Premiers pas. [Presses universitaires de Rennes, 2010, www.pur-editions.fr] [«Les chemins de la mer», Gilbert Buti]

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Premiers pas «Voyage à l aventure.» Les premiers pas de cette recherche prirent assurément modèle sur cette forme de navigation familière aux marins provençaux. Prêt à embarquer, pour un voyage au long cours en direction de la péninsule ibérique et des Empires américains, sous la ferme et paternelle conduite de Charles Carrière, la brutale disparition de celui-ci me fit ajourner ce voyage lointain plein de promesses. Le hasard de la préparation d une Leçon d histoire avec Fernand Braudel sur le siège de Toulon de 1707, me dirigea vers les archives du Service historique de la Marine de Toulon 1. La Leçon terminée, je prolongeais la fréquentation des archives de ce port afin d explorer au mieux les richesses d un gisement aperçu et encore inexploité localement, à savoir les archives produites par le service des classes de la Marine mis en place depuis Colbert. Cette documentation relative à la marine d État mais aussi à celle du commerce que d aucuns croyaient perdue ou absente des archives d un port de guerre me permit de renouer avec les interrogations formulées naguère par Charles Carrière à propos des franges maritimes provençales, de réactiver une problématique centrée sur l organisation de l espace marchand marseillais au xviii e siècle. En effet, à partir de la fi n du xvii e siècle, Marseille étend son espace commercial jusqu aux limites du monde connu ; son horizon économique dépasse la proche Méditerranée pour atteindre les lointains océans 2. Pour parvenir à faire de leur port un instrument capable de jouer un rôle mondial, les négociants et armateurs de la place se sont glissés entre les mailles des puissants réseaux internationaux. Les étapes de cette dilatation de l aire commerciale et les modalités mises en œuvre pour hisser la cité portuaire provençale au niveau des plus grandes places marchandes sont connues. Elles ont retenu, depuis la fin du xix e siècle, l attention des historiens du commerce de Marseille de Paul Masson à Gaston Rambert et Charles Carrière. Parallèlement aux changements qui ont affecté la place, ces historiens se sont accordés sur le fait que «l activité grandissante de Marseille a rejeté 1. Aujourd hui Service historique de la Défense, département Marine, Toulon. 2. Carrière C., Négociants marseillais au XVIII e siècle, 2 vol., Marseille, 1973. 13

LES CHEMINS DE LA MER dans l ombre les ports secondaires de Provence 3». Néanmoins, faut-il négliger pour cela cette guirlande portuaire composée d une quarantaine de ports et modestes havres d échouage ou «marines» qui s étire d Arles à Antibes, riche en hommes, marchandises et navires? Si l histoire des économies maritimes a longtemps privilégié le vaste et le lointain, les grands ports et les flux internationaux, l élite négociante et la formation du capitalisme commercial, le temps n était-il pas venu d accorder une attention aux discrètes sociétés littorales et aux petits ports placés «à l ombre» d un pôle majeur? L arrière-pays marseillais se réduirait-il au seul Languedoc drapier si important soit-il pour les échanges avec le monde levantin? Ne peut-on percevoir pour Marseille comme André Lespagnol a pu le montrer avec bonheur pour Saint-Malo 4 «un arrière-pays latéral, c est-à-dire littoral», une «riviera» à l image de la voisine «rivière de Gênes»? Ne constituant en rien un bloc homogène, ces ports offrent-ils l image répétitive d une même évolution, ou invitent-ils, en considération de comportements originaux, à dégager des pratiques et techniques jusque-là méconnues ou inédites? Marseille et le désert maritime provençal? Pour les nombreux «bourgs et villages maritimes» qui, à l évidence, ne peuvent pas créer à eux