Géoarchéologie de la Loire moyenne et de ses marges

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1 Géoarchéologie de la Loire moyenne et de ses marges Synthèse des résultats du PCR Coordination N. Carcaud et M. Garcin Décembre 2001

2 Avant-propos En 1996, à l'origine du PCR "Géoarchéologie de la Loire moyenne et de ses marges", les connaissances archéologiques, géomorphologiques et paléobotaniques étaient très dispersées et trop rarement associées dans une démarche d'analyse globale de l'évolution de la dynamique paysagère. De ce constat est née l'idée de créer un groupe interdisciplinaire de recherches. Le projet s'inscrivait dans une approche géoarchéologique, approche dont la validation se voulait aisée sur le val de Loire et ses vallées affluentes. Dès 1996, le Service Régional de l Archéologie de région Centre a adhéré à notre démarche et nous a soutenu auprès de la CIRA grand Ouest afin de nous constituer en Projet Collectif de Recherches (PCR). Merci pour cette confiance de première heure. En 1997, le travail a pris une dimension nationale avec la constitution du programme «Interactions Sociétés/Milieux dans le bassin versant de la Loire à l Holocène» piloté par J. Burnouf et soutenu par les comités SEDD et PEVS du CNRS. Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

3 Sommaire général Avant-propos 2 Sommaire général 3 Introduction générale 5 Le Val d Avaray (Loir-et-Cher) 8 Présentation de la fenêtre Val d Avaray 9 Synthèse interdisciplinaire, intégration des données 11 Conclusion 23 Bibliographie 24 Le Val de Tours (résumés des maîtrises) 25 Contribution à la géoarchéologie et la morphogénèse de la Loire dans le val de Tours. Constitution d une base de données géologique 26 Interprétation lithostratigraphique sur la fenêtre de Tours. Intégration des données géologiques, palynologiques et archéologiques 26 Les paléochenaux dans la plaine alluviale de Tours 27 Les modifications du trait de la rive gauche de la Loire dans l'ouest de Tours 29 Introduction 30 L'information collectée 30 Le gain dans le fleuve dans l'ouest de la ville (Fig. 3) 33 Conclusion : des gains sont attestés pour l'ouest de la ville entre le 9 e et le 11 e siècle 35 Bibliographie 36 La communauté urbaine de Tours et la Loire à la fin du Moyen Age 37 Introduction 38 Un encombrement du lit mineur de la Loire Moyenne à la fin du Moyen Age 38 La communauté urbaine de Tours et les aménagements de protection contre les crues et les inondations 41 Perspectives 45 Bibliographie 45 Le chapitre de Saint-Martin de Tours et la Loire aux IX-X e siècles 47 Introduction 48 Organisation du patrimoine de Saint-Martin de Tours dans le Val de Loire 48 Potentialités de ces possessions situées près de cours d eau 50 Les réseaux d approvisionnement de Saint-Martin 56 Comparaison avec Saint-Denis et Saint-Germain-des-Prés sur la Seine 59 Conclusion 61 Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

4 Bibliographie 62 Conception de la base de données ArcTo 64 Introduction 65 Présentation critique des sources 65 Présentation de la base de données «Arcto» 67 Conclusion 69 Etude des interactions Hommes / Milieux depuis la protohistoire dans le vallon de Rigny (Indre et Loire) : approches pluridisciplinaires. 72 Introduction 73 Problèmes, méthodes et sites d étude 73 La caractérisation texturale et micromorphologique des formations. 75 Données palynologiques. 81 Corrélation des données polliniques et géomorphologiques, interprétations. 86 Synthèse et conclusion 87 Bibliographie : 88 La haute vallée de l'authion 91 Introduction 92 Moyens mis en oeuvre - Méthodologie 92 Contexte géomorphologique global 96 La diversité des formes fluviales dans la haute vallée de l'authion 98 Apport des fenêtres stratigraphiques 99 Le cas de la vallée du Changeon et de la grande Boire 105 L occupation de la haute vallée de l'authion 109 Conclusion 112 Bibliographie 113 Conclusion générale 115 L'espace fluvial et son façonnement depuis le Tardiglaciaire 115 Les sociétés et les vallées 117 Les sociétés et la dynamique fluviale 118 Réflexions transversales de synthèse 122 Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

