Tous photographes!
Jacques Croizer Tous photographes! 58 Leçons pour réussir vos photos 2 e édition
Photographies de couverture : Jacques Croizer, Xavier-Philippe Lemierre (course automobile, en haut à droite) Graphisme de couverture : Vincent Burgeon Maquette intérieure : Belle Page, Vincent Burgeon Mise en page : Belle Page Dunod, 2013, 2014 5 rue Laromiguière, 75005 Paris www.dunod.com ISBN 978-2-10-072086-6
sommaire Introduction.................................... 8 LES RÉGLAGES Leçon 1 L appareil photo numérique.......... 12 Leçon 2 Une juste quantité de lumière........ 19 Leçon 3 L objectif............................ 25 Leçon 4 Le diaphragme...................... 30 Leçon 5 La vitesse d obturation............... 33 Leçon 6 La sensibilité........................ 39 Leçon 7 Les modes d exposition.............. 44 Leçon 8 La mesure de la lumière.............. 52 Leçon 9 Zoom sur les modes de mesure de la lumière....................... 59 Leçon!º Contrôler l exposition d une photo : l histogramme....................... 65 Leçon! Analyser un histogramme............ 68 Leçon! histogramme, luminosité et contraste. 74 Leçon! La couleur.......................... 77 Leçon! La balance des blancs............... 80 LA PRISE DE VUE Leçon! Qu est-ce qu une photo réussie?...... 86 Leçon! écrire avec la lumière................ 91 Leçon! La composition...................... 95 Leçon! La règle des tiers.................... 97 Leçon!ª Le nombre d or..................... 100 Leçon @º Texture et profondeur de champ..... 103 Leçon @ Choix de l objectif.................. 106 Leçon @ L hyperfocale...................... 112 Leçon @ Le bokeh.......................... 115
Leçon @ Perspective et compression des plans 120 Leçon @ Augmenter la profondeur de champ. 124 Leçon @ Initiation à la macrophotographie... 126 Leçon @ Pratique de la macrophotographie.. 132 Leçon @ Prise de vue pour le hdr............ 136 Leçon @ª La photo panoramique............. 142 Leçon #º La photo au flash................... 145 Leçon # La photo de nuit.................... 151 Leçon # Des idées pour vos photos.......... 156 LE POST-TRAITEMENT Leçon # Pour ou contre le post-traitement?.. 164 Leçon # Fichier RAW ou JPEG?............. 167 Leçon # Développement du fichier RAW..... 170 Leçon # La gestion des couleurs............. 172 Leçon # Corriger l exposition sur un fichier RAW..................... 174 Leçon # Corriger la température de couleur sur un fichier RAW................. 179 Leçon #ª Corriger le contraste sur un fichier RAW.................. 181 Leçon $º Corriger la saturation sur un fichier RAW.................. 184 Leçon $ Post-traitement en JPEG........... 186 Leçon $ Les calques d image................ 190 Leçon $ Corriger l histogramme sur un fichier JPEG................. 193 Leçon $ Corriger le contraste sur un fichier JPEG................. 199 Leçon $ Redresser l horizon................. 202 Leçon $ Corriger la perspective............. 205 Leçon $ Recadrage........................ 207 Leçon $ Les masques de fusion.............. 210 Leçon $ª Modes d application des calques.... 216 Leçon %º Le calque gris neutre............... 221 Leçon % Tamponner une poussière........... 224 Leçon % Traiter le bruit numérique........... 226 Leçon % Le noir et blanc.................... 229 Leçon % Le montage panoramique.......... 233 Leçon % Le focus stacking................... 240 Leçon % Le hdr............................ 247 Leçon % Publier ses photos sur Internet...... 250 Leçon % Imprimer ses photos................ 257 Annexes..................................... 263 Le mot de la fin............................... 273 Remerciements.............................. 275 Index........................................ 277 suppléments en ligne Les fi chiers originaux nécessaires pour pratiquer certains exercices de post traitement ou pour mieux analyser certaines images sont disponibles sur www.tousphotographes.imagegone.fr 7