seuls une région vivante, la présence d une grande cité portuaire constitue un atout essentiel. Cependant, l essor commercial de Marseille entraîne-t-il dans son sillage les ports voisins ou les étouffe-t-il? Observe-t-on complémentarité ou subordination de ces derniers à l égard du port mondial? Depuis Paul Masson la réponse paraissait claire : «[Hormis La Ciotat] qui a largement profi té de l activité marseillaise, [ ] Martigues, «la Venise provençale», a perdu beaucoup de son ancienne prospérité, [ ] Toulon, accaparé par la Marine royale, a définitivement renoncé au grand commerce, [ ] les autres ports, comme Antibes, Saint- Tropez, La Seyne, Cassis ont décliné [ ]. Ils n étaient alors plus que des satellites de Marseille, vivant surtout d un cabotage, plus ou moins actif, les unissant au grand port 5.» La notion fortement réductrice de ports satellites nie toute parcelle d autonomie. Le «monde grouillant des rivières provençales» (Fernand Braudel) se placerait servilement à la remorque de la puissante cité marchande et serait cantonné à un cabotage dévalorisant. Considérant, à travers le cas ciotaden, le rôle occupé par les ports provençaux dans le trafic méditerranéen, notamment vers le Levant et la Barbarie, la réponse de la Chambre de commerce de Marseille, dès la fin du xvii e siècle, a le mérite de la clarté : 3. Masson P., La Provence au XVIII e siècle, 3 vol., Paris, 1936, t. 3, p. 752. 4. Lespagnol A., Messieurs de Saint-Malo. Une élite négociante au temps de Louis XIV, 2 vol. Rennes, 1997. 5. Masson P., op. cit., p. 753-755. 14

PREMIERS PAS «On défi e les intéressés aux bâtiments de La Ciotat de justifi er qu ils aient jamais expédié un seul bâtiment qu ils n aient eu besoin de réclamer le secours des négociants de Marseille [ ]. Ce sont les négociants représentés par la Chambre qui font subsister la navigation de La Ciotat 6.» Peut-on affirmer plus nettement, et avec une certaine arrogance, cette inféodation? Toujours selon ce même Mémoire, les bâtiments provençaux n apparaîtraient «à l égard du commerce sur mer que ce que sont les charretiers et les muletiers». Doit-on accorder un total crédit à ce jugement qui limite les ports provençaux au seul rôle de transporteurs des mers, rôle qui, sur ce littoral, reste d ailleurs méconnu? Le cabotage auquel se livrent les bâtiments de ces ports est par ailleurs assimilé à une activité marginale, à tout le moins négligeable. Poussière d échanges déposée sur le prestigieux commerce lointain? Laissons la réponse à Fabry, directeur de l arsenal de Toulon, donc éloigné du comptoir du négoce. Ce responsable militaire, qui approuve la nécessité d organiser des croisières pour protéger la côte provençale et ses prolongements au moment de la guerre d Indépendance américaine, insiste sur le rôle du trafic maritime local : «Les petits ports de la côte, depuis Agde jusqu à Gênes, ont aussi un commerce particulier et font également leur demande pour le transport des blés, des huiles, des soies d Italie pour les manufactures de Lyon et pour tous les objets de consommation et d industrie. Ce commerce n est pas le moins intéressant ; c est, pour ainsi dire, le père nourricier des provinces méridionales et même de l intérieur, soit pour l importation, soit pour l exportation 7.» Saurait-on mieux exposer la place occupée par le trafic de proximité, par ce «père nourricier»? Certes, pour le responsable de l arsenal les livraisons attendues, tant par le canal des Deux-Mers pièces d artillerie que par le Rhône bois de marine, représentent des impératifs stratégiques majeurs, éloignés dans une certaine mesure des préoccupations des négociants. Elles s inscrivent néanmoins dans un mouvement plus ample et plus complexe présenté avec clairvoyance. De l embouchure du Var au delta du Rhône, voire au-delà, les activités des ports situés dans l ombre de Marseille, se limitent-elles à ce rôle de cabotage de concentration et de redistribution? Au-delà des échanges de proximité participent-elles, de près ou de loin, aux autres circuits du négoce marseillais, voire à des trafics indépendants de lui? Certes, Marseille éclipse les ports secondaires, mais le réseau portuaire s étrique-t-il pour autant au fil du siècle? Bref «on aimerait, avec Michel Vovelle, saisir l évolution véritable du réseau portuaire provençal, comme on aimerait prolonger vers l intérieur les routes et les relais du commerce phocéen 8». 