Texte officiel Février 2011 Cour de cassation Chambre sociale Audience publique du 18 janvier 2011 Pourvoi n 09-40820 Non publié au bulletin Rejet www.editions-tissot.fr Editions Tissot
Mme Mazars (conseiller doyen faisant fonction de président), président SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat(s) REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l arrêt suivant : Sur le moyen unique : Attendu, selon l arrêt attaqué (Montpellier, 12 septembre 2008), que M. X... a été engagé par la SAEML Transports de l agglomération de Montpellier à compter du 2 juin 1998 ; qu il a obtenu un congé formation pour suivre une formation de pilote d hélicoptère qui devait prendre fin le 27 janvier 2006 ; que par courriers des 30 janvier et 23 février 2006, le salarié a demandé que ses jours d absence soient imputés sur ses congés payés et sur son compte-épargne temps en précisant que la formation, tributaire des conditions météorologiques, devait s achever fin avril 2006 ; que l employeur a répondu, le 2 mars 2006, que le salarié n avait pas suffisamment de congés payés pour couvrir la période d absence jusqu à fin avril, et que, malgré l absence de respect du délai de prévenance en matière de compte épargne temps, il acceptait à titre exceptionnel, que du 1er février 2006 au 11 février 2006, il soit en congés payés, puis en absence CET jusqu au 30 avril 2006 ; que le courrier rappelait, qu en cas de demande de prolongation du congé, il convenait de respecter le délai de prévenance d un mois minimum ; que par lettre du 17 avril 2006, M. X... a sollicité un nouveau congé jusqu au 6 juin 2006 ; que l employeur a répondu, le 28 avril 2006, que le délai de prévenance n était pas respecté et qu il n acceptait pas la prolongation d absence ; que contestant son licenciement intervenu le 16 juin 2006 pour absence injustifiée, le salarié a saisi la juridiction prud homale d une demande en paiement de diverses sommes ; Attendu que le salarié fait grief à l arrêt de le débouter de ses demandes, alors, selon le moyen : 1 / que M. Mohamed X... faisait valoir dans ses écritures d appel que, selon les documents de demande d absence remis par son employeur, les demandes devront être déposées minimum 48 heures à l avance ; qu en reprochant au salarié de n avoir pas respecté le délai minimum d un mois allégué par l employeur, sans rechercher, ainsi qu elle y était invitée, si les documents précités ne permettaient pas au salarié de s en tenir au respect d un délai de 48 heures, la cour d appel n a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 122-6, L. 122-8, L. 122-14-3 et L. 122-14-4 du code du travail devenus L. 1234-1, L. 1234-5, L. 1234-9, L. 1232-1, L. 1235-1 et L. 1235-3 du code du travail. 2 / que la faute grave s apprécie in concreto ; qu ayant consacré seize mois à la formation de pilote professionnel d hélicoptère débutée le 5 janvier 2005, et imputée sur ses congés
payés, son compte épargne temps et un congé individuel de formation amputé de deux mois par l employeur, à la connaissance de son employeur, M. Mohamed X... avait été dans l impossibilité de présenter l examen pratique final en raison des conditions météorologiques ; qu en ne tenant aucun compte des circonstances qui avaient ainsi contraint M. Mohamed X... à prolonger son congé après en avoir avisé son employeur, dont ne résultait pas la volonté de se soumettre sans motif aux instructions précises de l employeur la cour d appel n a pas légalement justifié sa décision au regard desdites dispositions ; 3 / qu en tout cas, en ne tenant aucun compte des conditions de la prolongation du congé et en ne s assurant pas de la bonne foi de l employeur pour le refuser ni de l impossibilité dans laquelle le salarié avait été de prévoir un mois à l avance la nécessité de prolonger de quelques jours le congés, la cour d appel a encore privé sa décision de base légale au regard desdites dispositions ; 4 / que tout jugement doit être motivé à peine de nullité ; qu en retenant que le salarié avait l intention de quitter l entreprise pour un emploi mieux en rapport avec sa nouvelle formation, sans aucunement préciser les pièces lui permettant de parvenir à une telle conclusion, la cour d appel a statué par voie de simple affirmation en violation de l article 455 du code de procédure civile ; 5 / que l intention du salarié de quitter l entreprise pour un emploi mieux en rapport avec sa nouvelle formation ne constitue pas une faute ; qu en fondant sa décision sur un tel motif, la cour d appel a statué par un motif inopérant en violation de l article 455 du code de procédure civile ; Mais attendu qu après avoir exactement rappelé que l accord d entreprise relatif au compte épargne-temps prévoyait que le salarié devait effectuer sa demande au minimum deux mois à l avance, lorsque le congé était compris entre un et deux mois, la cour d appel a constaté que le salarié avait été mis en garde sur la nécessité de présenter la demande au moins un mois à l avance et que le salarié avait présenté, le 17 avril 2006 une nouvelle demande de congé jusqu au 6 juin 2006, et ne s était pas présenté à son poste de travail le 2 mai 2006, malgré la lettre de refus de l employeur en date du 28 avril 2006 ; que la cour d appel, qui n était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation ni de s expliquer sur les pièces qu elle décidait d écarter, a pu en déduire que ces faits rendaient impossible le maintien dans l entreprise et constituaient une faute grave ; qu elle a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ; PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ; Condamne M. X... aux dépens ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit janvier deux mille onze. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils pour M. X... Le moyen fait grief à l arrêt attaqué d AVOIR débouté Monsieur Mohamed X... de ses demandes en paiement de compléments de salaires, indemnité compensatrice de préavis, congés payés y afférents, indemnité conventionnelle de licenciement et dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. AUX MOTIFS QUE c est à l employeur et à lui seul d apporter la preuve de la faute grave invoquée par lui pour justifier le licenciement ; qu en l espèce, à la lettre de Mohamed X... du 23 février 2006 lui demandant une prolongation de ses congés afin de terminer sa formation prévue pour fin avril 2006, sous toutes réserves, la S.A.E.M.L. TRANSPORTS DE L AGGLOMÉRATION DE MONTPELLIER a répondu le 2 mars 2006 : Nous vous informons que vous n avez pas suffisamment de congés payés pour couvrir la période d absence jusqu à fin avril. Bien que vous ne respectiez pas le délai de prévenance pour une absence sur votre compte épargne temps, à titre exceptionnel, nous acceptons de vous considérer en absence en C.E.T. (compte épargne temps). Du 1er février au 11 février 2006, vous serez pointé en congés payés et du 13 février au 30 avril 2006, en absence en C.E.T. Si vous souhaitez prolonger votre absence après le 30 avril, vous devrez, en conformité avec la réglementation en vigueur et afin d agir selon les contraintes d organisation du service de l entreprise, nous en informer avec un délai de prévenance d un mois minimum. Dans le cas contraire, toute demande d absence sera refusée et vous serez contraint de réintégrer votre poste. Toute absence sans autorisation est une absence injustifiée ; qu en effet, aux termes de l article 4-B de l accord d entreprise relatif au compte épargne temps, la prise de congé devra faire l objet d un accord entre les parties et le salarié devra effectuer sa demande au minimum deux mois avant la date de son congé si celui-ci est compris entre un et deux mois ; qu en dépit de cette mise en garde, Mohamed X... n a pas respecté le délai minimum qui lui était imposé et n a demandé un nouveau congé jusqu au 6 juin 2006, que par courrier du 17 avril 2006 ; que le 28 avril 2006, l employeur lui a alors écrit : Nous vous avons informé que vous deviez respecter un délai de prévenance d un mois pour prolonger votre absence, ce que vous ne faites pas puisque, le 20 avril 2006, vous nous avez adressé un courrier nous informant que vous ne reprendriez votre travail que le 6 juin 2006... Nous n acceptons pas la prolongation de votre absence. Si vous ne vous présentez pas à votre poste de travail le 2 mai 2006 et au plus tard à première présentation de cette lettre, vous serez en absence injustifiée et nous en tirerons les conséquences qui s imposent... ; que Mohamed X... n a pas repris son travail à la date indiquée ; que ce comportement délibéré, malgré deux mises en garde préalables, révélateur de la volonté du salarié de s affranchir du pouvoir de subordination de l employeur ou de quitter l entreprise pour un emploi mieux en rapport avec sa nouvelle formation, caractérise la faute grave privative des indemnités de rupture ; que, du 1er au 17 juin 2006, Mohamed X... a été absent de son poste de travail et ne démontre pas s être tenu à la disposition de son employeur pour exécuter sa prestation ; que la demande de rappel de salaire n est pas fondée ; qu enfin, l équité commande de faire application de l article 700 du code de procédure civile devant la cour d appel.
