CONNAISSANCES STATUTAIRES LA REFORME DE LA RETRAITE La dernière loi portant réforme des retraites est la loi n 2014-40 du 20 janvier 2014 garantissant l'avenir et la justice du système de retraites. Deux décrets d application ont été adoptés à cette date : le décret n 2014-129 du 14 février 2014 et le décret n 2014-350 du 19 mars 2014. Cette réforme a pour objet de réduire le déficit du régime des retraites qui avoisine les 7,6 Mds en 2020. La loi de 2014 prévoit notamment une évolution de la durée d assurance requise pour l obtention d une pension de retraite à taux plein (mais l âge légal de départ à la retraite reste fixé à 62 ans). Elle crée également le compte personnel de prévention de la pénibilité servant à comptabiliser les périodes d exposition à un ou plusieurs facteurs de pénibilité et les droits acquis à ce titre. I. LES PRINCIPALES DISPOSITIONS DU NOUVEAU CADRE JURIDIQUE A. Age du taux plein L âge minimum pour faire liquider la pension de vieillesse versée par le régime général, toujours fixé à 60 ans pour les assurés nés avant le 1 er juillet 1951, est porté progressivement à 62 ans, en fonction de l année de naissance de l assuré et selon les règles figurant au tableau ci-dessous. Age légal de la retraite en fonction de l année de naissance (ministère des Affaires sociales) Date de naissance de l assuré avant le 1 er juillet 1951 du 1 er juillet 1951 au 31 décembre 1951 Age minimum requis pour partir à la retraite 60 ans 60 ans et 4 mois 1952 60 ans et 9 mois 1953 61 ans et 2 mois 1/10
1954 61 ans et 7 mois à compter du 1 er janvier 1955 62 ans Cet âge peut toutefois être abaissé dans le cadre : de la retraite anticipée pour longue carrière (art. L. 351-1-1 CSS), dont les conditions d accès ont été assouplies par le décret n 2012-847 du 2 juillet 2012 (JO du 3 juillet 2012) applicable aux pensions prenant effet à compter du 1 er novembre 2012 ; de la retraite anticipée pour les travailleurs handicapés. L article L. 351-1-3 du code de la Sécurité sociale prévoit que l âge de la retraite peut être abaissé pour les assurés handicapés ayant accompli une certaine durée d assurance alors qu ils étaient atteints d une incapacité permanente minimum (au moins 50 %). Les conditions d accès à ce dispositif de retraite anticipée ont été assouplies par la loi du 20 janvier 2014 précitée ; de la retraite anticipée pour carrière pénible instituée par la loi du 9 novembre 2010 (article L 341-1-4 nouveau du CSS) applicable, sur ce point, aux pensions de retraite prenant effet à compter du 1 er juillet 2011. B. Durée d assurance Jusqu'à présent, pour les assurés nés en 1956 et après, la durée d'assurance applicable à leur génération était fixée l'année de leur 56 e anniversaire, compte tenu de l'évolution constatée de l'espérance vie à 60 ans. Un décret du 13/12/2013 avait fixé la durée d'assurance à 166 trimestres pour les générations nées en 1957. Pour répondre à l'allongement continu de l'espérance de vie, la loi du 20 janvier 2014 réformant les retraites a modifié le dispositif : le calendrier de relèvement de la durée d'assurance prévoit, désormais, pour les générations nées à partir de 1958, une augmentation progressive de la durée minimale d'assurance d'1 trimestre tous les 3 ans, de manière à atteindre 172 trimestres (soit 43 ans) pour les générations nées en 1973 et après. Année de naissance Nombre de trimestres cotisés Avant 1949 160 1949 161 1950 162 1951 163 1952 164 2/10
1953, 1954 165 1955, 1956, 1957 166 1958, 1959, 1960 167 1961, 1962, 1963 168 1964, 1965, 1966 169 1967, 1968, 1969 170 1970, 1971, 1972 171 En 1973 et après 172 C. Allocation de solidarité aux personnes agées (ASPA) Pour bénéficier de l ASPA ( ex «mininum vieillesse»), le demandeur doit remplir des conditions d âge (a), de résidence (b) et de ressources (c). a) âge minimum Il faut avoir au moins 65 ans. Cette condition d âge est abaissée à l âge légal de départ en retraite notamment pour : les assurés reconnus inaptes au travail ; les anciens déportés ou internés titulaires de la carte de déporté ou interné de la Résistance ou de la carte de déporté ou interné politique ; les anciens prisonniers de guerre (sous certaines conditions notamment de durée de captivité) ; les titulaires de l allocation supplémentaire d invalidité (ASI), d une retraite d inaptitude au travail suite à une pension d invalidité, d une retraite anticipée assuré handicapé, de l allocation aux adultes handicapés, de l aide sociale aux infirmes, aveugles et grands infirmes, de la carte d invalidité à 80 %. b) résidence en France Peuvent prétendre à l Aspa, les personnes qui résident