6. ACCIM, B5-1688, f 334. 7. AN, Marine B3-690, f 92. 8. Vovelle M., «Le xviii e siècle provençal», Baratier E. (dir.), Histoire de la Provence, Toulouse, 1969, p. 346-347. 15

LES CHEMINS DE LA MER Si les affaires maritimes constituent le pôle central de la recherche engagée, le monde de la mer ne saurait se limiter aux seuls négociants même si ceux-ci constituent, dans les ports, le moteur des activités maritimes avec leurs divers prolongements, comme la banque et l assurance. Au-delà de l intensité des trafics internationaux de l élite négociante, vit directement au rythme de la mer «une autre population maritime économiquement indispensable, nombreuse mais pour nous silencieuse 9». Ce silence reste entier, ou presque, pour les populations des rives de la France méditerranéenne et autorise, naturellement, tous les clichés. Les gens de mer provençaux ont ainsi souvent piètre renommée : médiocres capacités nautiques et libertinage dessineraient, teintés de dédain, les traits majeurs de leur identité. Quelle valeur accorder à cette mauvaise réputation? Par ailleurs, tournées vers le large, les populations maritimes se montrent-elles indifférentes aux choses de la terre, ignorent-elles le rythme des saisons agricoles? Au reste, si les gens de mer des petites places réussissent à s infiltrer dans les rouages du port mondial, à quel degré, selon quelle ampleur et par quelles stratégies si stratégie il y a apportent-ils du sang neuf à l élite marchande de la grande place? Répondre à ces interrogations demanderait d engager une investigation port par port, sollicitant un jeu d éclairages conjuguant longue durée et temps bref, dimensions socio-économiques et culturelles, retenant les houles profondes et les brèves secousses. Les registres conservés au Service historique de la Défense, dans lesquels se trouvaient classés les navires, les gens de mer et les mouvements marchands, ne pouvaient-ils pas restituer un large pan de l économie maritime d un littoral laissé en friche, d approcher les éléments d un réseau figé et étouffé par l exceptionnelle croissance du port mondial voisin? Des chercheurs ponantais songeons à Jacques Bernard avaient ouvert la voie et sous la houlette de Michel Mollat, de multiples travaux donnaient à la mer, «frontière de la peur ou rivage de l espoir», sa place de grand personnage de l histoire 10. La documentation toulonnaise permettait de fournir le socle pour une recherche résolument maritime, mais il fallut rapidement se rendre à l évidence que l épaisseur du filon à exploiter était inégale fragmentée pour Martigues, réduite pour La Seyne, insignifi ante pour La Ciotat et les contraintes de temps, pour mener à bien l entreprise, dépassaient l ardeur d un chercheur isolé. Certes, l outil informatique apparut très vite indispensable pour maîtriser un corpus dont la présentation et le contenu semblaient attendre l ordinateur. Au vrai, malgré, ou à cause, de ce précieux renfort, j ai dû opérer des choix et d abord renoncer à vouloir embrasser 9. Cabantous A., La mer et les hommes. Pêcheurs et matelots dunkerquois de Louis XIV à la Révolution, Dunkerque, 1980, p. 9 et du même, Dix mille marins face à l océan. Les populations de Dunkerque au Havre aux XVII e et XVIII e siècles (vers 1660-1794). Etude sociale, Paris, 1991. 10. Voir ci-dessous l orientation bibliographique. 16

