Albert BOHÉMIER et Pierre-Paul CÔTÉ, Droit commercial général, tome 1, 3 e édition, Montréal, Thémis, 1985, 422p., ISBN 2-920376-52-7.



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Compte rendu Ouvrage recensé : Albert BOHÉMIER et Pierre-Paul CÔTÉ, Droit commercial général, tome 1, 3 e édition, Montréal, Thémis, 1985, 422p., ISBN 2-920376-52-7. par Louise Poudrier LeBel Les Cahiers de droit, vol. 27, n 4, 1986, p. 989-993. Pour citer ce compte rendu, utiliser l'adresse suivante : URI: http://id.erudit.org/iderudit/042780ar DOI: 10.7202/042780ar Note : les règles d'écriture des références bibliographiques peuvent varier selon les différents domaines du savoir. Ce document est protégé par la loi sur le droit d'auteur. L'utilisation des services d'érudit (y compris la reproduction) est assujettie à sa politique d'utilisation que vous pouvez consulter à l'uri https://apropos.erudit.org/fr/usagers/politique-dutilisation/ Érudit est un consortium interuniversitaire sans but lucratif composé de l'université de Montréal, l'université Laval et l'université du Québec à Montréal. Il a pour mission la promotion et la valorisation de la recherche. Érudit offre des services d'édition numérique de documents scientifiques depuis 1998. Pour communiquer avec les responsables d'érudit : info@erudit.org Document téléchargé le 23 October 2015 12:39

Chronique bibliographique 989 accordées en cas de blessures corporelles, que ce soit à la victime elle-même ou à son conjoint, parent ou enfant. Classés selon la date du jugement, ces tableaux tentent de résumer en chaque espèce les éléments devant être considérés dans le processus d'évaluation des dommages : situation personnelle de la victime, pourcentage d'incapacité partielle permanente, nature du préjudice subi, etc. Un aspect intéressant de ces tableaux est qu'ils expriment également la somme des dommages en dollar constant de 1984. On peut cependant regretter qu'une méthode chronologique de classement ait été retenue ; il eut été à notre avis plus utile de procéder selon la nature des blessures subies. Tels que présentés, ces tableaux ne permettent pas d'appréhender l'évolution qui s'est faite dans les montants accordés depuis une quinzaine d'années aux victimes de blessures corporelles ainsi qu'à leurs proches. De plus, ils ne font aucune place au processus d'évaluation suivi par le juge ; ceci risque de perpétuer de la part de l'utilisateur les vieilles habitudes de l'évaluation «au point», qui se traduit presque toujours par une sous-indemnisation de la victime. En résumé, la présente édition conserve des qualités incontestables, l'existence de certains points faibles étant inévitable dans un ouvrage de cette envergure. Il est à souhaiter que le professeur Baudouin n'attendra pas une autre douzaine d'années avant d'enrichir le monde juridique québécois de sa prochaine édition. L'édition 1985 saura en attendant satisfaire pleinement ses nombreux lecteurs. Daniel GARDNER Université Laval. Albert BOHÉMIER et Pierre-Paul CÔTÉ, Droit commercial général, tome 1, 3 e édition, Montréal, Thémis, 1985, 422p., ISBN 2-920376-52-7. La parution au Québec d'un nouvel ouvrage de droit ou d'une nouvelle édition «entièrement revue et remaniée» d'un ouvrage existant, est toujours un événement heureux. Soulignons donc la parution chez les Éditions Thémis, du Droit commercial général, 3 e édition, tome I par A. Bohémier, d'abord par des éloges pour les premières cent pages qui constituent une œuvre de réflexion mais aussi par des remarques plus sévères pour les trois cent autres pages, «Documents reproduits», qui apparaissent plus comme une œuvre d'emprunt. 1. Œuvre de réflexion Le tome I, intitulé Le Code civil et le commerce, comprend une Introduction générale où l'auteur précise son approche et sa conception du droit commercial. Ses réflexions sur la difficulté de définir l'objet du droit commercial méritent d'être rapportées. Puis suivent deux chapitres de longueur inégale. Le premier, de près de 70 pages, traite de la théorie de l'acte de commerce, et ici encore l'auteur témoigne d'une pensée réfléchie et cohérente. Le deuxième chapitre présente sommairement en 20 pages le fonds de commerce, la vente en bloc et le nantissement commercial. Il n'y a pas lieu de commenter ici ce deuxième chapitre si ce n'est pour exprimer le regret de n'y pas trouver plus de discussion et l'absence de référence à l'article de E.E. Saunders, «Pledge, Commercial Pledge, Sales with a Right of Redemption and Similar Security Devices» dans 1967 Meredith Lectures 16-25 qui contredit celui du notaire Comtois sur plusieurs points. 1.1. Les considérations de l'auteur sur le droit commercial québécois Dans un article publié il y a dix ans, (A. Bohémier, «Quelques réflexions sur le droit commercial québécois et ses perspectives d'avenir», (1976) Il R.J.T. 510) le professeur Bohémier soulignait la difficulté de définir de façon précise l'objet du droit commercial. Il en attribuait la cause à deux facteurs. D'abord le peu d'intérêt accordé au droit commercial par le milieu québécois

