TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE NANTES N 155974 M. B M. Danet Juge des référés RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS Le juge des référés Ordonnance du 31 juillet 2015 Vu la procédure suivante : Par une requête enregistrée le 16 juillet 2015, M. B, représenté par Me Verdier, demande au juge des référés, sur le fondement des dispositions de l article L. 521-1 du code de justice administrative : 1 ) d ordonner la suspension de la décision du 10 juillet 2015 par laquelle le président de l Université d Angers a refusé de l admettre en master 2 «Management Marketing et TIC» au titre de l année universitaire 2015-2016 jusqu à ce qu il soit statué au fond sur la légalité de la décision ; 2 ) d enjoindre à l autorité administrative, à titre principal, de procéder à son inscription et, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l ordonnance à intervenir, sous astreinte ; 3 ) de mettre à la charge de l Université d Angers la somme de 1 800 euros au titre de l article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - la condition d urgence est satisfaite compte tenu de la proximité de la rentrée universitaire et dès lors que la décision contestée a pour effet d interrompre la poursuite de ses études ; - il existe un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée : - elle est entachée d un défaut de motivation ; - elle est entachée d un vice de procédure dès lors qu aucune disposition législative ou réglementaire ne prévoit la mise en place d une commission de sélection ; - elle est entachée d une erreur de droit résultant d un défaut de base légale dès lors qu en l absence de publication du décret prévu à l article L. 612-6 du code de l éducation, l admission en master ne peut être subordonnée aux capacités d accueil de l établissement, au succès à un concours ou à l examen du dossier du candidat ;
- elle méconnaît le principe de l organisation de l enseignement supérieur en cycle prévue à l article L. 612-1 du code de l éducation, laquelle ne permet pas d exclure un étudiant en cours de cycle, auquel est au surplus associé un nombre de crédits par unité d enseignement ; - elle procède d une erreur de droit dès lors que l article 11 de l arrêté du 25 avril 2002, sur le fondement duquel a été prise la décision attaquée, renvoie aux conditions d admission en master applicable lorsque ce grade était conféré dans le cadre d un troisième cycle ; - l Université d Angers ne pouvait légalement se fonder sur la distinction entre master recherche et master professionnel, laquelle a été supprimée notamment par un arrêté du 22 janvier 2014. Par un mémoire en défense, enregistré le 28 juillet 2015, l Université d Angers, représentée par Me Brossard, conclut au rejet de la requête et à ce qu il soit mis à la charge de M. B une somme de 2 000 euros sur le fondement de l article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - la condition d urgence n est pas satisfaite dès lors que le requérant peut poursuivre ses études et obtenir une inscription dans un autre master 2 ou solliciter une inscription dans un autre cursus ; les inconvénients liés au délai prévisible du jugement de sa requête ne sauraient constituer un motif d urgence ; - il n existe aucun doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée : - le moyen tiré du défaut de motivation manque en fait ; - le moyen tiré du vice de procédure doit être écarté dès lors que l article 11 de l arrêté du 25 avril 2002 applicable en l espèce prévoit que l admission dans un parcours-type de formation débouchant sur le master professionnel est prononcée par le chef d établissement sur proposition du responsable de la formation et que le président de l Université d Angers a pu dans ce cadre et à bon droit mettre en place une «commission de sélection» chargée d auditionner les candidats et d éclairer le responsable de formation du master 2 ; - le moyen tiré du défaut de base légale doit être écarté dès lors qu ainsi qu il a été dit précédemment, l arrêté du 25 avril 2002, applicable en l espèce, permet la mise en place d une procédure de sélection des candidats pour l accès en master 2, alors même que le décret prévu à l article L. 612-6 du code de l éducation n a pas été publié ; - le requérant n est pas fondé à soutenir que la décision attaquée méconnaît le principe de l organisation de l enseignement supérieur en cycle figurant à l article L. 612-1 du code de l éducation et le système d attribution de crédit associé dès lors que, ainsi qu il a été dit, l article 11 de l arrêté du 25 avril 2002 n a pas été abrogé et continue à s appliquer, nonobstant la circonstance que le master relève du deuxième cycle ; en outre, la distinction entre le master professionnel et le master recherche n a pas disparu. Par un mémoire, enregistré le 29 juillet 2015, M. B conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens. Il soutient en outre que les écritures présentées pour l Université d Angers ne sont pas recevables dès lors qu il n est pas établi que son président ait reçu une habilitation du conseil d administration lui permettant de défendre en justice au nom de l établissement. 2
Vu : - la décision attaquée ; - la requête n 155971 enregistrée le 16 juillet 2015 par laquelle M. B demande l annulation de la décision du 10 juillet 2015 par laquelle le président de l Université d Angers a refusé de l admettre en master 2 «Management Marketing et TIC» au titre de l année universitaire 2015-2016 ; - les autres pièces du dossier ; - le code de l éducation ; -le code de justice administrative. Le président du tribunal a désigné M. Danet, conseiller, pour statuer sur les demandes en référé en application de l article L. 511-2 du code de justice administrative. Ont été entendus au cours de l audience publique du 29 juillet 2015 à 14h : - le rapport de M. Danet, juge des référés, - les observations de Me Verdier, avocat de M. B, - et les observations de Me Boucher, substituant Me Brossard, avocat de l Université d Angers. La clôture de l instruction a été prononcée à l issue de l audience. 