C.C.201 CONSEIL DE LA CONSOMMATION AVIS sur le projet de loi relatif à l'organisation du marché de l'électricité Bruxelles, 5 mars 1999
Le Conseil de la Consommation qui, usant de son droit d'initiative, a décidé de se saisir du projet de loi relatif à l'organisation du marché de l'électricité, s'est réuni en séance plénière le 5 mars 1999 sous la présidence de Monsieur Ramaekers, et a émis l'avis suivant. Le Conseil de la Consommation a prié le Président de remettre cet avis au Premier Ministre, au Ministre de tutelle, au Ministre chargé de l'energie, aux Ministres concernés et aux Parlementaires. AVIS Le Conseil de la Consommation, Vu le projet de loi relatif à l'organisation du marché de l'électricité; Vu l'exposé de Monsieur Verbruggen, Professeur à l'ufsia; Vu l'exposé de Monsieur Vandermarliere, représentant du cabinet du Ministre chargé de l'energie; Vu les travaux de la Commission "Libéralisation Energie" lors de ses réunions des 21 et 28 janvier 1999 et 4 et 10 février 1999; Vu la participation aux travaux des experts suivants: Mesdames Lewin et Schockaert (Coordination Gaz-Electricité) et Panneels (F.G.T.B.), messieurs Aertsens (Fedichem), Claes (Fedichem), Ducart (C.R.I.O.C.), Janssen (Cabinet du Ministre chargé de l'energie), Melon (C.S.C.), Stulens (Administration Politique Commerciale), Vandermarliere (Cabinet du Ministre chargé de l'energie) et Verbruggen (Professeur); Vu le projet d'avis établi par messieurs Ducart (C.R.I.O.C.) et Latteur (F.E.B.); Vu l'avis du 11 février 1999 remis d'urgence par le Bureau du Conseil de la Consommation; EMET L'AVIS SUIVANT :
Le Conseil de la Consommation s est penché sur le projet de loi relatif à l organisation du marché de l électricité afin d émettre un avis sur les grandes lignes du projet. A cette fin, au sein de la Commission Libéralisation de l Energie, il a entendu divers experts à savoir: les représentants de la Coordination Gaz-Electricité-Eau, le Professeur Verbruggen (UFSIA) et les représentants du Ministre de l Energie. Le Conseil entend poursuivre ses travaux au-delà de l adoption du projet de loi et pourra émettre d autres avis ultérieurs en la matière. Observations générales du Conseil 1.1. Le Gouvernement entend clôturer rapidement l adoption du projet en question, et ce avant le 19 février 1999. Cet important projet a été déposé officiellement au Parlement dans la seconde moitié du mois de janvier. A l avenir, le Conseil demande à être étroitement associé à la poursuite des discusssions sur la libéralisation dans la mesure où le présent projet de loi est un cadre préliminaire qui appelle de nombreux prolongements (arrêtés royaux, arrêtés ministériels, décrets régionaux, etc.). Le Conseil se réjouit qu une réflexion approfondie soit menée au Parlement sur l enjeu de ce débat et face à la complexité du projet de loi. Il demande de prendre en considération de manière approfondie une série d inquiétudes et de revendications fondamentales pour la protection des consommateurs résidentiels, et particulièrement les plus défavorisés d entre eux, mais aussi pour les PME et les entreprises non éligibles (ci-après dénommés les usagers). 1.2. Dans cette optique, le Conseil insiste sur le fait que la libéralisation du marché de l électricité doit s accompagner de mécanismes de régulation, garantissant à toutes les catégories d'usagers de bénéficier des effets positifs attendus de la libéralisation en matière de tarifs, permettant d éviter toute subsidiation croisée entre diverses catégories de clients et organisant un financement équitable des politiques sociales. Le Conseil émet en effet des craintes fondées principalement sur deux constats: a. l existence de contrats d exclusivité entre le producteur et les distributeurs qui les lient jusqu en 2007 et partiellement jusqu en 2011 alors même que les Régions sont très loin d avoir défini leurs missions de service public; b. le manque d effets tangibles pour le consommateur résidentiel dans le cadre de la libéralisation actuelle du secteur des télécommunications, principalement dans le domaine de la téléphonie fixe (par exemple: augmentation de la redevance d accès, augmentation du prix des communications à partir des cabines publiques, etc.). 1.3. Le Conseil demande une approche globale, claire et engagée en faveur de l ensemble de toutes les catégories d'usagers, et notamment des consommateurs domestiques et en faveur du développement d une politique sociale en matière énergétique. L exposé des motifs du projet de loi définit la protection des consommateurs domestiques comme étant un objectif de la Belgique et en décrit les principaux axes : absence de subsides croisés, prix abordable pour les consommateurs domestiques, tarifs spécifiques pour couvrir des besoins de première nécessité,. Or, le Conseil constate que ces axes sont insuffisamment explicités dans le texte-même du projet.. 1.4. La directive européenne, dont l un des objectifs est de renforcer la cohésion économique et sociale dispose : l imposition d obligations de service public peut être nécessaire pour assurer la sécurité d approvisionnement, la protection du consommateur et la protection de l environnement que, selon certains Etats membres, la libre concurrence, à elle seule, ne peut pas nécessairement garantir.
