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Transcription:

Délibération n 2008-78 du 14 avril 2008 Emploi public Carrière Harcèlement moral discriminatoire appartenance syndicale La haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l égalité a été saisie d une réclamation d un policier municipal qui s estime victime de harcèlement moral discriminatoire. La réclamante allègue que ces faits seraient fondés sur son activité syndicale et l exercice de ses mandats de représentant du personnel. Le Collège constate que les agissements dont le policier a fait l objet depuis plusieurs années ont excédé les limites de l exercice normal du pouvoir hiérarchique et qu ils sont ainsi constitutifs d un harcèlement moral, en dépit de la mauvaise volonté dont aurait pu faire preuve l agent dans l accomplissement de ses tâches qu elle regardait comme injustifiées, ainsi que l allègue l administration. Ce faisant, le Collège souligne que le maire, non seulement s est abstenu de toute mesure susceptible de mettre un terme à cette situation, mais a également cautionné et contribué à ces agissements. Le Collège considère de surcroît qu en reprochant à la réclamante l exercice de ses mandats syndicaux et de représentation du personnel, et en s appuyant sur ces griefs pour bloquer son évolution de carrière, le maire de la commune de Roissy-en-Brie a commis à partir de l année 2005 une discrimination prohibée par l article 6 de la loi du 13 juillet 1983. Le Collège, Vu la loi n 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, et notamment ses articles 6 et 8 ; Vu la loi n 2004-1486 du 30 décembre 2004 portant création de la haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l égalité, Vu le décret n 85-697 du 3 avril 1985 relatif à l exercice du droit syndical dans la fonction publique territoriale, Vu le décret n 2005-215 du 4 mars 2005 relatif à la haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l égalité ; Sur proposition du Président, Décide : 1. La haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l égalité a été saisie, le 22 juin 2006, d une réclamation de Mme D relative aux faits de harcèlement moral dont elle aurait été victime au sein de la mairie de R où elle exerce les fonctions de brigadier-chef principal de police municipale. Elle estime que ces faits, imputables à sa supérieure hiérarchique directe et

couverts par les deux maires successifs de la ville, seraient constitutifs d une discrimination fondée sur son activité syndicale et l exercice de ses mandats de représentante du personnel. 2. Mme D a été recrutée comme policier municipal par la mairie de R en 1976. Brigadierchef principal depuis 1987, elle a rapidement exercé les fonctions de responsable du service de police municipale. 3. Après un changement de municipalité en 1996 et l arrivée d un nouveau collègue, M. M, la réclamante a rencontré des difficultés avec ce dernier. 4. Le 6 février 1996, Mme D a été remplacée dans ses fonctions par un autre brigadier-chef, Mme G, et une procédure disciplinaire a été engagée à son encontre, pour des motifs que l enquête effectuée par la haute autorité n a pas permis de faire apparaître clairement. Avant l issue de la procédure, elle a été suspendue de ses fonctions à titre conservatoire, le 22 février 1996. 5. Le conseil de discipline ayant émis un avis défavorable à la sanction, les poursuites ont été abandonnées. La réclamante a alors souhaité être réintégrée au service de police municipale, ce que le maire a refusé par décision du 9 mai 1996. 6. La réclamante a saisi le tribunal administratif de Melun qui, par un jugement en date du 26 mai 1998, a annulé ce refus de réintégration au motif qu il constituait une sanction disciplinaire déguisée et a enjoint au maire de réintégrer Mme D dans le service de la police municipale en constatant que la réclamante était «fondée à demander que le maire la réaffecte au service de la police qui correspond à l emploi qu elle a légalement vocation à occuper et dont il n est pas contesté qu il est vacant». 7. En exécution de cette décision, le maire a réintégré Mme D au sein de la police municipale sous les ordres de M. M, devenu entre temps responsable de la police municipale. La réclamante ayant déjà rencontré des difficultés avec cet ancien subordonné, elle a jugé préférable dans ces circonstances d être réaffectée aux affaires générales de la commune, ce qui a été accepté. 8. La cour administrative d appel de Paris, saisie par la réclamante (qui contestait le rejet de sa demande d indemnisation), a confirmé le 11 juillet 2006, le jugement du tribunal administratif du 5 novembre 2002 allouant la somme de 5000 euros en réparation de son préjudice moral. La cour a porté cette somme à 10 000 euros pour la période allant du 9 mai 1996 au 13 août 1998. 9. Mme D a été réaffectée au sein de la police municipale à compter du 1 er juillet 2001. Elle a été chargée, sous l autorité directe du nouveau maire élu en 2000, de missions ponctuelles comportant essentiellement le recensement des épaves. 10. Les membres de l équipe de police municipale ont alors reçu l instruction de Mme G, responsable du service, comme l établit une attestation écrite rédigée par une collègue, de ne pas recevoir d ordre de Mme D et de la mettre à l écart. La hiérarchie de Mme D a ainsi organisé son isolement au sein du poste de police où elle travaillait et lui a fait perdre toute responsabilité d encadrement.

