I ERE PARTIE PROLEGOMENES A L'ETUDE DU DROIT CRIMINEL



Documents pareils
«La prison est la seule solution pour préserver la société.»

Séries statistiques des personnes placées sous main de justice

Introduction. Une infraction est un comportement interdit par la loi pénale et sanctionné d une peine prévue par celle-ci. (1)

Majeurs et mineurs mis en cause par les services de Police en 2013

SURVEILLANCE ÉLECTRONIQUE

ACAT-France. Et si la prison n était pas toujours la solution? SANCTIONNER AUTREMENT. Et si la prison n était pas toujours la solution?

La Justice et vous. Les acteurs de la Justice. Les institutions. S informer. Justice pratique. Vous êtes victime. Ministère de la Justice

DISPOSITIF FEMMES EN TRES GRAND DANGER BILAN D UNE ANNÉE D EXPÉRIMENTATION

ARTICLE 90 DU DECRET DU 19 DECEMBRE 1991 MODIFIE

Direction de l administration pénitentiaire Le placement sous surveillance électronique mobile

Introduction au droit La responsabilité professionnelle

La responsabilité pénale dans l entreprise

Notice relative à la demande d'aide juridictionnelle

à la Consommation dans le monde à fin 2012

de la commune organisatrice ou bénéficiaire, ci-après dénommée «société de transports en commun bénéficiaire». Par dérogation aux dispositions de

Feuillet récapitulatif Gestion des causes de niveau intermédiaire : droit criminal

BULLETIN OFFICIEL DU MINISTÈRE DE LA JUSTICE n 102 (1 er avril au 30 juin 2006)

Avons ordonné et ordonnons:

La fraude fiscale : Une procédure pénale dérogatoire au droit commun. Par Roman Pinösch Avocat au barreau de Paris

La République fédérale d Allemagne est composée de

l L immense majorité des condamnations concernent des délits

LA REBELLION. a) il faut que l'agent ait agi dans l'exercice de ses fonctions.

LOI N du 14 janvier (JO n 2966 du , p.3450) CHAPITRE PREMIER DE LA PREVENTION DES INFRACTIONS

CODE DE PROCEDURE PENALE TITRE PRILIMINAIRE De l action publique et de l action civile Art. 1 à 9

Textes abrogés : Notes de l administration pénitentiaire du 15 juillet 2002 et 29 mars 2004 Circulaire AP9206GA3 du 26 novembre 1992

L ORDONNANCE DU 2 FEVRIER Exposé des motifs

1. Informations générales 124

BULLETIN OFFICIEL DU MINISTÈRE DE LA JUSTICE

Les droits des victimes

Textes de référence : Table des matières

LE DOCUMENT UNIQUE DE DELEGATION

LES RESPONSABILITES DES AGENTS PUBLICS DE L ÉTAT. Formation AVS Janvier 2013

) Découvrez les métiers de la Justice. Informez-vous sur

LOI N DU 7 MARS 1961 déterminant la nationalité sénégalaise, modifiée

I. - Les principales caractéristiques du Droit Pénal chinois

Qui sont les enseignants?

Les responsabilités civile et pénale de l'élu local. > Observatoire SMACL des risques de la vie territoriale

chronique juridique Contrats de droit privé : l académie de Créteil, un exemple à suivre! Procédures disciplinaires : le memento CHRONIQUE JURIDIQUE

Allocution d ouverture M. Philippe Boillat, Directeur général, Direction générale Droits de l'homme et Etat de droit, Conseil de l'europe

LES VIOLENCES AU SEIN DU COUPLE. Françoise GUYOT Vice-Procureure, Chargée de mission au Cabinet du Procureur de la République de Paris

ASSOCIATION DES ACCIDENTÉS DE LA VIE. Quelles procédures après un accident de la route? Informations pour les victimes de dommages corporels

Guide des bonnes pratiques. Les différentes manières dont on saisit la justice pénale

Directeur de la publication : André-Michel ventre, Directeur de l INHESJ Rédacteur en chef : Christophe Soullez, chef du département de l ONDRP

Le Garde des Sceaux, Ministre de la Justice

Introduction : un contentieux aux trois visages différents

Taux de risque de pauvreté ou d exclusion sociale le plus élevé en Bulgarie, le plus faible en République tchèque

(BON du ) (BON du ) Que l on sache par les présentes puisse Dieu en élever et en fortifier la teneur!

REGARDS SUR L ÉDUCATION 2013 : POINTS SAILLANTS POUR LE CANADA

Orientations. gouvernementales. en matière. d agression. sexuelle. Plan d action

La cybercriminalité et les infractions liées à l utilisation frauduleuse d Internet : éléments de mesure et d analyse pour l année 2012

Le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales

ECONOMIE. DATE: 16 Juin 2011

BULLETIN OFFICIEL DU MINISTÈRE DE LA JUSTICE n 101 (1 er janvier au 31 mars 2006)

- La mise en cause d une personne déterminée qui, même si elle n'est pas expressément nommée, peut être clairement identifiée ;

LA RÉDUCTION DU TEMPS DE TRAVAIL : UNE COMPARAISON DE LA POLITIQUE DES «35 HEURES» AVEC LES POLITIQUES D AUTRES PAYS MEMBRES DE L OCDE

A. Recommandations générales

Procédure pénale. Thèmes abordés : Procédure par contumace/ Nouvelle procédure par défaut

Lutter contre l habitat indigne : Guide pénal

Saint-Marin Allemagne. Monaco. Saint-Siège Andorre. Norvège. Slovaquie Autriche. Pays-Bas. Slovénie Belgique. Pologne. Suède Bulgarie.

BULLETIN D ACTUALITES JURIDIQUES

Responsabilité civile et pénale de l instituteur

Si connu: la ou les langues que la personne recherchée comprend: Traits distinctifs / description de la personne recherchée:

Principaux partenaires commerciaux de l UE, (Part dans le total des échanges de biens extra-ue, sur la base de la valeur commerciale)

Plan d Action de Ouagadougou contre la traite des êtres humains, en particulier des femmes et des enfants, tel qu adopté par la Conférence

CONSEIL DE LA MAGISTRATURE LE MINISTRE DE LA JUSTICE DU QUÉBEC. - et - - et - - et - - et - RAPPORT DU COMITÉ D'ENQUÊTE

Leçon n 3 : La justice garante du respect du droit

Rencontre des hautes juridictions de France et d Israël. Séminaire du 23 mai 2011 à la Cour de cassation. L exécution des décisions de justice

Alcool au volant : tous responsables? La question de la co-responsabilité sera enfin posée au Tribunal de Saint Nazaire

BULLETIN OFFICIEL DU MINISTÈRE DE LA JUSTICE

GUIDE METHODOLOGIQUE. Guide du Travail d Intérêt Général (T.I.G.) MAI 2011

La chambre du conseil de la Cour d'appel du Grand-Duché de Luxembourg a rendu le douze février deux mille quatorze l'arrêt qui suit:

Les victimes et auteur-e (s) de violences domestiques dans la procédure pénale

dans la poursuite pénale dirigée contre

le Fichier central des chèques (FCC) et le Fichier national des chèques irréguliers (FNCI),

LE TRAITEMENT EN TEMPS REEL DES PROCEDURES PENALES

NOTE DE SYNTHÈSE DU REM (INFORM)

COMPRENDRE, EVALUER ET PREVENIR LE RISQUE DE CORRUPTION

QUELLE DOIT ÊTRE L AMPLEUR DE LA CONSOLIDATION BUDGÉTAIRE POUR RAMENER LA DETTE À UN NIVEAU PRUDENT?

La responsabilité des directeurs d unité

Responsabilité pénale de l association

Les homicides avaient été les plus fréquents dans les régions de l'ontario et des Prairies, qui

Procédures. L extrait de casier judiciaire

LES OBLIGATIONS DE SOINS AUX TOXICOMANES DANS LE CADRE DU SURSIS PROBATOIRE

La responsabilité juridique des soignants

Fondements éthiques et domaines d'activités des services de probation en Suisse

Statistiques sur les armes à feu Tableaux mis à jour

Quel est le temps de travail des enseignants?