Introduction p Kodak original (1888) q Zenit 11 (1982) Qu il est tentant le mode tout-automatique de notre appareil photo, en regard des trois cents pages de son manuel d uti - li sation! «Vous déclen chez, nous fai sons le reste?» En 1888, ce slo gan décliné par Kodak met la photo graphie à la por tée de tous. Un siècle plus tard, les quatre cent mille pixels du Fuji DS-1P abordent de manière encore très confi den tielle le virage du numérique. Enjeux économiques obligent, l histoire s accélère alors rapi de ment : en 1995, Casio lance le QV-10, pre mier appa - reil photo numé rique en des sous de mille dol lars. Il pré cède de peu le Powershot 600, qui inau gure la grande lignée des compacts Canon. En 2003, le Canon 300D Digi tal Re bel donne ses vraies lettres de noblesse à la photographie numérique. Il vainc les réticences des professionnels et convainc les photo graphes ama teurs qui y voient l occa sion de renouer avec leur pas - sion. Excepté la pel li cule, ce boîtier embarque tout ce qu ils connaissent déjà (contrôle précis de l exposition, de la sensibilité, autofocus ), le tout avec une ergo no mie qui leur est fami lière : les habi tués du reflex argen tique n ont aucune difculté à passer au reflex numérique. Il n en est pas de même pour les nou veaux venus dans le monde de la photo - graphie. Leur pre mier boîtier concentre en effet plus d un demi- siècle d amé - lioration continue. Priorité vitesse ou priorité diaphragme? Mesure pondérée cen trale ou mesure matricielle de la lumière? Auto fo cus dyna mique ou auto - fo cus sta tique? Flash TTL? C est vrai qu il est bien ten tant le mode tout-auto - ma tique de notre appa reil photo : vous déclen chez, il fera le reste! L adoption de la photographie numérique par le grand public est intimement liée au déve lop pe ment de la micro- informatique. Windows 3, né deux ans après le Fuji DS-1P, lance Microsoft aux trousses du Macintosh d Apple. Mosaic, ancêtre de nos navi ga teurs, était déjà capable d afficher des images sur le Web. Le déploiement d Internet a rapidement offert aux nouveaux venus du monde de la photo graphie un mode d échange jus qu alors inédit, inter ac tif et extrêmement réactif. Des communautés se sont formées autour d une marque (Nikon, Sony, Canon, Pentax ), d une tech nique (noir et blanc, macrophotographie, photo argentique ) ou plus généralement d une passion commune : la photographie! Au fil du temps, les forums Inter net sont deve nus une mine de ren - seignements pour les utilisateurs, confrontés à la complexité de leur matériel. Choix d un objectif? Problème technique? Doute esthétique? 8