ET AUX MOTIFS éventuellement adoptés QUE Monsieur X... fait une demande de GIF pour obtenir la licence de pilote professionnel d hélicoptère le 03 juillet 2003 pour un congé du 12 janvier 2004 au 12 janvier 2005, congé non accepté par le FONGECÏF. Une autre demande le 09 décembre 2003 pour un congé du 03 mai 2004 au 19 juin 2006, refusé par le FONGECIF. Une troisième demande le 15 avril 2004 pour un congé du 06 septembre 2004 au 17 juillet 2005, encore refusé par le FONGECIF, puis recours gracieux enfin octroyé ; qu entre temps, il y a eu une quatrième demande, du 03 janvier 2005 au 02 décembre 2005, acceptée par la TAM ; que les demandes faites au FONGECIF sont transmises par le salarié, l employeur n ayant aucune intervention autre que l établissement du dossier initial et l émission de son accord ; que la demande de congé a été accordée aux dates sollicitées par Monsieur X..., en s adaptant à quatre demandes et à la modifications des dates sur recours gracieux et cela peut se vérifier par l accord donné pour partir en congé avant le GIF pour suivre la formation théorique initiale ; que Monsieur X... confirmera son retour le 27 janvier 2006 par lettre du 26 décembre 2005, faisant simplement état de la nécessité de prendre ultérieurement quelques heures de congés pour le passage de son test final ; que par courrier recommandé avec AR du 17 janvier 2006, la TAM demande à Monsieur X... de réintégrer l entreprise le 28 janvier 2006, mais que s il souhaite poursuivre son absence en prenant des congés payés 2005 ou du temps de CET, il doit remplir l imprimé joint et le retourné signé ; que le 30 janvier 2006, Monsieur X... écrivait une longue lettre à la DRH dont le contenu est sans rapport avec l historique ci-dessus ; qu il demande que lui soient programmés des congés payés de 2006 et concluait ces ternies : pour suivre ma formation, veuillez me déduire sur le congé CE et CAMELIO jusqu au 25 mars 2006, les résultats des tests feront foi (car selon testeur DGAC désigné, météo...) les dates restent imprévisibles ; que le 23 février 2006, Monsieur X... demande par lettre recommandée avec AR une prolongation de congés payés ; que le 02 mars 2006, la TAM informe par lettre recommandée avec AR, Monsieur X... : qu il n a pas suffisamment de congés payés pour couvrir la période d absence jusqu à fin avril, bien qu il ne respecte pas le délai de prévenance pour une absence sur le compte épargne temps, à titre exceptionnel, la TAM accepte de le considérer en absence en CET, du 1er février au 11 février 2006, il sera pointé en congés payés et du 13 février au 30 avril 2006 en absence en CET, s il désire prolonger son absence après le 30 avril 2006, il devra en conformité avec la réglementation en vigueur en informer la TAM avec un délai de prévenance de 1 mois minimum, sinon toute demande d absence sera refusée et Monsieur X... sera contraint de réintégrer son emploi ; que le 17 avril 2006, courrier de Monsieur X... informant qu il passait son diplôme début mai 2006 ; le 28 avril 2006, lettre recommandée avec AR de la TAM répondant au courrier de Monsieur X... (daté du 17 avril, réceptionné par la TAM le 24 avril) qu elle n accepte pas la demande de prolongation d absence de Monsieur X..., que si Monsieur X... ne se présente pas à son poste de travail le 02 mai 2006 et au plus tard à la première présentation de la présente, il sera en absence injustifié (voir courrier de la TAM du 02 mars 2006) ; que le 3 mai 2006, par lettre recommandée avec AR de la TAM sur une éventuelle sanction disciplinaire, Monsieur X... doit se présenter auprès de Monsieur Y... le 23 mai 2006 dans le cadre d un entretien préalable pour être informé du motif de la sanction ; que le 23 mai 