Technologie des contacteurs gaz liquide : cas des colonnes à plateaux et à garnissage M. Prévost Version V2/ nov 2006
Structure du cours Partie 1 : Introduction Partie 2 : Mise en contact de Gaz et de Liquide : Colonnes à Plateaux Partie 3 : Mise en contact de Gaz et de Liquide : Colonnes à Garnissage
Partie 1 : Introduction Généralités La conception ou dimensionnement d un appareillage de mise en contact de phases en vue de la réalisation d un transfert de masse n intervient qu en dernier, après une suite d étapes s enchaînant avec logique telle que: ϖ Définition et quantification de l objectif recherché en termes de transfert (ou séparation) ϖ Sélection de la technique de séparation (les données thermodynamiques sont indispensables); ϖ Résolution des bilans matière et énergétique macroscopiques, c est à dire aux bornes d une boite représentant ce que sera la localisation physique de l appareillage au sein du flow-sheet du procédé; ϖ Détermination des conditions opératoires et d éventuelles grandeurs intensives et extensives internes. Alors seulement interviennent ϖ La sélection de la technologie en fonction des acquis précédents et de contraintes éventuelles ϖ le dimensionnement proprement dit pour atteindre les bornes macroscopiques établies avec prise en compte de contraintes additionnelles éventuelles. Seuls les dispositifs dits à contre-courants seront abordés par la suite. Les appareils de mise en contact de phases sont conçus pour répondre de la façon la plus efficace possible aux exigences telles que : assurer le transfert des quantités de matière requises, au meilleur coût, en incluant en outre des notions telles que : La sécurité et stabilité de fonctionnement ; La rapidité d exécution des étapes de démarrage et mise en régime ; La durée potentielle de fonctionnement (corrosion, maintenance,.). Dans tous les cas, la quantité de matière échangée au sein d un appareillage diphasique, notée N, peut être évaluée par N = Surface d échange * (différence de potentiel d échange)* coefficient d échange de matière Il ne faut alors pas s étonner que les appareils soient conçus pour offrir un maximum de surface d échange, compatible avec des conditions hydrodynamiques (débits circulants et leurs propriétés physicochimiques) donnant lieu à une faible résistance au transfert entre phases : hydrodynamique favorable. Dans le cas particulier des échanges de matière entre une phase gazeuse et une autre phase (liquide ou même solide) il est en plus primordial que la perte de charge côté gaz soit aussi modérée que possible afin d éviter des dépenses énergétiques rédhibitoires ou des conditions de pression incompatibles avec les échanges recherchés. Ainsi deux grandes classes ou familles de technologies ont principalement fait l objet d un développement, en fonction du mode de génération de la surface d échange nécessaire à l intensification des transferts de masse : Phase liquide dispersée en film sur interne Phase liquide dispersée en gouttes ϖ Action sur la phase liquide générant un écoulement en film: la phase liquide peut être répartie en film mince sur une surface solide de grande dimension ; cela donne lieu aux appareils dits à film. Selon la géométrie de la surface solide les appareils seront à film tombant ( généralement des plaques ou des tubes verticaux ) à garnissage ( matériaux de remplissage offrant une grande surface d étalement du liquide, comparable à une matrice macroporeuse) ; Action sur la phase liquide générant des gouttes : la phase liquide est dispersée par consommation énergétique en gouttes. Soit l énergie de dispersion est prélevée sur la phase liquide, ce qui conduit à des appareillages à pulvérisation ( type pomme de douche exploitant l énergie de pression du liquide ) soit l énergie est apportée par la phase gazeuse ( effet de friction et de cisaillement due à une vitesse du gaz importante ), conduisant à la famille des éjecteurs venturis à gaz moteur.