Introduction Leur perplexité se traduit en interrogations souvent légitimes, par fois naïves, comme en témoigne cet exemple : «J ai besoin d aide sur mon nouveau Canon 600D. Avec le zoom 18-55 mm f/3,5-5,6 je vou lais avoir tout de net sur la photo ci- jointe, du pre mier plan à l arrière-plan : comment dois- je régler mon appa reil pour que tout soit net? Merci!» Freiné dans son inspiration par un aspect purement technique, l auteur de ce SOS obtiendra rapidement sur le forum plusieurs réponses pertinentes, qui l aideront à débroussailler l épineux problème de la profondeur de champ. La fréquentation de ces sites pâtit pourtant aujourd hui de l essor des réseaux sociaux. Plus faciles d accès, plus interactifs, Facebook et autres communautés sont à la fois le «tout-à-l ego» de nom breux photo graphes ama - teurs et un formidable outil de promotion. aller plus loin Les explications et la pédagogie n ont malheureusement pas encore trouvé leur place dans ce mode de communication excessivement lapidaire. Nous voici reve nus à notre point de départ. Comment par ve nir à oublier l appa - rente complexité d un nouveau boîtier, en appréhender progressivement tout le potentiel, en assimiler les limites? Pourquoi ne pas tout simplement lire le manuel livré avec l appa reil photo? La notice utilisateur d un appareil photo est généralement bien conçue par et pour des tech ni ciens. Elle détaille un à un les bou tons et les menus, en les mettant en rela tion avec leurs fonc tions. Mais le photo graphe ne se demande pas à quoi sert ce bouton? Il veut savoir quel est le bou ton qui lui per metra d arri ver au résultat espéré. Il faut lui par ler lumière pour expliquer le diaphragme, neteté pour introduire l hyperfocale, l accompagner dans une promenade à travers des exemples commen tés, qui lui per mettront de se fami lia ri ser peu à peu avec le vocabulaire souvent énigmatique du photo-geek. Il verra alors que cette appa - rente sophistication ne fait que préciser des notions finalement très naturelles. La photographie techniquement réussie n est que l alliance harmonieuse de quelques réglages que les boîtiers modernes savent déjà très bien optimiser. La plus-value esthétique du photographe dépend de sa capacité à interagir avec ces automatismes. «Une photographie est un frag ment de temps qui ne revien dra pas», a dit Martine Franck. C est pourquoi le réglage opti mal doit deve nir un réflexe. C est l objec - tif ultime de ce livre, que nous avons construit sous forme de 58 leçons afin de faciliter votre apprentissage. Le parcours initiatique est long. Avant de donner libre cours à votre imagination et à votre créativité, vous devrez appri voi ser votre appa reil photo. Posez- le à côté de vous et tour nez la page. Vous allez don ner du souffle à votre pas sion un parcours à deux vitesses Ce livre est conçu pour faci li ter un par cours à deux vitesses : découverte/perfectionnement. Dans les encarts Aller plus loin, le photo graphe confirmé trouvera des informations pour rafraîchir ou compléter ses connaissances. Ces points plus tech niques sont isolés du corps du texte et font par fois l objet d une annexe à décou vrir en fin d ouvrage. Le néophyte pourra accélérer son apprentis sage en sau tant ces encarts, sans que sa compréhension s en trouve altérée. Il aura ensuite tout loisir d approfondir les points qui l intéressent en utilisant l index. q Nikon D3300 (2014) 9
LES RÉGLAGES
Comment le boîtier mesure- t-il la lumière et comment détermine- t-il les quatre para mètres (vitesse, dia phragme, sen si bi lité et tem pé ra ture de cou leur) qui font la réus site tech nique d une photo? Quel est le rôle de ces para mètres? Comment interagissent- ils entre eux? Quelles sont leurs limites? Quelle est leur influence sur l esthé tique de la photo? Comment le photo graphe peut- il impo ser son choix et quelles en sont les consé quences? Vous trou verez illus trées dans cette pre mière partie les bases incontour nables de la photo graphie.