Questionnaire du projet Innocence

LES OBLIGATIONS DE SOINS AUX TOXICOMANES DANS LE CADRE DU SURSIS PROBATOIRE

Les concepts et définitions utilisés dans l enquête «Chaînes d activité mondiales»

PROJET PILOTE DE TRIBUNAL CHARGÉ DES CAUSES DE VIOLENCE CONJUGALE (TVC) MONCTON (NOUVEAU-BRUNSWICK)

Bénéficiaires du droit d asile dans l UE, par nationalités, Irak 5% Afghanistan

CC, Décision n QPC du 23 novembre 2012

INTERROGATION ÉCRITE N 6

(juillet 2007) En France en 2007 il est préférable de tuer une petite vieille que de ne pas payer ses contraventions de stationnement

Actifs des fonds de pension et des fonds de réserve publics

Demande d avis n/ C ( Juge de l application des peines du tribunal de grande instance de Créteil, 23 décembre 2013 ) RAPPORT

Code de conduite pour les responsables de l'application des lois

Notice sur les allégements dans l exécution des peines et mesures

Transcription:

1 I ERE PARTIE PROLEGOMENES A L'ETUDE DU DROIT CRIMINEL 1 - Notion de répression - La matière pénale semble être placée sous le sceau d'une opposition irréductible. Dans une première acception, l'accent est mis sur la nécessité de la répression. La réalité, l'importance et la gravité du phénomène criminel sont telles que, à partir d'un sentiment vécu ou diffus d'insécurité, une partie de l'opinion publique s'engage vers deux voies alternatives ou successives. D'abord, sont réclamés, sur un plan collectif, une plus grande sévérité du législateur, comme des juges, et un accroissement des moyens de protection policière. Ensuite, et en cas d'échec de cette lutte contre le laxisme collectif, se développent des réactions individuelles, instinctives ou organisées, afin de pallier la carence des autorités (milices privées, sociétés de surveillance ou de gardiennage, groupes d'auto défense...). La société n'en fait jamais assez dans le cadre de la réaction sociale contre le crime et pour la protection des victimes d'infractions. Dans une seconde acception, en revanche, les dangers de la répression sont au centre des préoccupations. En elle-même, la répression, caractérisée par des atteintes à la liberté voire à la vie des individus, est toujours condamnable : le terme de répression est entendu de manière exclusivement péjorative. Il faut alors en permanence assurer le respect des droits de l'homme, lutter au plan social et individuel contre l'arbitraire des peines, l'inutilité et le danger de la prison, le rejet des criminels par la société. La société n'en fait jamais assez pour limiter une réaction sociale par essence abusive, et pour la protection des victimes du système répressif. En réalité, ces deux attitudes ne s'opposent qu'en apparence. Nul ne peut contester à la fois la réalité et la gravité du phénomène criminel, et leur corollaire : la nécessité et les dangers inhérents à l'idée même de répression. C est pourquoi il convient de présenter au préalable l'état du phénomène criminel (Chapitre 1) avant de définir la lutte contre le phénomène criminel (Chapitre 2) et d appréhender les sources du droit criminel placé au service de la protection de la société (Chapitre 3).

2 CHAPITRE 1 LE PHENOMENE CRIMINEL 2 - Il ne s'agit pas, dans l'introduction au droit pénal général, de prétendre saisir le phénomène criminel dans ses causes ; une telle analyse est l'œuvre de la criminologie théorique qui, à partir de l'étude de la criminalité, du crime et du criminel, offre différents niveaux d'interprétation de ce phénomène. Il s'agit, en revanche, d'illustrer le phénomène criminel contemporain avec la valeur relative d'une photographie à un instant donné ou d'un film se référant à une courte ou moyenne période. Deux secteurs particulièrement mouvants permettent de réaliser cette illustration : celui de la criminalité (Section 1) et celui de la population pénale (Section 2). Section 1 : La criminalité 3 - Définition - La criminalité est constituée par l'ensemble des infractions se produisant dans un temps et lieu donnés, et dont l'étude scientifique est fondée pour l'essentiel sur la statistique, l'histoire, l'ethnographie et la sociologie. Le terme de criminalité n'est pas entendu ici dans un sens étroit : il est employé pour cerner la totalité des crimes, infractions les plus graves jugées par les cours d'assises, des délits, infractions de gravité moyenne jugées par le tribunal correctionnel, et des contraventions, infractions de faible gravité jugées par le tribunal de police. Dans le cadre des sociétés occidentales actuelles, et en particulier de la société française, la criminalité apparaît comme une activité humaine spécifique, caractérisée par son étendue. Cette étendue de la criminalité peut être mesurée comme toute activité humaine. Les éléments de mesure sont variés et n'ont pas tous la même valeur selon que l'on considère la criminalité légale, apparente ou réelle 1. 1 : La criminalité légale 4 - Chiffre de la criminalité - La criminalité légale détermine le nombre des condamnations prononcées par les juridictions pénales 2. 1 Les principales sources statistiques utilisées sont : - le compte général d administration de la justice criminelle, pub. Annuelle jusqu en 1978 : depuis 1979, statistique annuelle : n 1 de 1979 à 1982, n 3 pour 1983, n 6 de 1984 à 1986 ; - les rapports annuels de la Direction de l Administration pénitentiaire du Ministère de la Justice ; - les Annuaires statistiques de la Justice, Min. Just., Doc. Fr. ; - les statistiques criminelles de 1831 à 1981, la base Davido, CESDIP, 1989 ; - les statistiques annuelles de la police et de la gendarmerie nationales 2 Sur cette notion, Cf. not. R. Gassin, Criminologie, Dalloz, 4è éd., 1998, p. 101 s. n 137s. ; R. Merle et A. Vitu, Traité de droit criminel, 7 ème éd., Cujas, 1997, p. 41 n 12 ; J. Léauté, Criminologie et science pénitentiaire, Thémis, PUF, 1972, p.205 s., pour l évolution de la criminalité légale depuis le XIX ème et réf.. Pour l évolution de la criminalité légale de six pays (Allemagne, Etats-Unis, France, Italie, Royaume Uni et Suède) cf. M. Le Clere, Indices criminels comparés, RSC 1959 p. 97 s.

3 Le tableau suivant montre l'évolution de ce taux depuis 1970 1 : Crimes Délits Crimes Délits 1980 2 255 472 397 1985 2 580 612 052 1981 2 419 278 516 1986 2 725 599 773 1982 2 293 421 631 1987 2 547 481 406 1983 2 027 484 748 1988 2 758 316 718 1984 2 284 572 259 1989 2 714 442 057 1990 2 722 472 081 1999 2 722 472 081 1991 2 739 430 856 2000 3 035 385 900 1992 2 620 433 778 2001 3 114 355 646 1993 2 776 426 377 2002 3 172 325 616 1994 2 718 354 791 2003 3 424 379 901 1995 2 777 304 139 2004 3 420 419 118 1996 2 869 357 244 2005 3 634 471 877 1997 3 082 376 230 2006 3 493 503 411 1998 3 209 381 955 Ces chiffres permettent de connaître et d'apprécier la cadence de travail des tribunaux pénaux et son évolution sur courte période, en établissant le nombre de condamnations prononcées par jour (sur 300 j/an) par chaque type de juridiction : Cour d'assises (juridiction non permanente) 80 81 82 83 84 85 86 87 88 89 90 91 92 93 94 95 96 97 98 2000 2001 7,5 8,0 7,6 6,7 7,3 7,8 8,5 8,0 8,8 8,5 8,2 8,2 7,8 8,0 8,0 9,2 9,4 10,2 10,6 10,1 10, 3 2002 2003 2004 2005 2006 10,5 11,4 11,4 12,1 11,6 Tribunaux correctionnels 80 81 82 83 84 85 86 87 88 89 90 91 92 93 94 1574 928 1405 1615 1638 1755 1744 1379 924 1406 1563 1507 1530 1496 1182 95 96 97 98 99 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 1013 1190 1254 1273 -- 1286 1185 1085 1266 1397 1572 1678 - Taux de criminalité - Ces chiffres permettent aussi de déterminer le taux de criminalité, c'est-àdire le rapport entre le nombre total de condamnés par les juridictions criminelles et correctionnelles et une fraction donnée de la population (1000 habitants) pour une année précise, en fonction de la population du pays. Par exemple, on peut mesurer l'évolution du taux de criminalité dans six pays pendant la première moitié du XXème siècle : Pays 1901 1911 1921 1931 1936 1941 1946 1951 Allemagne 10,2 10,6 13,4 10,8 -- 4,1 12,2 9,6 Angleterre 2,1 2,3 2,3 6,2 6,2 7,4 9,5 10,3 Etats Unis -- -- -- -- 8,3 9 11,8 12,7 France 5,1 6,07 6,4 6,1 5,6 9,9 8,7 6,0 1 Ce Tableau est établi à partir des statistiques fournies par les Annuaires statistiques de la Justice, Doc. Fr. Pour les crimes, jusqu en 1983, il s agissait de l ensemble des condamnations définitives prononcées à l égard de majeurs ; depuis 1984, la statistique se réfère aux condamnations prononcées pour une année donnée et inscrite au casier judiciaire, ce qui explique le chiffre pour 1987, les condamnations pour 1987 amnistiables à la suite de l amnistie présidentielle du 20 juill. 1988 ne figurant pas dans ce chiffre. Il en est de même pour les condamnations correctionnelles de 1987