11. Dans le même temps, Mme D a fait l objet, entre le 8 novembre 2001 et le 2 avril 2002, de plusieurs rapports d information écrits visant à remettre en cause son comportement et ses qualités professionnelles, sans qu aucune démarche visant à la sanctionner n ait été entreprise. Plus encore, les insuffisances professionnelles alléguées n ont à aucun moment été mentionnées dans les évaluations annuelles, empêchant Mme D de prendre connaissance des griefs formulés à son encontre. 12. Dans ce contexte, la réclamante a été placée en arrêt maladie pour état dépressif de juin 2002 à juin 2003. 13. Après sa reprise du travail, Mme D, n a pas retrouvé de fonctions d encadrement et toute promotion lui a été refusée par le maire, celui-ci invoquant les mandats syndicaux et de représentation du personnel qu elle exerçait. 14. La fiche de notation de Mme D établie pour l année 2005, comportait un gel de la note chiffrée (maintenue à 19,80) et des appréciations défavorables portées par Mme G et le maire. 15. Saisie par la réclamante, la Commission administrative paritaire réunie le 22 mars 2006, a rendu un avis favorable à la révision de l appréciation écrite, constatant «l incohérence entre l appréciation écrite sur la valeur professionnelle et la note chiffrée. La commission demande à l autorité territoriale et au vu des observations produites par l intéressée par courrier du 16 janvier 2006 de réviser l appréciation écrite sur la valeur professionnelle afin de la mettre en adéquation avec la note chiffrée». 16. Par courrier du 22 mai 2006, le maire a informé Mme D de son intention de ne pas suivre l avis de la Commission administrative paritaire et de baisser la note à 14. S appuyant sur «les insuffisances constatées dans le suivi de son travail ainsi que sur son comportement général caractérisé par des relations difficiles avec ses collègues de travail et une attitude à l égard des intéressés laissant à désirer» (selon les termes du mémoire en défense produit dans le cadre de l instance en cours), elle a, par la nouvelle fiche de notation pour l année 2005 en date du 31 août 2006, abaissé la note attribuée à Mme D à 14. 17. Le tribunal administratif de Melun a été saisi le 31 novembre 2006 d un recours pour excès de pouvoir demandant l annulation de la notation définitive qui lui a été attribuée au titre de l année 2005 et à ce qu il soit enjoint au maire de réattribuer la note chiffrée de 19,80 ainsi que des appréciations en corrélation avec celle-ci. L instance est toujours pendante. 18. L article 6 quinquiès de la loi n 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée sur les droits et obligations des fonctionnaires prohibe le harcèlement moral. 19. Pour sa part, le Conseil d Etat a, par un arrêt du 24 novembre 2006 (Mme A.), caractérisé une situation de harcèlement moral (antérieure à l introduction de l article 6 quinquiès) par des agissements répétés reprochés au salarié (multiplications des instructions par voie écrite, consignes tatillonnes, mise en cause de la compétence de l agent, etc.), une dégradation des conditions de travail (dégradation des relations avec la hiérarchie, confinement dans des tâches inférieures à son niveau de qualification, isolement renforcé par des mesures vexatoires, etc.) et, finalement, une atteinte à l intégrité de la victime traduite par une altération de sa santé. Le Conseil d Etat a également estimé que, si par la mauvaise volonté qu elle met dans l accomplissement de ses tâches, la victime «a largement contribué, par son attitude, à la dégradation des conditions de travail dont elle se plaint ( ), cette situation

n est pas de nature à retirer leur caractère fautif aux agissements rappelés précédemment de sa hiérarchie». 20. Si, dans un premier temps, les faits dont Mme D s estime victime ne paraissent pas se rattacher à un critère de discrimination prohibé, il ressort clairement de l enquête qu à partir de 2005, l engagement syndical de la réclamante, membre depuis 1992 du «Syndicat autonome de la fonction publique territoriale de Seine et Marne», exerçant des fonctions de déléguée du personnel depuis 1996 et membre du conseil d administration de ce syndicat, vont être reprochés à la réclamante de manière à justifier le refus de toute évolution professionnelle. 21. Comme l atteste un courrier en date du 19 avril 2005 adressé à la réclamante, le maire déplore «les demandes d autorisation d absences pour vos activités syndicales ou de représentant du personnel auprès des instances paritaires. Je vous félicite pour votre investissement en faveur du personnel communal, cependant je m interroge sur la compatibilité de cet engagement avec vos missions d encadrement d une équipe au sein de la police municipale». Cette interrogation sera à nouveau réitérée dans un courrier en date du 9 juin 2005. 22. Plus clairement encore, dans le mémoire en défense adressé à la juridiction administrative, la mairie de R affirme : «les sujétions inhérentes aux mandats dont elle est titulaire, l un syndical, l autre de représentation du personnel auprès des instances paritaires ainsi qu elles ressortaient en tout cas de la multiplication de ses absences à ces deux titres étaient telles qu elles apparaissaient difficilement conciliables avec la dévolution de responsabilités d encadrement». 23. De la même manière, sur une première version de la fiche d évaluation pour l année 2006, Mme G, chef de la police municipale, a mentionné qu elle n était «pas en mesure de noter Mme D, cet agent étant peu présent sur son poste de travail». 24. Or, l article 8 de la loi n 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires dispose que «le droit syndical est garanti aux fonctionnaires». 25. A l effet de faciliter l exercice de ce droit, le décret n 85-697 du 3 avril 1985 relatif à l exercice du droit syndical dans la fonction publique territoriale prévoit des possibilités d autorisations spéciales d absence et de décharges d activités de service au bénéfice des fonctionnaires investis d un mandat syndical. 26. En vertu de l article 12 de ce décret, «des autorisations spéciales d absence sont accordées aux représentants des organisations syndicales mandatés pour assister aux congrès syndicaux ou aux réunions des organismes directeurs dont ils sont membres élus quel que soit le niveau de cet organisme dans la structure du syndicat». 27. De la même manière, «sur simple présentation de leur convocation à ces organismes, les représentants syndicaux appelés à siéger aux commissions administratives paritaires ou aux organismes statutaires créés en application de la loi n 84-53 du 26 janvier 1984 se voient accorder une autorisation d absence». 28. L administration se trouve ainsi dans l obligation de délivrer l autorisation demandée lorsque l agent remplit les conditions limitatives fixées par le décret du 3 avril 1985. Le