PREMIERS PAS toutes les localités maritimes offertes à nous par ces registres, pour n en retenir qu une. En me glissant au cœur de la riviera provençale, j ai choisi de privilégier un point d observation, à savoir Saint-Tropez. Saint-Tropez, étonnant maillon du complexe portuaire provençal Pour témoigner sur le tout, la partie retenue peut paraître étroite, étonnante, insolite et, à tout le moins, arbitraire. À quoi bon un tel choix, diront d aucuns, affirmant que «Saint-Tropez c est Marseille», entendez un petit port placé dans la stricte dépendance du grand, inscrit dans son sillage, vivant sous sa tutelle. Qui plus est, le choix de Saint-Tropez pour conduire l enquête peut surprendre, irriter ou amuser. Avouons-le sans détour, mon intention première n était pas de m attacher à ce port secondaire. N était-ce pas succomber à un quelconque caprice de mode? Que de visages ai-je vu s éclairer d un sourire entendu après m avoir écouté énoncer, prudemment, l objet de mon enquête! Une «histoire méridionale» de plus, qui plus est tropézienne, donc locale et peu sérieuse, forcément anecdotique et nécessairement légère. En somme une galéjade supplémentaire, voire une provocation. Aller «travailler aux archives» peut soulever un certain intérêt, ou tout au moins une curiosité, mais aux archives à Saint-Tropez était-ce vraiment sérieux? Organiser une sortie pédagogique pour favoriser la découverte du patrimoine local, voilà une belle idée, mais choisir pour cela Saint-Tropez devient suspect! Le fait est que pèse aujourd hui sur cette ville le poids de clichés aux racines multiples, où la fantaisie le dispute à la frivolité. N ai-je pas moi-même, pourquoi le taire, marqué quelque réticence avant d engager une recherche située dans le champ de l histoire économique et sociale et non dans celui des représentations? Y-aurait-il une histoire à Saint-Tropez avant le début de ce siècle, avant les visites ou les séjours de Matisse, Colette et Cocteau? Saint-Tropez, invention parisienne? Assurément. Mais n est-ce pas plus vrai encore de Saint-Trop façonné par les médias et parcouru par les foules? Les fameuses bravades des mois de mai et juin semblent à certains comme de vagues souvenirs entretenus et mis en scène pour marquer l ouverture de la «saison» entendez «touristique». Ne faudrait-il pas ranger Saint-Tropez parmi les fameux lieux de mémoire? Un carottage effectué dans notre imaginaire montre l existence de plusieurs strates, à tout le moins de plusieurs sensibilités. Du préfet Fauchet au gendarme Cruchot, de la Treille Muscate à la Madrague ensoleillée, des textes de Maupassant aux toiles de Signac, jusqu à la caméra de Vadim qui participa à la création de Saint-Trop, les références tropéziennes appartiennent à cette mémoire collective en construction. Sur un plan strictement régional, la lecture des seules Unes d un des quotidiens les plus diffusés Var-Matin reflète le décalage entre la dimension administrative de la cité et la taille qu elle occupe dans les mentalités, 17

LES CHEMINS DE LA MER ou qu on souhaite lui donner. Un «banal» fait divers mérite la Une s il se produit à Saint-Tropez et lorsque le littoral varois se trouve exceptionnellement couvert de neige c est le blanc manteau tropézien qui occupe largement ladite page pour souligner l étrangeté de la situation. Le tumulte présent tend à réduire au silence le passé tropézien, lorsqu il ne s agit pas de le recomposer. Toutefois, imaginaire et fantasme ne sont pas de récentes composantes de la représentation tropézienne. Déjà, dès le début du xix e siècle, les bravades se trouvaient qualifi ées par le préfet Fauchet de «mascarades religieuses et d extravagances 11». En 1832, Eugène Sue, ancien chirurgien de la marine et fin connaisseur des choses de la