4 Italie 15,7 15,7 17,2 12,4 11,7 14,2 23,2 14,2 Suède 2,8 2,5 1,6 1,9 1,9 2,3 2,7 2,8 De même, en France, pour une période plus récente, le taux de criminalité a subi des variations assez sensibles : ce taux est passé de 5,06 /oo en 1963 à 8,31 /oo en 1978 après avoir atteint son plus faible seuil (4,49 /oo) en 1974 1, et à 10,7 /oo en 1985 pour revenir à 8,41 /oo en 1987. Sur un plan quantitatif, même à son taux le plus haut, la criminalité légale n'affecte qu'une petite partie de la population et reste exceptionnelle dans l'ensemble de l'activité humaine. Néanmoins, sur un plan qualitatif, l'évolution du taux de criminalité démontre, pour la France, une augmentation de plus de la moitié en quinze années; et comme le taux de criminalité ne concerne que les infractions les plus graves, crimes et délits, on ne peut nier l'accroissement de la dangerosité infractionnelle. Cette situation est d'autant plus préoccupante que les tribunaux pénaux surchargés n'ont pas suivi l'accélération de la criminalité apparente qui a plus que doublé pendant la même période. 2 : La criminalité apparente 6 - Détermination - Etablie à partir des statistiques de police, la criminalité apparente comprend toutes les affaires pénales constatées et découvertes sur le territoire français par l'ensemble des services de police et de gendarmerie, dans le cadre de leur mission de police judiciaire 2. Ainsi, ces services, sous la direction des parquets des procureurs de la République, ont reçu un total de plaintes et de procès verbaux s'élevant à : 1960 3 230 774 1979 13 825 000 1975 12 969 000 1980 15 042 000 1976 13 935 000 1981 14 054 000 1977 12 935 000 1982 15 676 000 1978 13 489 000 1983 16 937 000 soit 30, 59 % d'augmentation en 8 ans, de 1975 à 1983. Depuis 1984, les statistiques se sont affinées et concernent les procès-verbaux, plaintes et dénonciations relatifs aux crimes, délits et contraventions de 5 ème classe reçus par le Parquet, les contraventions de 1 ère à 4 ème classes relevant de l'officier du Ministère public près le tribunal d'instance : Année Parquet OMP TOTAL TOTAL 1990 5 244 000 13 281 000 18 525 000 1991 5 431 477 12 755 557 18 187 034 1992 5 614 530 13 221 014 18 835 544 1993 5 324 236 13 140 760 18 464 996 1994 5 399 740 14 812 378 20 212 118 1995 5 191 255 14 592 269 19 783 524 1996 5 185 495 12 755 874 17 941 369 1997 4 936 899 13 981 317 18 918 216 1998 4 954 988 12 920 771 17 875 759 1999 4 586 854 12 684 042 17 270 896 1 Cela s'explique en très grande partie par la baisse artificielle de la criminalité provoquée par la loi d'amnistie du 16 juillet 1974 2 Cf. J. Pinatel, L évolution de la criminalité en France depuis la Libération, RSC 1954 p.157 s. ; J. Susini, 12 ans de statistiques de police (1950-1961), RSC 1963 p.151 s. ; J. Pinatel, L évolution de la criminalité en France depuis 1946, RSC 1965 p.199 s. ; Rev. pol. Nat., La criminalité en France ; R. Gassin, Criminologie, op. cit., p.101 s. n 137s., spéc. p. 103 n 139 et réf. ; B. Aubusson de Carvalay, De la statistique criminelle apparente à la statistique judiciaire cachée, Déviance et Société 1998 p. 155 s.

5 2000 4 611 383 13 149 260 13 560 643 2001 4 944 721 12 071 874 17 016 595 2002 5 083 465 13 299 387 18 382 852 2003 5 008 724 12 628 789 17 637 513 2004 5 004 795 12 025 735 17 030 530 2005 4 838 441 12 374 423 17 212 864 2006 4 953 065 11 779 333 16 732 398 Si l'on exclut les contraventions, les services de police et de gendarmerie ont eu connaissance, depuis 1975, d un nombre légèrement variable de crimes et délits suivants 1 : 1990 3 492 712 1997 3 493 442 2004 3 825 442 1991 3 744 112 1998 3 565 525 2005 3 775 838 1992 3 930 996 1999 3 567 864 2006 3 725 588 1993 3 881 894 2000 3 771 849 2007 3 589 293 1994 3 919 008 2001 4 061 792 2008 3 558 329 1995 3 665 320 2002 4 113 882 1996 3 559 617 2003 3 974 694 De tels chiffres expliquent le taux de la criminalité apparente. 7 - Progression du taux - Le taux de criminalité apparente pour 1000 habitants a très fortement évolué depuis 1963 en France, atteignant ainsi une partie croissante de la population (sans commune mesure avec l'augmentation de la population pendant la même période). Ce taux a triplé en seize années, de 1963 à 1979 : de 13 /oo à 43,67 /oo en 1979. L'évolution de ce taux de criminalité apparente est d'autant plus significative qu'elle reflète mieux que celle du taux de criminalité légale l'impact de la criminalité sur les victimes d'infractions et le développement dans l'opinion d'un sentiment d'insécurité. Elle traduit également de manière sensible, parce qu'immédiate, les mouvances de la législation pénale, aussi bien vers une dépénalisation que vers la création de nouvelles incriminations. Ainsi, la variation annuelle du taux de criminalité apparente traduit-elle l'accroissement de cette criminalité chaque année en France : - 1980 : +12,74 % - 1988 : - 1,21 % - 1996 : - 2,88 % - 2004 : - 3,76-1981 : + 9,99 % - 1989 : + 4,27 % - 1997 : - 1,86 % - 2005 : - 1,30-1982 : +18,12 % - 1990 : + 6,93 % - 1998 : + 2,08 % - 2006 : - 1, 33-1983 : + 4,40 % - 1991 : + 7,20 % - 1999 : + 0,1 % - 2007 : - 3, 66-1984 : + 3,30 % - 1992 : + 4,99 % - 2000 : + 5,7 % - 2008 : - 0,86-1985 : - 2,78 % - 1993 : - 1,25 % - 2001 : + 7,69% - 1986 : - 8,02 % - 1994 : + 0,95 % - 2002 : + 0,2 % - 1987 : - 3,68 % - 1995 : - 6,47% - 2003 : - 0,19 % 8 - Evolution relative - La progression du taux de criminalité apparente ces dernières années montre le développement des crimes et des délits dans notre société. Cela ne signifie pas que cette augmentation se soit produite de manière uniforme. Seule une analyse sectorielle peut mettre en exergue les infractions les plus préoccupantes en raison de leur important accroissement, à la fois sur 1 Ce tableau est établi à partir des données statistiques de la Direction générale de la Police Nationale, Aspects de la criminalité et de la délinquance constatées en France, annuel, Doc. Fr.

