Restitution des débats. Les conditions de passage à l échelle européenne et les modèles d affaires pertinents



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Transcription:

Séminaire de travail du 9 juin 2015 France Stratégie Internet des objets : quelles stratégies européennes pour faire émerger des plateformes d envergure mondiale? Restitution des débats Les conditions de passage à l échelle européenne et les modèles d affaires pertinents Le chemin que prend actuellement l Internet des objets appelle à une prise de conscience. L Internet des objets est en train de trouver des voies d applications multiples, que ce soit auprès du grand public, ou dans le monde industriel. Ces deux marchés diffèrent cependant par leurs caractéristiques en termes d usages et d applications, en raison d exigences de sécurité des données ou de durée de vie différentes. Un danger majeur guette les acteurs français. Les grandes entreprises historiques Over The Top et de l Internet ont décidé, depuis peu, de se regrouper en alliances, afin de perpétuer sur le matériel leur domination établie dans l Internet. Dans ce paysage, la France et l Europe sont néanmoins actives, notamment dans le travail de réglementation et la participation à la standardisation. La France a des leaders mondiaux dans toutes les industries dites «traditionnelles», mais reste représentée marginalement dans le numérique, même si le niveau de sa recherche est reconnue mondialement. L impact de l Internet des objets peut donc être important sur l industrie et les services européens, avec des risques potentiels de désintermédiation. Les objets connectés vont être absolument prégnants à l avenir, et la question sera de très vite savoir comment en tirer profit. Pour les aspects industriels, la question des usages est clé. Il faut pouvoir, une fois la technologie développée, adapter l usage à un processus industriel donné, et «connecter» ces usages avec ce dernier. Pour une PME ou une startup qui fournit des services à usage professionnel, la relation avec les grands groupes est cruciale. Une petite PME en France a besoin de pouvoir discuter avec des leaders pour grandir. Actuellement cependant, les liens semblent encore difficiles entre PME et grands groupes, même si ces derniers commencent à s ouvrir aux petites structures, à travers notamment des démarches d open innovation. La collaboration industrielle entre entreprises peut parfois être freinée si elle s établit entre concurrents. Le passage à l international présente les mêmes difficultés que pour les autres secteurs. Pour les aspects grand public de l Internet des objets, se pose la question des acteurs avec lesquels travailler. En France, nous avons beaucoup de PME et de startups qui peuvent répondre aux besoins des différents niveaux de la chaîne de valeur des objets connectés. Mais il est parfois difficile d identifier le bon acteur pour un niveau de la chaîne de valeur, et d accéder à ses services. Créer un écosystème est une façon de réunir les acteurs de manière bien identifiée. L exemple d Apple montre l importance des étapes de conception, de production et de communication. L objectif est d avoir un niveau de prototypage suffisant pour se

développer. Bien qu une grande partie des savoir-faire de production industrielle se trouve actuellement en Chine et à Taiwan, la production d objets connectés peut toujours s inscrire dans une démarche nationale, comme le montre la création de la cité de l objet connecté à Angers 1. Il est ainsi crucial de savoir produire et réaliser l étape de prototypage en France. Beaucoup de bonnes idées sortent des grands groupes et des startups français. La relation avec l utilisateur est plus marquée, et pousse au développement de plateformes. Quand on parle de données, il faut pouvoir réfléchir à la manière d y donner accès. Cette démarche doit se développer à l échelle européenne, et ne peut se faire seul. La «co-construction», développée autour d une logique d outillage et d un travail collaboratif entre acteurs, est ainsi déterminante pour réussir. La création d un label de certification de produit, par exemple certifiant une utilisation responsable des données récoltées, peut être utile. La production de masse s effectue en grande partie aujourd hui en Asie, notamment en Chine. Mais d autres aspects que la production entrent en compte dans la valeur ajoutée. L expérience-utilisateur et la gestion des données en sont des exemples. Tout ne se situe pas seulement au niveau du processus industriel nécessairement. La valeur est moins dans la production que dans l usage ou le service innovant. Notre historique d ingénierie et d électronique est très riche en France et continue d évoluer : on ne savait pas faire de logiciel il y a encore trente ans ; aujourd hui, si. Les difficultés d interaction entre startups et grands groupes sont tout de même à nuancer. Des projets, tels que Oledcomm, autour de l éclairage Wifi, ont profité à un écosystème d industriels. Les grands groupes et les startups changent la dynamique. Des choses se font aussi de plus en plus dans les pôles de compétitivité. La collaboration n est pas seulement technique, mais aussi capitalistique. Les acteurs doivent se projeter tout de suite globalement, en visant directement l échelle mondiale. L univers logiciel n est d ailleurs en grande partie pas américain. La capillarité des objets connectés avec le monde de l Internet soulève des enjeux autour de l automatisation (automation). L objet connecté se compose de deux parties : une partie matériel et une partie logiciel. Selon le rapport de Dominique Potier de 2010, la compétitivité de plus de 50 % des emplois industriels en France est «étroitement déterminée par la maîtrise du logiciel embarqué» 2. Les modèles d affaires qui réussissent sont ceux créant de la donnée. On peut produire et industrialiser en France, dès lors que les coûts de main d œuvre sont limités à 7 % - 8 %. L enjeu des usages est donc réel. On ne s interroge pas assez sur comment favoriser leur émergence, tout en laissant l utilisateur se les approprier. Il y a aussi un vrai problème de modèles d affaires. Trouver les bons besoins demande de pouvoir essayer avec agilité. D où l ambition nécessaire des acteurs français de se positionner sur la donnée. Ce faisant, une ère «post-gafa» semble se profiler, où l utilisateur tendrait à maitriser ses données, et à 1 Son concept a été imaginé dans un esprit «start-up» par le président fondateur de Withings, et ceci, en collaboration avec le groupe d électronique angevin Eolane (3 500 salariés dans le monde). Sa grande nouveauté est de concentrer l ensemble des compétences nécessaires à la conception de ces produits «intelligents» en matière d électronique (Hardware et Software), de plasturgie, de mécanique ou de design et de les rendre accessibles à tout porteur de projet d objet connecté. Grâce à cette concentration de savoir-faire et de technologies uniques et l accompagnement proposé, un porteur de projet doit parvenir, rapidement, à transformer sa bonne idée en un objet prêt à être produit en série. 2 http://www.ladocumentationfrancaise.fr/var/storage/rapports-publics/104000528.pdf

