AXA ROYALE BELGE, société anonyme, anciennement dénommée Royale. Belge 1994, dont le siège social est établi à Watermael-



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Transcription:

16 NOVEMBRE 2001 C.00.0139.F/1 N C.00.0139.F AXA ROYALE BELGE, société anonyme, anciennement dénommée Royale Belge 1994, dont le siège social est établi à Watermael- Boitsfort, boulevard du Souverain, 25, inscrite au registre du commerce de Bruxelles sous le numéro 356.389, demanderesse en cassation d un arrêt rendu le 2 novembre 1999 par la cour d appel de Liège, représentée par Maître John Kirkpatrick, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, boulevard de l Empereur, 3, où il est fait élection de domicile, contre STEPHITRANS, société privée à responsabilité limitée dont le siège social est établi à Omal, rue Jules Stiernet, 32, défenderesse en cassation, représentée par Maître Cécile Draps, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Liège, boulevard Emile de Laveleye, 14, où il est fait élection de domicile, en présence de

16 NOVEMBRE 2001 C.00.0139.F/2 TRANSPORTS JEAN VINCENT, société anonyme dont le siège social est établi à Eynatten, Langstrasse, 89, partie appelée en déclaration d arrêt commun, représentée par Maître René Bützler, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Ganshoren, avenue de Villegas, 33-34, où il est fait élection de domicile. LA COUR, Ouï Madame le conseiller Velu en son rapport et sur les conclusions de Monsieur Henkes, avocat général ; Vu l arrêt attaqué, rendu le 2 novembre 1999 par la cour d appel de Liège ; Sur le moyen pris de la violation de l article 149 de la Constitution, du principe général du droit relatif au respect des droits de la défense et du principe général du droit dit principe dispositif, en vertu duquel le juge ne peut élever d office une contestation étrangère à l ordre public dont les conclusions des parties excluaient l existence, en ce que, après avoir constaté que la défenderesse exécutait régulièrement des transports en sous-traitance à la demande de la s.a. Transports Jean Vincent (ci-après s.a. Vincent) ; que la défenderesse était propriétaire d un tracteur et d une remorque que la demanderesse assurait en responsabilité civile automobile et en omnium dans le cadre d une

16 NOVEMBRE 2001 C.00.0139.F/3 police n 617.780.953 ; que la défenderesse prenait en location un tracteur et des remorques de la s.a. Vincent ou d une autre société ; que dans le cadre du contrat de soustraitance, la défenderesse s était engagée vis-à-vis de la s.a. Vincent à faire assurer chaque remorque qu elle lui prenait en location par une police omnium pour la somme de 1.000.000 francs ; que par lettre du 24 juin 1994, le courtier d assurances Maréchal, agréé par la demanderesse, demanda à celle-ci, pour la défenderesse, s il était possible de couvrir par un avenant les quatre remorques utilisées par la défenderesse, notamment celles appartenant à la s.a. Vincent ; que le 26 juillet 1994, le courtier écrivit à la demanderesse que l assurance relative à la quatrième remorque devait commencer à courir le 27 juillet ; que le 17 août 1994, au cours d un transport en sous-traitance, un préposé de la défenderesse endommagea la remorque que la s.a. Vincent louait à la défenderesse ; que le 19 août 1994, la s.a. Vincent fit une déclaration de sinistre à la demanderesse, auprès de laquelle cette société avait également souscrit une assurance de dégâts matériels de ses remorques, en indiquant que les dégâts à la semi-remorque doivent être pris en charge par le contrat 617.980.953 au nom de (la défenderesse) ; que le sinistre fut aussi déclaré à la demanderesse par le courtier Maréchal ; que par lettre du 13 octobre 1994 audit courtier, la demanderesse accepta de couvrir le sinistre du 17 août sur la base du con-