6 un plan évolutif et sur un plan descriptif. Ainsi, ces dernières années, certaines infractions ont évolué de la manière suivante : - Vols à main armée 1990 7 388 1994 10 243 1998 8 100 2002 2006 5 759 1991 7 846 1995 9 147 1999 7 515 2003 7 384 2007 5 294 1992 9 737 1996 9 428 2000 8 613 2004 6 521 2008 6 107 1993 11 211 1997 8 295 2001 9 363 2005 5 744 - Vols avec violences sans arme à feu 1990 51 520 1994 63 067 1998 76 191 2002 2006 121 431 1991 56 926 1995 65 430 1999 87 432 2003 117 902 2007 107 591 1992 60 324 1996 70 031 2000 101 223 2004 113 120 2008 100 526 1993 60 838 1997 72 203 2001 124 918 2005 118 856 - Cambriolages 1990 389 676 1994 468 903 1998 395 913 2002 2006 335 052 1991 416 414 1995 433 320 1999 370 076 2003 407 585 2007 312 384 1992 447 606 1996 436 414 2000 370 993 2004 377 381 2008 298 173 1993 468 524 1997 407 385 2001 416 297 2005 343 305 - Vol d'automobiles 1990 294 194 1994 369 551 1998 317 474 2002 2006 157 437 1991 339 293 1995 351 509 1999 297 058 2003 230 750 2007 143 130 1992 373 077 1996 345 625 2000 301 539 2004 196 102 2008 131 077 1993 384 574 1997 322 783 2001 313 382 2005 173 897 - Vols de deux roues à moteur 1990 139 300 1994 114 628 1998 96 483 2002 2006 85 167 1991 136 615 1995 102 016 1999 96 911 2003 97 064 2007 81 129 1992 131 862 1996 98 142 2000 98 431 2004 88 829 2008 80 029 1993 122 314 1997 94 577 2001 104 348 2005 86 072 - Vols à la roulotte 1 1990 746 452 1994 821 437 1998 687 362 2002 2006 501 092 1991 812 542 1995 745 240 1999 666 604 2003 630 918 2007 470 323 1992 886 011 1996 704 955 2000 670 177 2004 568 783 2008 428 916 1993 879 815 1997 672 101 2001 720 779 2005 522 517 - Infractions astucieuses 2 1990 384 937 1994 422 079 1998 287 415 2002 2006 334 064 1991 424 995 1995 338 384 1999 295 734 2003 343 473 2007 345 416 1992 380 092 1996 289 530 2000 352 164 2004 329 955 2008 381 032 1993 390 045 1997 277 796 2001 366 208 2005 318 680 1 Il s agit de vols dans des véhicules en stationnement, et qui constituent en nombre la manifestation la plus importante de la délinquance de ces dernières années 2 Cette catégorie recouvre l ensemble des escroqueries et des infractions économiques et financières, à l exception des chèques sans provision aujourd hui dépénalisés

7 - Escroqueries 1 1990 96 258 1994 66 784 1998 2002 2006 306 392 1991 1995 1999 2003 322 607 2007 315 740 1992 62 190 1996 2000 317 044 2004 304 579 2008 348 795 1993 65 857 1997 2001 334 064 2005 291 076 - Abus de confiance ( + 32,31 % en 14 ans), Escroquerie et Abus de confiance depuis 1995 1990 21 317 1994 23 771 1998 82 252 2002 2006 163 111 1991 23 679 1995 90 068 1999 95 444 2003 145 174 2007 177 309 1992 23 422 1996 84 014 2000 142 583 2004 139 313 2008 214 402 1993 22 861 1997 84 233 2001 154 107 2005142 107 - Homicides volontaires (et tentatives) 2 1990 2 526 1994 2 696 1998 2 150 2002 2006 1 937 1991 2 614 1995 2 563 1999 1 997 2003 2 173 2007 1 866 1992 2 702 1996 2 385 2000 2 166 2004 2 097 2008 1 899 1993 2 818 1997 2 085 2001 2 289 20052 107 - Usages et usage-reventes de stupéfiants (interpellations) 1990 29 015 1994 52 518 1998 78 148 2002 2006 132 951 1991 39 760 1995 62 325 1999 85 884 2003 107 865 2007 137 601 1992 48 486 1996 69 228 2000 92 363 2004 122 421 2008 157 880 1993 45 206 1997 82 725 2001 80 540 2005 125 777 - Destructions et dégradations de biens privés (y compris véhicules privés) 1990 278 055 1994 435 107 1998 466 473 2002 2006 493 762 1991 327 651 1995 440 591 1999 461 877 2003 541 338 2007 462 395 1992 389 101 1996 468 515 2000 518 439 2004 507 709 2008 437 622 1993 419 961 1997 476 133 2001 574 994 2005 535 516 - Atteintes aux mœurs (nombre de faits constatés) Proxéné- Viols Attentats Outrages Débauche Outrages TOTAL tisme à la publics à la de bonnes pudeur 3 pudeur mineurs moeurs 1990 992 4 582 8 762 6 260 1 266 380 22 242 1991 823 5 068 9 164 6 982 1 298 397 23 732 1992 786 5 356 10 217 7 356 1 188 501 25 404 1993 679 5 605 11 192 6 909 1 368 816 26 569 1994 627 6 526 12 661 7 302 1 524 639 29 279 1995 533 7 350 11 503 9 737 4 29 123 1996 474 7 191 12 056 9 907 29 628 1997 503 8 213 13 923 12 451 35 090 1998 481 7 828 12 809 11 896 33 014 1999 440 7 958 11 273 11 360 32 490 1 Ces chiffres sont inclus dans ceux de la catégorie des infractions astucieuses. Depuis 1995 ont été regroupées sous une seule rubrique les escroqueries, abus de confiance, falsifications et contrefaçons 2 Il s agit, par ordre décroissant, des homicides non crapuleux, crapuleux, et des règlements de compte 3 Ces attentats correspondent aux infractions dénommées " agressions sexuelles " (y compris harcèlements) prévues depuis janv. 1994 dans le Code pénal 4 Depuis janv. 1994, ces anciennes qualifications sont devenues des " atteintes sexuelles " et «autres atteintes aux mœurs»

8 2000 368 8 458 14 263 10 449 33 538 2001 371 9 574 15 273 10 233 35 451 2002 2003 539 10 408 15 394 14 250 40 577 2004 548 10 506 15 732 17 050 43 836 2005 557 9 993 13 875 16 859 41 284 2006 464 9 784 13 080 15 863 39 191 2007 455 10 132 13 115 16 343 39 135 2008 475 10 277 13 754 15 718 40 224 9 - Déperdition - Sur l'ensemble des faits parvenant à la connaissance des services de police et traités par eux, certains donneront lieu des classements sans suite du Parquet ou à des ordonnances de non-lieu par des juridictions d'instruction 1 ; cela explique la différence entre les chiffres de criminalité apparente et ceux de criminalité légale. Année Classements sans suite Ordonnances de non lieu Parquet OMP Juge d'instruction 2000 414 692 1 792 469 7 117 7 698 2001 434 475 2 411 787 7 883 6 483 2002 429 506 2 423 586 7 833 5 282 2003 385 874 1 132 955 8 294 3 902 2004 366 414 1 656 968 8 840 3 850 2005 323 594 1 097 376 8 552 3 940 2006 299 459 1 152 922 7 781 3 940 3 : La criminalité réelle 10 - Approche - La criminalité réelle serait l'ensemble des infractions réalisées ou tentées dans un pays donné, à une époque donnée. Elle comprendrait non seulement les infractions constatées et traitées par les services de police et de gendarmerie, jugées par les juridictions pénales, mais aussi les infractions qui resteront à jamais inconnues. Dès 1908, le procureur japonais Oba soulignait l'importance de ce chiffre caché de l'activité criminelle (aussi appelé chiffre noir, chiffre obscur) particulièrement difficile à évaluer 3. Des études criminologiques ne peuvent en cette matière qu'utiliser des sondages aléatoires et des références empiriques à partir d'aveux ou de témoignages : il n'y a pas de méthode sûre pour déceler des crimes ou des délits qui ne sont "parfaits" que pour ceux qui les ont commis et qui resteront toujours inconnus 4. 11 - Conclusion On a décelé une augmentation de la criminalité dans les évolutions différenciées de la criminalité dans les pays européens entre 1993 et 1997 5. Certains pays présentaient une croissance de criminalité importante, alors qu'une décrue était perceptible chez d'autres : 2 1 Cf. Ann. Stat. de la Justice, éd. 1998, Doc. Fr. p. 87 2 Non lieu sans mise en examen dans le réquisitoire introductif et non lieu à la clôture 3 Cf. not. E. Yamarellos et G. Kellens, Le crime et la criminologie, 2 vol, éd. Marabout, 1970, t.1, V Chiffre noir, p. 76-77 ; Le chiffre noir de la criminalité, 6ème Conférence des dir des Instituts de criminologie, Strasbourg, 1968 ; Mac Klintock, Aspects du chiffre noir, RICPT 1971 p. 97 s. 4 Cependant, voir l appréciation des techniques d approche du chiffre noir, enquêtes d auto confession et enquêtes de victimisation, in R. Gassin, Criminologie, op. cit., p. 101 s. n 137 et réf. 5 Cf. Aspects de la criminalité et de la délinquance constatées en France en 1998, par les services de police et de gendarmerie d après les statistiques de police judiciaire, Doc. Fr., p. 36 s. Les chiffres fournis par le Royaume Uni ne

