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Transcription:

1 Généralités. A partir du Xe siècle, se dressent par centaines dans toute l Europe occidentale des abbayes, des cathédrales et des châteaux. En effet, à cette époque la construction connaît un regain d activité lié à l essor général de l Occident. Au cours du Xe siècle, les grandes invasions instaurent en Occident un climat d insécurité et de peur qui nécessite une protection que le pouvoir central n est plus en mesure d assurer. La féodalité se met progressivement en place et la nouvelle aristocratie construit des châteaux pour imposer une autorité et assurer la sécurité de la population environnante. Le nombre de châteaux élevés à l époque médiévale est colossal. A partir de l an Mil, le nombre de constructions par comté triple tous les cinquante ans! Les XIVe et XVe siècles voient aussi une importante activité de construction. C est tout un monde qui émerge alors, celui des bâtisseurs. Cette période donne lieu à de nombreuses évolutions dans le domaine de la construction. Le castellologue Philippe Durand distingue trois phases de constructions des châteaux forts : la première correspond globalement à l art roman et s étend du Xe au milieu du XIIe siècle, la seconde du milieu du XIIe à la fin du XIIIe siècle, et la troisième couvre les XIVe et XVe siècles. Les vestiges de l époque ainsi que les sources écrites nous apprennent que si l homme du Moyen-âge a la folie des grandeurs, le développement des arts et des techniques met surtout en lumière, une fois de plus, une époque trop souvent considérée comme barbare et peu éclairée. 2 La construction d un château fort. Projet et implantation. Le commanditaire d un chantier est appelé «maître d ouvrage». Il s agit en général d une personne physique ou morale importante et fortunée. Les châteaux forts voient le jour par la volonté d un seigneur de s installer sur un site pour différentes raisons : économiques, stratégiques ou militaires. Mais la construction d un château revêt également un caractère symbolique. Elle permet au Seigneur de faire la démonstration de son pouvoir, d assoir son autorité voire d impressionner d éventuels ennemis. On privilégie un lieu sur lequel on trouvera les matériaux nécessaires à la construction, car au Moyen-âge les transports effectués par les bœufs ou les chevaux sont lents et coûtent cher. Le maître d ouvrage choisit ensuite un maître d œuvre (cf page suivante) pour diriger le chantier. Enfin, le maître d œuvre peut présenter, selon les recommandations du maître d ouvrage, le projet de construction avec un dessin voire une maquette (en bois, plâtre, pierre ou cire). Le plan de St Gall (Suisse) daté de vers 820 est le plus ancien dessin de bâtiment médiéval sur parchemin conservé. Les autres traces de documents conservés remontent au XIIIe siècle. Il s agit de dessins aux dimensions imposantes (plus de 4 m) des cathédrales de Cologne, Strasbourg, Reims, d Ulm, Vienne, campanile du Dôme de Florence, tour de la façade de Notre Dame de Fribourg en Brigsau Entre le IXe et le XIIe siècles, la France a extrait à elle seule plus de pierres que toute l ancienne Egypte! 1

Les métiers du chantier De nombreux corps de métiers sont présents sur les chantiers médiévaux. Avec la multiplication des chantiers en Europe occidentale, c est tout un monde qui émerge : le monde des bâtisseurs. Ils s organisent en «corporations» et vivent au rythme du chantier. En fonction du matériau qu ils travaillent et du moment où ils interviennent dans la construction, ces artisans peuvent se trouver dans la forêt (les essarteurs, les scieurs de long, les charbonniers ), dans la carrière (les carriers) ou directement sur le chantier (le maître d œuvre, les maçons, les charpentiers, les tailleurs de pierre, les chaufourniers, les couvreurs,). La rémunération des bâtisseurs se fait en fonction du prestige de leur art. Ces artisans spécialisés sont secondés par des ouvriers sans qualification qui