.,.,. LES FOUILLES DE MÉGARA HYBLAEA ( ) Ministero dei beni e delle attività culturali e del turismo -Bollettino d'arte.

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Transcription:

LES FOUILLES DE MÉGARA HYBLAEA (1949-1959) OIXANTE-DIX ans après les premières recherches effectuées, en 1879, par Cavallari, sur le site de Mé S gara Hyblaea, l'école française de Rome a eu la chance de pouvoir reprendre, au cours d'une série de campagnes nouvelles, l'étude systématique du site de cette colonie, fondée par les Mégariens de Grèce, dans l'actuelle baie d'augusta, à vingt kilomètres environ au nord de Syracuse. De cette Mégara occidentale, que savait-on? Peu de choses en vérité. Les auteurs anciens donnent quelques repères chronologiques: selon Thucydide, I} la ville fut fondée quelques années après Syracuse, essaima à son tour cent ans plus tard pour fonder Sélinonte, et Hérodote rapporte sa destruction par la toute puissante Syracuse sous le règne de Gélon, vers 483.2} Thucydide encore indique au passage, à propos d'un épisode de la grande expédition athénienne contre Syracuse, que le site de Mégara était abandonné en 415.3} Puis, l'existence à l'époque hellénistique d'une nouvelle Mégara est mentionnée de façon épisodique par Diodore, 4} sous le règne d'agathocle, en 309, et, de façon plus précise, par Tite-Live 5} qui signale sa destruction par Marcellus, au cours du siège de Syracuse par les Romains, vers 213. Signalons enfin les deux passages où Cicéron 6} et Strabon 7} considèrent que Mégara est, de leur temps, une ville à peu près morte et, si l'on ajoute que son nom figure dans [' Itinéraire d'antonin, on peut dire que la tradition littéraire à son sujet n'est guère riche: tout ce qu'elle apporte, c'est une date de fondation, vers 728, une destruction vers 483, puis, tout au plus, la vie intermittente d'une bourgade hellénistique installée sur les ruines de la cité archaique. A dire vrai, le but des fouilles de Cavallari d'abord, puis d'orsi, était moins de vérifier ou de compléter ces données historiques que de sauver une partie de la riche nécropole pillée par les fouilleurs cjandestins et de dégager les restes de quelques constructions monumentales (mur d'enceinte et temple).8) Ces travaux, qui mirent au jour un important matériel, apprirent peu de choses sur l'histoire meme de la ville. Notre but, dès 1949, fut tout différent: de nombreux sondages stratigraphiques furent effectués à l'intérieur de la zone d'habitations et si, depuis, nous avons du procéder aussi au dégagement de certains édifices, c'est après avoir exploré l'ensemble du site, dans le mesure du moins où l'état actuel du terrain le permettait. De ces onze années de recherches, il est d'ores et déjà possible de dresser un rapide bilan, mais dont les conclusions doivent encore etre considérées comme provisoires. g}.,.,. ~E(ROPOL.I ARCf\IC.A FIG. I - MEGARA HYBLAEA - PLAN SOMMAIRE DES FOUILLES type analogue à ce lui de Stentinello. IO} Restait à déterminer le tracé d'ensemble de ce fossé et l'emplacement exact du village qu'il protégeait. La fouille a révélé qu'il s'adossait en forme de demi-cercle à la falaise septentrionaie du plateau sur une longueur de 200 m. environ et une largeur maxima de 135 m. De tracé sinueux et taillé irrégulièrement dans une roche de résistances inégales, le fossé a une largeur à peu près constante (de 3 m. 25 à 4 m.), une profondeur très variable (de I m. 50 à 4 m. 50). Le matériel comporte de la céramique du "type de Stentinello "' à décor géométrique incisé ou estampé, fabriquée sur piace, comme l'indique la découverte de deux poinçons-matrices. L'outillage se distingue par la prédominance du silex sur l'obsidienne; sont notables de petites haches en pierres dures, des meules allongées en roches volcaniques, des bassins (de décantation?) à fond d'argile crue. D es fonds de cabanes se sont révélés par les trous de poteaux-porteurs. Une tombe a été o u.. -.J O Cl Une des conclusions les plus indiscutables est que les deux plateaux bas dominant la mer qui forment le site de Mégara Hyblaea n'étaient pas habités au moment de l'arrivée des Grecs. En effet, dès 1917, Orsi, en dégageant les fondations d'un tempie archalque, avait découvert l'existence du fossé d'un village néolithique d'un FIG. 2 - FRAGMENT DE COUPE GÉOMÉTRIQUE PROTOCORINTHIENNE (VERS 750-740)