16 NOVEMBRE 2001 C.00.0139.F/4 trat d assurance de dégâts matériels souscrit par la s.a. Vincent ; que celle-ci refusa la quittance émise par la demanderesse sur la base dudit contrat ; que le 24 novembre 1994, la demanderesse écrivit au courtier qu elle ne pouvait accepter d accorder la garantie demandée dans la lettre du 24 juin 1994, car cela revenait à couvrir des biens que nous ne connaissons pas sans contrôle possible ; que la s.a. Vincent assigna la défenderesse en réparation des dégâts à la remorque ; que le premier juge fit droit à cette demande ; que devant la cour d appel, la défenderesse appela la demanderesse en intervention afin que l arrêt à intervenir lui soit déclaré opposable, l arrêt attaqué, déclaré commun et opposable à la demanderesse, décide que la défenderesse pouvait légitimement croire que la demanderesse couvrait par une assurance omnium la remorque qu elle louait à la s.a. Vincent et que son préposé avait endommagée, aux motifs que (la défenderesse) a (...), conformément à ses obligations contractuelles, demandé à son assureur, la (demanderesse), une extension de couverture comprenant une assurance omnium de 1.000.000 francs pour chacune des quatre remorques qu elle utilisait ; que l extension de couverture demandée le 24 juin 1994 avait pour objet de couvrir les sinistres tels que celui effectivement survenu le 17 août 1994 ; que (la défenderesse), par cette demande transmise par son courtier le 24 juin 1994, pouvait et devait légitimement se croire bénéficiaire de cette couverture contractuelle ;

16 NOVEMBRE 2001 C.00.0139.F/5 qu en effet, eu égard aux usages en matière d assurance de véhicules et en matière de transport routier, la demande introduite par le courtier auprès de la compagnie d assurance qui l agrée emporte couverture d assurance provisoire, jusqu à la rédaction de l instrumentum ; qu en outre, dans toutes les matières d assurances, les assureurs doivent à l ensemble des candidats assurés une information claire et rapide, donnée dans la plus grande urgence ; que l assureur qui entend refuser de couvrir un risque doit transmettre son refus dans le délai le plus bref possible afin de permettre au candidat assuré de prendre toutes les mesures utiles à la conservation de ses intérêts et éviter tout acte susceptible d engager une responsabilité non couverte ; qu en la présente espèce, la (demanderesse) saisie par la demande transmise par le courtier le 24 juin 1994, précisée quant à la date de prise d effet par lettre du 26 juillet 1994, ne pouvait pas, sans faute inexcusable dans son chef, s abstenir d un examen immédiat de la demande et d une communication urgente informant parfaitement (la défenderesse) du refus de couverture du risque demandé dans le délai le plus bref ; que la (demanderesse), saisie régulièrement d une demande d extension de couverture du risque assuré, dont elle a eu connaissance, s est abstenue de notifier immédiatement, en temps utile, son refus de donner la couverture demandée par (la défenderesse) le 24 juin 1994 ; que la (demanderesse) s est abstenue d exécuter ses obliga-

16 NOVEMBRE 2001 C.00.0139.F/6 tions contractuelles en n informant pas (la défenderesse), avant sa lettre du 24 novembre 1994, qu elle refusait l extension de couverture demandée le 24 juin 1994 ; que cette faute inexcusable dans le chef d un professionnel a eu pour conséquence, en raison des usages de couverture dès l introduction de la demande par le courtier, de créer une apparence de contrat d assurance omnium des quatre remorques utilisées par (la défenderesse), à laquelle (la défenderesse), comme tout autre entrepreneur normalement diligent et soucieux de ses intérêts, devait se laisser prendre, sans la moindre faute dans son chef ; que (la défenderesse) pouvait légitimement croire à une assurance la couvrant, alors que, première branche, au reproche d avoir répondu tardivement à la demande d assurance qui lui avait été adressée le 24 juin 1994 et d avoir, par son silence prolongé, créé une apparence de contrat, la demanderesse opposait, dans ses conclusions additionnelles, le moyen suivant : la lettre du courtier Maréchal du 24 juin 1994 (...) ne constitue ni une demande d assurance ni une proposition d assurance ; que la loi du 25 juin 1992 sur le contrat d assurance terrestre définit la demande d assurance comme étant un formulaire émanant de l assureur par lequel celui-ci offre de prendre le risque en charge provisoirement à la demande du preneur d assurance, la proposition d assurance comme étant un formulaire émanant de l assureur, à remplir par le preneur, et destiné à