5 INTRODUCTION GENERALE Le PCR «Géoarchéologie de la Loire moyenne et de ses marges» s'est fixé pour objectif de travailler à la lecture des paysages fluviaux à l Holocène dans le bassin de la Loire moyenne, selon une approche globale de l espace fluvial intégrant les dimensions hydro-morphodynamique, bioclimatique et sociale. L'étude des fonds de vallées renseigne sur l'évolution régionale des paysages. Ce sont en effet les exutoires du système bassin versant dont ils enregistrent toutes les évolutions pédologiques, bioclimatiques et d'aménagement en termes d'érosion ou de sédimentation. Plus localement, les flux hydriques et alluvionnaires se répartissent au sein d'unités fonctionnelles complexes, elles-mêmes décomposables en différentes formes fluviales élémentaires et plus ou moins mobiles selon le contexte morphodynamique. L'intérêt d'une approche interdisciplinaire est donc frappant ; il se mesure en termes de fonctionnement général du système vallée mais également d'impact des sociétés sur les milieux (ou des milieux sur les sociétés), de ressources et de risques et plus concrètement de potentiel archéologique. Le bassin de la Loire en région Centre est un excellent laboratoire de recherches pour des problématiques comme la nôtre avec des possibilités multiples d'étude des relations entre milieux et sociétés. D'un point de vue bioclimatique et hydrologique, le bassin de la Loire moyenne occupe une position de carrefour entre les influences du haut bassin versant (zone proximale soumise à un environnement de moyenne montagne) et celles de la Loire océanique (zone distale directement touchée par les variations du niveau marin). La vallée de la Loire moyenne possède également des traits morphodynamiques tout à fait intéressants. Il s'agit du lieu d'épanouissement des grands vals ligériens tels que les vals d'orléans, de Tours ou de l'authion mais également du siège des grandes confluences avec le Cher, l'indre puis la Vienne. Cette richesse de l'environnement fluvial a généré quantités de formes d'occupation et donc de relations entre milieux et sociétés. Ce sont notamment de grandes métropoles ligériennes comme Orléans et Tours ou des espaces ruraux comme le val d'authion et les aménagements qui s'associent à leur développement (levées, remblais, reports de confluences, moulins à eau). Dans un travail d'équipe, plusieurs thèmes de questionnement surgissent. Ceux-ci ont longuement été débattus lors de nos réunions. - Les limites chronologiques : Les discussions ont porté sur la limite chronologique inférieure du projet. Les archéologues des périodes historiques ont attiré l'attention sur le fait que l'on a longtemps considéré les dernières années comme étant de peu d'importance dans le façonnage des paysages. C'est un des grands acquis de l'archéologie des périodes historiques que d'avoir mis en valeur dans les études d'interaction de l'homme et du milieu les changements intervenus et ce même sur des périodes aussi "courtes" que les ans de Moyen Age où des changements importants en termes d'occupation du sol apparaissent liés à cette interaction en relation avec les "micro-changements" climatiques. Dans la mesure où l'on considère que le Tardiglaciaire correspond à une référence du point de vue du contexte bioclimatique, l'ensemble des chercheurs s'est accordée pour considérer ce moment comme une sorte de niveau zéro, de niveau de référence, de point de départ de la réflexion. - Les échelles : C'est sans doute un des aspects les plus complexes et les plus importants de ce projet. Lors de nos rencontres, les naturalistes ont souvent souligné que l'échelle d'observation du milieu par les archéologues (microlocale) était très étroite et donc dépendante de variations anecdotiques du milieu, d'où une préférence manifestée pour l'archéologie spatiale. Les archéologues ont répondu en expliquant que la fiabilité des résultats de l'une et l'autre pratique de l'archéologie était très différente. Elles ne sont pas exclusives l'une de l'autre et apportent des informations différentes en qualité et en quantité. Bien des conclusions acquises par l'archéologie spatiale peuvent être remises en question Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

6 lors de l'ouverture d'une fouille. L'un des points forts du programme tient au croisement des échelles d'observation et à la réflexion interdisciplinaire sur la signification et la représentativité des faits observés. - La désignation des espaces d'étude (fenêtre, transect, profil) : Nous avons très vite compris qu'il était impossible de traiter intégralement un bassin versant comme celui de la Loire et que les chercheurs ne pouvaient que procéder par examen d'espaces limités, d'où le terme de "fenêtre". La situation idéale étant celle où il est possible de croiser au même endroit des données historiques, archéologiques et sédimentologiques, il est apparu que pour comprendre les variations latérales des cours d'eau dans les vallées le "transect" était la figure obligatoire d'observation et qu'il représentait un point commun entre toutes les disciplines. Dans ce cas, on postulera que dans l'espace appelé "fenêtre" plusieurs "transects" peuvent être nécessaires et qu'il sera souvent difficile d'avoir tous les transects souhaités. - L'interaction sociétés-milieux : Dans le choix des fenêtres d'étude, le poids des sites anthropisés peu apparaître prépondérant alors même que, pour les disciplines naturalistes, nombre de problèmes relatifs au fonctionnement des milieux hors anthropisation sont loin d'être résolus. Néanmoins, il apparaît aujourd'hui, à la lumière des travaux archéologiques effectués sur les autres bassins versants, que l'action des sociétés sur les milieux est déterminante (voire irréversible) à partir du Néolithique. Les naturalistes comme les archéologues et les historiens refusent désormais le déterminisme naturel ou anthropique mais les interactions réciproques sur lesquelles sont fondés leurs raisonnements n'en sont que plus difficiles à expliquer. Il serait tentant de chercher des zones non anthropisées comme "encaissant" neutre permettant de paramétrer les fonctionnements du milieu hors de l'emprise humaine mais l'expérience des archéologues montre que c'est un leurre : la notion d'un "tissu archéologique" continu (mais pas forcément connu) a remplacé depuis au moins 15 ans l'ancienne notion de "site archéologique" ainsi que les interprétations qui pouvaient être faites des "cartes des sites" par période. Ceci n'exclut pas la possibilité de sélectionner des espaces, en dehors de tout site anthropisé connu, correspondant à des questions posées par le fonctionnement des cours d'eau. Localisation des fenêtres d'observation : Neuf fenêtres d'observation ont été étudiées entre 1996 et Elles se répartissent sur trois types d'unités hydrographiques. Les bassins versants élémentaires : - vallée du Fouzon, vallon de Rigny. Les affluents majeurs : - vallée de la Choisille (A. 28), vallée de la Claise. Le val de Loire : - val d'avaray (Muides), val de Tours, les Caves d'amont, val triple, val d'authion. Contribution à la structuration de la recherche et à la création d'un réseau de chercheurs Le programme réunit une quarantaine de chercheurs et fédère cinq grandes institutions (AFAN, BRGM, CNRS, Service Régional du Ministère de la Culture et Universités) : - A.F.A.N., 1 Rue Saint Jacques, Le Mans - S.R.A. région Centre, 6 Rue de la Manufacture, Orléans - B.R.G.M., 3 Av. Claude Guillemin, Orléans - Centre archéologique de Muides, 20 Rue de la Mairie, Muides - LAUT, Château de Tours, 25 Quai d'orléans, Tours - U.M.R "Archéologie et territoires", 3 Pl. Anatole France, Tours Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