mer, apporte sa contribution à l histoire rêvée du petit port provençal. Alors que La Salamandre, «gracieuse corvette», entre en juin 1815 dans le golfe de Grimaud, l auteur se laisse aller à une évocation où perce une certaine nostalgie : «Le soleil, tombant d aplomb sur les toits bruns de Saint-Tropez, découpe de larges ombres sur les rochers de quartz, de granit et de porphyre qui encadrent le golfe de Grimaud, à la pointe duquel est creusé ce petit port [ ]. Que de fois les Sarrasins maudits, bravant la protection des comtes de Provence, ont fait échouer leurs sacolèves au pied de ton môle, leurs sacolèves qu ils venaient charger de ces jeunes Provençales toujours si recherchées aux bazars de Smyrne et de Tunis! Pauvres jeunes filles de Saint-Tropez! Pour vous plus d espoir d être arrachées à vos familles en pleurs, enlevées par quelque maudit pirate, et déposées palpitantes, mais curieuses, sous les riches portiques du palais d un émir. Plus d espoir de quitter vos chaumières de briques, vos nattes de jonc, l eau salée de la mer, pour les bains parfumés sous les sycomores, les tapis de cachemire et les coupoles élégantes aux peintures mauresques. Bonnes filles, que je conçois vos naïfs regrets!. Au moins autrefois on attendait avec espoir la saison de l enlèvement ; car enfin c était un avenir que cette venue des pirates 12.» À travers cet édifiant «désir de rivage» nous retrouvons certes l ambivalence du mirage oriental, mais si étonnant ou exotique soit-il, ne porte-t-il pas la trace de contacts anciens entretenus ou subis par les Tropéziens avec le monde levantin? De quelles réalités ces rumeurs sont-elles donc l écho? Les travaux scientifi ques disponibles ne permettent pas d éclairer ce passé et d apporter les réponses attendues. Saint-Tropez a certes suscité les enthousiasmes et la curiosité d amateurs et d érudits. Tant de récits romanesques ont évoqué cette localité et le font encore à la veille de chaque été. Pourtant, avouons-le sans détours, aucun guide n offre de réel secours. L histoire de Saint-Tropez ne semble devoir être que «cachée», «secrète» ou «ignorée» et les minces éléments de réponse proposée contribuent souvent à épaissir un voile que l on aimerait lever. Les publications ou, plus encore, les 11. AD V, IV M 6 Rapport de Messidor an X. 12. Sue E., La Salamandre, Paris, 1832 (réédité en 1993 dans Romans de mort et d aventures, p. 304-305, chapitre «Saint-Tropez»). 18

PREMIERS PAS références tropéziennes dispersées çà et là, au fil d énumérations des ports provençaux ou des survols des petites places fortes littorales, cristallisent les connaissances autour de quatre thèmes majeurs. L évocation du passé tropézien se trouve d abord associée, depuis près de deux siècles, à une série de clichés au commun dénominateur à savoir celui du «pittoresque petit port de pêche». Dans un ensemble relativement fourni ne prélevons qu une pincée : «tranquille et vieux port de Saint- Tropez», «bourgade insignifiante et infime port de pêche», «vieux port de pêche», ou encore, «délicieux petit village pour les pêcheurs et pour les peintres.» Les souvenirs de Tropéziens renforcent cette image en décrivant, avec nostalgie, cette «bourgade de pêcheurs et de leveurs de liège, de ramendeuses de fi lets et de bouchonnières 13». La permanence de cette image figée, rassurante et paisible, occulte à souhait, dès le début du xix e siècle, les activités marchandes de la place. Certes, un tel glissement symbolique dans l image de la bourgade dépasse le seul cas tropézien. D une façon plus large il s accélère avec les transformations traversant l ensemble de l économie locale et s inscrit dans la mutation de la représentation globale de la région. Une galerie de portraits illustres, que quelques plumes s efforcent régulièrement d étoffer, participe ensuite à la composition d un