9 BELGIQUE + 101,73 % DANEMARK - 1,55 % ALLEMAGNE + 5,66 % ESPAGNE - 2,84 % IRLANDE + 5,05 % AUTRICHE - 3,38 % LUXEMBOURG + 2,98 % FINLANDE - 5,81 % SUEDE + 2,57 % FRANCE - 7,08 % ITALIE + 1,35 % GRECE - 8,33 % PORTUGAL - 11,05 % Cependant, ces taux de croissance doivent être relativisés en fonction des taux de criminalité pour 1000 h en 1997, et des chiffres de la criminalité globale dans chaque pays : PAYS et Taux de Criminalité globale population criminalité 1993 1994 1995 1996 1997 PORTUGAL 7,61 87 165 97 773 93 455 82 494 75 577 9 934 110 h ESPAGNE 23,44 965 133 901 696 908 264 930 780 924 393 39 433 942 h IRLANDE 25,82 98 979 101 036 102 484 100 785 90 875 3 519 963 h GRECE 36,83 358 503 303 311 329 110 349 475 377 871 10 259 899 h ITALIE 42,72 2 259 903 2 172 477 2 267 488 2 422 991 2 440 754 57 138 489 h LUXEMBOURG 58,22 28 338 29 166 28 380 27 566 24 355 418 300 h AUTRICHE 59,75 439 786 504 568 486 433 485 450 481 549 8 059 385 h FRANCE 59,72 3 881 894 3 919 008 3 665 320 3 559 617 3 493 442 58 493 885 h BELGIQUE 71,38 352 085 583 309 717 780 725 914 N-C 10 170 226 h FINLANDE 76,89 412 328 409 325 405 751 399 362 394 649 5 132 320 h PAYS BAS 78,20 1 279 464 1 305 288 1 222 883 1 183 373 1 217 300 15 567 100 h ALLEMAGNE 80,31 6 750 613 6 537 748 6 668 717 6 647 598 6 586 165 82 012 162 h ROYAUME UNI 84,46 5 526 255 5 252 980 5 100 241 5 036 552 4 598 327 51 403 000 h DANEMARK 100,68 546 914 546 928 538 969 528 520 531 115 5 275 121 h SUEDE 8 846 063 h 135,21 1 191 251 1 112 505 1 145 945 1 175 339 1 196 065 comprennent pas les statistiques de l'ecosse et de l'irlande du Nord et n'autorisent pas de comparaisons avec les années antérieures

10 Le taux de criminalité et de délinquance en France peut aussi être perçu au travers des chiffres donnés en 2007 dans les «Aspects de la criminalité et de la délinquance constatées en France» sur la période de 1947 à 2007 : Crimes et délits Années Vols (y compris recels) Escroqueries et infractions économiques et financières Crimes et Autres délits contre infractions les (dont personnes stupéfiants) Total Population Nombre (source INSEE) Taux 1000 habitants 1949 233 816 67 725 63 941 217 767 583 249 41 480 227 14,06 1950 187 496 43 335 58 356 285 102 574 289 41 828 873 13,73 1951 177 863 39 674 58 133 252 357 528 027 42 155 535 12,53 1952 183 962 49 156 59 263 253 297 545 678 42 459 668 12,85 1953 192 378 50 719 61 675 242 839 547 611 42 751 746 12,81 1954 189 219 51 968 59 696 223 696 524 579 46 056 505 11,39 1955 191 138 54 624 59 906 211 096 516 764 43 427 670 11,90 1956 210 416 56 326 60 218 231 086 558 046 43 843 075 12,73 1957 253 352 74 713 62 961 276 648 667 674 44 310 863 15,07 1958 266 846 72 890 58 879 205 352 603 967 44 788 853 13,48 1959 305 020 72 058 56 180 211 500 644 758 45 239 730 14,25 1960 345 945 71 893 53 272 216 656 687 766 45 684 227 15,05 1961 373 284 70 804 53 950 210 742 708 780 46 162 828 15,35 1962 390 889 78 164 53 117 211 696 733 866 46 997 703 15,61 1963 368 812 70 082 58 238 70 549 567 681 47 836 218 11,87 1964 391 902 78 219 61 023 80 377 611 521 48 330 415 12,65 1965 423 216 88 471 62 975 85 779 660 441 48 777 796 13,54 1966 463 053 109 576 67 600 94 855 735 084 49 183 665 14,95 1967 529 509 132 844 70 643 106 028 839 024 49 568 305 16,93 1968 609 976 154 910 71 902 100 854 937 642 49 915 404 18,78 1969 628 473 213 853 75 086 103 803 1021 215 50 317 977 20,30 1970 690 899 250 990 77 192 116 540 1 135 621 50 772 227 22,37 1971 790 918 288 189 83 603 126 668 1 289 378 51 251 094 25,16 1972 910 220 438 102 81 818 245 367 1 675 507 51 700 913 32,41 1973 974 775 440 209 84 925 263 463 1 763 372 52 118 299 33,83 1974 1 124 561 329 987 85 315 287 510 1 827 373 52 460 363 34,83 1975 1 233 186 314 100 87 738 277 303 1 912 327 52 699 169 36,29 1976 1 217 510 282 239 86 454 237 750 1 823 953 52 908 672 34,47 1977 1 336 071 370 024 91 964 299 860 2 097 919 53 145 286 39,48 1978 1 351 301 405 587 90 724 300 220 2 147 832 53 376 320 40,24 1979 1 471 883 444 733 96 939 317 011 2 330 566 53 606 230 43,48 1980 1 624 547 531 588 102 195 369 178 2 627 508 53 731 387 48,90 1981 1 771 035 619 284 108 313 391 388 2 890 020 54 028 630 53,49 1982 2 081303 765 631 112 004 454 744 3 413 682 54 335 000 62,83 1983 2 163244 814 659 116 824 469 248 3 563 975 54 625 729 65,24 1984 2 277530 806 664 116 570 480 689 3 681 453 54 830 907 67,14 1985 2 301934 681 699 117 948 477 613 3 579 194 55 062 478 65,00 1986 2 121 525 607 140 107 812 455 712 3 292 189 55 278 413 59,56 1987 2 028 608 465 084 105 304 465 084 3 170 970 55 509 955 57,12 1988 2 016 781 568 638 122 646 424 629 3 132 694 55 753 955 56,19

1989 2 126 973 548 354 132 321 458 794 3 266 442 56 016 985 58,31 1990 2 305 600 551 810 134 352 500 950 3 492 712 56 614 493 61,69 1991 2 456 871 566 567 141 716 578 958 3 744 112 56 893 206 65,81 1992 2 615 444 413 417 146 095 656 040 3 830 996 57 217 577 66,95 1993 2 640 417 409 246 152 764 679 467 3 881 894 57 526 521 67,48 1994 2 573 074 440 179 175 374 730 381 3 919 008 57 779 305 67,83 1995 2 400 644 357 104 191 180 716 392 3 665 320 58 027 305 63,17 1996 2 331 000 310 910 198 155 719 552 3 559 617 58 255 883 61,10 1997 2 244 301 295 511 214 975 738 655 3 493 442 58 493 885 59,72 1998 2 291 404 287 415 220 948 765 758 3 565 525 58 722 674 60,72 1999 2 252 528 295 734 233 194 786 408 3 567 864 58 518 748 60,97 2000 2 334 696 352 164 254 514 830 475 3 771 849 58 746 500 64,21 2001 2 522 346 366 208 279 610 893 628 4 061 792 59 039 173 68,80 2002 2 507 027 355 342 303 552 947 961 4 113 882 59 344 025 69,32 2003 2 380 770 349 473 325 697 918 754 3 974 694 59 625 919 66,66 2004 2 243 445 329 955 339 882 912 160 3 825 442 59 900 268 63,86 2005 2 138 506 318 680 354 836 963 816 3 775 838 60 561 200 62,35 2006 2 080 182 334 064 375 414 935 928 3 725 588 61 044 684 61,03 2007 1 939 570 345 416 386 603 917 704 3 589 293 61 538 000 58,33 11