accepter le traitement qui en est fait. L un des enjeux est aussi de travailler sur le service, la question étant de savoir comment accompagner l utilisateur. Par ailleurs, les objets connectés sont intensifs en main d œuvre, notamment dans les domaines algorithmique et du traitement du signal, pour la téléphonie et la vidéo. Beaucoup d entreprises nationales font le choix de se développer en priorité sur les marchés les plus porteurs à l international. Le principal marché étranger est aujourd hui celui des États-Unis. Deux entreprises, Apple et Google, structurent déjà le cadre puisqu ils ont gagné le marché des systèmes d application des smartphones. Ils règnent par une politique très agressive à l égard des parties prenantes, laquelle restreint étroitement le développement et la diffusion d applications. La question des capitaux est également décisive, dans la mesure où les investissements en recherche et développement, ainsi qu en marketing, sont très importants. Le manque de moyens de certains acteurs nationaux des objets connectés est évident comparativement à leurs concurrents américains. L Internet des objets est ainsi un relais de croissance pour nombre d entreprises. La connexion entre acteurs, pour favoriser les gains d échelle, nécessite de penser à un niveau global. La connexion entre startups et grands groupes devrait notamment être plus recherchée. En France, cela passerait par la création de filières. Cela nécessite cependant de bien comprendre les besoins en aval. Les objets connectés nécessitent aussi de s intégrer à d autres technologies, ce qu ils commencent à faire. Les plateformes futures ne se penseront pas sans une réflexion sur les convergences à opérer avec les technologies cloud et big data. L intérêt à ouvrir une plateforme ne semble par ailleurs pas toujours évident. Les startups peuvent connaître une forte croissance dès le début, par une créativité et une innovation dans les usages. Beaucoup de produits innovants se développent aujourd hui en France. Le grand manque actuel cependant est le passage à la phase d industrialisation et de commercialisation. Comment se financer (pas nécessairement en recherche et développement) pour aller vite? Faut-il une plateforme logicielle particulière? Il faut segmenter un peu l analyse. Les mêmes plateformes logicielles et de connectivité ne sont pas requises selon les usages. Il faut donc déjà faire un grand tri. Les deux dimensions horizontale, au niveau d un maillon «technique» de la chaîne de valeur, et verticale, au niveau d un secteur d activité complet, sont néanmoins importantes. On voit bien autour du véhicule par exemple que la manière de produire est en train d évoluer. On ne mélange pas la partie logicielle embarquée avec la connectivité. L un des problèmes identifiés par les industriels verticaux dans leur relation avec les startups est la qualité du service rendu. L accès aux données est par ailleurs un point important. Un manque d attractivité dans l innovation se fait sentir en France actuellement. Les acteurs d un écosystème échangent plus aux Etats-Unis qu en France dans certains secteurs. Il manque à cet égard un lieu de rencontre bien identifié. La question de la capitalisation est également cruciale : la vente ou valorisation effective d une idée avant qu elle ne soit génératrice de revenus pose débat. Les industriels veulent un retour sur investissement sûr pour être capable de monter des opérations autour d un produit connecté. Les discussions se font actuellement autour