16 NOVEMBRE 2001 C.00.0139.F/7 éclairer l assureur sur la nature de l opération et sur les faits et circonstances qui constituent pour lui les éléments d appréciation du risque ; que l article 4 de la loi du 25 juin 1992 n est donc pas applicable en l espèce ; que le courrier du 24 juin 1994 constitue une simple demande de renseignements ; que bien qu il ait été rédigé par un courtier professionnel de l assurance, il ne reprend pas les informations indispensables à l appréciation du risque et, plus particulièrement, le contrat de sous-traitance conclu entre la société Vincent et la (défenderesse) le 10 octobre 1992 et le contrat de location conclu entre (la défenderesse) et la société Auto Exclusive le 21 décembre 1993 ; que l arrêt considère que la lettre du courtier du 24 juin 1994 contenait une demande d assurance au sujet de laquelle la demanderesse devait réagir à bref délai sans répondre au moyen précité des conclusions de la demanderesse par lequel celle-ci contestait que ladite lettre contînt pareille demande ; que l arrêt attaqué n est dès lors pas régulièrement motivé (violation de l article 149 de la Constitution) ; deuxième branche, aucune des parties en cause devant la cour d appel n a invoqué l existence d usages en matière d assurances de véhicules et en matière de transport routier, en vertu desquels la demande d assurance introduite par un courtier auprès de la compagnie qui l agrée emporterait couverture d assurance provisoire jusqu à la rédaction de

16 NOVEMBRE 2001 C.00.0139.F/8 l instrumentum ; que l arrêt décide qu en omettant d informer à bref délai la défenderesse de son refus d accorder la couverture sollicitée, la demanderesse a créé, à l égard de la défenderesse, une apparence de contrat d assurance omnium des quatre remorques utilisées par la défenderesse, au motif qu en raison des usages précités, la défenderesse pouvait légitimement croire à une assurance qui la couvrait ; que l arrêt n a pas donné à la demanderesse la possibilité de contester l existence des usages précités ; que l arrêt méconnaît ainsi les droits de la défense (violation du principe général du droit relatif aux droits de la défense) ; troisième branche, dans ses conclusions prises devant la cour d appel, la défenderesse soutenait que la demanderesse avait commis une culpa in contrahendo à son égard en laissant perdurer l apparence d un acquiescement ; que la défenderesse n avait en revanche pas conclu à l existence d un contrat d assurance couvrant même provisoirement la remorque endommagée ; qu au contraire, en réponse au moyen de la s.a. Vincent qui reprochait à la défenderesse de n avoir pas respecté ses obligations contractuelles à son égard en n ayant pas fait assurer en omnium la remorque qu elle lui louait, la défenderesse invoquait qu elle s était trouvée dans l impossibilité de le faire, parce que les parties au contrat de sous-traitance avaient créé un système non assurable, aucune compagnie d assurances ne pouvant assurer une remorque louée

16 NOVEMBRE 2001 C.00.0139.F/9 et non désignée, tirée par un tracteur loué et non désigné ; que l arrêt considère que, eu égard aux usages en matière d assurance de véhicules et de transport routier, la demande introduite par le courtier auprès de la compagnie d assurances qui l agrée emporte couverture d assurance provisoire jusqu à la rédaction de l instrumentum ; que si ce motif implique que la défenderesse était couverte par une assurance provisoire dès la demande d assurance introduite par le courtier le 24 juin 1994, l arrêt élève une contestation étrangère à l ordre public dont les conclusions des parties avaient exclu l existence ; qu il viole ainsi le principe général du droit dit principe dispositif ; que de plus, en fondant sa décision sur les usages précités dont aucune des parties à la cause n avait invoqué l existence, l arrêt méconnaît les droits de la défense de la demanderesse (violation du principe général du droit relatif au respect des droits de la défense) : Quant à la deuxième branche : Sur la fin de non-recevoir opposée par la défenderesse au moyen en cette branche et déduite du défaut d intérêt : Attendu que, pour décider que la défenderesse pouvait légitimement croire que la demanderesse couvrait par une assurance "omnium" la remorque qu elle louait à la partie appelée en déclaration d arrêt commun et que son préposé avait endommagée, l arrêt énonce qu "eu égard aux usages en matière