7 - U.M.R "Institut de Préhistoire et de Géologie du Quaternaire", Université de Bordeaux I, Talence Cedex - U.M.R "Laboratoire d'écologie et des paléoenvironnements atlantiques", 2 Rue de la Houssinière, BP 92208, Nantes - U.M.R "Laboratoire COSTEL", Université de Rennes II - U.R.A. 141 "Laboratoire de géographie physique Pierre Birot", 1 Pl. A. Briand, Meudon - UPRES EA 2100 «Laboratoire de Géologie des Environnements Aquatiques Continentaux», Faculté des Sciences et Techniques, Parc de Grandmont, Tours - Laboratoire des Sciences de l Environnement et de l Aménagement, Rue de la Barre, Angers. Pour notre équipe, la mission de formation et d accueil de jeunes chercheurs est importante. On peut d ores et déjà se réjouir du nombre et de la qualité des mémoires de maîtrise et de DEA soutenus. YENNE Le Mans Val d'avaray Orleans Val d'orléans LOIRET Val d'authion A 28 LOIR-ET-CHER Blois Angers NE-ET-LOIRE Val Triple Tours Saumur Tours INDRE-ET-LOIRE Vierzon Vallon de Rigny Vallée de la Claise Bourges CHER Chatellerault INDRE Chateauroux Localisation des différentes fenêtres du PCR «Géoarchéologie de la Loire moyenne et de ses marges» Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

8 Le Val d Avaray (M.Garcin, G.Farjanel, D.Giot) LE VAL D AVARAY (LOIR-ET-CHER) M.GARCIN BRGM ARN 3 av. Claude Guillemin BP Orléans m.garcin@brgm.fr G.FARJANEL BRGM CDG 3 av. Claude Guillemin BP Orléans g.farjanel@brgm.fr D.GIOT BRGM CDG 3 av. Claude Guillemin BP Orléans d.giot@brgm.fr Résumé Les travaux réalisés sur le Val d'avaray visent à définir les modalités de la genèse de la vallée ligérienne de ce secteur. La géométrie des corps sédimentaires, la chronologie des événements et la dynamique des processus morphogénétiques y ont été étudiées. Un nouveau modèle d'évolution est proposé et diffère des interprétations antérieurement admises. L incision et le remplissage du lit majeur dans le secteur du Val d Avaray se sont effectués de façon polyphasée au Tardiglaciaire et à l Holocène. Cinq corps alluviaux principaux s y individualisent par érosion méandriforme des précédents puis par remplissage sableux. Des bras morts étroits à dépôt argilo-tourbeux ont été identifiés. Certains chenaux ont été actifs du Tardiglaciaire jusqu au Boréal, d autres du Boréal au Subatlantique tandis que certains n ont fonctionné que du Subboréal au Subatlantique. Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

9 Le Val d Avaray (M.Garcin, G.Farjanel, D.Giot) Présentation de la fenêtre Val d Avaray Présentation géographique Le Val d Avaray (Loir-et-Cher, 1,533 W ; 47,69 N) se situe en Loire moyenne, entre Blois et Beaugency, à 680 km de la source. La zone d étude s étend sur une dizaine de kilomètres de long pour une largeur du lit majeur comprise entre 2,5 km à l amont et 1,5 km à l aval (fig. 1). Les altitudes du lit majeur varient entre 78 m à l amont et 74 m à l aval, la topographie y est très plate, les morphologies très discrètes et peu contrastées. figure 1 : Cadre géographique du Val d Avaray Caractérisation hydrologique et géométrique Le Val d Avaray est localisé à l aval du coude d Orléans où la Loire voit son sens d écoulement passer du N à l WSW. Dans ce secteur, la Loire ne présente pas de confluence majeure. Le tracé du lit actuel montre à l amont un méandre assez marqué (méandre de Saint-Laurent- Nouan) ; la Loire qui s écoule en partie centrale du lit majeur avant le méandre, est ensuite plaquée contre le coteau en rive gauche sur une distance de 10,5 km environ. Quelques ruisseaux sont présents dans le lit majeur, ils prennent naissance dans des sources du coteau rive droite. Le «Pisse Vache» s écoule d Avaray jusqu à l île de Nouan tandis que la Tronne s écoule de Courbouzon jusqu au Vivier sur une distance de 11 km. Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