12 Tableau 1 Taux partiels de criminalité en Europe 1990-2003 (European Sourcebook 1995-2003)

13 Le taux global de criminalité dans l'union européenne en 1998, pour 1000 habitants, ne paraît pas avoir varié de manière sensible en 2005 1 : En 1998 Portugal : < à 10 en 2005 40 Espagne : < à 25 21 Irlande : < à 25 26 Grèce : < à 40 37 Italie : < à 45 44 Hongrie : / 43 Autriche : < à 60 / France : < à 65 62 Luxembourg : < à 65 56 Finlande : < à 80 90 Pays-Bas : < à 80 85 Allemagne : < à 80 77 Belgique : 85 94 Danemark : < à 95 90 Royaume-Uni : < 100 98 Suède : non communiqué 138 Les systèmes répressifs nordiques, cités en exemple pendant le XX ème siècle, ont perdu leur valeur de modèle : la criminalité se présente toujours comme un phénomène en mouvement. Comme toute autre activité humaine, la criminalité ne saurait être détachée des individus qui l animent et qui constituent la population pénale. Section 2 : La population pénale 12 - Définition et localisation - La population pénale est constituée par l'ensemble des détenus (prévenus et condamnés) composant la population pénale en milieu fermé, et de la population pénale en milieu ouvert comprenant notamment les probationnaires, les libérés conditionnels, les interdits de séjour. L'administration pénitentiaire, qui a en charge ces deux catégories de personnes, intervient à la fois dans les établissements pénitentiaires, pour les détenus, et en dehors de ces établissements pour le régime dit ouvert. L'organigramme de cette administration est le suivant, pour l essentiel, au 1er janvier 2010 2 : Direction nationale : Paris 9 Directions Régionales : Rennes, Paris, Lille, Lyon, Strasbourg, Lyon, Marseille, Toulouse, Bordeaux. 190 Etablissements pénitentiaires 6 Maisons centrales : Reçoivent des condamnés à une peine supérieure à 1an 37 Centres pénitentiaires : Etablissements mixtes avec un quartier "maison d'arrêt" et un quartier "maison centrale" et/ou un quartier "centre de «détention» ; reçoivent des condamnés à de courtes ou longues peines 12 Centres de semi-liberté : reçoivent les condamnés admis au régime de semi liberté 1 V. Aspects de la criminalité et de la délinquance constatées en France en 1999, d'après les statistiques centralisées par la Direction Centrale de la Police Judiciaire, op. cit., p. 32. Statistiques Eurostat pour 2005 2 Annuaire Statistique de la Justice. 2008 op. cit., p. 19 ; Chiffres clefs de l administration pénitentiaire 2010

14 leur permettant d exercer une activité, recevoir un enseignement ou une formation professionnelle, suivre un traitement médical 24 Centres de détention : pour condamnés ayant les meilleures perspectives de réinsertion 106 Maisons d'arrêt : Auprès de chaque TGI : Reçoivent inculpés, prévenus, accusés, et condamnés à moins d'1 an ou / dont le reliquat est inférieur à un an. 1 Etablissement public de santé à Fresnes 4 Etablissements pénitentiaires pour mineurs : Pour détenus sous surveillance médicale en raison de leur âge, sexe, état de santé mentale ou physique Sans entrer ici dans le domaine de la science pénitentiaire 1, il suffit de constater que la population pénale, comme tout groupe humain, est en évolution permanente et présente des caractéristiques particulières que permettent de saisir les comptes généraux de la Justice, les rapports annuels de l'administration pénitentiaire et les Annuaires statistiques de la Justice. 1 : Les flux de la population pénale 13 - Diversité - La situation d'ensemble de la population pénale, constatée au 1 er janvier de chaque année, et portant sur la métropole et les territoires d'outre-mer, a plus que triplé entre 1968 et 1991. Cela résulte du tableau de la situation de cette population pénale, tant en milieu fermé qu'en milieu ouvert, au ler janvier de chaque année, depuis 1968 : 1/1 1968 53 723 1978 95 677 1988 149 050 1998 176 804 2008 1969 56 271 1979 102 552 1989 124 014 1999 184 328 1970 46 958 1980 108 196 1990 144 115 2000 186 461 1971 51 731 1981 113 835 1991 164 777 2001 189 534 1972 57 703 1982 77 389 1992 157 498 2002 189 216 1973 64 182 1983 91 464 1993 153 570 2003 184 676 1974 68 197 1984 104 547 1994 150 841 2004 191 738 1975 64 809 1985 116 220 1995 153 877 2005 184 634 1976 75 176 1986 123 158 1996 160 284 2006 205 813 1977 85 138 1987 135 252 1997 171 330 2007 205 678 Pour affiner cette présentation, il convient de séparer les chiffres relatifs au milieu fermé de ceux afférents au milieu ouvert. A : En milieu fermé 14 - Présentation générale - Pour l'ensemble de la population carcérale en France, on a pu constater un accroissement quasi constant de 1991 à 1996, puis un recul jusqu en 2001 avant de connaître une hausse constante jusqu à ce jour : 1 Cf. not. Cuche, Traité de science et de législation pénitentiaire, Paris, 1905 ; J. Pinatel, Précis de science pénitentiaire, Sirey, 1945 ; Traité élémentaire de science pénitentiaire et de défense sociale, Sirey, 1950 ; C. Germain, Eléments de science pénitentiaire, Cujas, 1956 ; J. Léauté, Criminologie et science pénitentiaire, Thémis PUF, 1972 ; S. Plawski, Droit pénitentiaire, PUL, 1977 ; G. Stéfani, G. Levasseur et R. Jambu-Merlin, Criminologie et science pénitentiaire, Dalloz, 5è éd., 1982 ; B. Bouloc, Pénologie, Dalloz, 2 ème éd., 1998

15 Année Chiffres Année Chiffres 1991 45 420 2001 47 837 1992 49 083 2002 48 594 1993 50 342 2003 55 407 1994 52 551 2004 59 246 1995 53 935 2005 59 197 1996 55 062 2006 59 522 1997 54 269 2007 60 003 1998 53 845 2008 64 003 1999 52 961 2009 66 178 2000 51 441 La répartition de la population pénale selon la catégorie pénale se modifie légèrement : le taux de prévenus diminue de manière constate par rapport au taux de condamnés : au 1/1 CONDAMNES PREVENUS Rapport 1991 24 769 20 650 54,5 / 45,5 1992 29 235 19 870 59,6 / 40,4 1993 29 650 20 472 59,1 / 40,8 1994 28 879 21 143 57,7 / 42,3 1995 31 609 20 959 60,1 / 39,9 1996 30 859 23 076 57,2 / 42,8 1997 31 748 22 521 58,5 / 41,5 1998 32 254 21 591 59,9 / 40,1 1999 32 509 20 452 61,3 / 38,6 2000 33 341 18 100 64,8 / 35,4 2001 31 730 16 107 66,3 / 33,7 2002 32 470 16 124 66,8 / 33,2 2003 34 555 20 852 62,3 / 37,6 2004 37 497 21 749 63,3 / 36,7 2005 39 063 20 134 65,9 / 34,0 2006 39 790 19 732 64,8 / 33,2 2007 41 920 18 483 69,4 / 30,6 2008 47 206 16 797 73,7 / 26,3 2009 50 245 15 933 75,9 / 24,1 Dans ce dernier tableau, on entend par «prévenus» les détenus, hommes et femmes, en cours d'information, en attente d'un jugement, c'est-à-dire des personnes non encore condamnées. On entend par condamnés toutes personnes, hommes et femmes, déjà jugées, y compris les condamnés en délai ou en exercice de voie de recours et les détenus soumis à la contrainte par corps. 15 - Population carcérale féminine - En métropole, on constate un accroissement faible mais constant depuis vingt ans 1., comme en témoigne le taux de féminité. Situation féminine carcérale et Taux de féminité : 1 Cf. not. R. Cario, Femmes et criminelles, Eres, 1992

16 Année nb taux Année nb taux 1991 1969 4,1% 2001 1738 3,6 1992 1951 4,1 2002 1715 3,6 1993 2080 4,4 2003 2085 3,7 1994 2107 4,2 2004 2255 3,8 1995 2134 4,2 2005 2238 3,7 1996 2133 4,1 2006 2187 3,6 1997 2223 4,1 2007 2152 3,5 1998 2136 4,2 2008 2379 3,7 1999 2029 2,9 2009 2093 3,1 2000 1882 3,9 Femmes mises en cause et taux de féminité par rapport aux hommes mis en cause Année femmes hommes Taux de féminité 2002 128 812 778 157 14,2 2003 145 560 810 863 15,2 2004 158 296 859 552 15,6 2005 162 050 904 852 15,2 2006 165 972 934 426 15,1 2007 165 027 960 844 14,9 B : En milieu ouvert 16 - Diversité - La population pénale en milieu ouvert est placée sous le contrôle du juge de l'application des peines et des "comités de probation et d'assistance aux libérés", et comprend diverses catégories de condamnés.. - Cela concerne d'abord le probationnaire, soumis à une condamnation assortie d'un sursis avec mise à l'épreuve. Dans ce cas, l'exécution de la peine privative de liberté est suspendue ; l'épreuve se déroule, avec ses diverses obligations, sous le contrôle du juge de l'application des peines assisté d'un comité de probation comprenant des éducateurs, des agents de probation ou des bénévoles. - Cela concerne ensuite les libérés conditionnels, c'est-à-dire des condamnés dispensés, sous certaines conditions, de subir le surplus de la peine. Cette mesure qui permet de libérer le condamné avant l'expiration de sa peine peut être accordée par le garde des sceaux ou par le juge de l'application des peines. Les comités de probation et d'assistance aux libérés sont chargés de la mise en oeuvre et de l'application de cette mesure. - Cela concerne encore les interdits de séjour et, depuis 2000, les contrôles judiciaires.. L'interdiction de séjour est une peine complémentaire consistant dans la défense faite à un condamné de paraître dans certains lieux ; elle comporte en outre des mesures de surveillance et d'assistance. Le respect de ces obligations est contrôlé par le comité d'assistance aux libérés. - Cela concerne enfin, depuis quelques années, les condamnés à un travail d'intérêt général, suivies au titre du contrôle judiciaire, bénéficiant d'une grâce conditionnelle ou d'un ajournement de la peine, et l'effectif des assujettis au service national 1. D'un point de vue quantitatif, l'effectif de la population pénale en milieu ouvert est presque le double de celui de la population pénale en milieu fermé ; de plus, il est en constante augmentation. Un tableau permet de cerner l'évolution du chiffre global de la population pénale en milieu ouvert : il résulte de ce tableau une très nette augmentation du nombre de probationnaires et de libérés 1 Art. L 51 C. du service national