effectuent toutes sortes de tâches pour un maigre salaire : porter les matériaux, soigner les animaux, etc. Arrêtons nous sur les principaux métiers du chantier médiéval : Le maître d œuvre Il dirige, contrôle et organise le travail de tous les ouvriers du chantier. Il commande les matériaux nécessaires et il vérifie que la construction s effectue bien selon les plans réalisés par l architecte. Le maître d œuvre trace au sol les contours de l édifice et doit donc bien connaître la géométrie, les tracés et les volumes. Il est souvent un homme de terrain, ancien charpentier, maçon ou tailleur de pierre qui s est distingué par ses compétences et ses qualités. Sur les enluminures, vitraux ou fresques, on reconnaît le maître d œuvre grâce à l instrument qu il tient dans sa main : compas, équerre, bâton Les bucherons Avant de commencer les travaux, ils défrichent et nettoient le terrain. Puis ils abattent et équarrissent les arbres pour approvisionner les charpentiers. Les plus beaux chênes sont utilisés. Le fût (tronc de l arbre) servira aux charpentiers et le houppier (branches) alimentera les fours à tuiles, le four à pain ou encore les feux des ateliers. Les bûcherons utilisent le passepartout (scie à deux poignées); la hache pour abattre l arbre; la doloire pour équarrir les troncs, le départoire (hache très tranchante) pour fendre le bois. Les carriers Ils sont chargés d extraire la pierre des carrières. La pierre la plus dure, de bonne qualité, est transportée dans la loge du tailleur de pierre pour être taillée. La pierre de mauvaise qualité, les déchets de la carrière, sont transportés directement sur le chantier pour remplir l intérieur des murs appelé blocage. 2

Les maçons Les maçons montent les murs de l édifice et assemblent toutes sortes d ouvrages compliqués tels que les voûtes, les arcs, les ouvertures. Le travail des maçons demande une grande précision, garantie par l usage d outils de contrôle. Le pendiculaire par exemple, permet de contrôler l horizontalité de la maçonnerie (voir ci-contre), le fil à plomb la verticalité, et l équerre permet de vérifier que les angles sont bien droits. Le gâcheur de mortier ou chaufournier est l ouvrier conducteur du four à chaux, qui transforme le calcaire en chaux vive. Il prépare ensuite le mortier en mélangeant la chaux à du sable et de l eau. Les Charpentiers Les charpentiers : Ils transforment le bois en pièces de charpente mais aussi en portes, en ponts Les charpentiers réalisent également les ouvrages provisoires nécessaires à la construction : les cintres qui soutiennent les voutes le temps de la maçonnerie, les échafaudages, les engins de levage, etc. Les tailleurs de pierres Ils sont parmi les artisans les mieux considérés, et donc rémunérés, du chantier. Devenir tailleur de pierre nécessite un long apprentissage car ce métier demande technique, précision et rigueur. Les tailleurs de pierre travaillent dans une loge abritée. Ils commencent par donner à la pierre la forme du moellon puis sculptent toutes sortes de décors. Pour tailler les pierres, le tailleur se sert du taillant; du pic; du maillet, du ciseau; et des précieux moles (modèles ou patrons en bois ou en métal, des différentes faces des pierres). Sur chaque pierre taillée on retrouve deux marques, on parle de marques lapidaires. La marque du tailleur est sa signature. Elle permet au maître d œuvre de contrôler la qualité du travail. Les tailleurs de pierre sont payés au nombre de pierres taillées. A la fin de la journée, on relève toutes les signatures pour payer les tailleurs. La marque de pose, quant à elle, indique l emplacement précis où la pierre doit être posée. Le forgeron Il est indispensable sur le chantier car c est lui qui fabrique et répare les outils en métal des bâtisseurs. Au Moyen-âge, le fer coûte très cher et il faut donc l économiser. Ainsi, quand les outils sont usés, le forgeron fait fondre le métal pour en fabriquer de nouveaux. 3