FIG. 3 - FRAGMENTS DE CRATÈRES GÉOMÉTRIQUES PROTOCORINTHIENS (SECONDE MOITIÉ DU VIII S.) FIG. 4 - FRAGMENT DE PYXIS GÉOMÉTRIQUE PROTOCORINTHIENNE (VERS 740) retrouvée au milieu des habitations. L'ensemble appartient à la phase la plus récente de la civilisation néolithique. Mais en aucun point du terrain les fouilles n'ont fait apparaitre la moindre tl'ace des civilisations du Bronze ou du premier age du Fer. C'est donc sur un site désert que s'installèrent les Mégariens, en accord avec le roi sicule Hyblon. Mais FIG. 5 - FRAGMENT DE BOL RHODIEN (TROISIÈME QUART DU VII s.) - et c'est la seconde conc1usion qui se dégage de nos recherches -, il semble bien que la fondation de Mégara soit antérieure à celle de Syracuse. En effet, sur la partie nord du site, qui fut la première occupée (pian, fig. I), les fouilles ont partout fourni une céramique protocorinthienne géométrique dont une part importante est plus ancienne que celle trouvée à Syracuse. On a en effet recueilli à Mégara de nombreux exemplaires de coupes géométriques, à parois épaisses, dont la décoration occupe un cadre réservé au milieu des filets qui ornent la vasque: ces coupes appartiennent au tout début de la production protocorinthienne (fig. 2); II) or, on ne recontre à Syracuse que des coupes d'un type déjà plus évolué (parois plus fines, rebot'd plus évasé vers l'extérieur). De meme Mégara a fourni une série de fragments de grands cratères protocorinthiens géométriques, de type nettement ancien (fig. 3), dont il n'y a pas non plus trace à Syracuse. Enfin certaines pièces, tel ce fragment d'une pyxis qui était décorée de deux oiseaux symétriques de dessin naturaliste (fig. 4), appartiennent à une phase ancienne du protocorinthien géométrique, bien antérieure à celle de ces vases - notamment des skyphoi - décorés de fil es de hérons schématiques, qui est pratiquement la seule à etre représentée à Syracuse.

D'autre part, en reprenant l'examen des traditions littéraires, notamment celle d'ephore et de Strabon qui ne concorde pas avec celle adoptée par Thucydide, il nous a semblé que l'on pouvait, que l'on devait en déduire une date de fondation voisine de 750. C'est donc à peu près dix-sept ans avant Syracuse qu'aurait été fondée Mégara Hyblaea. 12) Dans le courant du VIIe sièc1e, la ville s'étendit en direction du sud sur le second et le plus petit des deux plateaux dominant la mer (pian, fig. I). A cette époque, Mégara, qui fonde Sélinonte, semble avoir connu une assez grande prospérité. Les sondages ont révélé un peu partout les fondations, malheureusement assez mal conservées, d'habitations construites en pierres sèches grossièrement polygonales, accompagnées de silos creusés dans le rocher et de nombreux puits, qui étaient remplis d'une abondante céramique d'importation ou de fabrication locale. Les importations les plus nombreuses et les plus riches sont d'origine protocorinthienne; la très grande abondance des vases d'usage courant (coupes et skyphoi notamment) pro uve que Mégara, comme les autres cités coloniales de la Si cile orientale, faisait partie du domaine commerciai de Corinthe qui, à céìté de quelques objets de luxe, fournissait aux colons une part importante de la vaisselle de tous les jours. A céìté des importations protocorinthiennes, celles de Rhodes (fig. 5), de la Grèce de l'est ou de l'etrurie ne sont pas négligeables par leur qualité; mais leur nombre reste relativement modeste. Cependant, pour cette époque, la série la plus intéressante est représentée par une céramique locale aussi riche que variée. C'est là sans doute l'un des principaux intérets des recherches entreprises à Mégara que d'avoir démontré de façon indiscutable l'existence en Occident d'ateliers produisant une céramique peinte à décor géométrique ou figuré d'une qualité artistique souvent comparable aux pièces de Grèce propre. 13) De fait, des fouilles récentes entreprises sur certains des principaux sites grecs d'occident ont montré le développement parallèle de fabriques locales d'importance analogue. 14) Pourtant, dans l'état actuel de nos connaissances, c'est à Mégara que, dans le domaine de la céramique, les modes d'expression artistique semblent avoir été les plus variés. En effet, dans la production des ateliers mégariens apparaissent c1airement toutes les phases par lesquelles évolue la céramique grecque du haut archaisme: c'est d'abord, peu de temps après la fondation de la ville, un style franchement géométrique qui s'inspire des modèles protocorinthiens. Mais ces créations ne se limitent pas, comme à Corinthe, à la fabrication de petits vases; au contraire, les potiers mégariens FIG. 6 - FRAGMENT DE DINOS MÉGARIEN GÉOMÉTRIQUE (DEBUT DU VII s.?) semblent avoir eu une certaine prédilection pour les grands récipients et notamment pour les dinoi qui constituent certainement un des éléments les plus caractéristiques de la production mégarienne. L a surface de ces grimds vases est ornée des memes motifs géométriques FIG. 7 - FRAGMENTS DE DINOI MÉGARIENS ORIENTALISANTS (SECOND QUART DU VII s.)

