TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE POITIERS N 1700314 COMMUNE DE SAINT-MICHEL M. François Lamontagne Président du tribunal RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS Le juge des référés Ordonnance du 16 février 2017 54-035-04-03 24-01-03-02 C+ Vu la procédure suivante : Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés le 7 février 2017 et le 15 février 2017, la Commune de Saint-Michel (16), représentée par la SCP Lavalette Avocats conseils, Me Antoine, demande au juge des référés : 1 ) d ordonner, sur le fondement des dispositions de l article L. 521-3 du code de justice administrative, à la Société Orange, qui occupe sans droit ni titre le domaine public communal constitué par l ancien château d eau de la commune, de procéder à l enlèvement sans délai des antennes et matériels lui appartenant, 2 ) d assortir cette injonction d une astreinte de 10 000 euros par jour de retard à compter de l intervention de l ordonnance, 3 ) de mettre à la charge de la Société Orange une somme de 3 000 euros en application de l article L. 761-1 du code de justice administrative. La commune soutient que la convention d occupation du domaine public a pris fin le 31 décembre 2016, sans que le bien soit libéré ; que l expulsion présente un caractère utile pour faire respecter les dispositions du POS qui interdit l implantation d antennes relais ; que l urgence procède de la nécessité de permettre un usage normal du bien, conforme à sa destination, de la possibilité de troubles à l ordre public, des nécessités d entretien du bien et enfin des risques liés à son état de dégradation. Par un mémoire en défense enregistrés le 15 février 2017, la SA Orange, représentée par la SELARL Cabinet Gentilhomme, conclut au rejet de la requête et à ce qu une somme de 5 000 euros soit mise à la charge de la commune de Saint-Michel.
N 1700314 2 Elle indique que la condition d urgence n est pas satisfaite dès lors qu aucun des motifs avancés n est pertinent. Qu en outre, il existe à l inverse une urgence à maintenir en fonctionnement les dispositifs de radiotéléphonie. Qu enfin la mesure ne présente pas de caractère utile pour la conservation du domaine public de la commune et qu au surplus, les motifs de refus de renouvellement de l autorisation ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l audience. Au cours de l audience publique tenue à 11 h 05 en présence de Mme Rouil, greffier d audience, M. Lamontagne a lu son rapport et entendu : - les observations de Me Gomez de la SCP Lavalette Avocats conseils, avocat de la commune de Saint-Michel, qui a repris ses écritures en insistant sur la volonté d Orange de ne pas tirer les conséquences de la fin de la convention d occupation temporaire et sur la nécessité de prévoir la réalisation de travaux de mise en sécurité, sa responsabilité étant susceptible d être recherchée en cas d accident d un agent d Orange. - Les observations de Me Gentilhomme, qui a repris ses écritures et contesté l existence en l état d une situation de danger, tout en faisant état de l opposition de la commune à la mise en place d un dispositif de remplacement permettant d assurer le maintien de la couverture téléphonique, en particulier pour la voirie nationale et le centre hospitalier. La clôture d instruction a été prononcée à l issue de l audience, à 12 h 05 Les faits : 1. Le château d eau édifié sur le territoire de la commune de Saint-Michel (16), boulevard de Bretagne sur des parcelles cadastrées AH 121 et 122, a fait l objet en 2000 d une convention d occupation temporaire pour l installation d antennes relai de radiotéléphonie. Il a ensuite été mis à la disposition de la Communauté d agglomération du Grand Angoulême (ComAGA) à compter du 1 er janvier 2001, à la suite du transfert de la compétence en matière de production et de distribution d eau potable. Cette dernière a conclu le 31 janvier 2008 une convention d occupation temporaire du domaine public avec la SA Orange France autorisant notamment l implantation par cette société d antennes relais et des matériels nécessaires à leur exploitation sur ce château d eau, prenant fin le 31 décembre 2016. Par délibération du 22 décembre 2015, le conseil municipal de la commune de Saint-Michel a émis un avis favorable à la désaffectation et à la rétrocession du château d eau au motif qu il n était plus utilisé par la ComAGA. Elle a ensuite mis en demeure la société Orange de cesser son occupation au plus tard le 31 décembre 2016 et fait constater son maintien dans les lieux après le terme de la convention d occupation temporaire. Par la présente requête, la commune demande à titre principal au juge des référés d enjoindre à la Société Orange de procéder à l enlèvement sans délai des antennes et matériels lui appartenant.