10 Le Val d Avaray (M.Garcin, G.Farjanel, D.Giot) Une levée a été construite en rive droite de la Loire, d Avaray jusqu à l aval de Saint-Dye. Cette levée construite en plusieurs phases n est pas continue et ne protège pas totalement le lit majeur de la Loire des inondations et contribue à créer un remous hydraulique. En effet, elle présente une courte interruption du lieu-dit «Le Val» jusqu au village de Fleury. En rive gauche, seul le secteur à l aval de Saint-Dye-sur-Loire, voit l élévation d une levée dès que le fleuve quitte le coteau sud. Le lit mineur à une largeur comprise entre 200 et 300 m, localement, il peut atteindre 400 m. Quelques petites îles sableuses sont présentes dans son lit. Un seuil rocheux dans le lit vif est à signaler à 1,1 km en amont de Muides. Il a peut être été un lieu de franchissement de la Loire pour les populations durant les périodes anciennes (néolithique, âge du Bronze ; R. Irribaria comm. Orale). Contexte géologique Dans le Val d Avaray, la Loire s est encaissée dans les «Calcaires lacustres d Etampes» d âge Oligocène. Au niveau de Muides, l encaissement du fleuve par rapport à la terrasse Fw attribuée au Würm est de 24 m (Gigout et al. 1970). Les accumulations alluvionnaires ultérieures qui font l objet de la présente étude, atteignent 7 m d épaisseur en moyenne. Elles sont constituées majoritairement par des graviers à la base puis des sables plus ou moins grossiers et enfin par des limons de débordement. Problématique spécifique Une première étude des morphologies de surface et des forages archivés dans la Banque de Données du Sous-sol (BSS) avait permis en 1997 d émettre l hypothèse d une mise en place diachrone des sédiments du lit majeur de la Loire dans le val d Avaray. Ce diachronisme serait lié à la migration latérale au cours du temps du méandre de Saint-Laurent-des-Eaux. Cette hypothèse est contradictoire avec les schémas d évolution du fond de la vallée de la Loire émis par les auteurs antérieurs. En effet, les travaux réalisés sur la répartition et la stratigraphie des alluvions du lit majeur de la Loire (Gigout et al. 1970, 1974 et Macaire 1981, 1983, 1984) aboutissent à des modèles de mise en place faisant intervenir une phase de creusement maximum suivie de trois stades de remblaiement distincts, superposés ou emboîtés. Les cartes géologiques du Blésois et de l Orléanais (Gigout et al. cartes à 1/ Orléans 1969, La Ferté-saint-Aubin 1970, Beaugency 1974) présentent une cartographie dans laquelle l incision du lit majeur est acquise durant le Weichsélien («Würm ancien»). Le remblaiement sédimentaire comprendrait en fond de lit un niveau ancien «alluvions würmiennes» attribué au Weichsélien (niveau Fx), auquel se superposerait un niveau holocène (Fy) affleurant en «montilles». Les dépôts «modernes» seraient encore superposés ou encaissés dans le niveau Fy. En Touraine, Macaire (1981, 1983, 1984) décrit le même type de relations géométriques mais donne une estimation stratigraphique différente. Il attribue l incision maximum à un interstadiaire intra-weichsélien, le remplissage Fy au Weichsélien supérieur et Fz à l Holocène. L objectif de l étude menée sur le val d Avaray a donc visé à confirmer puis à affiner notre hypothèse et à fournir des éléments chronologiques, paléo-environnementaux et de préciser l évolution de la dynamique fluviale. L intérêt de cette étude pour la connaissance de la dynamique fluviale de la Loire récente est de : - fournir de nouveaux éléments sur les âges des sédiments du fond de la vallée ligérienne, - connaître les modalités de dépôt de ces alluvions et la dynamique fluviale associée, - reconstituer les paysages et les environnements aquatiques au cours du temps ce qui permettra d appréhender la variabilité du système sous le contrôle des processus géodynamiques puis sous emprise anthropique avant l époque industrielle. L objectif étant alors d appréhender la part relative des facteurs de forçage géodynamiques et anthropiques dans l évolution d un hydrosystème fluvial à l Holocène. Par ailleurs, l intérêt de cette étude pour la compréhension des relations milieux-sociétés est triple : Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