16 NOVEMBRE 2001 C.00.0139.F/10 d assurance de véhicule et en matière de transport routier, la demande introduite par le courtier auprès de la compagnie d assurances qui l agrée emporte couverture d assurance provisoire jusqu à la rédaction de l instrumentum" ; Qu après avoir considéré que la demanderesse a commis une faute inexcusable en s abstenant d informer la défenderesse dans le délai le plus bref de son refus de lui accorder la couverture du risque qu elle avait demandée, l arrêt décide que "cette faute inexcusable dans le chef d un professionnel a eu pour conséquence en raison des usages de couverture dès l introduction de la demande par le courtier de créer une apparence de contrat d assurance "omnium" des quatre remorques utilisées par la défenderesse" ; Qu il s en déduit que la considération critiquée par le moyen en cette branche ne présente pas de caractère surabondant ; Que la fin de non-recevoir ne peut être accueillie ; Attendu qu il ressort des pièces auxquelles la Cour peut avoir égard qu aucune des parties n a invoqué devant la cour d appel l existence d usages en matière d assurance de véhicules et en matière de transport routier, en vertu desquels la demande d assurance introduite par un courtier auprès de la compagnie qui l agrée emporterait couverture d assurance provisoire jusqu à la rédaction de l instrumentum ;

16 NOVEMBRE 2001 C.00.0139.F/11 Qu en se fondant sur ce moyen pour retenir dans le chef de la demanderesse la création fautive d une apparence d assurance sans le soumettre à la contradiction des parties, la cour d appel a méconnu le droit de défense de la demanderesse ; Qu en cette branche, le moyen est fondé ; Sur la demande de déclaration d arrêt commun : Sur la fin de non-recevoir opposée à la demande par la partie appelée en déclaration d arrêt commun et déduite du défaut d intérêt de celle-ci : Attendu que la demande tendant à ce qu une décision soit déclarée commune à la partie défenderesse à cette demande a pour seul objet d empêcher que celle-ci puisse éventuellement, dans un litige subséquent l opposant à la partie demanderesse, objecter que cette décision ne lui est pas opposable ; Que l existence de cette possibilité suffit pour que la partie demanderesse établisse qu elle a un intérêt à ce que la décision soit déclarée commune à la partie défenderesse ; Qu une demande ayant cet objet a un caractère purement conservatoire ; qu il n appartient pas à la Cour, lorsqu elle statue sur celle-ci, de trancher des contestations qui pourraient éventuellement opposer les parties dans le cadre d une autre procédure mue entre elles, même si la solution donnée à ces contestations devait faire apparaître que la partie demanderesse est sans intérêt à entendre déclarer la décision commune ;

16 NOVEMBRE 2001 C.00.0139.F/12 Attendu que la demanderesse établit avoir intérêt à ce que le présent arrêt soit déclaré commun à la société anonyme Transports Jean Vincent ; Que la fin de non-recevoir ne peut être accueillie ; Attendu qu en raison de la cassation, il y a lieu d accueillir la demande ; PAR CES MOTIFS, sans qu il y ait lieu d examiner les autres branches du moyen qui ne sauraient entraîner une cassation plus étendue, Casse l arrêt attaqué en tant qu il décide que la défenderesse pouvait légitimement croire que la demanderesse couvrait par une assurance "omnium" la remorque que lui louait la société anonyme Transports Jean Vincent et que son préposé avait endommagée, qu il dit cette décision opposable à la demanderesse et qu il statue sur les dépens des parties au pourvoi ; Déclare le présent arrêt commun à la société anonyme Transports Jean Vincent ; Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge de l arrêt partiellement cassé ; Réserve les dépens pour qu il soit statué sur ceux-ci par le juge du fond ; Renvoie la cause, ainsi limitée, devant la cour d appel de Mons.

16 NOVEMBRE 2001 C.00.0139.F/13 Ainsi jugé par la Cour de cassation, première chambre, à Bruxelles, où siégeaient Monsieur le conseiller Parmentier, faisant fonction de président, Messieurs les conseillers Storck, Mathieu, Mesdames les conseillers Matray et Velu, et prononcé en audience publique du seize novembre deux mille un par Monsieur Parmentier, conseiller faisant fonction de président, en présence de Monsieur Henkes, avocat général, avec l'assistance de Madame Danhiez, greffier adjoint.