990 Les Cahiers de Droit ('986) 27 C. ded. 983 tel que démontré par la rareté de la littérature juridique ainsi que des enseignements et des recherches consacrés à ce champ de connaissance. Dans l'avant-propos de cette troisième édition du Droit commercial générai, l'auteur précise son approche : [...] une certaine mise en ordre du droit commercial québécois était nécessaire à son épanouissement. Qui n'a pas gardé à l'esprit l'époque où le droit commercial était présenté comme cet ensemble de lois statutaires hétéroclites? Certes, le fait de regrouper les diverses branches du droit commercial dans le cadre d'un cours ou d'un livre n'a pas pour résultat de changer grand-chose à la réalité. Il propose cependant une orientation que l'on peut espérer fertile à la longue. Au Québec, il faut franciser le droit commercial, le latiniser, l'apprivoiser à nos mentalités. Sinon, il demeurera un corps étranger, indigeste. Il restera le monopole d'une certaine élite. Le droit fiscal est un exemple frappant à cet égard. Le projet de réforme de la Loi sur la faillite s'inscrit dans la même perspective. Aussi, outre les responsabilités pédagogiques premières et immédiates des auteurs, cet ouvrage veut modestement répondre à un besoin plus général de notre collectivité, (p. V) Déjà depuis une décennie,!e milieu juridique québécois francophone s'ouvre à la réalité du droit commercial, du droit des affaires ou, comme on dit maintenant, du droit économique. Les facultés de droit du Québec dispensent de plus en plus d'enseignements dans ce domaine tant au niveau du premier cycle que du deuxième. Les étudiants de maîtrise et de doctorat affectionnent ce sujet de recherche. Quelques colloques ont été organisés par les facultés. Il faut souligner aussi des publications récentes dans le domaine des sûretés, du financement des entreprises, de la protection du consommateur. Il est heureux que l'ouvrage de Monsieur Bohémier vienne s'ajouter à cette liste. Les premières éditions de son volume se voulaient d'abord des instruments pédagogiques, celle-ci vise, au dire même de l'auteur, à répondre à un besoin plus général de notre collectivité. Dans son article plus haut cité, le professeur Bohémier considérait la dualité des sources du droit commercial comme deuxième facteur de difficulté pour la définition de son objet. Est-il besoin de rappeler que la Loi constitutionnelle de 1867 établit un partage des compétences en matière de droit commercial. Il est naturel que le droit fédéral s'inspire du droit anglais alors que le droit civil s'inspire du droit français. Le droit anglais connaît l'unité du droit privé : les mêmes règles s'appliquent aux actes civils et aux actes de commerce, aux commerçants et aux non-commerçants. Le droit français, au contraire, connaît la dualité du droit privé : des règles juridiques s'appliquent de façon spéciale aux commerçants et aux actes de commerce. L'auteur reproche à la doctrine et à la jurisprudence de n'avoir pas su dégager la physionomie propre du droit commercial québécois. Dans l'avant-propos, il écrit: [...] le droit commercial québécois est resté trop souvent attaché à ses sources françaises plutôt que de développer son contenu original. Par exemple, la doctrine et la jurisprudence ne cessent de référer à l'acte de commerce par nature et à l'acte de commerce par accessoire. En elle-même, cette distinction, inventée pour des raisons artificielles par le droit français, n'a aucune raison d'être chez nous. Elle conduit à établir une différence injustifiable entre l'acte de commerce par nature et Pacte de nature commerciale. Si l'on tient à conserver cette terminologie particulière, que l'on soit bien conscient des artifices qu'elle renferme, (p. V et VI) Selon lui, notre droit commercial présente un caractère hybride (p. 5) qu'il explique : Les codificateurs de 1866 avaient essentiellement pour fonction de «réduire en un code le droit en vigueur à l'époque, mais à l'image et suivant le plan du Code civil français». Confrontés à la difficulté de proposer des règles appropriées en matière commerciale tout en étant fidèles à leur mission, les codificateurs ont opté pour une solution de compromis. Mais ils se sont arrêtés à mi-chemin entre la solution française où un code distinct régit le commerce et le droit anglais qui, depuis longtemps, ne fait plus aucune distinction entre ce qui est commercial et ce qui ne l'est pas. Le législateur québécois a prévu, pour les matières