17 conditionnels, et une sensible diminution du nombre d'interdits de séjour pris en charge par l'administration pénitentiaire : au 1/1 Probationnaires (SME) Libérés conditionnels Interdits de séjour Travail d'intérêt général 1990 82 182 9 670 20 7 707 1991 94 960 6 185 18 10 507 1992 98 066 5 147 15 11 289 1993 94 933 4 591 16 12 996 1994 87 446 4 579 11 13 069 1995 87 776 5 053 505 18 928 1996 86 594 5 293 899 20 903 1997 96 523 6 125 1 100 22 812 1998 104 482 4 775 1 237 23 763 1999 109 349 4 685 1 419 23 952 2000 113 499 5 361 1 542 24 962 2001 119 764 5 680 1 619 25 411 2002 119 753 5 904 3 942 23 488 2003 107 846 6 056 3 972 19 106 2004 105 247 6 428 4 073 17 990 2005 108 528 6 480 4 195 16 885 2006 120 676 8 168 7 879 24 260 2007 119 756 6 861 8 711 24 672 2008 121 700 6 581 9 708 24 502 2 : Les caractéristiques de la population pénale 17 - Paramètres - Les différents tableaux ci-après précisent les caractéristiques essentielles de la population pénale métropolitaine en milieu fermé, en tenant compte de l'âge, de la nature de l'infraction commise, de la nationalité et du niveau d'instruction des détenus. A : L'âge des détenus 18 - Stabilité - La répartition selon l'âge met en évidence la constante de l'âge moyen du détenu en France depuis 1990 : aux environs de 31 ans, le plus grand nombre de détenus se situant entre 25 et 40 ans (même si on assiste à un vieillissement global de la population pénale). Cela correspond à l'analyse criminologique selon laquelle "la distribution par âge de la criminalité donne l'image d'un taux de criminalité qui s'élève durant toute une période de l'existence humaine puis diminue progressivement pour devenir presque négligeable à la fin de la vie" 1. Ainsi, il est possible de dresser un tableau traduisant l'évolution de la population pénale en métropole depuis 1990, même si ce tableau traduit mal la réalité de la délinquance juvénile : Au Ensemble -18 ans 18 à 25 25 à 40 40 à 60 + 60 1/1 1990 43 913 524 13 345 22 388 7 227 429 1991 47 160 395 13 502 24 346 8 442 475 1 R. Gassin, Criminologie, op. cit., p. 317 s. n 410 s. et réf.

18 1992 48 119 474 14 005 25 034 8 081 519 1993 48 164 545 14 029 24 768 8 272 550 1994 50 240 513 14 503 25 745 8 858 621 1995 51 623 533 14 127 26 183 10 001 779 1996 52 658 514 13 435 27 112 10 729 868 1997 51 640 576 12 830 25 893 11 283 1 058 1998 50 744 622 11 871 24 790 12 111 1 350 1999 49 672 662 11 740 25 281 13 029 1 442 2000 48 049 718 11 971 24 277 13 527 1 564 2001 44 618 616 11 181 21 914 12 520 1 606 2002 45 319 826 12 331 21 580 12 292 1 565 2003 51 827 808 14 599 24 646 14 593 1 781 2004 55 355 739 15 369 26 588 14 570 1980 2005 55 302 623 14 936 26 433 15 135 2 070 2006 55 633 732 14 971 26 256 15 321 2 242 2007 56 294 729 15 180 27 113 15 164 2 207 2008 59 468 727 15 661 28 971 15 980 2 364 B : La nationalité des détenus 19 - Accroissement - La répartition par continent de la population pénale métropolitaine est relativement stable. Au premier rang des détenus, hommes et femmes d'origine étrangère, se situent les africains. Après une hausse entre 1981 et 1983, suivie d'une légère régression entre 1984 et 1989, on doit relever un accroissement sensible depuis 1989. De plus, sur l'ensemble de la période 1980-1991 on note une augmentation de 227 % du nombre total de ces détenus. Au second rang, loin derrière les détenus d'origine africaine, on trouve des détenus européens dont le nombre a certes augmenté depuis 1990, mais dont le taux par rapport au nombre total de détenus étrangers est en constante diminution depuis cette date. Viennent ensuite les détenus asiatiques qui ont progressé de 328 % en 12 ans, les détenus américains qui ont progressé fortement, puis les détenus océaniens et autres (apatrides et nationalité mal définie), mais qui ensemble ne dépassent pas 12 % de toute la population carcérale en métropole d'origine étrangère. Année Ensembl Europe Afrique AMERIQUE Asie Océanie Autres e 1991 14343 2387 (16,6) 10240 (71,4) 535 (3,7) 1091 (7,6) 6 (0,1) 84 (0,6) 1992 14718 2432 (16,5) 10505 (71,4) 486 (3,3) 1190 (8,1) 4 (0,0) 101 (0,7) 1993 15125 2432 (16,1) 11002 (72,7) 451 (3,0) 1152 (7,6) 6 (0,0) 82 (0,3) 1994 15519 2836 (18,3) 10987 (70,8) 436 (2,8) 1210 (7,8) 8 (0,1) 42 (0,5) 1995 14979 3026 (20,2) 10267 (68,5) 448 (3,0) 1181(7,9) 11 (0,1) 46 (0,3) 1996 15300 3173 (20,7) 10566 (69,1) 417 (2,7) 1094 (7,2) 3 (0,0) 47 (0,3) 1997 14706 3164 (21,4) 9875 (66,9) 474 (3,2) 1185 (8,0) 8 (0,1) 63 (0,4) 1998 13136 3140 523,8) 8399 (63,7) 470 (3,6) 1120 (8,5) 7 (0,1) 45 (0,3) 1999 12534 3059 (25,1) 7536 (61,9) 423 (3,4) 1087(8,9) 4 (0,03) 55 (0,4) 2000 11453 2840 (24,7) 6841 (59,7) 798 (6,9) 965 (8,4) 9 74 2001 10145 2666 (26,2) 5791 (57) 814 (8) 870 (8,5) 4 89 2002 10507 2721 (25,8) 6006 (57,1) 859 (8,1) 868 (8,2) 6 47 2003 11918 3297 (27,6) 6357 (53,3) 1129 (9,4) 1054 (8,8) 3 78 2004 13356 4038 (30,2) 6865 (51,4) 1194 (8,9) 1250 (9,3) 11 62 2005 13068 4138 (31,6) 6416 (49) 1285 (9,8) 1220 (9,3) 9 64