A cet égard, même si des dispositions du projet prévoient des obligations de service public ainsi que le fixation de prix maxima, le Conseil estime qu elles sont générales, peu explicitées et que leur application est exclusivement confiée à l Exécutif. Le Conseil demande que la pérennité de ces obligations soit garantie avant toute ouverture du marché au niveau des clients de la distribution, et ce en associant notamment le Conseil de la Consommation. Dans cette optique, il demande une approche des missions de service public qui ne peuvent être rencontrées spontanément par le marché. Dans le cadre de la transposition de la directive et en application du principe de subsidiarité, il insiste en effet sur la nécessité de baliser, notamment au niveau régional, le principe et les éléments de la garantie d accès à l énergie pour tous les usagers: contenu, qualité de fourniture, prix et conditions abordables, service de base, financement Ces missions doivent être définies d une façon claire par les Etats membres, dont la Belgique. Le projet de loi peut être l occasion d ouvrir le débat qui n a pas eu lieu au niveau européen, contrairement à ce qui s est par exemple passé pour le secteur des télécommunications. Le Conseil est en tout cas prêt à poursuivre le débat sur des propositions concrètes de contenu et de financement d un accès garanti à l énergie, selon un calendrier bien établi. Pour ce faire, le Conseil estime fondamental de prévoir un calendrier contraignant de réglementation au plus tard en 2006, moment choisi par Commission européenne pour évaluer la situation. 1.5. Pour le Conseil, les délégations à l Exécutif fédéral et/ou au Ministre de l Energie sont trop nombreuses et posent des questions de contrôle démocratique et de transparence de décision. Pour l avenir, le Conseil propose de travailler selon deux options: ou bien, là où cela s impose, par ex., pour la définition des obligations de service public, apporter un prolongement légal au présent projet pour susciter un débat démocratique plus large, ou bien, pour des points plus particuliers qui ne touchent pas aux options fondamentales, pouvoir discuter des arrêtés d exécution dans des instances consultatives, comme le prévoit parfois le projet de loi actuel. 1.6 Pour le Conseil, des mécanismes de régulation d un marché libéralisé nécessitent un organe régulateur fort et indépendant en lui attribuant des moyens suffisants techniques et humains pour exercer son mandat, en renforçant son information et en veillant à préserver son autonomie d action et son indépendance. 1.7. Pour le Conseil, la question éventuelle des coûts échoués doit faire l objet d une disposition de loi prévoyant : I. une définition précise de cette notion; II. une analyse indépendante et approfondie des éventuels coûts échoués; III. la prise en charge de ces coûts en fonction de la responsabilité propre du secteur électrique et des obligations qui lui ont été imposées; IV. l assurance que le financement de ces coûts éventuels ne mettront pas en péril les objectifs du projet de loi en faveur de l'usager ainsi que les obligations de service public définies par ailleurs. 1.8. Le Conseil constate que de nouvelles notions ou de nouveaux acteurs importants sont précisés dans le projet, notamment le gestionnaire du réseau de transport dont les tâches sont très importantes. Le Conseil estime que le principe de l indépendance du gestionnaire doit être concrétisé avant l ouverture réelle du marché 1.9. Pour le Conseil, l organisation du fonds de financement apparaît encore très floue quant aux contributions. De plus, il faut discuter du rôle de ce fonds de financement dans la mise en oeuvre des
obligations de service public. A cet égard, la définition des mécanismes du fonds de financement est prioritaire dans le cadre de la libéralisation afin que ce fonds soit rendu opérationnel avant toute ouverture du marché aux clients de la distribution. 1.10. Le Conseil demande que des mesures de protection supplémentaires du consommateur non éligible soient envisagées, et notamment, la mise en place d une structure de règlement des litiges qui fait particulièrement défaut dans le secteur. 1.11. Le Conseil demande que les acteurs concernés soient suffisamment représentés dans les organes de régulation à créer. 1.12. le Conseil estime que la question de la fixation des tarifs d utilisation du réseau et de leur contrôle est fondamentale: ces tarifs ne doivent pas seulement être contrôlés par l organe régulateur mais fixés par lui en concertation et en collaboration avec le gestionnaire du réseau de transport. Par ailleurs, dans son activité de contrôle et étant donné la libéralisation et la mise en concurrence de plusieurs opérateurs, cet organe régulateur pourra-t-il disposer de moyens et de toute l information nécessaires concernant la structure des tarifs? Le Conseil se réserve le droit de remettre un avis complémentaire sur d'autres points et prend acte avec satisfaction que sa Commission "Libéralisation Energie" continue ses travaux.
MEMBRES AYANT ASSISTE A L'ASSEMBLEE PLENIERE DU CONSEIL DE LA CONSOMMATION DU 5 MARS 1999 PRESIDEE PAR MONSIEUR R. RAMAEKERS 1. Membres représentant les organisations de consommateurs: Effectifs: Madame DE ROECK (Bond van Grote en Jonge Gezinnen) Monsieur BONTINCKX (FEBECOOP) Monsieur DEJEMEPPE (Centre Coopératif d/l Consommation) Monsieur MECHELS (Test-Achats) Monsieur FRASELLE (Test-Achats) Monsieur STEVENS (A.C.V.) Monsieur STROBBE (A.C.L.V.B.) Suppléants: Monsieur DE MUELENAERE (A.C.L.V.B.) Monsieur QUINTARD (F.G.T.B.) 2. Membres représentant les organisations de la production: Effectifs: Madame STRUYVEN (F.E.B.) Madame SWEERTS (A.B.B.) Monsieur FELIX (U.P.C.) Monsieur VANDEPLAS (FEDICHEM) Suppléants: Madame SEGHERS (FABRIMETAL) Monsieur DASTOT (B 3 A) Monsieur van OLDENEEL tot OLDENZEEL (F.E.B.) 3. Membres représentant les organisations de la distribution: Effectif: Madame POLLERS (FEDIS) 4. Membres représentant les organisations des classes moyennes: Effectifs: Madame SWALENS (N.C.M.V.) Madame PIRLET (U.C.M.)