Fiche d analyse d expérience

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Fiche d analyse d expérience Titre de l action : prise en charge spécialisée pour les mineurs isolés Thématique :protection des mineurs sans référents parentaux en France Lieu de l action (quartier, commune,..) PARIS Format de la fiche selon cette présentation : 3 à 4 pages 1) Le contexte de l action En préalable il convient d indiquer que le droit français ne connaît pas la notion de minorité ethnique et considère chaque personne comme sujet de droit, sans distinction de son appartenance ou de sa non appartenance à une ethnie donnée. Depuis quelques années, il est fait le constat d une forte augmentation de l arrivée sur le territoire français d «enfants de moins de 18 ans en dehors de leur pays d origine, séparés de leur famille ou de leurs répondants en fonction des lois et coutumes en dehors de leur pays d origine». Cette définition est donnée par le Programme en faveur des Enfants isolés en Europe (PEIE) qui a pour but de «défendre les droits et l intérêt supérieur des enfants et des jeunes isolés, arrivés ou voyageant en Europe, en établissant une politique commune et en s engageant à une bonne pratique aux niveau national et européen». Dans le système judiciaire français le juge des enfants a des fonctions civiles et pénales. Au titre de la protection, il peut prononcer des mesures d assistance éducative «si la santé, la sécurité ou la moralité d un mineur sont en danger ou si les conditions de son éducation sont gravement compromises». Le fait de vivre «à la rue» est un facteur de danger pour les 1

enfants au sens de la loi française. Dans le cadre pénal, le juge des enfants peut également prononcer des mesures éducatives afin de responsabiliser le mineur, de favoriser sa réinsertion sociale et de prévenir la récidive. Les mineurs isolés constituent plus de la moitié des présentations devant les juges des enfants de Paris au titre de la délinquance. Il s agit d une délinquance de survie. Beaucoup vivent dans la rue, certains se prostituent. Leurs conditions de vie nécessitent de pouvoir établir avec eux une relation de confiance qui permette d engager un véritable accompagnement éducatif.. Or jusqu à présent l organisation du tribunal pour enfants ne permettait pas d instaurer un suivi éducatif spécifique tant dans le cadre de la protection que dans le cadre pénal. En effet les tribunaux pour enfants sont organisés de façon territorialisée au sein de chaque département en lien avec le lieu d habitation. Par ailleurs, aucune mesure éducative n était possible en raison de la propension de ces mineurs à fuir toute prise en charge. Pratiquement il n y avait pas d alternative à l incarcération de ces mineurs quand ils étaient présentés au juge à la suite d une infraction. 2) La définition du projet Mise en œuvre d actions visant à la protection des mineurs isolés en difficulté sur le territoire de la république française par la création d un cabinet d un juge des enfants spécialisé pour ces mineurs, d une prise en charge adaptée à leurs difficultés spécifiques et par des accords de coopération internationale. 3) La mise en œuvre 3.1. Le cabinet de juge des enfants spécialisé 2

Le cabinet de juge des enfants non sectorisé a vocation à recevoir tous les mineurs sans domicile, à entendre leurs souhaits et à entamer une vraie démarche éducative avec eux. L objectif de la création de ce cabinet est de permettre l acquisition d une connaissance de ces mineurs : savoir d où ils viennent, connaître leurs conditions de vie et leur donner une représentation exacte de la justice c est à dire la possibilité d identifier le juge saisi de leur cas ainsi que les services éducatifs, les mettre en confiance pour élaborer une prise en charge individuelle. - Le Service Educatif Auprès du Tribunal pour enfants rencontre tous les mineurs présentés en urgence au juge des enfants dans le cadre de poursuites pénales ou de demandes de mesures de protection. Il approfondit les informations les concernant, sert de relais avec les associations de prévention, oriente les jeunes vers des dispositifs de soins, de formation, d hébergement et vont les voir quand ils sont incarcérés. 3.2. La prise en charge adaptée aux difficultés spécifiques des mineurs étrangers isolés - Un réseau d acteurs compétents dans les problématiques diverses de ces mineurs a été développé en fonction de leur origine : asiatique, maghrébine, tzigane, roumaine par exemple. - 1) les associations de rue : pour ces mineurs délinquants ou en en risque de délinquance, l une des difficultés réside dans le repérage. Ce travail de repérage est effectué par des associations de rue qui les accueillent, les mettent en confiance, ont une action de médiation sociale. - 2)les lieux de formation et d hébergement susceptibles de s adapter à la culture d origine de ces enfants et à leur parcours de marginalité - 3)des interprètes - 4)des psychologues si possible parlant la langue maternelle de ces enfants 3