Chronique bibliographique 991 commerciales, une série d'exceptions au régime général de droit privé afin de tenir compte des nécessités propres au commerce. Cette approche dualiste pour répondre aux besoins spécifiques du commerce que Ton retrouve dans le Code civil et dans certaines lois, (Loi sur la protection du consommateur, L.R.Q., c, P-40.1 ; Code de la sécurité routière, L.R.Q., c. C-24.1 ; Loi sur les caisses d'épargne et de crédit, L.R.Q., c. C-4), n'est cependant pas présente dans toute la législation émanant de l'assemblée nationale. En effet, le législateur, influencé par les lois des provinces de common law et par les lois fédérales d'inspiration anglaise, favorise généralement un régime unifié dans le droit statutaire. (Loi sur les impôts, L.R.Q., c. 1-3, Loi sur les compagnies, L.R.Q., c. C-38, Loi sur les déclarations des compagnies et des sociétés, L.R.Q., c. D-l.) (p. 8) À cause du partage des compétences, l'étude du droit commercial québécois comprend un ensemble de règles se rapportant aux personnes qui se livrent à des activités commerciales. Si, au contraire, et c'est le point de vue que nous partageons, on définit le droit commercial d'une façon moins formelle comme l'ensemble des règles qui intéressent plus particulièrement les personnes qui se livrent à des activités commerciales, on peut parler alors d'un droit commercial du Québec. Cette dernière conception, il est vrai, déforme partiellement la réalité. Par exemple, selon cette opinion, le droit commercial comprend le droit de la faillite puisque le commerçant est souvent aux prises avec des problèmes de cette nature. Il ne faudrait pas ignorer pour autant que ce droit de la faillite présente également un intérêt majeur pour les non-commerçants. Malgré ce sérieux inconvénient, il y a lieu d'accepter cette conception large du droit commercial. Elle permet de regrouper diverses matières dans un tout plus unifie et, ainsi, de mieux comprendre comment est réglementée en fait l'activité commerciale. D'autre part, l'enseignement du droit commercial et le développement de cette discipline ne peuvent se réaliser adéquatement que si l'on parvient à s'entendre sur le contenu du droit commercial, et que si ce contenu est suffisamment précis pour former une branche de droit relativement autonome. (P-6) 1.2. La théorie de l'acte de commerce Après avoir rappelé les conceptions fondamentales, la conception subjective dont la pierre angulaire est la notion de commerçant et la conception objective qui considère l'acte en lui-même qui doit renfermer les éléments de spéculation, de circulation et d'entremise, l'auteur affirme que la doctrine et la jurisprudence utilisent simultanément l'une ou l'autre des conceptions sans trop chercher à formuler un système qui aurait des apparences de cohérence (p. 23). Cette situation s'explique par le fait que dans la très grande majorité des cas, il est facile de déterminer si un acte a un caractère civil ou commercial, peu importe que Ton adopte l'une ou l'autre des conceptions ; exemple : acte fait par un commerçant pour les fins de son commerce (p. 25). La question ne présente d'intérêt qu'en cas d'acte spéculatif fait par un noncommerçant ou de doute sur le statut de l'auteur de l'acte (p. 25). L'auteur prétend qu'une analyse attentive de la jurisprudence permet d'affirmer que les critères de la commercialité objective doivent prévaloir en droit québécois. Malgré tout, nous croyons que l'on peut fonctionner d'une façon adéquate avec le système de la commercialité objective, nonobstant ses imperfections, et cela pour plusieurs raisons fondamentales. En fait, il suffirait d'indiquer que nos tribunaux y sont parvenus d'une façon plus qu'honorable. De plus, dans la très grande majorité des cas, le caractère commercial d'un acte ne soulève aucune difficulté. Un acte intervient entre deux commerçants pour les fins de leur commerce. // est commercial quel que soit le système adopté et il n'y a pas lieu de discuter. Ce n'est qu'à titre exceptionnel ou sporadique que la qualification nous forcera à choisir un système et à appliquer les critères de qualification qui lui sont propres. Enfin, dans la mise en œuvre du système choisi, nous recourrons à des présomptions qui nous faciliterons grandement la tâche. Le droit civil est la règle et le droit commercial, l'exception. C'est dire qu'en cas de doute, il faut opter pour le caractère civil de l'acte et le fardeau de la preuve