d acteurs mondiaux, pas seulement européens. Le besoin de protection de données et de solutions génériques est partagé par beaucoup. L Internet des objets soulève l enjeu de création de nouveaux usages. Les solutions manquent encore d interopérabilité 3. Mais faut-il nécessairement un écosystème européen? Cela ne semble pas si certain pour les acteurs. Pour autant, certaines problématiques liées à la connectivité peuvent se penser à une échelle plus large que l échelle nationale. Les coûts de roaming et l utilisation de cartes SIM chez certaines entreprises peuvent entraîner par exemple des difficultés à faire bénéficier d un service d un côté à l autre d une frontière. La connectivité est un élément important, notamment à travers les alternatives au réseau mobile. Le passage de la 4G à la 5G peut apporter plus de confiance en les usages, même si gérer le changement d opérateurs reste une contrainte pour certains acteurs traditionnels s embarquant dans l Internet des objets. On peut craindre de voir émerger des solutions ne correspondant à aucun besoin, même si, de ce foisonnement d initiatives, peuvent naître de futures grandes innovations. Une nouvelle génération de technologies devrait ainsi émerger. Pour autant, il est à attendre de ces évolutions une remise en cause de la neutralité des réseaux, telle que définie actuellement. L agrégation des services via le smartphone n est-il qu une étape? Une convergence des usages se fera probablement. L Internet des objets peut être une première étape avant la convergence de la robotique et de l intelligence artificielle, laquelle pourrait mener ensuite progressivement vers un internet des robots. Il faut donc une réglementation, mais mise en place progressivement. L objet va devenir indépendant, telle une machine. La non maîtrise de la connectivité peut faire de l objet un produit qui va nous échapper. Dès lors que les questions de bande passante et d usage seront résolues, la question centrale sera celle de savoir qui aura accès à l objet et à ses données. La segmentation est aussi fondamentale, notamment au niveau des usages industriels. Alors que les objets connectés grand public peuvent se contenter d une durée de vie de l ordre d un an, les objets industriels vont nécessiter une durée de vie d un à 20, voire 30 ans, en devenant connectés. Le besoin de durabilité change donc, posant la question de la mise à jour des objets. L idée que l innovation est déjà dans le grand public fait aujourd hui consensus, l enjeu du matériel et de la connectivité étant crucial. L Internet des objets s accompagne d un changement d ordre de grandeur, notamment du point de vue de la puissance de calcul, qui est en constante croissance. On voit notamment se développer de plus en plus de services cloud à la périphérie. Des pistes disruptives apparaissent, autour du contrôle des objets. On ne sait pas encore s ils seront contrôlés depuis des serveurs distants ou en local. Mais on peut imaginer que des systèmes se construisent autour d objets se certifiant entre eux. Les protocoles P2P et les certifications décentralisées permettront de construire des réseaux ad hoc et décentralisés. 3 Un utilisateur du bracelet Withings ne peut par exemple récupérer les données générées par un bracelet Fitbit pour avoir un historique, qu en important ces dernières de l application de Withings, HealthMate. Cela peut rendre difficile le passage d un objet à un autre, et le suivi dans le temps d une mesure de santé.

Les actions à mettre en œuvre pour créer des plateformes françaises de l Internet des objets Il ne faut pas s éloigner du marché pour les produits vendus. Il semble qu il faudrait plutôt suivre les développements dans les filières verticales (dans l aéronautique, l énergie, ), en constituant des groupes de travail autour de donneurs d ordre et autour de besoins prédéfinis, pour réussir à faire émerger des cas d usages. L idée serait de former un consortium en milieu industriel, en s appuyant sur des entreprises leaders. Le CNRFID a déjà mené une telle concertation dans l aéronautique, et vient de recevoir pour mission d en mener deux nouvelles dans le luxe et l énergie. Des initiatives fortes ont déjà été lancées dans l Internet des objets, qu il faut analyser au préalable. Par exemple, le projet allemand d Industrie 4.0 est aujourd hui bien avancé et structuré. Ce type d initiative pourrait prendre néanmoins son sens s il parvient in fine à toucher un public au moins européen. En particulier, il est fort souhaitable de s appuyer sur des startups qui portent des visions. Il est encore difficile à savoir si la création du futur passe par les clients. La Silicon Valley s est par exemple créé en laissant faire les «jeunes». Cependant, le seul moyen de laisser faire, c est par le moyen financier. Les structures de fonds d amorçage et de capital-risque sont des leviers particulièrement utiles. En France, il existe des fonds, mais ils ne sont pas à la même échelle qu aux Etats-Unis. Le coût de revient des ingénieurs est cependant plus faible, même si le marketing a un coût identique. Tant qu on ne pourra pas alimenter financièrement l innovation numérique, il sera difficile de se développer. Pour les petites entreprises innovantes, le plus important est de réussir les différentes étapes de son développement, même si cela s accompagne parfois d échecs. Établir la cartographie technologique est crucial 4. De même qu avoir la capacité à passer à l échelle en favorisant le rachat d entreprises, et qu exploiter les entreprises qui sont innovantes. Le manque de capitaux à grande échelle est un souci permanent chez beaucoup d acteurs nationaux. Il faut disposer de fonds doté d un milliard d euros, taille des fonds aux Etats-Unis aujourd hui. Ce n est d ailleurs pas qu une question de cœur de métier. Les grands groupes sont de plus en plus des intégrateurs. Pour un projet, il est important de bénéficier rapidement d une réponse du financeur, «oui» ou «non», ainsi que d avoir des capacités d organisation et d identification des personnes. Mais il existe parfois un problème de ressources. Certaines entreprises connaissent des difficultés pour trouver des développeurs. L étape de «proof of concept» peut déjà permettre des commandes d un million d euros, et ne constitue pas une difficulté en soi pour les entreprises. L étape critique est plus aujourd hui en France la conception industrielle. 4 Publication à ce titre prochainement du recueil des «Technologies clés 2015» par la Direction générale des entreprises.