exemple des cerc1es concentriques) complètent heureusement la décoration; 15) il s'y ajoute parfois des éléments figurés de style encore géométrique, comme des oiseaux, des chevaux (fig. 7), des bateaux (fig. 6). Cette phase géométrique est suivie assez rapidement par un style orientalisant OÙ la décoration figurée occupe la première piace. Les fragments de dinoi ici reproduits (figg. 7, 8) permettent de juger l'originalité de cette céramique qui s' écarte nettement des vas es protocorinthiens contemporains et ne trouve son équivalent réel que dans des séries assez limitées de vases de la Grèce propre (protoattique moyen polychrome, grands vas es orientalisants des Cyc1ades, argien orientalisant). 16) Comme ces derniers elle utilise une polychromie assez savante combinée avec un dessi n en partie en silhouette et en partie au trait: sur un englobe ivoire se détachent des figures cernées d'un trait brun sombre encadrant des surfaces d'un brun beaucoup plus c1air, tandis que le blanc et le rouge sont utilisés pour les visages et pour certains détails de l'ornementation. Le des~in fait déjà preuve d'une grande maitrise pour l'époque (second quart-milieu du VIle siècle): on notera en particulier l'allure vivante et souple des personnages. Mais assez vite les infiuences corinthiennes reprennent le dessus et s'imposent aussi bien dans la technique que dans le style; dans sa dernière phase la céramique orientalisante de Mégara est une céramique à figures noires et à incisions où d'abondants rehauts rouges évoquent la dernière phase de la céramique protocorinthienne à figures noires. Les scènes à personnages sont relativement fréquentes, associées à des motifs caractéristiques du protocorinthien, comme la tresse multiple et la frise de lotus, mais les zones d'animaux variés sont aussi couramment représentées, dans un style qui ne manque pas de FIG. 8 - FRAGMENTS D'UN SUPPORT DE DINOS MÉGARIEN POLYCHROME (VII S.) vigueur et de réalisme (fig. 9). simples du protocorinthien (lignes brisées, chevrons, Une bonne partie de cette céramique locale à décoration figurée provient de plusieurs dépots votifs, seules etc...), mais un effet décoratif originai est obtenu par la multiplication de ces éléments géométriques groupés en traces subsistantes des sanctuaires remontant à cette panneaux, tantot horizontaux, tantot verticaux, et parfois époque; ils renfermaient également de nombreux petits meme obliques. Quelques motifs curvilignes simples (par aryballes protocorinthiens, de.s alabastres du style de transition, des pyxides, des oenochoès, des olpès corinthiennes, mais aussi des anneaux, épingles et fibules de bronze ou d'argent, des ivoires, des scarabées en falence. Il s'agit évidemment d'objets de luxe, relativement rares dans les habitations où abondent en revanche les petits vases locaux d'usage courant à décor subgéométrique très simple. Cette production brillante semble avoir cessé avant la fin du VIle sièc1e. Le fait d'ailleurs est général en Occident et n'a pas de signification particulière pour Mégara. En effe t, pour le VIe sièc1e, on ne trouve guère qu'une céramique d'usage courant, de technique souvent peu soignée, à décoration très rudimentaire: cette fabrication locale s'est trouvée attestée par la dé FIG. 9 - FRAGMENTS D'UN DINOS MÉGARIEN ORIENTALISANT (VERS 630) couverte d'un four de potier de cette

époque, de forme circulaire, qui renfermait encore quelques rebuts de fabricàtion. Toute la céramique de qualité est désormais importée. Corinthe continue pendant longtemps (jusque vers la fin du VIe siècle) à imposer au marché colonial sa production presque industrielle. Cependant les importations ioniennes sont assez abondantes durant la meme période; mais, dans la seconde moitié du VIe siècle, ce sont surtout les vases attiques qui sont importés, et en très grand nombre. Le VIe siècle se caractérise, à Mégara comme ailleurs en Sicile, par l'édification de grands temples doriques. Malheureusement, il n'en reste que des vestiges épars ou des traces difficilement identifiables: en effet tous ces édifices ont été, dès l'époque hellénistique, démontés jusqu'à la dernière assise des fondations, les éléments de la décoration débités en forme de b~ocs ou passés au four à chaux, et il n'en subsiste que les tranchées de mise en piace des assises creusées dans