19 2006 12467 3924 (31,4) 6180 (49,5) 1185 (9,5) 1190 (9,5) 8 54 2007 12284 3925 (31,9) 5985 (48,7) 1155 (9,4) 1214 (9,8) 5 78 2008 12160 4028 (33,1) 6143 (50,5) 1224 (10) 748 (6,1) 19 (0,1) 77 (0,6) La part des étrangers, dans la population carcérale de France métropolitaine, d'un point de vue quantitatif, est relativement stable depuis quinze ans. C : Le niveau d instruction 20 Evolution - La répartition des détenus en France métropolitaine et Outre-mer démontre un accroissement quantitatif du nombre d illettrés avec des variations annuelles sensibles ; néanmoins, la proportion d illettrés dans cette population carcérale reste minoritaire avec une légère augmentation sur moins de 20 années. La part des détenus ayant une instruction secondaire ou supérieure, depuis 1982, a presque quadruplé en quantité. La part des détenus ayant une instruction primaire n est plus la plus importante depuis 2002. Cependant elle est en diminution corrélativement à l'augmentation des deux autres catégories 1. Année au 1/1 Illettrés Primaire Secondaire et supérieur Année au 1/1 Illettrés Primaire Secondaire et supérieur 1991 5595 31 477 10 1 18 2000 5714 26 604 19 123 1992 5866 30 032 12 215 2001 4904 22 573 20 360 1993 7100 30 343 12 215 2002 5201 19 711 23 682 1994 6361 29 332 14 547 2003 5372 22 014 28 021 1995 8207 30 274 13 142 2004 6188 23 266 29 792 1996 8657 29 712 14 289 2005 6093 20 733 32 371 1997 7948 27 736 15 956 2006 6503 21 365 31 654 1998 6736 27 405 16 603 2007 5451 17 308 33 535 1999 6104 26 229 17 339 2008 1570 16 729 41 169 21 - Relativité des statistiques - Pour conclure cette présentation du phénomène criminel, il convient de souligner qu'aujourd'hui on formule à l'encontre des statistiques criminelles certaines critiques même si longtemps on leur a attribué un grand crédit 2. D'abord, ces statistiques ne seraient pas d'une parfaite exactitude, en raison d'erreurs voire de falsifications délibérées de la part des autorités. Ensuite, ces statistiques criminelles déformeraient la réalité en attribuant le même poids à toutes les infractions comptabilisées quelle que soit leur gravité. Enfin, ces statistiques mesureraient, non la criminalité, mais l'activité des services répressifs et leur réaction à la délinquance. En réalité, des inexactitudes peuvent toujours exister. Parfois un changement de mode de calcul rend impossible l'appréciation d'une situation de criminalité. Les statistiques criminelles sont relatives. Elles ne permettent pas de mesurer la criminalité réelle : ne saisissant que les criminalités légale et apparente, elles ne sont pas un indicateur satisfaisant de la criminalité. Cependant, ces statistiques, en mesurant formellement l'activité des services répressifs, sont en même temps un indicateur du phénomène criminel contre lequel ces services ont pour objectif de lutter. 1 Cf. not. E. Yamarellos et G. Kellens, op. cit., V Instruction t.1 ; J. Léauté, Criminologie et science pénitentiaire, op. cit., p.378 s. ; M. Cusson, Croissance et décroissance du crime, op. cit., p.61 s. ; R. Gassin, Criminologie, op. cit., p. 351 n 463 2 Cf. not. R. Gassin, Criminologie, op. cit., p. 99 s. n 136 s. et réf..

20 CHAPITRE 2 LES MOYENS DE LUTTE CONTRE LE PHENOMENE CRIMINEL 22 - Les moyens pratiques et théoriques- La lutte contre la criminalité traduit la réaction sociale face à la réalité et à l importance de ce phénomène. De tous temps, les sociétés ont créé et multiplié les moyens de cette lutte avant même d en imaginer et d en préciser les orientations. Or, les instruments de répression (Section 1) n ont toujours été que relativement efficaces à contenir ou à diminuer le développement du phénomène criminel. Cela n est sans doute que la conséquence des difficultés que les sociétés ont toujours rencontrées tant dans la recherche que dans la mise en œuvre des conceptions de la répression (Section 2). Section 1 : Les instruments de répression 23 - Structures et sciences - Les institutions traditionnelles de réaction sociale, c est-à-dire le système répressif dans son ensemble comprenant les services de police, les juridictions et l administration pénitentiaire, se caractérisent par une efficacité relative lorsqu on les confronte au développement de la criminalité ( 1). En revanche, sur le plan scientifique, l évolution des sciences criminelles permet de doter la société d instruments sinon efficaces du moins adaptés le mieux possible à la lutte contre le phénomène criminel ( 2). 1 : Les institutions répressives 24 - Diversité des structures - Le système répressif présente des structures complexes de perception et de traitement de la criminalité. Cette complexité est une source de lenteurs, d engorgements, de blocages sectoriels ou d ensemble, souvent dénoncés par l opinion publique et reconnus par tous les gouvernants. Cette complexité est surtout une nécessité en raison des dangers inhérents au système répressif, des risques d erreur, d atteintes aux libertés, à la vie ou aux patrimoines des individus, des débordements de pouvoirs de la part des utilisateurs de ces moyens..., autant d éléments qui rendent indispensable la multiplication des contrôles, des sélections, des tris, des orientations ou décisions. Néanmoins, cette lenteur nécessaire ne justifie pas une immutabilité du système répressif. D importantes réformes de structure seules permettraient d améliorer l efficacité des différents moyens institutionnels de lutte contre la criminalité : les moyens policiers, judiciaires et pénitentiaires. A : La police 25 - Mission de police judiciaire - L action policière est abondante dans l exercice de sa mission de police judiciaire. Avant de préciser cette action et d en mesurer l efficacité, il est indispensable de s interroger sur le sens de l expression " police judiciaire " et sur ce que recouvre la mission de police judiciaire. L expression " police judiciaire " est amphibologique. Quand elle se réfère à l organisation administrative du Ministère de l intérieur, la police judiciaire désigne un service spécialisé de la police nationale : ce n est pas le sens retenu ici. En procédure pénale, la police judiciaire désigne

21 l ensemble des personnels chargés de missions dites de police judiciaire, tant lors de l enquête préliminaire que lors de l instruction. La police judiciaire est donc un regroupement intellectuel de personnes appartenant à des corps administratifs différents : la gendarmerie, la police nationale, les maires, d autres fonctionnaires de l Etat.. La mission de police judiciaire suppose qu une infraction ait été commise : elle doit alors être constatée, on doit en rassembler les preuves et en rechercher les auteurs 1. Cette mission se distingue nettement de la tâche de police administrative par laquelle il est pourvu au bon fonctionnement des services publics, même si certains agents cumulent les fonctions de police administrative et judiciaire tels notamment les douaniers ou gardiens de la paix. Le contenu de cette mission de police judiciaire est variable selon le moment de son exercice dans le procès pénal : - avant toute ouverture d une information, cette mission consiste à fournir au Ministère Public, qui en dirige l exécution, les éléments de nature à apprécier l opportunité de déclencher les poursuites ; en fonction de ces éléments, le Parquet pourra décider, soit de classer sans suite le dossier, soit de saisir immédiatement la juridiction de jugement par voie de " citation directe ", soit enfin de déclencher l ouverture d une instruction par un réquisitoire à fin d informer qui saisira le juge d instruction, ouverture obligatoire en matière de crime et facultative pour les délits ; - lorsqu une information est ouverte, la mission de police judiciaire consiste à seconder les juridictions d instruction en exécutant, sous leur contrôle, leurs réquisitions : par exemple, il sera procédé à des auditions de témoins par voie de commission rogatoire, ou à des arrestations en exécution d un mandat du juge d instruction.... 26 - Efficacité de la police judiciaire - Cette efficacité se mesure en établissant le rapport entre le nombre total des affaires constatées par la police judiciaire et celui des affaires élucidées, c est-à-dire dans lesquelles les coupables ont été découverts. Les statistiques en ce domaine, établies par le Service central d étude de la délinquance de la Direction centrale de la police judiciaire (Direction générale de la police nationale), démontrent la faiblesse du taux d efficacité pour les crimes et les délits. Taux global d élucidation de 1977 à 1999 Années Total crimes Années Total crimes Années Total crimes et délits et délits et délits 1977 37,3 % 1985 36,1 1993 32,2 1978 38,4 1986 40,0 1994 34,8 1979 39,0 1987 42,0 1995 32,4 1980 39,8 1988 40,8 1996 30,2 1981 41,0 1989 38,8 1997 29,4 1982 39,5 1990 37,5 1998 28,6 1983 40,4 1991 36,7 1999 27,6 1984 40,4 1992 32,9 Cependant, il convient de relativiser ces taux 2. En effet, il n y a pas de rapport immédiat entre les faits constatés au cours d une année par les services de police et les faits élucidés la même année, car des faits élucidés peuvent avoir été constatés au cours des années précédentes, ce qui explique des taux de réussite supérieurs à 100 %. De plus, ce taux varie en fonction des moyens policiers, et surtout de la nature des infractions commises, certaines étant élucidées dès leur constatation (ex. toxicomanie), d autres étant presque toutes révélées aux services d enquêtes (ex. les homicides, les 1 art. 14 C.P.P 2 CESDIP source Davido, P. Robert et alii, Les comptes du crime, op. cit., p. 80