de façon stable et régulière en France, c est-à-dire celles qui y ont leur foyer ou leur lieu de séjour principal. La circulaire Cnav n 2009/8 du 29 janvier 2009, citée en référence, définit le foyer comme étant le lieu de résidence habituelle et permanent et le lieu de séjour principal comme celui dans lequel le bénéficiaire est présent plus de 6 mois (ou 180 jours) au cours de l année de versement des prestations. Cette condition de résidence est vérifiée au moment de la demande de l Aspa. Mais, elle peut être contrôlée plus tard, notamment lors d une révision des droits. c) plafond de ressources Les ressources du demandeur (y compris le montant de l Aspa) auxquelles il faut 3/10
ajouter, le cas échéant, celles de son conjoint, concubin ou partenaire de Pacs ne doivent pas dépasser un certain plafond (montants en vigueur depuis le 1 er avril 2014) : 9 503,89 par an pour une personne seule, 14 755,32 par an pour un couple (marié, concubin ou pacsé). D. Parents d enfant handicapé Les parents d enfant handicapé continueront à bénéficier d une retraite à taux plein à 65 ans, quel que soit le nombre de trimestres validés, à condition : qu ils soient bénéficiaires d au moins un trimestre au titre de la majoration de durée d assurance pour enfant handicapé, ou s ils ont été salariés ou aidant familial de leur enfant pendant au moins 30 mois et qu ils ont bénéficié, pour cet enfant, de l aide humaine au titre de la prestation de compensation du handicap. E. Polypensionnés public / privé La durée de service minimale pour bénéficier du régime de retraite de la fonction publique est abaissée de 15 ans à 2 ans. Désormais, il suffira d avoir cotisé pendant 2 années dans la fonction publique pour bénéficier du régime des fonctionnaires, soit une retraite calculée à partir du traitement perçu les six derniers mois. Mais cette règle ne s appliquera que pour la période durant laquelle les intéressés ont travaillé dans le public. F. Préretraite amiante Certains salariés ayant été exposés à l'amiante peuvent, sous conditions, bénéficier d une préretraite. Elle leur permet de percevoir une allocation de cessation anticipée d'activité jusqu à leur admission en retraite. Les personnes éligibles à la préretraite amiante (FCAATA) ne verront pas l âge d accès à cette préretraite modifié. Par ailleurs, ils continueront de bénéficier de la retraite à partir de 60 ans. G. «Rachat Fillon» Le rachat de trimestres ou versement pour la retraite (VPLR), institué par la réforme des retraites de 2003, permet aux salariés qui le souhaitent de racheter un maximum de 12 trimestres en raison d années d études supérieures ou d années de cotisation incomplètes. Mais, du fait du relèvement de l âge légal de départ à la retraite de 60 à 62 ans, les trimestres rachetés peuvent se révéler inutiles pour certains assurés. La loi 4/10
prévoit la possibilité, pour les assurés nés à partir du 1 er juillet 1951, et qui ont effectué leur VPLR avant le 13 juillet 2010, d être remboursés. Pour cela, il ne faut pas déjà percevoir une retraite dans un régime de base ou complémentaire obligatoire. La loi prévoit un délai de 3 ans pour demander le remboursement. Le montant remboursé sera majoré pour tenir compte du temps écoulé entre le paiement du rachat et son remboursement et il sera soumis à l impôt sur le revenu. H. Retraite pour inaptitude au travail La retraite au titre de l'inaptitude au travail permet d'obtenir une retraite au taux maximum de 50 % à compter de l âge légal de départ à la retraite, quel que soit le nombre de trimestres. L'inaptitude au travail doit être reconnue par le médecin-conseil de la caisse qui attribue la retraite. Il faut joindre un dossier médical (fourni par sa caisse de retraite) à sa demande de retraite. Certaines personnes sont considérées inaptes au travail et ne sont pas soumises au contrôle médical. Il s'agit : des personnes reconnues invalides avant 60 ans ; des titulaires d'une pension d'invalidité ; des titulaires d'une retraite de veuf ou veuve substituée à une pension d'invalidité de veuf ou veuve ; des titulaires de l'allocation aux adultes handicapés ; des titulaires de la carte d'invalidité reconnaissant au moins 80 % d'incapacité permanente. La pension de retraite au titre de l inaptitude prend le relais, à l âge légal de départ à la retraite, de la pension d'invalidité, soit 60 ans pour les personnes nées avant le 1 er juillet 1951, puis progressivement 62 ans pour les personnes nées à compter du 1 er janvier 1956. I. Surcote La surcote est une majoration de la pension de retraite de base dont bénéficient les assurés qui continuent de travailler au-delà de l âge légal de la retraite, et au-delà de la durée d'assurance nécessaire pour une retraite à taux plein. La surcote reste fixée à 5 % de pension supplémentaire par année supplémentaire travaillée. Deux paramètres sont à prendre en compte pour calculer la majoration éventuelle qui sera appliquée à votre retraite du régime de base : le nombre de trimestres de surcote à prendre en compte, le taux de surcote à appliquer pour chaque trimestre. La surcote est alors calculée à partir du premier jour du trimestre civil qui suit l'âge légal de votre départ en retraite (entre 60 et 62 ans selon votre année de naissance). 5/10