992 Les Cahiers de Droit ( 19» 6 ) 27 c - de D - 983 incombe à celui qui prétend qu'un acte est commercial. L'acte fait par un non-commerçant est présumé civil. Un acte usuel fait par un commerçant, ou un acte fait dans le cadre d'une entreprise commerciale est présumé commercial. La preuve de l'état de commerçant se fera en fonction des usages, de la jurisprudence, de la doctrine et par l'analyse des actes accomplis habituellement par la personne en cause, (p. 45, voir aussi p. 26 et 39) L'auteur fait quelques observations intéressantes sur les concepts de base de la commercialité objective. Au sujet de la spéculation, le critère le plus essentiel, il faut, écrit-il, distinguer entre la recherche d'une compensation pécuniaire et la recherche d'un profit (p. 40). Quant au critère de la circulation, il ne présente aucun intérêt dans le domaine tertiaire des services (p. 42). Le critère d'entremise s'appuie sur le fait que le commerçant agit comme un intermédiaire (p. 43). Cependant, «la présence de chacun de ses éléments n'est cependant pas absolument nécessaire pour conclure à la commercialité d'un acte» (p. 43). Il conclut donc: [...] que les critères de la commercialité objective ne sont ni absolus ni parfaits. Quelques concepts abstraits n'arrivent pas à en cerner la réalité. La difficulté tient à la variété des activités commerciales, à l'intervention de la tradition qui vient parfois fausser la rationalité du système (par exemple, activités professionnelles ou agricoles) et au fait que ces critères ont été élaborés à une époque où le système économique était moins développé que le système actuel, (p. 45) Puis suit une classification des actes de commerce. L'auteur met en garde contre l'emploi de la terminologie traditionnelle issue du droit français. Il s'élève contre les expressions acte de commerce par nature et acte de commerce par accessoire (p. 51 à 57). Il retient plutôt la classification suivante : Tout d'abord les actes de commerce par application d'une disposition légale (l'assurance maritime et la vente d'effets mobiliers). Puis les actes de commerce par application des critères de la commercialité objective. Il distingue alors les actes objectivement commerciaux et ceux commerciaux par relation ; les contrats accessoires et les actes mixtes. Enfin, il consacre un développement aux opérations immobilières et aux effets de commerce. 2. Œuvre d'emprunt La deuxième partie du volume, près de trois cents pages, consiste en la reproduction d'articles et de jugements. La proportion entre les deux parties étonne. Pour un ouvrage destiné à l'ensemble de la communauté juridique, pourquoi reproduire tant de documents facilement accessibles? Six des sept articles proviennent soit des revues des facultés de droit du Québec, soit de la Revue du Barreau, soit de la Revue du Notariat. Un seul est moins accessible puisqu'il origine de la Revue trimestrielle de droit commercial. Des dix-huit décisions québécoises reproduites seulement deux sont des jugements inédits. Certes pour des fins pédagogiques, il peut être utile aux étudiants de trouver ces documents réunis. Mais pourquoi ne pas en faire alors un ouvrage séparé, un véritable «Casebook and Materials»? Il y aurait lieu de revoir la présentation pour en faire une œuvre plus originale. Chaque article et décision pourraient exposer le problème juridique, faire le lien avec le cours et comporter un bref commentaire. Pourquoi reproduire les décisions in extenso, alors qu'un résumé des faits permettrait de concentrer la discussion sur les motifs? Il y aurait aussi lieu de revoir le classement. Pourquoi aligner par ordre alphabétique des auteurs et des parties, articles et décisions? Admettons néanmoins que le choix des articles et des décisions est fort judicieux et que la reproduction de formules est avantageuse. Conclusion La première partie de l'ouvrage du professeur Bohémier est des plus intéressantes mais la deuxième laisse à désirer.