N 1700314 3 La demande présentée au titre de l article L. 521-3 du code de justice administrative : 2. Aux termes de l article L. 521-3 du code de justice administrative : «En cas d urgence et sur simple requête qui sera recevable même en l absence de décision administrative préalable, le juge des référés peut ordonner toutes autres mesures utiles sans faire obstacle à l exécution d aucune décision». Le juge des référés tient de ces dispositions le pouvoir, en cas d urgence et d utilité, d ordonner l expulsion des occupants sans titre du domaine public. 3. La commune considère que la société Orange occupe sans droit ni titre le domaine public communal, après le terme de la convention d occupation temporaire et en dépit d une mise en demeure de libérer les lieux. Cette situation n est pas contestée, en droit et en fait, et n est pas contredite par les pièces du dossier, alors que la contestation par une requête distincte de la décision de refus de renouvellement de la convention temporaire d occupation n est pas de nature à remettre en cause cette appréciation. 4. Toutefois, l occupation sans droit ni titre n implique pas de matière automatique l existence d une situation d urgence, qui doit s apprécier de manière concrète, au regard des éléments produits par les parties. 5. En l espèce, il n est pas contesté que le château d eau n est plus utilisé depuis de nombreuses années par le service des eaux et qu aucune réutilisation n est envisagée. Par suite, il a pour seule fonction, au jour de la présente décision, son utilisation comme support des antennes de radiotéléphonie. Dans ces conditions, l occupation irrégulière ne fait pas en l état obstacle à une utilisation conforme à sa destination. 6. La commune fait ensuite valoir que l occupation irrégulière fait obstacle à la réalisation de travaux d entretien rendus nécessaires par l état de la construction, ou de travaux de démolition. Il n est toutefois pas contesté qu il n existe aucun projet actuel de travaux, pas plus que de réutilisation ni de destruction, la commune confirmant qu elle n a pas arrété sa décision quand à l avenir de cet édifice. En outre, le rapport de vérification technique de sécurité établi par SOCOTEC en juillet 2013, pas plus que les constatations de l huissier missionné le 2 janvier 2017, ne mettent en avant la nécessité de réaliser à court terme des travaux de mise en sécurité de l enveloppe du bâtiment impliquant la réalisation rapide de travaux qui seraient incompatibles avec la présence des dispositifs de radiotéléphonie. Enfin, l existence d un risque pour les agents de la société Orange intervenant sur le site ne résulte pas des éléments produits devant le juge des référés. 7. L interdiction des dispositifs de radiotéléphonie présentant certaines caractéristiques de puissance par les dispositions du règlement d urbanisme applicable sur le territoire de la commune de Saint-Michel est en tout état de cause sans conséquence sur l urgence à faire cesser l occupation irrégulière du domaine public, s agissant à tout le moins de législations distinctes et en l absence de toute décision d urbanisme. 8. Enfin la possibilité de troubles à l ordre public du fait de l absence de mise en œuvre d un engagement de l équipe municipale n apparait pas, faute de tout élément concret, de nature à caractériser l urgence de la mesure sollicitée par la commune sur le seul fondement de la protection du domaine public. 9. Il résulte de ce qui précède que pour regrettable qu elle soit en l absence d autorisation, l occupation du château d eau de la commune de Saint-Michel par la SA Orange ne crée pas, à la date de la présente décision, une situation d urgence au sens des dispositions de
N 1700314 4 l article L. 521-3 précité. Par suite, les conclusions de la commune tendant à ce que le juge des référés ordonne l enlèvement sans délai des antennes et matériels doivent être rejetées. Qu il en va de même, par voie de conséquence, des conclusions à fin d astreinte. Sur les conclusions accessoires : 10. Il résulte des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative que le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée, et peut, même d'office, ou pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. 11. Ces dispositions font obstacle aux conclusions de Commune de Saint-Michel dirigées contre la Société Orange France qui n est pas, dans la présente instance de référé, la partie perdante. Dans les circonstances de l espèce, il n apparait pas inéquitable de laisser à la charge de cette dernière la somme qu elle demande sur le même fondement. O R D O N N E : Article 1 er : La requête de Commune de Saint-Michel est rejetée. Article 2 : Les conclusions de la SA Orange France présentées en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à la Commune de Saint-Michel et à la SA Orange France. Fait à Poitiers, le 16 février 2017. Le juge des référés, Signé François Lamontagne
N 1700314 5 La République mande et ordonne au préfet de la Charente en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, Pour le greffier en chef, Le greffier, D. GERVIER