3 Des hommes et des machines. Pour monter les blocs de pierres, des engins de levage sont indispensables. Pour les petites charges (de dix à trente kilos) on se sert de la chèvre. Déjà connue sous l antiquité, elle est composée de trois grandes pièces de bois réunies à leur sommet et formant à leur base un triangle sur lequel est fixée une poulie où se trouve le câble de tirage. Pour les charges atteignant des centaines de kilos, la grue à roue de carrier (cf. ci-contre) est souvent utilisée. Les ingénieurs de l époque construisaient aussi des grues à vis. Sur le grue à roue de carrier, en actionnant la grande roue, on soulève et on fait pivoter la charge afin de la poser à l endroit voulu. La charge est retenue pour éviter qu elle ne retombe, grâce à un frein actionné par un levier. Pour reposer la charge au sol, il suffit de desserrer le frein. En fonction de la hauteur du bâtiment, on pose la grue au sol près du mur, ou bien, sur une plate-forme en hauteur et on la déplace au fur et à mesure de la construction. De nombreux échafaudages sont également présents sur le chantier. Ils sont composés de plateformes horizontales soutenues par un châssis composé de pièces de bois verticales, transversales ou obliques. Les plus fréquents sont les échafaudages encastrés (cf. ci-contre) car ils sont plus solides et plus économiques. Ces structures sont maintenues en place par des poutres dites «boulins» engagées dans le mur. Au fur et à mesure de l avancée de la construction, les maçons réservent des trous carrés à ces poutres. Les boulins peuvent être sciés après leur usage mais ils sont généralement retirés pour être réemployés ailleurs. 4 La géométrie pratique appliquée à la construction. L utilisation de la géométrie pratique sur les chantiers remonte à l antiquité. A partir du XIIe, les principes géométriques de mathématiciens grecs tels que Pythagore, Euclide, Platon ou Thalès sont portés à la connaissance des intellectuels voire de certains bâtisseurs. Ils ne s intéressent pas à la théorie de ces ouvrages mais en tirent des recettes pratiques pour résoudre des problèmes liés à l exercice de leur métier. Leurs démonstrations sont matérielles et expérimentales. Le «nombre d or» ou «divine proportion», utilisé dans la conception des édifices médiévaux, était déjà connu des égyptiens. En observant la nature, ceux-ci s étaient aperçus que la faune et la flore y étaient régies par une proportion. Le corps humain est également régi par cette proportion. Ainsi la longueur du pied est égale au produit de 1,618 par l empan. Sur le chantier, angles droits, arcs et autres figures géométriques sont garantis par l utilisation d équerres, de compas, de règles, et de la corde à treize nœuds. Cette corde est divisée en douze sections de mêmes dimensions, partagées entre elles par des nœuds. En superposant le premier et le treizième nœuds on peut réaliser de nombreuses figures géométriques (triangles, carrés, rectangles...). Elle sert au traçage des arcs et aussi à mesurer car une section mesure souvent une coudée (cf page suivante). Le cordeau est aussi très utilisé. C est l outil simple et pratique sur tout chantier. Lesté, il sert de fil à plomb et définit la verticale. Il permet aussi de tracer, sur le terrain, des cercles de n importe quelle dimension. Il peut matérialiser des droites et reste d usage courant sur les chantiers pour marquer les axes principaux ou les parements des murs. 4