Chronique bibliographique 993 Certes au Québec, il n'y a pas encore de tradition de «Case Book» du moins en une édition officielle. Cependant, l'ouvrage du professeur Tancelin, Jurisprudence sur les obligations, P.U.L., 1981, est un exemple à suivre. Louise POUDRIER LEBEL Université Laval. D. BRADET, B. CLICHE, M. RACINE et F. THIBAULT, La Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles : Les aspects pratiques et juridiques du nouveau régime, Montréal, Yvon Biais, 1985, 790p., ISBN 2-89073-547-8. Sous la direction de P.L. BARIBEAU, Guide du gestionnaire des accidents du travail et des maladies professionnelles, Montréal, Wilson et Lafleur Ltée, 1985, 330p., ISBN 2-89127-034-7. A. PONTAUT, Santé et sécurité : un bilan du régime québécois de santé et sécurité au travail, 1885-1985, Montréal, Boréal Express, 1985, ISBN 2-89052-132-X. L'entrée en vigueur, le 19 août 1985, de la nouvelle Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles (NLAT) a créé un pressant besoin d'information, notamment chez les juristes, sur ce qui se présente comme le quatrième et dernier stade d'une réforme amorcée dès 1977. Trois éditeurs ont lancé autant d'ouvrages en vue de répondre à ce besoin. Pour apprécier les mérites respectifs de ces trois livres, il n'est pas inutile d'en rappeler le contexte historique récent. Première réforme en 1977 : un droit d'appel est créé contre les décisions de l'ancienne Commission des accidents du travail (CAT). Deuxième réforme en 1978 : le taux d'indemnisation est porté à 90% du salaire, et la Loi sur les accidents du travail (CAT) de 1931 fait l'objet d'une modernisation partielle. Troisième réforme en 1979 : la CAT change de nom et élargit sa vocation, par l'effet de la Loi sur la santé et la sécurité du travail. Parallèlement à ces réformes se développent et se poursuivent dans les années 80 d'âpres débats sur l'indemnisation des conséquences socioprofessionnelles des lésions, sur l'hypertrophie bureaucratique de la CSST, sur la judiciarisation du processus de révision de ses décisions, et sur la solvabilité à long terme du régime. L'élaboration parlementaire du projet de loi 42, devenu la NLAT, a été marquée par ces controverses, dont certaines ne sont d'ailleurs pas terminées. Les travaux préparatoires se sont du reste étalés sur plus d'un an et demi, durée record dans l'histoire parlementaire québécoise. En lever de rideau, la Commission du travail consacre en décembre 1983 une série de séances mouvementées à l'administration et au fonctionnement de la CSST. Renvoyé aux audiences publiques devant cette Commission après sa première lecture, le projet de loi 42 est soumis à une vigoureuse critique par les organisations patronales générales et sectorielles, les syndicats, les groupes de défense des accidentés, diverses professions de la santé, des groupes de juristes. Il sera profondément remanié avant sa réintroduction au stade de l'adoption du principe, en juin 1984. L'examen détaillé du projet par la Commission de l'économie et du travail a occupé plusieurs semaines de débats et donné lieu à l'adoption de 383 amendements: autre record. Le produit de l'opération est un texte de près de 600 articles, extrêmement détaillé dans la plupart des matières et novateur sur bien des points ce qui n'exclut pas la continuité quant aux principes de base du régime, à son champ d'application et aux modalités de son financement. L'ouvrage collectif publié chez Yvon Biais présente ce matériau législatif de façon très neutre. La moitié du volume n'est rien d'autre que la reproduction du texte français de la NLAT, accompagné d'un index analytique détaillé, commodément placé à la fin de l'ouvrage. Ce document est précédé d'un exposé d'une cinquantaine de pages où les auteurs, évoquant brièvement l'arrière-plan historique, présentent les dispositions principales de la loi. Cet exposé