Conseil d Etat a ainsi estimé «qu il ne saurait être fait grief à un fonctionnaire de distraire une partie de son temps de service pour exercer des activités syndicales dès lors que lui a été accordée une dispense de ce chef ; que si, en raison même de l octroi d une autorisation spéciale d absence ou de dispense de l activité de service, il peut être légalement fait mention de l existence du mandat syndical ayant motivé l intervention de telles mesures, le respect dû tant à la liberté d opinion des fonctionnaires qu à la liberté syndicale implique qu une mention de ce type ne puisse s accompagner d une quelconque appréciation portée par l autorité administrative sur la manière dont l intéressé exerce ses activités syndicales» (CE, 27 septembre 2000, Rocca). 29. Par ailleurs, toute absence non autorisée pour motif syndical doit donner lieu à une sanction disciplinaire, ainsi qu à une retenue sur traitement pour absence de service fait (TA de Châlons-en-Champagne, 2 juin 1998, Syndicat des municipaux d Epernay CGT). 30. En l espèce, l enquête a montré que toutes les absences pour motif syndical bénéficiaient des autorisations nécessaires délivrées par la hiérarchie de Mme D, cette dernière bénéficiant d une décharge d activités de service. 31. Ainsi, les reproches fondés sur ces absences n apparaissent pas justifiés. 32. Au vu de ces éléments, le Collège constate que les agissements dont Mme D a fait l objet depuis plusieurs années ont excédé les limites de l exercice normal du pouvoir hiérarchique et qu ils sont ainsi constitutifs d un harcèlement moral, en dépit de la mauvaise volonté dont la réclamante aurait pu faire preuve dans l accomplissement de ses tâches qu elle regardait comme injustifiées, ainsi que l allègue l administration. Ce faisant, non seulement le maire s est abstenu de toute mesure susceptible de mettre un terme à cette situation, mais il a également cautionné et contribué à ces agissements. 33. En reprochant à la réclamante l exercice de ses mandats syndicaux et de représentation du personnel, et en s appuyant sur ces griefs pour bloquer son évolution de carrière, le maire de la commune de R a commis à partir de l année 2005, une discrimination prohibée par l article 6 de la loi du 13 juillet 1983 précitée en vertu duquel «aucune distinction, directe ou indirecte, ne peut être faite entre les fonctionnaires en raison de leurs opinions ( ) syndicales». 34. Soulignant la simultanéité de ces griefs et le gel puis l abaissement de la note administrative de la réclamante à l issue de son évaluation pour l année 2005, le Collège estime que cette mesure a revêtu un caractère discriminatoire. En conséquence, conformément à l article 13 de la loi portant création de la haute autorité de lutte contre les discriminations, le Collège estime utile de présenter des observations devant le tribunal administratif de Melun saisi par Mme D d un recours demandant l annulation de la notation définitive qui lui a été attribuée au titre de l année 2005. 35. Bien que la situation professionnelle de Mme D se soit améliorée récemment, dans la mesure où elle a été nommée en août 2007 responsable adjointe du service de police municipale, le Collège invite son Président à recommander au maire de R le réexamen de la situation de Mme D, celle-ci n ayant pas retrouvé la plénitude de ses responsabilités. 36. En dernier lieu, le Collège recommande à la commune une indemnisation du préjudice subi par Mme D pour les faits de harcèlement moral discriminatoire dont elle a fait l objet,

faits pour lesquels elle n a pas engagé d action contentieuse. Il sera rendu compte de l exécution de cette mesure dans les trois mois suivant la notification de la présente délibération. Le Président Louis SCHWEITZER