2006, la TAM par lettre recommandée avec AR pour mesure disciplinaire de second degré convoque Monsieur X... à un entretien qui doit se dérouler le 05 juin 2006 avec Monsieur Z... puis le 07 juin 2006 devant le conseil de discipline ; que le 14 juin 2006, la TAM par lettre recommandée avec AR informe Monsieur X... qu au terme de l entretien du 23 mai 2006 et de l entretien du 05 juin 2006 auxquels il ne s est pas présenté, du conseil de discipline du 07 juin 2006 auquel Monsieur X... était assisté du délégué syndical, Monsieur A..., qu il a été entendu par les faits relevés à son encontre et qu il lui est notifié son licenciement pour faute grave ; que depuis le 02 mai 2006, Monsieur X... est en absence injustifiée ; que le Conseil
estime que le licenciement pour faute grave en bien fondé pour absences injustifiées, Monsieur X... devait reprendre son travaille 02 mai 2006 suite au courrier de la TAM du 28 avril 2006 ; qu en conséquence il convient de rejeter l intégralité des demandes de Monsieur X... ALORS QUE Monsieur Mohamed X... faisait valoir dans ses écritures d appel (p. 4, 2 ; p. 7, av. dernier ) que, selon les documents de demande d absence remis par son employeur, «les demandes devront être déposées minimum 48 heures à l avance» ; qu en reprochant au salarié de n avoir pas respecté le délai minimum d un mois allégué par l employeur, sans rechercher, ainsi qu elle y était invitée, si les documents précités ne permettaient pas au salarié de s en tenir au respect d un délai de 48 heures, la Cour d appel n a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L.122-6, L.122-8, L.122-14-3 et L.122-14-4 du Code du travail devenus L.1234-1, L.1234-5, L.1234-9, L.1232-1, L.1235-1 et L.1235-3 du Code du travail. ET ALORS en tout cas QUE la faute grave s apprécie in concreto ; qu ayant consacré seize mois à la formation de pilote professionnel d hélicoptère débutée le 5 janvier 2005, et imputée sur ses congés payés, son compte épargne temps et un congé individuel de formation amputé de deux mois par l employeur, à la connaissance de son employeur, Monsieur Mohamed X... avait été dans l impossibilité de présenter l examen pratique final en raison des conditions météorologiques ; qu en ne tenant aucun compte des circonstances qui avaient ainsi contraint Monsieur Mohamed X... à prolonger son congé après en avoir avisé son employeur, dont ne résultait pas la volonté de se soumettre sans motif aux instructions précises de l employeur la Cour d appel n a pas légalement justifié sa décision au regard desdites dispositions. QU en tout cas, en ne tenant aucun compte des conditions de la prolongation du congé et en ne s assurant pas de la bonne foi de l employeur pour le refuser ni de l impossibilité dans laquelle le salarié avait été de prévoir un mois à l avance la nécessité de prolonger de quelques jours le congés, la Cour d appel a encore privé sa décision de base légale au regard desdites dispositions. ALORS encore QUE tout jugement doit être motivé à peine de nullité ; qu en retenant que le salarié avait l intention de quitter l entreprise pour un emploi mieux en rapport avec sa nouvelle formation, sans aucunement préciser les pièces lui permettant de parvenir à une telle conclusion, la Cour d appel a statué par voie de simple affirmation en violation de l article 455 du Code de procédure civile. ET ALORS enfin QUE l intention du salarié de quitter l entreprise pour un emploi mieux en rapport avec sa nouvelle formation ne constitue pas une faute ; qu en fondant sa décision sur un tel motif, la Cour d appel a statué par un motif inopérant en violation de l article 455 du Code de procédure civile. Décision attaquée : Cour d appel de Montpellier du 12 mars 2008