fabuleux, sinon mythique, xviii e siècle tropézien. Les destins étonnants de glorieux ou d obscurs aventuriers, qui opèrent souvent en de lointains horizons, jalonnent le dernier siècle de l Ancien Régime. Dans une mémoire collective résolument maritime, forgée et entretenue par de multiples canaux, le bailli de Suffren occupe la place de choix, à l image de la masse imposante de sa statue de bronze qui veille sur le port depuis 1866. D aucuns n hésitent pas d ailleurs à gommer la naissance à Saint-Cannat non loin d Aix-en-Provence, de Pierre-André de Suffren (1729-1788), «héros de la campagne des Indes» (1781-1784), pour en faire un Tropézien de souche. À l ombre du bailli se bousculent d autres grandes figures emblématiques qui scandent les temps forts de l Ancien Régime fi nissant. C est le «conventionnel Antiboul» (1752-1793), avocat issu d une très vieille famille tropézienne, représentant du Var à la Convention et guillotiné pour son attitude ni ferme, ni claire lors du procès de Louis XVI et ses réserves émises au moment de l élimination des Girondins. Avec Jean-François Herménégilde Sibille (1760-1810), ancien capitaine au long cours, la mer redevient le théâtre privilégié des figures héroïques. Alors que le commandant Sibille avait choisi de servir les campagnes méditerranéennes de Bonaparte, avant de s opposer un temps à Napoléon, Charles Tropez Guichard (1768-1805) capitaine marchand resta entièrement fidèle à Napoléon Bonaparte, d Aboukir à Trafalgar où il trouva la mort à bord du Berwick. Bien que sans doute natif de Bormes, Hippolyte Bouchard (1780-vers 1835) s introduit dans la mémoire tropézienne en même temps qu il franchit les limites de la Méditerranée pour se 13. Ben F.-J., Le pays de Saint-Tropez, Marseille, 3 e éd., 1990, p. 11. 19

LES CHEMINS DE LA MER ranger, en Amérique latine, aux côtés des insurgés dressés contre la puissance espagnole et devenir le «héros de la libération de l Argentine», puis du Pérou 14. Les activités en Levant, puis en Perse, de Jean-François Allard du général Allard (1785-1839) s effacèrent rapidement des mémoires derrière ses campagnes militaires au Pendjab au titre de généralissime des armées de Lahore, avant de regagner la petite patrie tropézienne et d y propager les saveurs orientales. À cette galerie de portraits riches en couleurs il conviendrait d ajouter sans plus attendre quelques figures «injustement oubliées», celles du capitaine Tropez Antoine Roux, du commandant de la citadelle Jean-Baptiste Du Bouchet, des Martin de Roquebrune et des frères Trullet, présents à Aboukir. Ne serait-il pas souhaitable de placer à leurs côtés Charles Magloire Baude, lieutenant de frégate embarqué sur le Luxor, pour aller chercher l obélisque offert par Méhémet Ali à Charles X (1831-1833) et rappeler ces dix Tropéziens qui accompagnèrent, à bord de la Favorite, le retour des cendres de Napoléon en 1840? Cessons-là un inventaire au risque d être soupçonné de voir des Tropéziens partout! Semblable énumération a toutefois le mérite de souligner la place essentielle tenue par le monde de la mer et les affaires militaires dans ces trajectoires. Dans ce bref panorama, l itinéraire des Martin de Roquebrune apparaît quelque peu atypique, dans la mesure où la marchandise, et non le fait d armes leur a ouvert la voie de la notabilité. L évocation de la guerre et du commerce conduit inévitablement à poser la question de la course, troisième volet régulièrement retenu du passé tropézien. Ainsi, rappelant les couleurs de la ville, à savoir «rouge-blanc-rouge en trois bandes verticales», F.