-Esprit? S'il a inspiré l'auteur, c'est dans un but. Dans un double but, je dirais, un but stratégique et un but spirituel. Le but stratégique, c'est de fonder le ministère de Paul, non seulement pour ses voyages missionnaires, mais pour son enseignement et son autorité en tant qu'apôtre. Derrière cette conversion vous avez le quart du Nouveau Testament, si on parle des lettres de Paul, la moitié si on parle aussi des compagnons de Paul. Une conversion et une rédaction hautement stratégiques, donc.
Prédication du pasteur Gordon Margery à Faremoutiers, le 9 février 2014 2 Mais aussi un but spirituel. Les récits historiques de la Bible nous font réfléchir pour notre propre compte. Suis-je prêt à obéir comme Ananias, à être l'agneau qui va dans l'antre du loup? Ai-je la foi d'ananias, qui a dit, sans l'ombre d'une hésitation : «Saul, mon frère»? Ai-je le discernement et la générosité d'un Barnabas, qui prend Saul avec lui et qui dit aux chefs de l Église : «Non, ce n'est pas une taupe, il n'a pas de micro ou de caméra cachée, c'est un frère»? Est-ce que moi j'ai besoin de me convertir comme Saul? Et est-ce que moi je suis capable de répondre à l'appel de Dieu comme Saul l'a fait? L'enjeu stratégique Regardons un peu plus dans le détail l'enjeu stratégique. Au verset 16, le Seigneur dit à Ananias : «Va, car j'ai choisi cet homme pour me servir : il fera connaître qui je suis aux nations étrangères et à leurs rois, ainsi qu'aux Israélites.» Cela nous paraît peut-être banal, mais jusqu'alors la mission des apôtres s'est limitée au seul peuple juif et à leurs cousins, les Samaritains. L'apôtre Paul sera le grand porte-drapeau de l'évangile en terre païenne, tout en ayant un ministère auprès de son propre peuple. Nous avons ici l'annonce non seulement de ses voyages missionnaires, mais aussi de son ministère d'enseignement. Lui même en parlera quelques années plus tard : «Le message que je vous ai annoncé n'est pas le fruit d'une pensée humaine. Car je ne l'ai reçu d'aucun homme, personne ne me l'a enseigné ; c'est Jésus-Christ qui me l'a fait connaître.» Et encore : «Dieu m'avait mis à part dès avant ma naissance et, dans sa grâce, il m'a appelé à le connaître» (Ga 1.11-12, 15). Je souligne ici la souveraineté de Dieu, l'initiative de Dieu. Personne ne s'improvise apôtre. Personne sauf Christ ne nomme les apôtres. Cela vient de Dieu. Et dans un but précis : faire connaître le message de Jésus-Christ, être l'agent de la révélation de Jésus-Christ, annoncer à tous l'évangile de Jésus-Christ. Au sens fort et biblique du mot, les apôtres du 1 er siècle étaient uniques. La conversion de Paul Disons un mot maintenant sur la conversion de Paul. Il était assez courant à l'époque que les Juifs portent deux noms, l'un hébraïque ; l'autre grec ou romain. C'est ainsi que Saul Scha-oul se fait appeler Paul en terre grecque. Mais ce changement de nom est très commode pour symboliser le grand changement que le Seigneur a opéré dans sa vie. Le grand traditionaliste, l'ultraorthodoxe, l'ardent défenseur de la culture juive est devenu un disciple de Jésus- Christ et l'homme de l'ouverture envers le monde païen. Comment?