une roche friable. Il ne survit guère, de la décoration de ces grands tem.ples, que des restes assez nota bi es des terres cuites architectoniques peintes qui couronnaient les édifices. Les types présentent le plus souvent les caractères habituels du style sicilien, qui semble s'etre répandu sur toute la Sicile, depuis Naxos jusqu'à Géla: geison à caissette et si ma avec tubes servant de gargouilles. Une sima frontonale, qui provient du tempie "C" (pian, fig. I), comporte cependant une décoration assez originale et jusqu'à présent, semble-t-il, unique. La partie piane de la sima est ornée d'un méandre oblique, fianqué de feuilles doubles, tandis que la corniche porte une décoration de feuilles allongées et de languettes d'un style plus classique (fig. IO). Pour le moment seuls les emplacements de deux grands temples (" A" et "C,,) et de deux tempietti (" B" et "E,,) peuvent etre identifiés avec certitude (pian, fig. I). Mais les éléments subsistants permettent d'affirmer l'existence de plusieurs autres sanctuaires de dimensions variées: parmi les éléments d'architecture épars et remployés dans des constructions plus tardives figurent en effet plusieurs séries de triglyphes, de chapiteaux et de colonnes. Le mieux conservé des sanctuaires jusqu'à présent identifiés est le tempietto "B" découvert en 1950. La fondation, longue de 13,70/ 14 m. sur 6,27/7,07 m. est de pian curieusement trapézoidal. 17) L'élévation a pu en etre reconstituée: c'est un naiskos aux murs nus surmonté d'une simple corniche; la stratigraphie permet de dater l'édifice de la fin du VIe ou du début du Ve siècle. Un autre petit sanctuaire datant de la meme époque n'a pu etre exactement localisé; c'est en effet dans un puits, sur la bordure méridionale du plateau nord, au voisinage de la mer (pian, fig. I: "X,,), qu'ont été retrouvés de nombreux éléments appartenant à la décoration de l' édifice: corniche à décoration polychrome, fragment d'une métope (?) conservant le corps d'un sphinx et diverses pièces du couronnement en terre cui te, qui est d'un type normal en Grèce à cette époque, mais assez rare en Sicile; cet édifice était en effet couvert de tuiles plates, ornées sur les bordures inférieure et latérale, FIG. IO - FIG. 12 - ELÉMENT D' UNE SIMA DE TERRE CUI TE (PREMIÉRE MOITIÉ DU VI s.) FIG. I I - AN TÉFIXE EN TERRE CUITE (FIN DU VI s.) SIMA IONIQUE EN MARBRE (DERNIER QUART DU VI s.)

FIG. 13 - Arula DE TERRE CUITE À COMBAT D'ANIMAUX (VI S.) et comportait des couvre-joints terminés par des antéfixes en relief, formés alternativement de palmettes et de tetes de Gorgone. Un antéfixe isolé, provenant d'un autre édifice, est en forme de tete féminine, d'un sty'le très ionisant (fig. II). A coté des temples doriques, Mégara a vu s'élever également, vers la fin de l'époque archalque, au moins un édifice d'ordre ionique. On sai t en effet que l'architecture sicilienne de la fin du VIe et du début du Ve FIG. 14 -, ". 4, TOMBE DE LA NÉCROPOLE MÉRIDIONALE (DEBUT DU V S.) siècle est fortement pénétrée d'influences ioniques, et les éléments décoratifs ioniens viennent se plaquer sur les lignes beaucoup plus sobres de l'ordre dorique. 18) En revanche on ne connaissait pas jusqu'à présent, en Sicile meme, de constructions de style purement ionique; or c'est certainement d'un édifice de cette sorte - probablement un petit tempie - que proviennent plusieurs fragments et un élément complet de si ma en marbre, ornée de palmettes et de fleurs de lotus en relief, alternant avec des tetes de lion formant gargouilles (fig. 12)' L'allure générale de la décoration n'est pas sans rappeler la corniche du trésor des Siphniens à D elphes; 19) mais la tete de lion a déjà toutes les caractéristiques des tetes de lion siciliennes, telles qu'on les retrouvera plus tard à l'athénaion de Syracuse, à Himère ou au tempie de Démèter à Agrigente. 20) La ville du VIe siècle a souffert, plus encore que les temples, des destructions opérées à une époque plus tardive par les nouveaux habitants du lieu. L'organisation urbaine demeure, dans l'ensemble, très hypothétique: tout au plus peut-on supposer avec quelque vraisemblance que l'agora archalque occupait à peu près l'emplacemen t de l'agora hellénistiq ue ; des traces de constructions plus anciennes subsistent en effet sous les édifices qui bordaient cette dernière.