-J. Ben rapporte que «deux villes seulement en France ont le privilège d arborer ces couleurs. Ce sont Saint-Malo et Saint-Tropez : les deux villes corsaires 15». Peut-on raisonnablement rapprocher les glorieux marins tropéziens dont la mémoire hante aujourd hui la citadelle transformée en musée naval de Duguay-Trouin ou Surcouf, de Jean Bart ou des frères Porée? Ici, plus encore sans doute qu à Saint-Malo «cette image-cliché interpelle fortement l historien». Repose-t-elle sur «des réalités majeures enfouies dans la mémoire collective et refoulées derrière le clinquant spectaculaire des scènes d abordage et les exploits légendaires 16»? L absence de corsaires de renom signifie-t-elle que les Tropéziens ont ignoré la course? Se penchant sur cette entreprise guerrière à fins commerciales dans une Méditerranée considérée comme «mauvais terrain de chasse», Charles Carrière posait, à propos des négociants de la grande place, la question : «Les Marseillais étaient-ils des corsaires 17?» Reprendre pareille interrogation à propos des Tropéziens peut paraître cocasse quand on songe à l ampleur des capitaux à mobiliser pour réaliser de tels armements. Pourtant, l exemple dunkerquois ne renvoie-t-il pas à des cas d armements corsaires 14. Le nom d Hippolyte-Bouchard a été donné à un navire-école de la flotte argentine. 15. Ben F.- J., op. cit., p. 60 et Sentis G., Saint-Tropez, cité corsaire, Grenoble, 1980, p. 141. 16. Lespagnol A., La course malouine au temps de Louis XIV, Rennes, 1995, p. 5-6. 17. Carrière C., Négociants op. cit., p. 522-530. 20

PREMIERS PAS avec de modestes embarcations? Les Tropéziens auraient-ils agi de la sorte le long des proches littoraux? Observons toutefois que lorsque la course se trouve mentionnée dans l histoire de Saint-Tropez, il s agit d abord de mettre en relief les méfaits de la course barbaresque. Alors, Saint-Tropez, cité corsaire ou cliché supplémentaire à ranger parmi les accessoires de la panoplie du légendaire? L image de la vaillante cité viendrait-elle équilibrer celle du «paisible bourg de pêche»? Une dernière composante observée dans l écriture de l histoire tropézienne, comme en contrepoint à cette série de destins hors du commun, vise à confondre le dernier siècle de l Ancien Régime avec une période de difficultés, d effacement, de déclin, de mise en coupe par le négoce marseillais. Le repli a d autant plus de force qu il semble prendre place à la suite d un lointain et mythique «âge d or» fait d étonnantes aventures, de fabuleux trafics et de commerce florissant. Le port, qui a pour divers observateurs «beaucoup perdu de ses activités d autrefois», s endort inexorablement 18. Saint-Tropez aurait donc, comme Martigues, ignoré le «brillant xviii e siècle 19». Dans une certaine mesure la notice de Jouy accompagnant la gravure de Garneray qui représente Saint-Tropez vers 1823 contient déjà nombre de ces éléments : «Saint-Tropez est une place d une faible importance maritime [ ]. Son port est petit, peu profond [ ] Saint-Tropez n a point d autre industrie et d autre commerce que l exploitation de la pêche [ ]. À Saint-Tropez les mœurs sont douces et l esprit cultivé [ ]. Le célèbre bailli de Suffren, dont les victoires dans l Inde coûtèrent si cher aux Anglais, y est né dans le siècle dernier, et l on montre encore aux voyageurs la maison de ce grand marin 20.» Nous avançons ainsi à grands pas vers le portrait de la «ville-fantôme» brossé un demi-siècle plus tard par l inspecteur des Ponts et chaussées Charles Lenthéric : «Au milieu de tous ces pans de murs rongés par le salin, on a peine à se croire dans une ville française du dix-neuvième siècle ; les façades des maisons sont bariolées suivant l ancienne mode espagnole. Les moindres habitations, délabrées et en ruine, sentent la misère et l abandon ; on ne les répare pas, on les badigeonne, et leurs couleurs vives se reflètent dans les eaux d un port presque désert 21.» Doit-on voir dans cet état des lieux l aboutissement d une évolution amorcée dès la fin du xvii e siècle? Comme frappé d ankylose, malgré les actes héroïques de quelques-uns de ses marins, le xviii e siècle tropézien annoncerait la désolation de la cité et la paralysie portuaire. 