leçon 1 L appareil photo numérique Dans les leçons suivantes, vous allez faire connais sance avec votre appa reil photo, non par le détail anthro po mor phique de ses bou tons, mais à tra vers les élé ments qui le composent et les fonc tion na li tés qui leur sont atta chées. Nous avons fait le choix de ne pas par ler du mode vidéo. Cette option, qui enri chit indé nia ble ment les boîtiers modernes, met en jeu d autres réflexes, d autres règles, qui ten draient à complexi fier le pro pos. Les diférents types de boîtiers Le terme géné rique «appa reil photo» regroupe quatre grandes familles de maté riel destinées à une pratique courante de la photographie. En premier lieu viennent les compacts. Comme son nom l indique, cette caté go rie concerne des boîtiers de petite taille, conçus pour être empor tés dans toutes les occa sions. Ils sont prin - cipalement utilisés en mode tout-automatique, mais proposent également des fonctionnalités avancées. Elles sont le plus souvent accessibles à travers des menus qui en rendent l usage par fois peu ins tinctif. Entre le compact bijou et le compact expert, se décline une large gamme de maté riels qui donne géné - ralement des images correctes, voire excellentes, dès lors que les conditions d éclairage sont bonnes. u Compact Casio Lorsqu il a épuisé les possibilités de son compact, le photographe amateur se tourne généralement vers les bridges. De taille intermédia ire entre le compact et le reflex, le bridge est fré quem ment équipé d un zoom de très grande ampli - tude, qui le rend opé ra tion nel aussi bien pour le pay sage que pour le por trait, voire la photo animalière. Ces possibilités étendues se payent souvent par une qualité d image en retrait. L objectif et le boîtier sont indissociables. 12
leçon 1 L appareil photo numérique Bridge Nikon L ergo no mie du bridge est supé rieure à celle du compact, mais sa qua lité de visée souvent médiocre finit par pousser le photographe passionné à adopter son premier appareil reflex. Le choix est très large : entre reflex grand public à par tir de 400 ou boîtier pro fes sion nel à plus de 4 000, il est tou jours possible de trouver un appareil adapté à son budget. L objectif s achète séparé ment, per mettant à cha cun de s équi per avec le maté riel le plus adapté à son besoin et d atteindre ainsi sans conces sion une qua lité d image opti male. Il n est pas rare qu un photo graphe pos sède plu sieurs objec tifs qui, ajou tés à la taille du boîtier, finissent par constituer un matériel relativement encombrant. Reflex Canon 13
Tous photographes! Un nouveau venu sur le marché vient troubler cette belle hiérarchie : l hybride. S affran chis sant de la visée reflex et de son miroir, il réus sit le grand écart entre compacité et modularité, sans pour autant sacrifier la qualité d image. Ces appa reils se payent encore au prix de l inno va tion, et le parc des optiques est relativement réduit, mais les appareils hybrides devraient rapidement devenir une alternative très intéressante aux boîtiers reflex. u Hybride Fuji Le capteur Le cap teur est à l appa reil photo numé rique ce que la pellicule est au reflex argentique. Au-delà du nombre des pixels mis en avant par les fabri cants pour carac - tériser leur matériel, c est à la dimension du capteur qu il faut s intéresser. Le monde de la photographie est resté très conservateur. Le format du négatif uti lisé par la majo rité des boî tiers argen tiques est devenu le Graal du photo - graphe numé rique : 24 milli mètres sur 36 milli mètres (24 36 mm). Les cap teurs de cette dimen sion équipent le haut de gamme des reflex numé riques : ce sont les boî tiers dits Full Frame ou «plein format». Ils restent encore relativement chers. Quelques compacts experts embarquent également depuis peu un cap teur plein for mat. L ave nir a de beaux jours devant lui Les reflex numériques utilisent donc en majorité des capteurs plus petits. Ce sont les reflex APS-C (Advanced Photo System Classic). La taille du cap teur APS- C est de l ordre de 15 23 mm, soit une sur face 2,5 fois moindre que celle d un capteur plein format. 14