FIG. 15 - AGORA HELLÉNISTIQUE VUE DU NORD : AU PREMIER PLAN, LE TEMPLE HELLÉNISTIQUE; AU MILIEU, LE GRAND PORTIQUE De nom.breux restes de murs des habitations archalques apparaissent ici et là, mais toujours trè$ fragmentaires et ne perm.ettant pas de reconstituer un pian d' ensemble: ces maisons semblent cependant bien construites, en petites pierres sèches soigneusement appareilléesj un puits, régulièrement, les accompagne. Pal'tout:, les bobines, les pesons provenant des métiers à tisser, les meules à grain, témoignent des activités domestiques. Plus intéressante est la présence fréquente, dans ces habitations du VIe siècle, de petits aute1s domestiques en terre cuite. Ces arulae sont très souvent ornées, en léger relief, de combats d'animaux, d'un style sobre et vigoureux (fig. 13) j 2 1) mais parfois elles comportent une décoration plus chargée: course de chars 22) ou scènes mythologiques par exemple (notamment une arula représentant Ulysse et un des ses compagnons sortant de l'antre de Polyphème). Les limites de la cité du VI" siècle sont cependant c1airement inscrites sur le terrain: e!les sont marquées par les restes de l'enceinte dont tout le secteur occidental avait déjà été dégagé par Cavallari et Orsi, 23) mais dont un nouveau et important tronçon, asse2; bien conservé, a été découvert sur la bordure nord du site. Avec sa robuste paroi extérieure de gros blocs présentant une inclinaison marquée et maintenant un épais agger de pierres et de terre cette muraille s'apparente étroitement au second mur d'enceinte archalque de Lentini j 24) mais elle paralt nettement plus récente que cette dernière: les fragments de céramique en piace dans la fondation descendent en effet jusque vers 510 (coupe attique de style sévère). Ce serait donc probablement asse2; peu de temps avant la prise de la ville par Gélon en 483 que les Mégariens auraient jugé nécessaire de se protéger par une muraille. La brusque désertion du site vers 483 est attestée de façon frappante par l'aspect de certaines tombes de la nécropole méridionale, située à quelques centaines de mètres au Sud de Mégara, sur l'emplacement où s'élèvent maintenant les usines d'une fabrique de cimento Plusieurs groupes de caveaux funéraires du VIe siècle, construits en grandes dalles encastrées dans le rocher, ont été explorés dans ce secteurj l'un d'eux, une sépulture de famille, groupait trei2:e tombes. Or certaines d'entre e!les avaient été utilisées et contenaient un matériel de la fin du VIe ou du début du Ve siècle (fig. 14), tandis que d'autres étaient intactes, mais totalement vides: il s'agit évidemment des tombes préparées pour d'autres membres de la famille et qui n'ont jamais pu etre utilisées, toute la population ayant été déportée par Gélon, les riches à Syracuse, les pauvres, pour etre vendus hor" de la Sicile. 25) FIG. 16 - ELÉMENT DE LA FRISE DU TEMPLE HELLÉNISTIQUE FIG. 17 - LARMIER DU TEMPLE HELLÉNlSTIQUE

FIG. 18 - SIMA ET GARGOUILLE DU TEMPLE HELLÉNISTIQUE Après une interruption d'environ cent quarante ans, la vie reprend à Mégara Hyblaea à l'époque, semble-t-il, de Timoléon (344-336). Seule une partie restreinte du FIG. 19 - TETE D'APHRODITE EN CALCAIRE (FIN DU VI s.) site est alors réoccupée : l'extrémité orientale du plateau nordi dans cette.zone en effet on trouve d'asse.z nombreux témoignages - céramique et monnaies - remontant au troisième Quart du IV sièc1e et, immédiatement en bordure, une petite nécropole avec des vases à vernis noir et à figures rouges de la seconde moitié du IV sièc1e. 26) Mégara ne redevint une cité asse.z importante qu'à partir de la fin du IV sièc1e, sous le règne d'agathoc1e semble-t-il, c'est à dire à partir de 317. Alors l'agora s'entoure de monuments (fig. 15): un tempie et un long portique au nord (44,05 sur 7Ao m.), des bases et des sculptures votives dans le voisinage. 27) La ville s'étend de nouveau sur les deux plateaux Nord et Sud et réoccupe une grande partie de l'emplacement de la cité archalque. De vastes maisons s'édifient le long des ruesi leur cour intérieure n'est bordée d'un portique que sur le coté Nord, le plus exposé au solei!. Le sol des pièces est souvent bétonné, les murs revetus d'un enduit peint. Le matériel qu'on y recueille - céramique à vernis noir, statuettes de terre cui te, vasques et grands plats décorés, petits autels, nombreuses monnaies d'argent ou de brome - ne diffère en rien de celui qu'on trouve, à la meme époque, sur les divers sites de la Sicile orientale. Plus intéressants sont les édifices publics, et notamment le petit tempie dorique in antis (probablement un Aphrodision) dont l'emplacement (pian, fig. I: "F,,) a été reconnu immédiatement au Nord de l'agora (fig. 15): il n'en subsiste in si tu que quelques blocs de la fondationi mais de très