1. Considérant que M. B, titulaire d une licence «Droit Economie Gestion» mention «Sciences économiques et de gestion» et inscrit au titre de l année universitaire 2014-2015 en master 1 «Management» au sein de l Université d Angers, s est porté candidat au titre de l année 2015-2016 au master 2 «Management Marketing et TIC» de la même université ; que par courriel du 10 avril 2015, l université lui a signifié le rejet de sa candidature ; que l exécution de cette décision a été suspendue par le juge des référés du tribunal de céans par une ordonnance n 1505324 du 7 juillet 2015 au motif que les moyens tirés de l incompétence de l auteur de l acte et du défaut de motivation étaient de nature à créer un doute sérieux quant à sa légalité ; qu après réexamen de la demande de M. B en exécution de ladite ordonnance, le président de l Université d Angers a, par une décision du 10 juillet 2015, refusé de l admettre en master 2 «Management Marketing et TIC» au titre de l année universitaire 2015-2016 aux motifs tirés de son niveau insuffisant et d un manque d expérience en lien avec les technologies de l information et de la communication, appréciés après un entretien de motivation et l examen de sa candidature par une commission d admission ; que M. B demande au juge des référés de suspendre l exécution de cette décision ; Sur les conclusions présentées au titre de l article L. 521-1 du code de justice administrative : 2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : «Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision (...)» ; 3. Considérant d une part, que compte tenu de la proximité de la rentrée de l année universitaire 2015-2016, et eu égard à la portée de la décision attaquée, la condition d urgence 3
posée par l article L. 521-1 précité du code de justice administrative doit être regardée comme remplie ; 4. Considérant d autre part, qu aux termes de l article L. 612-1 du code de l éducation : «Le déroulement des études supérieures est organisé en cycles. Le nombre, la nature et la durée des cycles peuvent varier en fonction des études dispensées. Chaque cycle, selon ses objectifs propres, fait une part à l'orientation des étudiants, à leur formation générale, à l'acquisition d'éléments d'une qualification professionnelle, à la formation à l'entreprenariat, à la recherche, au développement de la personnalité, du sens des responsabilités et de l'aptitude au travail individuel et en équipe. Au cours de chaque cycle sont délivrés des diplômes nationaux ou des diplômes d'établissement sanctionnant les connaissances, les compétences ou les éléments de qualification professionnelle acquis. Les grades de licence, de master et de doctorat sont conférés respectivement dans le cadre du premier, du deuxième et du troisième cycle. ( )» ; qu aux termes de l article L. 612-6 du même code : «L'admission dans les formations du deuxième cycle est ouverte à tous les titulaires des diplômes sanctionnant les études de premier cycle ainsi qu'à ceux qui peuvent bénéficier des dispositions de l'article L. 613-5 ou des dérogations prévues par les textes réglementaires. / La liste limitative des formations dans lesquelles cette admission peut dépendre des capacités d'accueil des établissements et, éventuellement, être subordonnée au succès à un concours ou à l'examen du dossier du candidat, est établie par décret après avis du Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche. La mise en place de ces formations prend en compte l'évolution prévisible des qualifications et des besoins, qui font l'objet d'une évaluation régionale et nationale.» ; que le requérant soutient que la décision attaquée est entachée d une erreur de droit résultant d un défaut de base légale dès lors qu en l absence de publication du décret prévu à l article L. 612-6 du code de l éducation précité, l admission en master ne peut être subordonnée aux capacités d accueil de l établissement, au succès à un concours ou à l examen du dossier du candidat ; qu un tel moyen est de nature, en l état de l instruction, à créer un doute sérieux quant à la légalité de l acte attaqué ; 5. Considérant qu il y a lieu dans ces conditions, et sans qu il soit besoin d examiner la recevabilité des écritures du défendeur, de suspendre l exécution de la décision du président de l Université d Angers du 10 juillet 2015 ; Sur les conclusions aux fins d injonction : 6. Considérant que la suspension de l'exécution de la décision du 10 juillet 2015 ainsi ordonnée implique que l Université d Angers, en l absence de tout autre motif y faisant obstacle, procède, à titre provisoire, à l inscription de M. B en master 2 «Management Marketing et TIC» au titre de l année universitaire 2015-2016 en attendant qu il soit statué au fond sur la légalité de ladite décision, dans un délai d un mois à compter de la notification de la présente ordonnance ; qu il n y a pas lieu d assortir cette injonction d une astreinte ; Sur les conclusions présentées au titre de l article L. 761-1 du code de justice administrative : 7. Considérant d une part, les dispositions de l article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu il soit mis à a charge de M. B la somme demandée par l Université d Angers au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que les conclusions présentées à ce titre par l Université d Angers doivent, dès lors, être rejetées ; 4
8. Considérant d autre part, qu il y a lieu, dans les circonstances de l espèce, de mettre à la charge de l Université d Angers une somme de 750 euros sur le fondement de ces dispositions ; O R D O N N E Article 1 er : L exécution de la décision du 10 juillet 2015 du président de l Université d Angers est suspendue. Article 2 : Il est enjoint à l Université d Angers de procéder à l inscription, à titre provisoire, de M. B en master 2 «Management Marketing et TIC» au titre de l année universitaire 2015-2016, dans un délai d un mois à compter de la notification de la présente ordonnance, en attendant qu il soit statué au fond sur la légalité de la décision dont l exécution est suspendue. Article 3 : L Université d Angers versera à M. B une somme de 750 (sept cent cinquante) euros sur le fondement de l article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Les conclusions présentées par l Université d Angers sur le fondement de l article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B est rejeté. Article 6 : La présente ordonnance sera notifiée à B et à l Université d Angers. Fait à Nantes, le 31 juillet 2015. Le juge des référés, Le greffier, J. DANET H. RONDEAU La République mande et ordonne au ministre de l éducation nationale, de l enseignement supérieur et de la recherche en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, Le greffier, H. Rondeau 5