II. LES RÈGLES APPLICABLES A LA FONCTION PUBLIQUE A. Les dispositions inchangées a) La règle des 6 derniers mois Les règles de liquidation des pensions des fonctionnaires et des militaires ne sont pas modifiées. La pension demeure calculée sur la base du traitement perçu pendant les 6 mois qui précèdent la cessation de fonctions. Le montant de la pension est calculé à partir de l indice correspondant à l emploi, au grade, à la classe et à l échelon effectivement détenus depuis au moins 6 mois au moment de la cessation d activité, multiplié par un pourcentage de pension (qui est fonction du nombre de trimestres acquis), soit 75 % pour une carrière complète. b) La possibilité de départ anticipé des catégories actives Le code des pensions civiles et militaires de retraite prévoit que les fonctionnaires dont les emplois sont classés en catégorie active (ce sont les emplois soumis à un risque particulier ou des fatigues exceptionnelles) peuvent être admis à la retraite avant 60 ans. Si les âges d ouverture des droits à la retraite et les durées de services sont relevés dans les mêmes conditions que pour les autres fonctionnaires (2 ans à raison de 4 mois par an), le principe d un départ anticipé des fonctionnaires occupant ces emplois est maintenu. c) La pension de réversion Les règles d attribution demeurent inchangées pour les veuves ou veufs de fonctionnaires qui se voient attribuer, sans condition de ressources et d âge, une pension de réversion correspondant à 50 % de la retraite de droit propre du défunt. d) Les bonifications Sous certaines conditions, les fonctionnaires peuvent bénéficier de bonifications de leur durée d assurance qui viennent s ajouter à leur durée de services effectifs. C est le cas par exemple de : La bonification dite du «cinquième» qui permet d acquérir une année de bonification pour cinq années de services dont bénéficient certains corps classés en catégorie active (sapeurs-pompiers, douaniers, policiers, surveillants pénitentiaires ) ainsi que les militaires ; La bonification pour les services civils rendus hors d Europe et en outre-mer ; Les bonifications attribuées au titre des bénéfices de campagne militaire ou pour l exécution d un service aérien ou sous-marin commandé. 6/10
Ces bonifications sont maintenues. B. Les principales modifications a) Le relèvement de l âge légal de départ à la retraite Les conditions diffèrent selon que les fonctionnaires appartiennent à la catégorie sédentaire et agent contractuel, ou à la catégorie active. (Il existe des dérogations dans chaque cas qui peuvent être consultées sur le site www.service-public.fr). Fonctionnaires de catégorie sédentaire et contractuels Âge limite d'activité en fonction de l'année de naissance Dates / années de naissance Avant le 1 er juillet 1951 Entre le 1 er juillet et le 31 décembre 1951 Âge limite d'activité 65 ans 65 ans + 4 mois 1952 65 ans + 9 mois 1953 66 ans + 2 mois 1954 66 ans + 7 mois 1955 67 ans Fonctionnaires de catégorie active Âge limite d'activité en fonction de l'année de naissance Dates / années de naissance Avant le 1 er juillet 1956 Âge limite d'activité 60 ans Entre le 1 er juillet et le 31 décembre 1956 60 ans + 4 mois 1957 60 ans + 9 mois 1958 61 ans + 2 mois 7/10
Âge limite d'activité en fonction de l'année de naissance Dates / années de naissance Âge limite d'activité 1959 61 ans + 7 mois 1960 62 ans b) La convergence public / privé des taux de cotisation Le taux de cotisation salariale acquitté par les fonctionnaires sera aligné progressivement sur celui du secteur privé. Il sera donc porté de 7,85 % à 10,55 %. Ce taux correspond à la somme des cotisations salariales en vigueur dans le secteur privé (régime général et régimes complémentaires AGIRC / ARCCO). L alignement du taux de cotisation s effectuera en 10 ans sans changement de l assiette de cotisation, à raison d une augmentation de 0,27 point par an à compter de 2011. c) Le départ anticipé sans condition d âge des parents