nombreux fragments du couronnement - architrave, frise (fig. 16), corniches latérales et de façade, blocs du tympan - ont été retrouvés sur piace, négligés par ceux qui, dès la fin du troisième sièc1e avant J. C., ont exploité l'édifice comme une carrière de pierres toutes pretes à et re réutilisées. Des éléments suffisants ont été ainsi recueillis, y compris le tambour inférieur d'une colonne et le bas d'un chapiteau, pour permettre une reconstitution d'ensemble précise de l'édifice. Le tempie mesure, à sa fondation, environ sei.ze mètres sur neufi il s'ouvre vers l'est par un pronaos profond de 4,60 m. Il était tout entier, sauf la fondation, construìl en calcai re blanc très fin de Melilli. La présence de crampons de métal entre les blocs et la précision des mesures sont l'indice d'une construction très soignée pour la Sicile. Les deux colonnes mesurent 0,79 m. de diamètre à la basei la hauteur totale de la colonne, avec son chapiteau, est de 4,535 m. L'architrave et la frise, qui compotte deux triglyphes dans les entrecolonnements (fig. 16), couraient tout autour du tempie. Le geison est décoré, à la base, en plus du larmier habituel, de deux moulures ioniques (fig. 17) i sur les cotés, il fait bio c avec la sima, qui est ornée de belles tetes de lion servant de gargouilles. En façade la sima, un peu plus haute que sur les cotés, se détache du geison et forme la corniche rampante du frontoni elle est décorée, elle aussi, à la base, des deux memes moulures ioniques et comporte également des tetes de lion (fig. 18), qui sont de fausses gargouilles vers le centre, de vraies gargouilles vers les angles. La hauteur totale du couronnement est, sur les cotés, de 1,64 m., en façade, de 2,70 m. Le falte du tempie s'élevait donc à 7,235 m. au dessus du stylobatei il était surmonté par 27

un aigle aux ailes déployées, formant acrotère centrai, haut de plus d'un mètre. Cet édifice, d'une cònstruction très soignée, est intéressant à bien des égards: il se piace à la transition entre l'architecture classique et l'architecture hellénistique, FIG. 21 - LA FORTERESSE HELLÉNISTIQUE: LONG MUR OCCIDENTAL FIG. :w - LA FORTERESSE HELLÉNISTIQUE: LONG MUR OCCIDENTAL période qui, dans ce domaine, est jusqu'à présent très mal connue en Sicile j il atteste qu'à cette époque encore la tradition du mélange des ordres (éléments décoratifs ioniques surajoutés aux structures doriques) survit en Sicile. Ajoutons enfin que plusieurs fragments du mobilier de ce tempie ont été retrouvés dans un four à chaux de basse époque distant d'une centaine de mètres: 28) le pied d'une grande vasque rituelle décorée des memes moulures ioniques que celles qui ornent le tempie et surtout divers morceaux d'une petite statue d'aphrodite en calcaire local dont la tete, parfaitement conservée, montre les traits d'un classicisme attardé, d'un style scopasique qui a déjà subi l'infiuence de Lysippe (fig 19) Cette Mégara hellénistique, pratiquement ignorée des historiens antiques, mais dont l'archéologie révèle la civilisation assez brillante, a très gravement subi le contrecoup de la prise de Syracuse par les Romains en 212. On peut meme affirmer qu'elle a beaucoup plus souffert que sa voisine et qu'elle ne s'est pratiquement pas relevée de

FIG. 2 2 - MURAILLE ET TOUR DE LA FORTERESSE HELLÉNISTIQUE deux de ces tours encadrent la porte centrale, située à l'quest dans l'axe de l'agora, 3 1 ) deux auttes une porte plus importante, à l'angle Sud-Quest, protégée en plus, de chaque c6té, par un profond retrait de la muraille. Sur le c6té Sud, l'enceinte domine la falaise bordant le plateau; aussi le travail de fortification a- t- il été beaucoup plus négligé : la muraille est en appareil très irrégulier et presque dépourvue de fondations. Vers le Nord, les restes de la forteresse ont à peu près disparu; on peut cependant constater que la muraille hellénistique recoupe en deux points le mur d'enceinte archalque, puis qu'elle le réutilise pour une partie de son trajet. Les témoignages concordant de la stratigraphie, des tessons et des monnaies trouvés dans l'intérieur meme de la muraille, d'une tombe contempo- raine de sa construction et des sources littéraires permettent de piacer avec une très grande vraisemblance l'édification de cette forteresse dans le courant de 214 et sa destruction par Marcellus 32) quelques mois plus tard, au printemps de 213. ses ruines. L'histoire de ces,temps troublés est inserite sur le terrain. Devant la menace romaine, des mercenaires syracusains s'étaient retranchés dans Mégara, ou ils construisirent en toute Mte une ençeinte fortifiée qui, sans se soucier des habitations exi~tantes, coupait au travers des maisons et ne visait à protéger que le coeur de la ville, c'est à dire le quartier d,e l'agora, l'extrémité orientale du plateau nord. Cette forteresse à peu près carrée, d'un peu plus de 300 m. de c6té (pian, fig. I), est encore relativement bien conservée, car elle a servi d'ossature à des habitations rurales plus tardives qui se sont installées sur ses ruines. 