3.3. Les accords de coopération internationale avec la Roumanie Le programme de coopération entre la France et la Roumanie en matière de protection de l enfance a été réaménagé dès le mois de mars 2002 afin de tenir compte de la situation des enfants roumains isolés présents sur le territoire français. Le 4 octobre 2002, un accord spécifique a été signé entre les gouvernements français et roumain. Il vise à prévenir le départ de ces enfants par l organisation d informations, en Roumanie, des dangers de l émigration d enfants seuls, et à résoudre les situations de ces enfants par des mesures de protection en France et, le cas échéant, de retour en Roumanie : leur prise en charge en France, le recueil de renseignements sur leur situation familiale et sociale en Roumanie et le retour dans leur pays avec leur accord et l organisation d un accompagnement éducatif en Roumanie sont prévus. Ce retour peut être réalisé dans leur famille d origine, en famille d accueil ou en institution selon la situation. Un groupe de liaison opérationnelle est créé pour faciliter les échanges directs entre les institutions françaises et roumaines et faciliter le travail de prise en charge et d orientation. L Office des Migrations internationales s occupe de l accompagnement des jeunes en cas de retour. Parallèlement, la coopération juridique qui préexistait à cet accord du 4 octobre 2002 a été adaptée à ces nouveaux objectifs et la direction de la protection judiciaire de la jeunesse a organisé des formations de travailleurs sociaux et de juges à la réalisation d enquêtes sociales.. 4)Résultats et évaluation Bilan après 18 mois de fonctionnement du cabinet du juge des enfants spécialisé pour les mineurs isolés : La liaison avec les association de prévention est bien établie, un vrai partenariat a pu se concrétiser. 4

S il y a encore peu de résultats éducatifs en matière pénale, de nombreux jeunes viennent demander protection dans le cadre de l assistance éducative. Parallèlement ces jeunes commencent à être identifiés par le système judiciaire et sortent de l anonymat. Quand leurs besoins d enfant sont pris en compte, ils ne posent pas de problème de comportement et sont très mobilisés par leur insertion. Il reste toutefois à régler des difficultés d organisation au niveau du tribunal. Un seul juge ne peut assurer cette charge. Une équipe spécialisée pourrait être créée. L outil éducatif doit être développé en terme de moyens humains pour organiser une permanence du Service Educatif Auprès du Tribunal, le nombre de lieux d hébergement est insuffisant et la prise en charge psychologique doit être développée. Cette expérience,articulée autour du triptyque travail avec les associations /un juge des enfants / convention franco-roumaine, tente donc de répondre de manière plus adaptée à ces publics de mineurs isolés inscrits dans la délinquance ou structurés dans l errance. Le travail de mise en confiance, le travail sur l identité et l histoire, la recherche de la famille sont au centre de ce travail. L une des difficultés majeure réside dans le fait que ces mineurs ont souffert du fait d adultes dans leur pays d origine et sont peu familiers de la démarche d aide proposée par le système judiciaire français. C est pourquoi on ne peut pas leur appliquer un accompagnement éducatif traditionnel. Cette expérience démontre la nécessité de la coopération bilatérale dans le cadre de la protection de l enfant afin de prévenir les départs d enfants et de favoriser leur retour lorsqu il est possible, et même d une protection internationale de l enfance afin de lutter contre les réseaux de trafic d enfants. 5)Les perspectives 5

-développer et adapter l outil éducatif pour ces jeunes nécessitant une disponibilité immédiate et un accompagnement physique dans les démarches, pratiques professionnelles auxquelles les services éducatifs judiciaires sont peu habitués -établir des passerelles avec les adultes qui les encadrent ou les parents qui, du pays d origine, les ont envoyés. En réalité les mineurs ne sont pas toujours aussi isolés qu il n y paraît et lorsqu ils veulent sortir du système dans lequel ils se trouvent, ils sont confrontés à un problème de loyauté insoluble, pris entre le besoin de retourner auprès de leur famille et le souhait de cette dernière de les envoyer faire fortune en France. Ainsi, la la nécessité de se concilier les adultes dont ils dépendent est apparue et, le cas échéant, des enquêtes sont réalisées sur leur famille dans le pays d origine, ainsi que cela a été mis en place avec la Roumanie. Il faudrait mettre en place un système d Investigation et d Orientation Educative à l échelle internationale. La convention franco roumaine est une illustration de cette tentative -établir des relations d échange et de coopération avec les juges de la jeunesse des autres pays européens diverses afin de tenter d établir un suivi transfrontalier car nombre de ces enfants se déplacent d un pays à l autre et font l objet de prises en charge.. 6)Contacts et informations utiles : 6

Mme Geneviève Lefebvre 1 er juge des enfants Tribunal pour enfants de Paris 4 boulevard du Palais 75001 PARIS Mr Hervé Hamon Président du tribunal pour enfants de Paris 4 boulevard du Palais 75001 PARIS TEXTES Article 375 et suivants du code civil Ordonnance du 2 février 1945 relative à l enfance délinquante accord franco roumain du 4 octobre 2002 7