Notre actuel système métrique n existait pas au Moyen-âge. A l époque, les unités de mesure correspondent à certaines parties du corps telles que le pouce, la paume, l empan, la coudée ou encore le pied. Cependant, puisque les mensurations diffèrent d un homme à l autre, on prend comme référence les mensurations du maître d œuvre du chantier. Ces mesures sont ensuite reportées sur un bâton de bois appelé canne d architecte. Chaque ouvrier dispose d une pige, une règle en bois, sur laquelle sont reportées les mesures du maître d œuvre. Zoom Villard de Honnecourt Le carnet de dessins de Villard de Honnecourt est aujourd hui célèbre grâce aux nombreuses reproductions de certains d entre eux dans les ouvrages spécialisés. Villard de Honnecourt serait né autour de l'an 1200, à Honnecourt-sur-Escaut, village situé près de Cambrai. Comme les compagnons de son temps, il fait son apprentissage en allant de ville en ville et de chantier en chantier. Il deviendra plus tard magister latomus, c'est-à-dire maître d'œuvre, profession qui englobe le métier d'architecte. Son activité professionnelle couvre les années 1225 à 1250. Son œuvre unique consiste en un carnet de soixante-six planches de dessins qu il réalise sur les différents chantiers où il est appelé à titre de consultant en raison de ses exceptionnelles connaissances techniques. D'une dimension de 14 22 centimètres, le carnet de Villard de Honnecourt se composait à l'origine d'une centaine de pages. Elles contiennent de nombreux croquis, d'une grande précision, accompagnés de légendes. On y trouve : - des planches naturalistes ; - des représentations de personnages : allégories, scènes religieuses ou civiles ; - des croquis d'architecture et des études géométriques ; - des engins : machines militaires ou de chantier, et même des ébauches de machines à mouvement perpétuel. Ce document est très riche d informations, d autant plus que l auteur, concevant son carnet comme un manuel d enseignement, y indique les procédés techniques utilisés - comme celui qui permet de mesurer une hauteur à distance grâce à un appareil de visée et en appliquant le théorème de Thalès. L autre facette de l œuvre de Villard, son génie d inventeur, a pu le faire surnommer le Léonard de Vinci français. On trouve en effet dans son carnet des plans de machines de guerre, d une scie hydraulique, d un oiseau mécanique ou encore d un chauffe-mains portatif! 5

Lexique Un castellologue : La castellologie(du latin«castellum», château) est l'étude des châteaux du Moyen Age(plus précisément du Xe siècle au XVe siècle). Elle s'intéresse à l'évolution, la fonction, la forme et les relations avec l'environnement des châteaux. Le castellologue est le celui qui étudie cette science. Équarrir : dégrossir une bille de bois, un bloc de pierre afin d obtenir les formes d un parallélépipède rectangle. Un essarteur : est un homme qui défriche une forêt pour en faire une clairière. Au Moyen Age, ce sont les premiers ouvriers à intervenir sur le chantier de construction. Une loge : petite hutte où chaque artisan du chantier s installait. Un moellon : pierre de petites dimensions, brute, ébauchée ou équarrie, employée avec du mortier pour maçonner un mur. Un maillet :grosmarteauàdeuxtêtesutiliséparlessculpteursdepierre. Un ciseau :tiged acieraiguiséeenbiseauàuneextrémitéetqui,frappéeaumarteauouàlamain,sertàtravaillerdesmatières diversescommelebois,lemétaloulapierre. Un parement:estunesurfaceapparented unepierreoud unmur,dansunouvragedemaçonnerie. Un compagnon : est un membre d un compagnonnage qui est association entre ouvriers d une même profession à des fins d instruction professionnelle et d assistance mutuelle. Bibliographie et sites Web - Durand, Philippe, Le château-fort, éditions Gisserot, 1999. - Bernardi, Philippe, Bâtir au Moyen-âge, CNRS éditions, 2011. - Hatot, Thierry, Bâtisseurs au Moyen-âge, une abbaye romane, éditions L instant durable, 1999. - Gimpel, Jean, Les bâtisseurs de cathédrales, éditions du Seuil, 1991. -Erland-Brandeburg A., Pernoud R., Gimpel J, Bechmann R, Carnet de Villard de Honnecourt, Editions Stock, 1994. Activités en lien avec le thème Les bâtisseurs de forteresses, château de Tiffauges L atelier des copistes, Abbaye de Nieul sur l Autize Le métier d enlumineur, Abbaye de Nieul sur l Autize Contacts Conseil départemental de la Vendée Ecole Départementale des Arts et du Patrimoine 40 rue Maréchal Foch 85000 La Roche sur Yon Centre de Ressources : 02 51 34 47 07 Réservations animations : 02 51 65 32 95 Mél : edap@vendee.fr Site Internet : www.edap.vendee.fr 6