leçon 1 L appareil photo numérique La taille du cap teur des cend encore lors qu on se tourne vers les boî tiers compacts non experts. Leur dia go nale peut être infé rieure à 1 cm. Dans ce cas, leur sur face compa rée à la réfé rence plein for mat est divi sée par plus de vingt! Quelle impor tance? Sans entrer dans les détails, disons que chaque pixel est une petite usine qui capte la lumière : le photosite. Plus ces usines ont de l espace et meilleures sont leurs per for mances, en par ti cu lier leur réac ti vité aux faibles quan ti tés de lumière et aux grands écarts de lumi no sité. Si vous admet t ez qu il est déjà déli cat de faire fonc tion ner 16 mil lions de photosites sur un gros timbre- poste, vous conce vrez aisé ment que sur une tête de punaise, l ambiance puisse rapi de ment deve nir très bruyante. «Si l œil peut voir, tu peux faire la photo!» a énoncé un La plage dyna mique photo graphe de mode à la mode. La for mule est certes encou ra geante mais un peu idéa liste : votre appareil photo ne voit pas comme votre œil, ce qui engendre bien des dés illusions! Qu on se le dise une fois pour toutes : le cap teur du meilleur appa reil photo du monde reste aujourd hui un objet impar fait. Il est beau coup moins per for mant que l œil humain. Vous en vou lez la preuve? Ce pay sage nor vé gien semble a priori ne pas poser de pro blème de lumi no sité. Et pourtant... q Pla teau d Hardangervidda (Norvège) 15
Tous photographes! Votre œil s habituera bientôt à analyser spontanément la scène que vous voulez photo gra phier à tra vers ses hautes et ses basses lumières : Hautes lumières : le ciel présente des nuages relativement sombres et d autres très clairs. Il est néces saire de conser ver de la matière sur toute sa sur face, afin de ne pas en atté nuer le modelé. Il ne faut donc pas avoir de nuages totalement blancs. Basses lumières : le revers de la col line est d autant plus dans l ombre que la pente est forte. En par ti cu lier, si la par tie droite du pay sage devient trop sombre, les détails y seront noyés et la photo graphie sera dés équi li brée. Il faudrait donc simultanément assombrir le haut de l image et en éclaircir le bas pour conser ver des détails sur toute sa sur face C est tech ni que ment impos sible à la prise de vue, si ce n est en uti li sant un filtre gris dégradé, dont la par tie supé rieure plus opaque absor bera le trop-plein de lumière du ciel. En réalité, la scène présente une plage dynamique supé rieure à ce que sup porte le capteur d un appareil photo numérique, autrement dit, un écart de luminosité trop impor tant entre les zones les plus denses (plus sombre, tout serait noir, sans le moindre détail) et les par ties les plus lumi neuses (plus clair, tout serait blanc, sans aucun relief). Les deux photo graphies qui suivent vous montrent ce que le capteur enregistrera, selon que vous fassiez le réglage pour préserver les hautes lumières, ou pour éclair cir les basses lumières. Les chiffres entre paren thèses dans les légendes des images tra duisent le para mé trage du boîtier. Nous y revien drons. Il n existe aucun réglage qui puisse vous permettre de réaliser directement une prise de vue correspondant à la photo du pay sage nor vé gien en début de leçon. Il fau dra donc vous u Hautes lumières préservées (f/6,3 à 1/250 s) 16
leçon 1 L appareil photo numérique contenter de l image trop claire ou du pay sage téné breux. Sombres perspec - tives pour vos pro chaines photos de voyage Rassurez- vous, il existe bien un moyen d aller au- delà des limites du cap teur. Il su fi t de sai sir les deux ambiances de notre exemple pré cé dent et de les combi - ner ultérieurement à l aide d un logiciel de post-traitement. D une manière générale, la photographie numérique nécessite souvent d être retraitée pour donner entière satisfaction. Les appareils compacts essaient d intégrer dès la prise de vue un maximum d ajustements automatiques. Ils fournissent des photographies contrastées, des couleurs saturées, des résultats flatteurs au risque d aller par fois trop loin, sans possibilité de reve nir en arrière. Les reflex numériques