11 Le Val d Avaray (M.Garcin, G.Farjanel, D.Giot) L organisation des dépôts du lit majeur en corps sédimentaires d âges différents leur confère un potentiel archéologique variable. L âge potentiel d un site ou de mobilier archéologique intra-sédiment est d abord lié à l âge du corps sédimentaire dans lequel il est piégé, dans un second temps dans un même ensemble sédimentaire l âge est fonction de la profondeur. Ceci permet de comprendre que dans le lit majeur de la Loire des sites reposant à la même profondeur ont des âges radicalement différents. Les reconstitutions de l évolution spatio-temporelle du fleuve et de ses morphologies permettront de fournir des éléments de réflexion sur les relations entre le fleuve et les sociétés au cours du temps. Les éléments recueillis seront alors utiles pour la cartographie géologique des formations alluviales holocènes mais aussi dans le cadre de projet d aménagement (connaissance du proche sous-sol, géométrie des aquifères et des nappes d accompagnement, réponse dans le long terme d un système fluvial aux aménagements et à l évolution de l occupation du sol dans son bassin versant etc.). Synthèse interdisciplinaire, intégration des données Dans les chapitres suivants, les principaux résultats et interprétations concernant la dynamique fluviale et la géométrie des dépôts du lit majeur seront présentés. Les dépôts argilo-organiques des bras morts sont ensuite décrit, les éléments de datation de ces bras-morts sont ensuite présentés et discuté. Les enseignements que l on peut en tirer au sujet de la dynamique fluviale et sur les indices de l incidence du rôle des sociétés sont alors dégégés. Les évolutions temporelles de la végétation sont ensuite présentées ce qui permet de retracer la succession des paysages végétaux d une partie du Tardiglaciaire et de l Holocène. Enfin, un court chapitre traite de l évolution de la morphologie fluviale récente, c est à dire sur les trois derniers siècles, à partir d éléments cartographiques. Dynamique fluviale et géométrie des dépôts La géométrie des corps alluviaux a été établie à partir de la morphologie de surface reconnaissable sur le terrain ou en photos aériennes, et par les indications de lithologie et d épaisseur fournies par 225 forages (dont 60 réalisés spécifiquement pour cette étude), de caractérisation géophysique par cartographie de la conductivité électromagnétique et de traitements informatiques 3D (logiciel GDM). La chronostratigraphie des différents corps alluviaux est fondée dans un premier temps sur leurs relations géométriques mutuelles (fig.1, fig. 2). Dans un contexte de migration de méandres, chaque corps correspond à un déplacement brutal du cours principal (Richards 1982, Chorley et al. 1984, Miall 1996). L abandon d un méandre est la conséquence de l ensablement du lit initial et de l ouverture en amont d une passe reformant le nouveau tracé. Un bras mort ou «mouillère» subsiste à l emplacement de l ancien lit ne recevant plus que les dépôts de crue et des sédiments argilotourbeux palustres. Les formations les plus anciennes (corps A) sont conservées en pied de coteau de la rive nord. La plaine alluviale s est construite dans le Val d Avaray selon une dizaine de stades actuellement recensés. Chaque stade correspond à la migration d un méandre avec : l érosion frontale de la berge de rive concave, le chenal graveleux en dépression au niveau du lit actif, les barres sableuses progradantes en élévation sur la rive opposée. La séquence sédimentaire verticale présente toujours à la base les sables graveleux de chenal, auxquels se superposent les sables des barres progradantes. Dans tous les cas observés dans cette étude, l érosion frontale détruit partiellement le corps sédimentaire précédent et recreuse le substrat calcaire de 1 à 3 m par rapport à sa cote précédente. La morphologie du toit du substrat calcaire est modifiée par le processus de migration des méandres. L hypothèse d un encaissement postglaciaire unique et de l acquisition de la morphologie du substratum dès cette période nous paraît de ce fait caduque. En effet, pour les stades A1 à A5, (base érosive à +69 m, comblement à +74 m aux Muides), les corps s érodent successivement et partiellement jusqu au substratum calcaire et reforment le lit à une cote de comblement quasiment identique. On observe donc pour chaque stade des érosions et des agradations latérales simultanées. Les chenaux abandonnés (ou bras morts) à sédiments argilo-tourbeux sont largement représentés dans ces stades anciens et la profondeur est telle que certains atteignent le substrat calcaire (fig. 2). Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

12 Le Val d Avaray (M.Garcin, G.Farjanel, D.Giot) L épaisseur du remplissage argilo-tourbeux peut y atteindre 5 m. Le recouvrement par les limons de débordement récents constitue un remblaiement qui malheureusement masque la paléo-morphologie. Le stade B érode les niveaux A, également jusqu au calcaire. L incision est bien marquée dans la morphologie actuelle par un ressaut de 0,5 m. Les chenaux d abandon sont très localement tourbeux mais les colmatages sableux prédominent. Les stades C et D traduisent un tracé du cours d eau faiblement onduleux à rectiligne et une largeur maximale possible du lit de 0,5 à 1 km, le remblaiement est situé à un mètre en contre bas du niveau B. Les chenaux montrent encore une morphologie nette et un colmatage uniquement sableux. Le stade E est localisé au niveau de l étroitesse maximale de la vallée vers Saint-Dye-sur-Loire. Après un tracé étroit et rectiligne en amont, une zone à méandres se développe à nouveau en aval. La morphologie est bien préservée en particulier les chenaux à remplissage uniquement sableux et les îles. Les figures 3 et 4 illustrent les différences entre le modèle de principe de Gigout et al et notre interprétation de la géométrie des dépôts dans le Val d Avaray. Dans le modèle de Gigout et al., la mise en place des différents corps sédimentaires du Würm tardif jusqu à l Actuel est gouvernée par une accumulation selon composante verticale. Les dépôts dit «modernes» s encaissant en partie dans les dépôts «holocènes», les buttes témoins d holocène formant les «montilles». Notre transect de principe du Val d Avaray montre au contraire que les grands ensembles sédimentaires se succèdent dans le temps selon une composante horizontale. Chaque phase de dépôt étant suivie, comme nous l avons vu précédemment, par une migration latérale, une incision puis une nouvelle phase de dépôt. Au sein de chaque corps, la succession temporelle des dépôts est bien évidemment verticale. Par ailleurs, les limons de débordement sont aussi diachrones pour une profondeur donnée. En effet, le dépôt des limons de débordement s effectue à chaque inondation du lit majeur sur les corps sédimentaires sous-jacents qui forment la plaine alluviale à une époque donnée. Logiquement, les corps les plus anciens sont surmontés au moins en partie par des limons plus anciens que ceux que l on retrouve sur les corps sableux plus récents. Ce fait permet d expliquer par ailleurs les différences d épaisseur dans le nappage limoneux surmontant les corps sableux qui masquent bien souvent les morphologies préexistantes. De plus, les corps sableux les plus récents ne présentent que peu voir pas de limons notamment en vertu de ce qui est énoncé précédemment mais aussi en partie par l édification durant les périodes historiques des levées. Celles-ci en isolant le fleuve de son lit majeur naturel ont réalisé partiellement leur rôle de protection par rapport aux crues mais de ce fait empêché tout apport de sédiment fin (limon) dans ce même lit majeur. Les limons n étant plus stockés dans le lit majeur, ils se re-déposent dans le lit mineur et le lit majeur endigué ce qui contribue à la modification des caractéristiques granulométriques du fond du lit. Ce fait ajouté à la déconnexion du lit majeur - lit mineur est responsable de la disparition de nombreuses annexes hydrauliques ce qui a été préjudiciable aux écosystèmes aquatiques. Il est probable qu il y a eu historiquement, dès l édification systématique des levées, une modification profonde de ces écosystèmes aquatiques par rapport à ceux qui prévalaient antérieurement. Récent Loire Ancien Calcaire de Beauce Würm Holocene Fy Moderne Fz D après Gigout et al Figure 2: Transect schématique des alluvions en Loire moyenne d après Gigout et al.1974 Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