18. Masson P., Histoire du commerce français dans le Levant au XVIII e siècle, Paris, 1911, p. 104. 19. Carrière C., «Y-a-t-il eu un xviii e siècle à Martigues?», Provence historique, 1964, n 55, p. 53-68 et la réponse de Paoli J.-M., Martigues au XVIII e siècle : un déclin, mémoire de maîtrise, Aix-en-Provence, 1971. 20. Garneray L., Jouy E., Ports et côtes de France, Paris, 1823, p. 12. 21. Lenthéric C., La Provence maritime ancienne et moderne, 2 e éd., Paris, 1880, p. 294. 21

LES CHEMINS DE LA MER Saint-Tropez, une «fille de la mer» Exhumer un passé enfoui et silencieux certes, mais contribuer à la connaissance des économies maritimes restent étroitement associés à ma démarche. Ayant quitté Marseille ses grandes respirations économiques, ses vastes horizons océaniques et les comptoirs de ses négociants pour une escale tropézienne invite, par un regard excentré et un changement d échelle, à décrypter le fonctionnement du complexe portuaire provençal. Ces objectifs énoncés, restait pour les atteindre à constituer un corpus de sources car, faut-il le rappeler, «l historien ne peut pas récolter les données dans un premier temps et les interpréter dans un second. C est seulement quand il a un problème en tête qu il peut se mettre à la recherche de données qui s y rapportent 22». L exceptionnelle conservation des archives produites par le service des classes laissait précisément entrevoir, par une interrogation méthodique de ces «masses dormantes», la richesse de la vie maritime locale à partir de la fin du xvii e siècle. Si cette documentation a servi de point de départ à mon étude, il m a fallu faire flèche de tout bois pour retrouver au plus près les travailleurs de la mer et ceux qui ne le sont pas mais qui en vivent largement et solliciter les liasses de l amirauté, les minutes notariales et les cadastres, sans omettre les registres de catholicité et les papiers de famille, connus ou ouverts à l occasion de cette recherche 23. Au fil de ce «voyage à la cueillette» quelques indices m ont permis de préciser la place occupée par Saint-Tropez sur le littoral provençal et ses liens avec le monde de la mer. Dans la riche Statistique générale du département du Var réalisée sous l autorité du préfet Joseph Fauchet au début de l Empire, la notice consacrée à Saint-Tropez retient l attention du lecteur car, de Bandol à Antibes c est le port qui offre la plus copieuse description, mettant en relief l originalité des activités maritimes, de la pêche à la construction navale en passant par le commerce à court et large rayon 24. Dans un tout autre domaine, les dons votifs placés dans la chapelle Sainte-Anne fournissent une autre trace de l ampleur de l activité portuaire de Saint-Tropez. Avec soixante-six ex-voto marins, cette chapelle constitue au début du xix e siècle le deuxième sanctuaire du Var oriental à avoir recueilli ce type de dons (soit 21,4 % de l ensemble recensé par Bernard Cousin). Elle occupe le cinquième rang parmi les sites de Provence maritime avec, par ailleurs, la présence de bâtiments relativement gros 25. L église du couvent de Saint-Tropez, aujourd hui désaffectée, renferme un grand tableau qui constitue, peut-être, la seule représentation de la ville et de quelques habitants au dernier siècle de l Ancien Régime. Cette toile 22. Collingwood R. G., The Philosophy of History, cité par Prost A., Douze leçons sur l histoire, Paris, p. 84. 23. Pour le détail des sources et la méthode suivie voir ci-dessous la présentation des sources. 24. Fauchet J., préfet, Statistique générale de la France. Département du Var, Paris, an X, p. 282-283. 25. Cousin B., Le miracle et le quotidien. Les ex-voto provençaux, images d une société, Aix-en-Provence, 1983, p. 57-61 et 136. 22