29) La parti e occidentale de la fortification, qui traverse le plateau, est la mieux construite (figg. 20 et 21): le terrain plat imposait une défense plus robuste. La muraille, épaisse de 2,80 m. à la fondation, de 2,50 m. au niveau de l'élévation, compor te deux parements fondés sur le rocher: le parement extérieur en gros blocs assez réguliers, le parement intérieur formé de pierres de toutes les dimensions dont les joints sont colmatés par des rangées de petites pierres plates formant une sorte de couronne autour de chaque élément. Les parois sont, de piace en piace, reliées par des murs transversaux déterminant des divisions intérieures larges de 2,50 à 4 m. Le blocage intérieur se compose de pierres irréguliéres mélangées à de la terre. Dans la fondation de la muraille et dans le blocage intérieur ont été remployés de nombreux éléments provenant d'édifices archalques ou meme hellénistiques : signalons notamment plusieurs inscriptions funéraires archalques et une épitaphe de la fin du IVe ou du début du IIIe siècle, mentionnant un certa in Démétrios, fils de Céphisodoros, Athénien, et surtout les fragments d'un relief archalque, provenant sans doute lui aussi de la nécropole, et représentant un jeune cavalier. 30) La muraille est flanquée de grandes tours carrées divisées en quatre chambres par deux murs intérieurs (fig. 22); La construction de la forteresse marquait le déclin de la cité hellénistique; sa destruction en achève la ruine. La ville fut certainement mise à sac : lorsque, au bout de quelques années, des habitations de caractère agricole s'élevèrent de nouveau sur ses ruines, eli es adoptèrent le plus souvent un pian tout différent des maisons hellénistiques du IIIe siècle. Cette bourgade, formée de quelques grosses fermes éparses, vécut d'une existence très modeste jusqu'au premier siècle avant ].C.: à tout le plus peut-on signaler la trouvaille, dans une cachette, de trois vas es en argent datant de certe période. La vie semble meme avoir pratiquement cessé vers le temps où Sextus Pompée était maltre de la Sicile: c'est ce que semble attester du moins la trouvaille d'un trésor de monnaies de bronze de cette époque dans les ruines d' une maison du premier siècle avant ]. C. 33) Il faut attendre le IIIe et le IVe siècje après J. C. pour voir une nouvelle activité se manifester sur le sol de Mégara. En certains points du site, des villae rusticae s'édifient, avec de vastes pièces au sol bétonné, des cuves à vino Un petit établissement thermal est meme aménagé au pied du plateau Nord, au voisinage d' une source. Des monnaies de Tustinien attestent la survivance de cette bourgade jusqu'au VIe siècle de notre ère. De nos jours, Mégara rena!t sous une autre forme. Grace aux fonds accordés par la Cassa per il Mezzogiorno une part importante du site archéologique a pu et re exproptiée, un Antiquarium a été édifié qui est destiné à illustrer la topographie et l'histoire de Mégara ainsi que ses monuments d'époque archalque; un projet pour un second batiment, qui abritera la reconstitution du tempie hellénistique et des vitrines de céramique, sera 272

bient6t réalisé. L 'aménagement touristique du site se poursuit. Ainsi, au coeur de la zone industrielle d'augusta en pleine expansion et tournée vets l'avenir, Mégara reste comme le témoin glorieux d'une terre lourde d'un passé mouvementé. G. VALLET et F. VILLARD I) THUCYD IDE, VI, 4. 2) HERODOTE, VII, 156; cf. aussi THUCYDIDE, VI, 4 et 94. 3) THUCYDIDE, VI, 49 et 94. 4) DIODORE, XX, 32. 5) TITE-LIVE, XXIV, 35. 6) CIcERON, Verr., li, V (de Suppliciis), 63. 7) STRABON, VI, 267. 8) F. CAVALLARI et P. ORSI, Mon. Ant., I, 1892, col. 689-950; P. ORSI, Mon. Ant., XXVII, '92', col. 109-180. 9) D es rapports provisoires ont déjà paru dans les M é1anges de l'eco1e française de Rome, LXIII, '95', pp. 7-52; LXIV, 1952, pp. 7-38; LXV, '953, pp. 9-38; LXVI, '954, pp. '3-38; LXV li, '955, pp. 7-34; LXX, 1958, pp. 39-59. Cf. aussi les synthèses de B. NEUTSCH, in Arch. Anz., '954, col. 523-540 et de ]. BAYET, in Annales de l'est (Université de Nancy), no 19, Etudes d'archéologie classique, I, 1958, pp. 23-31. C'est paur nous un agréable devoir de remercier id la Surintendance de Syracuse, que dirige le Prof. L. Bernabò Brea, avec qui nous avons toujours pu travailler dans un esprit d'amicale et d'étroite collaboration; parmi le personnel de la Surintendance, nous devons mentionner particulièrement le Cav. S. Minniti, assistant principal aux Antiquités, qui assure depuis de nombreuses années, avec autant de compétence que de dévouement, la direction technique de notre chantier. IO) P. ORSI, Mon. Ant., XXVII, '92', col. III-15. II) Deux coupes de ce type ont été trouvées par P. Orsi à Thapsos (Mon. Ant., VI, 1895, col. 103-104, pl. IV, 16); elles correspondent à la brève station effectuée par les Mégariens à Thapsos, au cours de laquelle mourut l'oeciste Lamis, juste avant la fondation de Mégara Hyblaea (cf. THU CYD IDE, VI, 4). 