13 Le Val d Avaray (M.Garcin, G.Farjanel, D.Giot) Ancien M25b Récent Garcin et al /- 50 BP /- 50 BP M19c M30b /- 60 BP /- 70 BP /- 90 BP /- 70 BP /- 50 BP /- 60 BP /- 50 BP A B C D A1 A2 A3 A4 Loire NW SE Calcaire de Beauce Corps A Corps B Corps C Corps D Argiles Limon tourbeuses Figure 3: Transect schématique des alluvions du Val d Avaray d après Garcin et al.1999a. Figure 4 : Carte des formations alluviales du Val d Avaray d après Garcin et al.1999a Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

14 Le Val d Avaray (M.Garcin, G.Farjanel, D.Giot) Les dépôts de bras mort Quatre forages carottés ont été étudiés (jusqu à 1999) dans les remplissages argilo-tourbeux des bras morts à la limite des différents corps sableux. Après une description synthétique de leur lithologie, leurs attributions stratigraphiques et les informations sur la dynamique fluviale et l évolution de la végétation que nous avons pu en déduire seront présentées. Rappelons que compte tenu de la prédominance des sables et des graviers dans les dépôts ligériens dans la Loire centrale, l analyse de ces dépôts argilo-organiques nous offre nombre d informations nouvelles aussi bien sur le contexte fluvial que régional. Description synthétique des sédiments Sondage M30b Le forage carotté M30b (coordonnées Lambert II ; x= 540,145 ; y = 2300,86 ; z = 76m, fig. 5) a recoupé 4m d alluvions reposant sur le calcaire de Beauce, 7 unités sont distinguées : (a) de 4,0 à 2,82m sable moyen jaune ; (b) de 2,82 à 2,3m sable moyen gris-noir ; (c) 2,3 à 2,14 m argile noire ; (d) 2,14 à 2,0m argile verte ; (e) 2,0 à 1,7m argile noire ; (f) de 1,7 à 0,5m argile verte ; (g) limon argileux Sondage M27b Le sondage M27b a recoupé 5,8m d alluvions reposant sur le calcaire de Beauce (coordonnées Lambert II : x = 540,62 ; y = 2300,22 ; z = 77m ; fig. 5). De bas en haut, cinq unités ont été identifiée : (a) 5,8 à 4,3m : sable grossier à moyen à graviers ; la partie terminale de cette unité se présentent sous un faciès de sable fin de couleur grise ; (b) 4,3 à 3,6m: tourbe argileuse noire à laminations riche en débris végétaux ; (c) 3,6 à 2,5m: argile noire compacte à rares débris végétaux ; (d) 2,5 à 1,5m: argile verte silteuse et finement micacée à la base, plus plastique vers le sommet. Présence de graviers carbonatés vers 1,8 m ; (e) de 1,5 à 0m : limon brun argilo-silteux ; Sondage M25b Le forage carotté M25b a recoupé 6,3m de dépôts holocènes reposant sur le calcaire de Beauce (coordonnées Lambert II : x = 540,765 ; y = 2300,68 et z = 77,0 m ; fig. 5). De bas en haut, 10 unités sont distinguées : (a) de 6,3 à 5,4m : sable grossier gris à graviers; (b) de 5,4 m à 4,9m : sable fin à moyen micacé ; (c) de 4,9 à 4,7m : tourbe très fine noire à grise à débris de bois et graines ; (d) de 4,7 m à 3,5m : tourbe noire brunissant vers le sommet très riche en débris ligneux, présence de gastéropodes ; (e) de 3,5 à 2,9m : argile noire très riche en gastéropodes entiers et à débris ligneux parfois pluricentimétriques ; (f) 2,9 à 2,7m : argile noire à rares débris de gastéropodes et fragments de bois ; (g) 2,7 à 2,2m : argile grise devenant progressivement verte vers le sommet. Les débris coquilliers y sont rares, les fragments végétaux très rares. (h) de 2,2 à 1,0m : argile verte très compacte à mouchetures bleues très pauvre en débris de gastéropodes. (i) de 1,0 à 0,9m : argile brunâtre passant à une argile limoneuse ; (j) de 0,9 à 0m : limon argileux brun. Sondage M19c Le forage carotté M19c a recoupé 4,8 m de dépôts holocènes reposant sur le calcaire de Beauce (coordonnées Lambert II : x = 541,305; y = 2300,14 ; z =76,5m ; fig. 5). De bas en haut, sept unités y sont distinguées : Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