délivrent habituellement des résultats plus neutres, voire décevants au pre mier regard. Un mini mum de tra vail en aval de la prise de vue est alors néces saire pour trans for mer cette matière brute en une belle photo - graphie : c est le rôle du post- traitement. Comprendre comment la réa lité se trans forme en une photographie reste un bon moyen de réus sir celle- ci à votre goût. Du pré cé dent pay sage, préférerezvous gar der la ver sion la plus sombre parce qu elle vous semble plus évo ca - trice d une ambiance, ou ne conser ver que la plus éthé rée car elle cor res pond plus à votre sou ve nir? Per sonne ne peut répondre à votre place. Vous pou - vez lais ser l auto ma tisme en déci der, mais si vous lisez ce livre, c est vrai sem - blablement que vous n avez pas envie d abandonner systématiquement votre libre arbitre à quelques compo sants élec tro niques. Vos envies doivent pou - voir s expri mer en toute liberté, très au- delà des contraintes tech niques liées à votre matériel, aussi sophistiqué soit-il. t Ombres débouchées (f/6,3 à 1/80 s) 17
Tous photographes! aller plus loin l appareil photo ne voit pas comme l œil humain! Devant la même scène, dans la même lumière, avec les mêmes réglages du boîtier, le cap teur ren dra tou jours la même image. Chaque être humain en aura par contre une per cep tion difé rente, qu il compa rera à cette réfé rence numé rique. De beaux débats en perspec tive! Le cap teur de l appa reil photo est mono chrome par construc tion. Chaque élé ment actif (photosite) est spé cia lisé dans la mesure de l inten sité lumi neuse d une seule des trois cou leurs pri maires. L attribution des tâches (qui mesure quelle cou leur?) est faite par un filtre en mosaïque colo rée : pour un pixel mesu rant le bleu et un voi sin s occu pant du rouge, deux sont dédiés au vert (cette répar tition hété ro gène repro duit la récep ti vité de l œil humain dont la sen si bi lité au vert est exa cer bée). Le cap teur enre gistre in fine une repré sen ta tion en noir et blanc de la scène photo graphiée (le for mat RAW). Les cou leurs sont reconsti tuées à tra vers le pro ces sus de dématriçage qui, pour retrou ver la vraie cou leur d un pixel, compose avec celle de ses voi sins. Il existe actuellement deux alternatives à la matrice de Bayer. Le capteur Foveon X3 (Sigma) est capable d enregistrer les trois composantes RVB au niveau de chaque pixel, sur autant de couches superposées. Le capteur X-Trans (Fuji) remplace la découpe initiale de 4 pixels par une matrice de 36 pixels. Autant d évolutions prometteuses pour le rendu des couleurs L indice de lumination IL (ou Exposure Value EV en anglais) mesure l exposition lumineuse d une manière simple : chaque fois que la quan tité de lumière double, l indice de lumination aug mente d un point. L échelle est ini tia li sée à IL = 0 pour une ouver ture de dia phragme de f/1,0 et un temps de pose de 1 seconde. La plage dynamique, autre ment dit l écart le plus impor tant entre les lumières les plus fortes et les ombres les plus denses susceptibles d être simultanément enregistrées est de 10 IL pour un capteur stan dard, ce qui cor res pond à un taux de contraste de 1 à 1 000, ou plus pré ci sé ment à 1 024 (entre les deux, la lumière est mul ti pliée dix fois par deux : 1 024 = 2 10 ). L œil humain est capable de per ce voir simul ta né ment les détails dans les zones claires et dans les zones sombres d une scène très contras tée, comme s il atté nuait les fortes lumières et ampli fiait les plus faibles. Sa plage dyna mique (avec accou tu mance) est de l ordre de 20 IL La plage dynamique de la photographie précédemment don née en exemple est de 12 IL, trop courte de seule ment 2 IL pour un cap teur stan dard. Les meilleurs boîtiers digèrent actuellement 14 IL. Souhaitons que cette barrière soit bientôt largement repoussée. 18