de 3 enfants ayant effectué 15 ans de services La loi portant réforme des retraites a mis progressivement fin à ce dispositif de départ anticipé pour les parents de 3 enfants et ayant au moins 15 ans de services au 1 er janvier 2012. Des dispositions transitoires ont été prévues par la loi afin de ne pas remettre en cause les projets de vie des agents : les dossiers déposés avant le 1 er janvier 2011 pour un départ au plus tard le 1 er juillet 2011 ont pu bénéficier de la règle de calcul antérieure à la réforme ; les fonctionnaires à moins de 5 ans de l âge d ouverture des droits à la retraite avant l entrée en vigueur de la loi (par exemple, 55 ans ou plus pour les fonctionnaires sédentaires) et les militaires à moins de 5 ans de l âge mentionné à l article L.4139-16 du code de la défense conservent les règles de calcul antérieures à la réforme. d) Le minimum garanti Le régime des fonctionnaires prévoit un minimum garanti de pension, dont l équivalent dans le secteur privé est le minimum contributif. Les conditions de durée d assurance dans le secteur privé pour le minimum contributif s appliqueront aux fonctionnaires pour bénéficier du minimum garanti : avoir validé tous ses trimestres ou atteindre l âge d annulation de la décote. 8/10
La mesure ne s appliquera pas aux fonctionnaires ayant aujourd hui poursuivi leur activité au-delà de l âge minimum de départ à la retraite (soit 60 ans pour les catégories sédentaires). De même, le minimum garanti restera alloué sans condition d âge ou de durée d assurance pour les départs en retraite pour invalidité, les départs anticipés pour les fonctionnaires handicapés et les fonctionnaires parents d un enfant handicapé. Enfin, le montant du minimum garanti demeure inchangé. e) La «condition de fidélité» pour l ouverture du droit à une pension du régime des fonctionnaires passe de 15 à 2 ans La durée minimale de services effectifs nécessaire pour qu un fonctionnaire puisse bénéficier d une retraite fonction publique (aussi appelée «clause de stage») aujourd hui de 15 années sera réduite à 2 années. Les services auxiliaires déjà validés ne sont pas remis en cause. Les fonctionnaires dont la titularisation interviendra avant le 1 er janvier 2013 pourront demander à valider ces services dans les deux années suivant leur titularisation. Ainsi, la validation au titre du régime de retraite des fonctionnaires des périodes effectuées avant la titularisation, en qualité d agent non titulaire, sera fermée à compter de 2015. C. Autres points de la réforme de 2014 augmentation des cotisations vieillesse pour les actifs et pour les employeurs (de +0,15 point en 2014 puis de +0,05 point pour les trois années suivantes) ; Pour les entreprises, cette augmentation sera compensée par une baisse des cotisations familiales qu'elles doivent verser. report de la revalorisation des pensions de retraite du 1 er avril au 1 er octobre ; fiscalisation de la majoration de pension de +10 % pour les retraités ayant élevé trois enfants (jusque-là, il n y avait pas de soumission à l'impôt) ; pour les femmes, les modes de calcul seront revus pour la prise en compte des trimestres d interruption au titre du congé maternité, les petits temps partiels et les majorations de pension pour enfant ; création reportée pour le moment en raison de la complexité de sa mise en place - d un compte personnel de pénibilité : les points accumulés sur ce compte (un point par trimestre d exposition à un facteur de pénibilité) pourront être utilisés pour des formations, travailler à temps partiel en fin de carrière ou bénéficier de trimestres de retraite. Les critères de la pénibilité sont ceux retenus par les partenaires sociaux : charges lourdes, bruits, travail de nuit, postures pénibles... 9/10
Le Comité de suivi des retraites a remis au Premier ministre son premier avis annuel conformément à la loi du 20 janvier 2014. Cet avis souligne notamment que "la situation et les perspectives du système de retraites ne s éloignent pas de façon significative des objectifs définis par la loi ". Il ne formule donc pas de recommandations de redressement pour l année en cours. Dans ce même avis, le comité estime que : les taux de remplacement (rapport entre les derniers salaires et les pensions) sont conformes aux objectifs définis par la loi. Il note également que cette situation devrait se maintenir au cours des dix prochaines années ; le niveau de vie des retraités est en moyenne satisfaisant, et que ces derniers sont moins concernés par la pauvreté que les actifs ; le système de retraites demeure confronté au défi de la croissance économique. 10/10