15 Le Val d Avaray (M.Garcin, G.Farjanel, D.Giot) (a) 4,8 à 4,7m : sable grossier à graviers et galets pluri-centimétriques ; (b) 4,7 à 3,8 m : argile noire plastique très riche en matière organique à rares gastéropodes ; (c) de 3,8 à 3,0 m : argile noire à lits organiques tourbeux d épaisseur millimétrique à centimétrique contenant des graines ; (d) de 3,0m à 2,8m : argile plastique brunâtre à verdâtre ; (e) de 2,8m à 1,2m : argile verte légèrement silteuse et finement micacée passant progressivement à une argile brunâtre puis à des silts argileux. Les débris végétaux y sont rares ; (f) de 1,2m à 0,4m : limon silteux micacé brun ; (g) de 0,4 à 0 m : sol argilolimoneux brun. Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

16 Le Val d Avaray (M.Garcin, G.Farjanel, D.Giot) Sondage M25b Sondage M19c Sondage M30b m Litho. Description Limon argileux avec remblai entre 0.44 et 0.26 (terre cuite, cailloutis calcaire) Argile verdâtre à rares mouchetures brunes Argile noire riche en m.o, qq débris végétaux passant à une argile grise puis verte Argile verdâtre à rares mouchetures de m.o noire Argile noire riche en m.o Sable moyen gris noir à passées assez grossières de graviers mm Sable moyen jaune à graviers (3mm) assez fréquents Sondage M27b m Litho. Description Limon Argile plastique verte, graviers CaCO3 entre 172 et 182 Argile silteuse verte finement micacée Argile brun clair, reprise probable Argile noire assez compacte, rares débris végétaux Tourbe argileuse noire, rares débris végétaux, légère lamination d'horizons organiques Tourbe argileuse noire, débris végétaux, lamination d'horizons organiques Sable fin gris m Litho. Description Limon argileux bruns et sol Argile brunâtre passant à une argile limoneuse Argile verte compacte, rares débris coquilliers, rares végétaux,mouchetures bleues , CO3Ca Reprise? carotte douteuse Argile grise à verte à rares débris coquilliers et très rares traces de végétaux Argile noire à rares débris de gastéropodes Argile noire très riche en gastéropodes, très riche en débris végétaux, gros débris de bois à 2.9 Reprise Argile brunâtre riche en m.o. avec nbreux gastéropodes Argile très riche en gastéropodes (2 genres), à 3.42 débris de bois et charbon Tourbe noire puis brune très riche en débris végétaux Reprise Tourbe noire à grise à débris végétaux, tigres débris de bois et graines Tourbe fine très noire Sable Figure 5 : Log des sondages carottés M30b, M27b, M25b, M19c m Litho. Description Sol argilo-limoneux brun Limon silteux brun micacé Argile verte à brunâtre passant progressivement à des silts argileux Argile verte légèrement silteuse à rares végétaux et très fins micas Argile plastique brunâtre à verdâtre Reprise de carotte/mélange Argile noire à lit organique tourbeux mm à cm, graines conservées Argile noire très plastique très riche en m.o. rares gastéropodes Sables à galets (+-7cm) et graviers Calcaire de Beauce Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

17 Le Val d Avaray (M.Garcin, G.Farjanel, D.Giot) Datations radiocarbones- Age des dépôts Les sédiments prélevés dans les carottes ont été datés par palynologie et par datations radiocarbones (20 datations 14 C AMS ; Laboratoire Beta Analytic Inc.). Les datations obtenues pour chaque carotte sont présentées de manière synthétique dans le tableau 1 et exhaustive dans Garcin et al Elles confirment les hypothèses sédimentologiques que nous avions émises à savoir une mise en place diachrone des différents ensembles sédimentaires. En effet, chaque remplissage argilo-tourbeux caractérisant un milieu palustre est nécessairement postérieur à la création de la morphologie en creux du bras mort concerné. La création de cette morphologie est donc antérieure aux dates les plus anciennes obtenues ou évaluées à la base de chaque carotte. Le tableau synthétique (Tabl. 1) permet par ailleurs de mettre en évidence les arrêts de sédimentation (ou les érosions?) qui ont affecté chaque bras mort. Ces arrêts de sédimentation se produisent à des âges différents dans chaque bras mort (remplissage diachrone). La sédimentation de chaque bras mort ne reflète, de ce fait, que leur histoire individuelle ; ces hiatus ne peuvent donc être reliés à des évènements fluviaux affectant l ensemble du Val d Avaray et à fortiori l ensemble de la Loire moyenne. Ces arrêts de sédimentation peuvent être interprétés comme des déconnections hydrauliques temporaires du bras mort et du fleuve n occasionnant plus d apport solide dans le système. Ces déconnections se produisent durant le Boréal pour le sondage M30, l Atlantique et le Subboréal pour le sondage M27. Dans le sondage M25 la sédimentation est quasiment continue du Boréal au Subatlantique si ce n est un hiatus autour de XXX B.P. qui a été mis en évidence par une discontinuité dans le diagramme pollinique et par les datations radiocarbones (voir Garcin et al. 2000). La réalisation de nombreuses datations 14C dans ce sondage a montré la stabilité (mis à part le hiatus) du taux de sédimentation du Boréal au Subatlantique. Le taux de sédimentation moyen a été évalué à 0,5 mm/an 14 C. Le bras mort traversé par le forage M19 a permis d évaluer sa vitesse moyenne de sédimentation de l ordre de 1,3 mm/an. Cette différence de taux de sédimentation résulte probablement de la distance plus faible entre ce chenal et le lit vif par rapport au corps A3 (M25b) occasionnant une quantité supérieure des apports lors des crues. Elle illustre la forte variabilité qui peut exister en terme de dynamique sédimentologique au sein de systèmes identiques appartenant au même hydrosystème et très proche géographiquement les uns des autres. Holocène Tardi Corps A1 M30b A2 M27b A3 M25b A3 M19c A4 Tx sédim.en mm / an Subatlantique?? 0,5 1,3 Subboréal Atlantique Boréal Préboréal Dryas récent Allerød Dépôt Incision Hiatus Tableau 1 : Les phases d incision, de dépôt et les lacunes dans les bras morts du Val d Avaray Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