Leçon 2 Une juste quantité de lumière Chaque photo graphie est un petit miracle d optique, que les ingé nieurs ont par fai te ment mis en boîte. Dans de bonnes condi tions de lumière, un appa reil photo en mode auto ma tique donne d excel lents résul tats. Nous détaillons ici la méca nique qui lui per met de faire entrer la juste quan tité de lumière jus qu au cap teur. Prendre une photo, c est faire pas ser une cer - taine quan tité de lumière du monde exté rieur vers un sup port qui fixera l image résul tante pour la postérité. Ce principe fonctionne assez bien depuis 1826, date à laquelle Joseph Nicéphore Niepce écri vit sur des plaques d étain enduites de bitume de Judée les pre - mières pages de la longue his toire de la photographie. Qu entend- on ici par «juste quan tité de lumière»? Celle calculée par le programme? Il arrive par fois qu une photo graphie ne soit pas correctement exposée : elle se révèle trop claire ou trop sombre. Ce n est pas de votre faute : c est tout simplement que le programme s est trompé! Le pro blème de la mesure de la lumière est en effet très complexe. Il su fi t d un élément extérieur imprévu pour fausser le calcul. C est par exemple le cas lorsque le soleil est face au photo graphe. La felouque ci-contre est photo graphiée en gros plan au soleil cou chant. L algorithme intègre cette lumière particulièrement vive et fait l hypo thèse que la scène est brillamment éclairée. En réalité, la source de lumière se trouve derrière le sujet principal, qui reste noyé dans sa propre ombre. Cette situation, dite de contre-jour, est plus ou moins bien prise en compte par les auto ma tismes. Complexité supplémentaire, exposer correctement le premier plan n est pas nécessairement la meilleure alternative esthétique une décision qu aucune intelligence artificielle ne pourra prendre à votre place! Vitesse, ouverture et sensibilité : un savant dosage Contre- jour sur le Nil 19
Tous photographes! Équivalence entre une chambre noire et une salle de spectacle Nous ver rons bien tôt comment est éva luée la quan tité de lumière néces saire à la bonne expo si tion de la photo, et pour quoi elle peut être erro née. Vous allez le consta ter, pour régler le boî tier une fois la mesure faite, l auto ma tisme ne joue finalement que sur très peu d éléments. Ce choix singulièrement limité va nous faciliter la tâche. Une chambre noire se pré sente un peu comme une salle de spec tacle : faire entrer la quan tité de lumière qui assu rera la bonne expo si tion de l image, c est s assu rer que tous les spec ta teurs seront ins tal lés à temps pour que la repré - sen ta tion puisse commen cer à l heure. Le gérant de la salle doit dans un pre - mier temps éva luer leur nombre, puis s orga ni ser pour atteindre son objec tif. En cas d afflu ence, il a le choix entre deux alter na tives : Ouvrir plus largement les portes afin d aug men ter le nombre des spec ta - teurs qui entreront simultanément dans la salle. Augmenter le temps pendant lequel les spectateurs pourront s installer, en avançant les horaires d ouverture. Spectateurs Porte Scène Lumière Objectif Capteur Le diaphragme Revenons- en à la photo graphie. En plein soleil, il faut limi ter le pas sage de la lumière, sous peine de sur ex po ser la prise de vue. Au contraire, lorsque le jour décline, il faut lui faci li ter le pas sage afin d obtenir un résultat qui reste sufsamment lumineux. Le fonction ne ment de la porte est tou jours au cœur du pro blème. Elle se trouve dans l objec tif : c est le diaphragme. Le diaphragme est une ouverture approximativement circulaire, dont la taille est contrôlée par un jeu de lamelles mobiles. Plus le nombre de lamelles est élevé et plus le cercle est régu lier. Cela contri bue à la qua lité de l image et au prix de l objec tif! Le dia phragme reste en per ma - nence ouvert : un rideau situé dans le boîtier, l obturateur, autorise ou empêche la lumière d atteindre le cap teur. 20