Les clients sont en retard dans leur organisation. Beaucoup de fonds de financement se développent en France, mais de manière disséminée. Les demandes de financement nécessitent un travail administratif parfois important, selon les entreprises demandeuses. Le montant maximum des fonds pouvant être perçus est néanmoins encore limité, comparativement à d autres régions du monde. Le crédit impôt recherche est un bon outil de soutien à la recherche et au développement. On a donc une bonne vision de la R&D. Mais c est l étape la moins coûteuse. Les entreprises sont plus préoccupées par l étape d amorçage. Les initiatives sur le marché numérique sont intéressantes, mais avec l Internet des objets, il faudrait plutôt des plateformes permettant de croître rapidement. Il faudrait notamment : une confiance accrue des grands groupes dans les startups, seuls niveaux en France susceptibles de toucher dès le départ un nombre important d individus ; une confédération européenne de financeurs publics ; des projets industriels, autour d industriels européens leaders. Faire un standard européen autour d entreprises leaders permettrait des gains d échelle en Europe. Néanmoins, tout dépend ce qu on met derrière la notion de standard. Le marché va souvent plus vite. La compétition actuellement à l œuvre pour être le premier dans les véhicules autonomes, montre que quelque chose peut être fait au niveau européen. La vision est primordiale : bien savoir ce que l on veut. La réglementation peut être un outil à développer, pour permettre de stimuler la demande notamment. Une réglementation bien pensée permettrait d agir au niveau européen. Le CNRFID, en particulier, est partie prenante de la standardisation européenne depuis plusieurs années, et même «project leader» européen pour les normes concernant le respect de la vie privée dans le «sans contact». La transversalité de l Internet des objets doit pouvoir être complétée par une vision sectorielle. Trop chercher à segmenter l Internet des objets peut enlever la transversalité. Si on ne réussit pas à agréger toutes les informations, on ne connaîtra rien. Il faut pouvoir intégrer la question du big data dans les problématiques de convergence de l Internet des objets. Des différences fortes entre pays apparaissent par ailleurs. Chacun essaie de créer un écosystème qui lui est propre. L exemple de Nest peut être un révélateur de succès, combinaison d un marché spécifique, le marché domestique, d un design, et d une maturité. Le niveau d exigence de sécurité peut être certifié, à travers des systèmes de labellisation tels que mis en place en Allemagne, avec le VDE Smart Home. Il n y a pour le moment pas de labels de sécurité européens. L adhésion à un label doit être un choix de l entreprise. Nous devons continuer à protéger les données personnelles, pour lever les réticences des utilisateurs à les agréger jusqu à l échelle européenne.

Les actions retenues par les participants au séminaire Créer un lieu de reconnaissance et d'affichage de l Internet des objets Monter et financer des consortia européens de l Internet des objets, associant donneurs d'ordre et fournisseurs et impliquant grands groupes et PME, dans une logique de projets opérationnels par filière d'activités industrielles (énergie, automobile, transports...) Travailler sur la définition et l implémentation de standards et labels dans les API, les accès et les usages (ex : asymétries d utilisation), notamment en termes de respect de la vie privée et de protection des données, ainsi que de sécurité des systèmes ; Développer des plateformes de promotion/communication, sur les «proofs of concept» et pour l'accès aux financements Stimuler la demande intérieure et la confiance dans les petites entreprises innovantes.