Prédication du pasteur Gordon Margery à Faremoutiers, le 9 février 2014 3 Nous avons l'impression d'une conversion subite, et cette impression n'est pas fausse. Paul ne s'attendait pas à se convertir à Christ. Sous l'empire romain, le grand-prêtre de Jérusalem avait autorité en matière de religion sur les Juifs de partout. Paul est en train de pourchasser ces abominables hérétiques que sont les chrétiens, c'est un grand inquisiteur. Il arrête des gens, il les emprisonne, il les expatrie vers Jérusalem, il vote même leur mise à mort. Mais derrière cette conviction et cette haine apparemment inébranlables il y a des failles. Il combat ce qu'il craint. Il connaît le message des apôtres. Il a vu comment Étienne est mort, ses dernières paroles restent gravées dans sa conscience : «Je vois le Seigneur pardonne-leur... Seigneur Jésus, reçois mon esprit.» Il a vu la foi et la constance d'innombrables chrétiens comme vous et moi. Il connaît les Écritures, il a dû entendre la façon dont les chrétiens les interprétaient. Mais si jamais le doute l'effleure, il le refoule, profondément. Il y a des aiguillons, des piques. Il n'en tient jamais compte. Puis s'est produit ce que personne ne pouvait prévoir : la révélation de Jésus-Christ, la vision de Jésus-Christ ressuscité, glorifié. Étienne a prié pour ses meurtriers. Les chrétiens ont sans doute prié pour celui qui les persécutait, parce que c'était un ordre du Maître. Peut-être que le Seigneur a lui-même suscité ces prières. Mais à coup sûr, la révélation faite à Paul sur le chemin de Damas ne dépendait ni de Paul ni de l Église. C'était le Seigneur. Sur le chemin de Damas, puis à travers Ananias. Une conversion forcée, donc? Pas tout à fait. La souveraineté de Dieu n'annule pas la responsabilité humaine. Ce sont deux façons complémentaires de regarder le même événement. Dans cette maison de la rue droite, Saul prie. Il cherche à comprendre. Il repasse en mémoire tout ce qu'il sait sur ce Jésus qu'il persécutait. Il prie encore. Il ne mange pas. Il est dans la repentance. Il croit, même... mais il ne sais pas comment faire désormais. Et Ananias l'aide à franchir la dernière étape. Saul dit à ce frère qu'il veut croire. Il accepte que ce frère prie pour lui. Il reçoit le Saint-Esprit. Il se fait baptiser, un vrai baptême de repentance et de foi en Christ. Et tout de suite après il rejoint les disciples qu'il était venu pourchasser. Il n'imagine même pas qu'il puisse appartenir au Seigneur sans appartenir à ses frères. Et tout de suite il témoigne. Les leçons de cette conversion Qu'est-ce que cela nous dit, à nous, tout cela?
Prédication du pasteur Gordon Margery à Faremoutiers, le 9 février 2014 4 Et d'abord ce qu'il ne nous dit pas. C'est un récit historique. Il a trouvé place dans notre Bible parce que l'événement est tout à fait exceptionnel et hautement stratégique, pas parce que tout serait à copier. Le texte n'enseigne donc pas qu'il faut tuer deux ou trois chrétiens avant de se tourner vers Christ, ou qu'il vaut mieux être voleur, ou drogué, ou tricheur avant de se convertir. L'Évangile est bien pour des assassins, des voleurs, des drogués, des tricheurs, des menteurs, et tout! Mais il est aussi pour des gens qui n'ont pas grand-chose à se reprocher, sauf à vivre sans Dieu. Pour des enfants. Pour des gens qui ont reçu une éducation chrétienne. Pour de gentils petits vieux. Pour des gens à qui tout réussi comme pour les gens qui ont l'impression d'avoir tout raté. Ce n'est pas la violence du changement qui compte, c'est la réalité de la repentance et de la foi. Autre chose que ce récit historique n'enseigne pas, c'est que tout le monde doit se convertir au milieu des feux d'artifice d'une révélation foudroyante. Les autres apôtres ne se sont pas convertis comme