Leçon 2 Une juste quantité de lumière Pour faire entrer davan tage de lumière, l appa reil a le choix entre : Ouvrir plus grand la porte, pour faire entrer plus de lumière à la fois. C est ouvrir le diaphragme. Ouvrir plus lon gue ment le rideau qui cache la porte, pour faire entrer la lumière plus longtemps. C est diminuer la vitesse de déclenchement. La notion de vitesse est moins intui tive que celle de diaphragme : si on dimi - nue la vitesse à laquelle il se ferme, l obtu ra teur reste plus long temps ouvert. CQFD! Ces deux solu tions sont équivalentes sur le plan du résul tat attendu : l appa - reil peut indiffé rem ment jouer sur la vitesse ou sur le dia phragme pour expo ser correctement la photo. C est le principe de fonctionnement du mode toutauto ma tique du boîtier (ou du mode P pour programme). Dans les modes semi-automatiques, l utilisateur prend la responsabilité d indiquer à l appa reil l un des deux para mètres. Il laisse le pro gramme cal cu - ler le second. Quel inté rêt? Même avec une exposition cor recte, le rendu de l image reste très dépen dant du choix de la vitesse et de l ouver ture. On comprend aisément qu un temps d exposition trop important puisse augmenter le risque de flou. On sait moins qu ouvrir le dia phragme modi fie la géo mé trie du pas - sage de la lumière et affecte éga le ment l aspect final de la photo graphie. La différence est d ailleurs parfois pratiquement invisible, jugez-en par vousmême sur l exemple architectural suivant. La mise au point est faite sur la tour du fond. Un agrandissement révélerait que l amphithéâtre à gauche est à peine moins net sur la pre mière image. Le dia phragme a pour tant été divisé par quatre entre les deux prises de vue (de f/4 à f/16), mais le photo graphe était sufsamment éloigné du premier plan pour que la différence ne soit pas gênante. Nous abor dons ici la déli cate notion de profondeur de champ sur laquelle nous revien drons en détail. f/4 à 1/1 600 s f/16 à 1/100 s 21
Tous photographes! Comment des réglages si diffé rents peuvent-ils don ner des résul tats si proches que sur les deux photographies précédentes? Celle de gauche n est ni plus claire ni plus sombre que celle de droite. La quan tité de lumière arrivant sur le cap teur est visi ble ment la même. Sans lui don ner d unité, sup - po sons que cette quan tité soit égale à 100. Ce nombre peut être obtenu par la multiplication de différents entiers : La règle des trois 100 = 2 50 100 = 4 25 100 = 5 20 100 = 10 10 De la même façon, pour une quan tité de lumière don née, il existe plu sieurs couples diaphragme-vitesse qui permettent d exposer correctement une photo. Fixer un paramètre détermine obligatoirement le second. La loi de réciprocité est une contrainte très impor tante. Dans une pre mière approche, il serait pos sible de dire qu il su fi t de régler le diaphragme et la vitesse pour obtenir le résultat souhaité. La réalité est à peine plus complexe. Un troi sième para mètre, la sensibilité, autorise plus de latitude dans le choix du couple optimal. La sensibilité joue sur la lumière comme un amplificateur le fait avec le son. Pousser (augmenter) la sensibilité permet en particulier de prendre des photographies en basse lumière. Vous avez besoin de 100? Faites le réglage à 50, voire même seule ment à 20. L ampli fi ca teur se débrouillera pour que l on puisse écrire : 100 = 2 2 25 100 = 2 5 10 100 = 5 4 5 100 = 5 2 10 Mais tout a un prix : l aug mentation de la sen si bi lité se paye par une moins bonne qualité d image. Le photographe préférera donc agir prioritairement sur le dia phragme ou sur la vitesse. Il ne tou chera à la sen si bi lité que s il a atteint les limites des deux précédents paramètres. Les progrès des fabricants d appareils photo sont toutefois spectaculaires dans ce domaine. Les auto ma tismes sont main te nant capables de faire varier simultanément les trois paramètres en limitant au maximum la dégradation de l image. Ces possibilités ouvrent de nouveaux horizons photographiques. Seul l exa men de l image dans son détail per met de détecter l uti li sation d une sensibilité élevée, comme le montre cette vue du pont Lafayette à Lyon (page suivante). L image prise à la plus forte sen si bi lité pré sente moins de finesse dans le détail. Elle semble un peu moins nette, comme sau pou drée d un nuage de points : c est la manifestation du bruit numérique. Le bruit existe également imperceptiblement à faible sensibilité. Il est amplifié en même temps que le signal qui contient les informations directement liées à l image. 22