12) Cf. G. VALLET et F. VILLARD, Bulletin de Conespondance Hellénique, LXXVI, 1952, pp. 289-346; cette chronologie a été adoptée par ]. BÉRARD, La colonisation grecque "" 2 éd., 1957, pp. 123-125 et 294. 13) L'existence de ces fabriques occidentales était, rappelons-ie, jusqu'alors à peu près unanimement niée: cf. encore par exemple T. J. DUNBABIN, The Western Greeks, 1948, pp. 26,-264. 14) A Pithécusses (G. BUCHNER, in Atti e M em. Soc. Magna Grecia, '954, pp. 7-8). à Naxos (G. V. GENTILI, in Boli. d'arte, XLI, 1956, p. 328, fig. 6). à Lentini (G. RIZZA, in Boli. d'arte, XLII, '957, pp. 65-67). à Géla (D. AOAMESTEANU, in Arch. Class., V, '953, pp. 244-247), etc... 15) Cf. en particulier le dinos reproduit dans les Mél. Ecole franç. de Rome, LXIII, '95', pl. V, fig. 14. 16) Un bon exemple de cette céramique orientalisante polychrome est fourni par le grand fragrnent. mélien " de Sélinonte, qui est de fabrication sicéliote, et très probablement mégarien (cf. Bull. Con. Hell., LXXXII, 1958, pp. 21-22 et fig. 6). 17) Cf. M él. Ecole franç. de Rome, LXIV, '952, pp. 22-38, fi gg. 9-18. 18) C'est le cas notamment de plusieurs monuments funéraires de Mégara; le plus typique est celui publié par G. V. GENTILI, in Not. Scav., '954, pp. 9'-92, fig. 16. 19) Fouilles de Delphes, IV, 2, '905, pl. XVI-XVII, 3; de La Coste Messelière et de Miré, Delphes, '943, pl. 92-93. 20) Cf. notamment P. MARCONI, in BolI. d'arte, VI, 1926-27, pp. 385-4 3 21) L'une de ces arulae est peinte, selon la technique des terres cuites architectoniques : M él. Ecole franç. de Rome, LXV, '953, pi. IV, lo 22) Mél. Eco1e franç. de Rome, LXIII, '95', pl. VI, fig. 15. 23) F. CAVALLARI et P. ORSI, in Mon. Ant., I, 1892, col. 698-742. 24) G. RIZZA, in Not. Scav., 1955, pp. 358-360, fig. 61; lo. in Boli. d'arte, XLII, '957, pp. 67-68, fig. IO. 25) HÉRODOTE, VII, 156. Cette nécropole a été reconstituée sur un autre emplacement, au voisinage de la muraille archaique, dans la zone de la nécropole principale foui1lée par P. Orsi à la fin du sièc1e dernier. 26) Sur ce premier habitat hellénistique, cf.. notre étude dans KQKAAOE, 1958, pp.loo-i06. 27) Cf. par exemple la nikè péplophore en caleaire local trouvée en 1952: M él. Ecole franç. de Rome, LXVI, '954, pi. IV, 2. 28) C'est également de ce,four à chaux que provient la sima ionique archalque de marbre reproduite fig. 12. 29) Cf. M él. Ecole franç. de Rome, LXX, '958, pp. 39-59. 30) Une partie des fra grnents sant reproduits par J. BAYET, in Annales de l'est, no 19, Etudes d'archéologie Classique, I, 1958, pl. XI, 2; cf. aussi Amer. ]ournal Archaeot., LX, 1956, pl. '35, fig. 31. 31) D evant cette porte a été recueilli un Hermès ithyphallique de facture assez grassière, destiné à protéger l'entrée de la forteresse. 32) Cf. TITE-LIVE, XXIV, 35:.. Marcellus..., M egara, ui capta, diruit ac deripuit Il 33) Cf. M él. Ecole franç. de Rome, LXIII, '95', pp. 47-48. IL RESTAURO DELLA CASULA DI FERMO I L FILO D'ORO usato per reintegrare certe lacune della casula che la Metropolitana di Fermo custodisce ab antiquo I) come reliquia di San Tommaso Becket, Arcivescovo di Canterbury, è quello stesso che abitualmente si incontra nei galloni dei paramenti barocchi e nelle bordure barocche di tappezzeria. Uniformandosi al modo antico, il rifacitore distese il filo sulla superficie a seconda delle necessità del disegno, ed ivi lo fissò mediante punti di raffermo. Il cordoncino di seta gialla, usato a questo fine, invase senza economia e risparmio l'intera superficie del tessuto, con il proposito più che generoso di sostituirsi ai vecchi punti di raffermo perduti, e di salvare le parti del tessuto volanti perchè lacere. Si giunse così a legare indissolubilmente il tessuto originale alla fodera rossa, rimessavi nel Settecento. L'intrusione fu implacabile e spietata. I punti gialli non risparmiarono una sola parte del ricamo. Ma fu anche discontinua e ineguale, così da generare forti squilibri di tiro fra le varie zone e, di conseguenza, una profonda e bene appariscente alterazione e forzatura delle linee originali di disegno. Ancor oggi è consuetudine comune a molti restauratori di scomporre galloni e bordure antiche per trarne la FIG. I - PARTICOLARE DEL ROVESCIO DELLA CASULA, CON GRIFO ALATO Le cuciture sono moderne e congiungono pezzi non rispondenti nel disegno (Fot. G. F. N.) 273 6