Phase gazeuse dispersée ϖ Action sur la phase gazeuse conduisant à la génération de bulles dans un milieu liquide continu : l énergie nécessaire à la création de surface est issue du gaz induisant une perte de charge. Les appareillages peuvent être à plateaux (l énergie nécessaire à la création de surface est issue du gaz induisant une perte de charge) ou du type venturi éjecteur à liquide moteur ( l énergie est prélevée sur la phase liquide qui subit une perte de pression). V L Schématisation d un venturi à gaz moteur aspirant et dispersant le liquide en gouttes L Schématisation d un venturi à liquide moteur alimenté par buse d injection o V Sans être réellement exhaustive, cette vision regroupe la quasi-totalité des technologies utilisées pour la mise en contact intime des phases liquide et gazeuse. Chacun de ces dispositifs de mise en contact de phase sous-entend des performances ou attendus spécifiques à l origine de leurs sélection. Quelle technologie? Il n y a pas de règles générales permettant de s orienter vers une technologie plutôt qu une autre. Par contre, un choix peut être dicté par des conditions de mise en œuvre spécifique à chaque cas d étude. Il sera noté à travers les deux parties suivantes que la phase gazeuse est soumise à une perte de charge plus ou moins importante en fonction de la technologie, de la dimension de l appareil laquelle est liée à l objectif de séparation envisagée. Globalement, il faut d ores et déjà retenir qu une colonne à plateaux induira, toutes choses égales par ailleurs, la perte de charge la plus grande puis par ordre décroissant, les colonnes à garnissage traditionnels, puis à garnissage moderne ou structuré puis les laveurs venturis et autres techniques à pulvérisation. Ces derniers dispositifs ne conduisent qu à un étage théorique dans leur modèle de base alors que les types précédents ne présentent pas cette limitation. Dès lors, la question se pose en termes d acceptabilité et sensibilité de la séparation à une variation de pression subie par le gaz à la traversée de la colonne sans oublier que la surpression, la compression d un gaz, la mise sous vide d un appareil sont onéreuses. Le choix sera alors facilité par les réponses aux questions telles que ci-dessous regroupées et la pratique que l on peut avoir du dimensionnement d équipement: L opération est-elle réalisée sous vide, à pression atmosphérique, sous pression supérieure à la pression atmosphérique? Une perte de charge est-elle supportable? De combien? ( Les schémas sont issus de Techniques de l Ingénieur, pages J 2621-2 et J 3580-21 )
Quel est le devenir de la phase gazeuse après traitement dans l appareil dimensionné? Recyclage? Evacuation à un évent? Poursuite dans le procédé? A-t-on besoin de nombreux étages théoriques pour assurer la séparation souhaitée? Les équilibres entre phases sont-ils sensibles à une variation de pression? Exemples de démarche : Pour une absorption, assurant le traitement par absorption physique d un gaz disponible à une pression donnée proche de la pression atmosphérique (ne pouvant être accrue à un coût modéré), opération d autant plus favorisée que la pression reste élevée, nécessitant n étages théoriques (n > quelques unités) réalisée avec des rapports de débits habituellement rencontrés Il est plutôt conseillé de s orienter vers une technologie à garnissage traditionnel Pour une absorption, assurant le traitement par absorption chimique d un gaz disponible à une pression élevée (exemple de l épuration de gaz naturel par absorption réactive), opération d autant plus favorisée que la pression reste élevée, nécessitant n étages théoriques (n > quelques unités) nécessitant un temps de séjour pas trop court pour atteindre un avancement suffisant des réactions réalisée avec des rapports de débits habituellement rencontrés Il est plutôt conseillé de s orienter a priori, tout en prenant en compte la dynamique de l absorption réactive, vers une technologie type plateaux Pour une distillation, dans des conditions classiques de débit, de pression, de nombre d étages théoriques, opération d autant plus favorisée que la pression reste faible, mais acceptant une variation de pression habituelle ne nécessitant pas un temps de séjour particulier, réalisée avec des rapports de débits habituellement rencontrés Pourquoi ne pas s orienter a priori vers une technologie type plateaux, très bien maîtrisée, fiable Pour une distillation, dans des conditions classiques de débit, de nombre d étages théoriques, opération à réaliser sous vide pour des raisons de sensibilité thermique des produits ou de difficultés de séparation, ne nécessitant pas un temps de séjour particulier, réalisée avec des rapports de débits inhabituels par suite du fonctionnement sous vide S orienter vers une technologie à garnissage traditionnel ou structuré
Pour une désorption de liquide dans des conditions classiques de débit pour ce type d opération, sans contrainte particulière de pression bien que le dégazage soit favorisé pour une faible pression, ne nécessitant pas un temps de séjour particulier, ne nécessitant qu un étage théorique ou guère plus Tenter une colonne à pulvérisation Chaque cas est à étudier avec sa problématique spécifique tenant compte des conditions opératoires, de la physico-chimie des phases, etc Il s agit donc de savoir comment dimensionner les technologies pour les mettre en œuvre dans toute une série de situations. Seuls les dispositifs à plateaux et à garnissages tout particulièrement utilisés dans l industrie seront évoqués par la suite.