ça. Des enfants de chrétiens ne connaissent pas toujours un chemin de Damas. Même des athées peuvent se convertir graduellement, imperceptiblement, sur six semaines, comme l'un de mes amis, ou sur six mois. Ce n'est pas l'extravagance de l'action de Dieu qui compte, c'est la réalité de la repentance et de la foi. Qu'est-ce que ce passage enseigne donc qui soit valable pour tous? C'est d'abord une formidable pierre dans le jardin de ceux qui disent que toutes les religions sont bonnes, qu'elles sont toutes pareilles. Elles ne sont manifestement pas toutes pareilles, puisque Saul a dû changer. Elles ne sont manifestement pas toutes bonnes, parce que celle qu'avait Saul jusque là le poussait à combattre la vérité et à encourager le meurtre. Des personnes religieuses peuvent se tromper, peuvent sérieusement se tromper. Même ceux qui sont tout gentils. En lien avec cela, on peut dire qu'avoir une religion ne nous sauve pas. C'est Christ qui sauve. C'est une prédication qui s'appuyait en partie sur la conversion de Saul de Tarse qui m'a convaincu à l'âge de 19 ans que j'avais besoin de d'accepter Christ personnellement. Je ne m'y attendais pas. Je croyais que j'étais bien. En plus, j'étais à l Église un dimanche matin-là. Mais non, la foi de nos parents ne nous sauve pas, les bonnes choses que nous faisons ne nous sauvent pas, la sincérité ne nous sauve pas, des croyances même chrétiennes ne nous sauvent pas. Christ sauve, et notre part, c'est la repentance, la foi, l'engagement à le suivre dans la vie et dans la mort. Si je peux me permettre de tirer une autre leçon de ce récit, ce serait en rapport avec le rôle des chrétiens ordinaires. Ceux qui ont été tirés de leur lit par la police religieuse et qui ont refuser de renier le Christ. Ceux qui ont prié. Ceux qui ont continuer à témoigner à leurs proches.
Prédication du pasteur Gordon Margery à Faremoutiers, le 9 février 2014 5 Je compte Ananias parmi les chrétiens ordinaires. Mais pas si ordinaire que ça, quand on pense au courage qu'il fallait pour obéir à la vision qu'il avait reçue, ou quand on voit les fruits de son obéissance. En tout cas, c'est un exemple pour nous. Obéir, pour un chrétien, c'est une joie! Et cela peut mener loin! Est-ce que j'ose compter Barnabas parmi les chrétiens ordinaires? Pas vraiment. Il a déjà fait un gros don à l Église de Jérusalem en vendant un champ qu'il possédait. Il deviendra un pilier de l Église d'antioche. Il sera le compagnon de Paul et le formateur de Marc, celui qui a écrit l'évangile. C'est de la grosse artillerie, à la fin. Mais ici, ce qu'il fait est tout simple, c'est à la portée de tout le monde. Il accueille. Il entoure. Il encourage ce qui est peut-être normal, étant donné le sens de son nom. Il le fait spontanément, parce qu'il est quelqu'un de généreux. Mais son geste plutôt modeste a un énorme impact. C'est grâce à lui que Paul est accueilli par les autres apôtres. Et nous? L'amour, l'hospitalité, l'accueil, la confiance faite à autrui, l'accompagnement de ceux qui sont plus jeunes dans la foi? Yes, we can! Si nous le voulons. Conclusion Mais ce récit ne parle pas seulement de Saul qui se convertit et de deux chrétiens qui jouent un rôle remarquable au début de sa vie chrétienne : le passage parle aussi de ce que le Seigneur Jésus fait lui-même. Il se révèle, il parle, il sauve, il pardonne, il guide, il inspire, il ordonne! Ce récit ne parle pas seulement de la conversion de Saul en tant que tournant stratégique dans l'histoire de l Église. Il nous donne à réfléchir sur notre propre vie. Et voilà le Seigneur qui me dit : Gordon, lève-toi. Christian, Élisabeth, Gaëlle, David : lève-toi, et va... Est-ce que quelqu'un peut m'indiquer la rue droite à Faremoutiers? Il faut que j'y aille! Amen Temps de questions