Comment prendre en compte les différences entre élèves en ce qui concerne leurs acquis langagiers?

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Transcription:

NOMBRES ET OPÉRATIONS : PREMIERS APPRENTISSAGES Lycée Buffon, Paris XV 12-13 novembre 2015 Comment prendre en compte les différences entre élèves en ce qui concerne leurs acquis langagiers? Julie Nys Docteur en psychologie (Université Libre de Bruxelles, Belgique)

Etude 1 Impact du langage sur le développement des capacités numériques? Une approche : Evaluer les compétences numériques d enfants dont l acquisition du langage est altérée Nys, Content & Leybaert, 2013 : évaluation d enfants présentant une dysphasie = Désordre langagier en lien avec un dysfonctionnement précoce des structures cérébrales spécifiquement mises en jeu lors du traitement de l information langagière, en dehors de toute carence psychoaffective, de déficit intellectuel, de déficience auditive, ou de pathologie relationnelle

Participants Expression Compréhension «Amélie, quel âge astu?» Déficit de production phonologique Bavard mais incompréhensible Normal «awa kaé moi» Dysphasie phonologicosyntaxique Style télégraphique «Leli kakan» Agnosie auditivo-verbale «?» Dysphasie lexicalesyntaxique Normal «Je suis J ai carte» Dysphasie sémantique pragmatique «J ai joué avec mes amis» Dyspraxie verbale «a - an»

Participants Dysphasie 15 enfants «jeunes» dans le cycle primaire (âge moyen = 8.9 ans) 13 enfants «âgés»» dans le cycle primaire (âge moyen = 11.8 ans) Développement typique 71 enfants «jeunes» dans le cycle primaire (âge moyen = 8.7 ans) 51 enfants «âgés» dans le cycle primaire (âge moyen = 11.3 ans) Nys, Content, & Leybaert, 2013

Epreuves intellectuelles Indice de Raisonnement Perceptif (WISC IV) Epreuves langagières Phonologie (ELO Score Brut) Max. = 32 Phonologie (L2MA Nombre d erreurs) Max. =77 Vocabulaire réceptif (EVIP Score Standard) Morpho-syntaxe (ECOSSE Nombre d erreurs) Max.= 92 Chaîne numérique verbale Tâches Dysphasiques (n = 15) Jeunes Contrôles (n = 71) Dysphasiques (n = 13) Agés Contrôles (n = 51) M (SD) M (SD) M (SD) M (SD) 98.1 (10.3) 100 (15) 95.2 (9.6) 100 (15) 17.8 (8.9) 31.5 (0.8) 21.9 (8.4) 31.7 (0.5) 23.2 (10.6) 2 (3) 18.5 (13.6) 1 (3) 82.6 (17.5) 100 (15) 79.8 (16.1) 100 (15) 23.7 (7.4) 9.5 (5.9) 17.9 (5.6) 5.7 (4.2) Longueur (Max. 100) 58.0 (32.4) 98.9 (7.3) 76.2 (30.3) 99.6 (3.2) Niveau d élaboration (% de RC) 56.7 (21.0) 91.2 (12.0) 80.8 (16.9) 98 (4.8)

Tâches Exacte Résolution exacte d additions complexes 45 + 24 =? Approximative Comparaison de quantités Non symbolique (collections de points) Symbolique (nombres arabes) Résolution approximative d additions complexes Non symbolique (collections de points) Symbolique (nombres arabes) 69 vs. 56 (45 + 24) vs. 56

Taux d erreurs Calcul exact 100 90 80 70 60 50 40 30 20 10 0 Jeunes Typique Dysphasie Agés

Taux d erreurs Comparaison de quantités (non symbolique) 50 45 40 35 30 25 20 15 10 5 0 Jeunes Typique Dysphasie Agés

Taux d erreurs Calcul approximatif (non symbolique) 50 45 40 35 30 25 20 15 10 5 0 Jeunes Typique Dysphasie Agés

Corrélation avec les habiletés langagières? Corrélations entre le taux d erreurs obtenu lors des tâches expérimentales et les mesures langagières obtenues par les enfants dysphasiques (n =28) Taux d erreurs Calcul Exact Comparaison de quantités (symbolique) Comparaison de quantités (non symbolique) Calcul Approximatif (symbolique) Calcul Approximatif (non symbolique) Vocabulaire réceptif EVIP (Score Standard) Morpho-syntaxe ECOSSE (Nombre d erreurs) Phonologie - Répétition de mots L2MA (Nombre d erreurs) Note. * p <.05. ** p <.01.15.28.10.27.29.22.10 -.04.16 -.16.52**.29.11.25.08

Etude 1 Conclusions Chez l enfant d âge primaire : Concomitance fréquente du déficit langagier et de l altération du système numérique exact Différence significative entre développement typique et dysphasie au niveau de la connaissance de la chaîne et des performances en calcul exact Corrélation significative avec les habiletés langagières Le système numérique approximatif ne semble pas être fondamentalement entravé par le déficit langagier Pas de différence significative entre développement typique et dysphasie Pas de corrélation significative avec les habiletés langagières

Etude 2 Participants Développement typique 28 enfants de 1 ère maternelle (âge moyen = 3 ans 8 mois) 26 enfants de 3 ème maternelle (âge moyen = 5 ans 8 mois) Nys & Content, in prep.

Tâches Système numérique exact Chaîne numérique verbale («compte le plus loin possible») Capacités de dénombrement («compte combien il y en a») Système numérique approximatif Tâche non verbale d estimation de quantités

Comptage (exact) 1 ère maternelle (n=28) 3 ème maternelle (n=26) M (SD) M (SD) Chaîne numérique verbale Longueur 8 (4) 34 (19) Dénombrement Nb d items 5 (3) 16 (5)

Estimation non verbale (approximative) Faibles compteurs Bons compteurs

Chaine verbale Chaîne verbale Corrélations 16 1ère maternelle 100 3ème maternelle 12 75 8 50 4 25 0-3 -2-1 0 1 2 3 Vocabulaire productif (Z score) 0-3 -2-1 0 1 2 3 Vocabulaire productif (Z score)

Précision estimation (COV moyen) Précision estimation (COV moyen) Corrélations 1,2 1ère maternelle 0,8 3ème maternelle 0,8 0,4 0,4 0-3 -2-1 0 1 2 3 Vocabulaire productif (Z score) 0-3 -2-1 0 1 2 3 Vocabulaire productif (Z score)

Conclusions générales Impact du langage sur le développement des capacités numériques? Relation avec le niveau de connaissance de la chaîne numérique verbale Relation avec les capacités arithmétiques Relation avec la précision des compétences numériques approximatives chez le jeune enfant

Recommandations Privilégier prioritairement le développement de la chaîne numérique verbale et des capacités de dénombrement... Attention particulière aux enfants présentant des faiblesses langagières Car petites causes, grands effets... tout en sollicitant le sens du nombre! Lien avec représentation concrète des quantités correspondantes, et manipulation sensorimotrice pour favoriser un apprentissage «véridique» de la chaîne et un meilleur apprentissage de ce que représentent les nombres pour, plus tard, agir en soutien aux compétences numériques exactes

Julie Nys Docteur en psychologie (Université Libre de Bruxelles, Belgique)