18 Le Val d Avaray (M.Garcin, G.Farjanel, D.Giot) Caractérisation de la végétation Les études palynologiques réalisées sur les sondages M30, M27, M25 et M19 ont permis de définir les étapes du peuplement végétal des environ du Val d Avaray du Tardiglaciaire au Subatlantique (fig. 6). Ainsi, les périodes suivantes ont put être caractérisées (Garcin et al. 2000). L'Allerød (M30b, palynozone a) Pinus et Betula sont les éléments importants du paysage accompagnés par des espèces mésothermophyles (Corylus, Quercus, Ulmus). Ces dernières sont également observées dans les tourbières de l'archet en forêt de Rambouillet (Jalut, 1967), Mur-de-Sologne (Planchais, 1970) et Prémery dans le Nivernais (Planchais, 1966). La strate herbacée est caractérisée par Artemisia présentant les plus forts pourcentages observés parmi les trois autres sondages où ce taxon est seulement présent. Le Dryas récent n'a pas été caractérisé dans l'ensemble des carottes analysées. Le Préboréal (sondage M30b, palynozone b) Il est caractérisé par des taux de pollens arboréens très élevés. Pinus est dominant. Ces pinèdes sont accompagnées par Betula, Corylus, Quercus et Alnus en faibles pourcentages. La flore herbacée diminue en quantité mais reste aussi variée qu'au Tardiglaciaire. Le Boréal (sondage M27b, palynozones a1,a2, a3 ; sondage M25b, palynozone a) On assiste au déclin de Pinus et Betula, à l'optimum de Corylus, à la progression de Quercus, Ulmus, Salix et à l'établissement de Tilia. Tilia est signalé dès le Boréal en Loire Moyenne (Carcaud et al., 1996). Corylus et Quercus et dans des taux moindres Tilia sont bien représentés au Boréal en Sologne (Planchais, 1970) et dans le Nivernais (Planchais, 1966). Quelques grains de Carpinus sont observés dans la palynozone a3 du sondage M27b, comme dans la tourbière de l'archet (Jalut, 1967). Les Cypéracées sont les herbacées les mieux représentés. A 3,79m, dans le sondage M27b, la datation 14 C (9540 ± 90ans BP, Préboréal) considéré comme vieillie sera rejetée. L'Atlantique (sondage M25b, palynozones b, c, d ; sondage M30b, palynozone c) Il est caractérisé par l'extension maximale d'alnus, contemporain de l'apparition de Fagus. Betula est rare. Les massifs forestiers sont constitués par Corylus, Quercus et très secondairement Ulmus. Tilia prend de l'essor attestant du caractère tempéré du climat. Parmi les herbacées, le groupe des Composées est dominant dans M30b, alors que ce sont les Graminées dans M25b, dans les deux cas, en association avec les Cypéracées. Les fougères monolètes et Polypodium sont très abondants dans le sondage M30b et avec des taux moindres dans le sondage M25b. Le Subboréal (M25b, palynozone e ; sondage M19c, palynozones a et b) L'apparition de Fagus en courbe quasi continue dans le sondage M25b (e) et l'accroissement de l'importance de Fagus dans le sondage M19c (a, b) suggère un âge subboréal. D'après de Beaulieu et al. (1990), l'accroissement de Fagus doit se placer dès le début de la période subboréale (fourchette 4500 et 3500 BP). Corylus, Betula, Quercus, Alnus continuent d'être bien représentés (M25b). Juglans est présent (4,58m, sondage M19c). Cette essence est connue à l'état sauvage en Touraine un peu avant le Subatlantique (in Carcaud et al., 1996). Dans ce secteur de Loire Moyenne Juglans serait déjà connu à l'état sauvage dès BP (Garcin et al., 1999a). Le rapport AP/NAP s'inverse ; les herbacées sont dominantes avec des Composées et des Graminées. Le milieu a un caractère humide confirmé par les taux très élevés des plantes aquatiques : Sparganiacées, Potamogeton (M19c), Cypéracées, Typhacées attestant d'une remontée du niveau de l'eau. Le phytoplancton d'eau douce et les fougères sont plus importantes dans le sondage M25b que dans le sondage M19c. Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

19 Le Val d Avaray (M.Garcin, G.Farjanel, D.Giot) La mise en culture par l'homme semble attestée [M19c (b)] par Plantago, les céréales (avec des valeurs atteignant 3,6 et 4,3%) et quelques grains de pollen d'urticacées. Le Subatlantique (M19c, palynozone c ; M25b, palynozone f ; M27b, palynozones b et c) On observe un changement radical de la végétation. Pinus est l'arbre dominant associé aux fougères et au phytoplancton d'eau douce (M25b, M19c). Les palynozones c et d du sondage M27b pourrait correspondre au début du Subatlantique. Les feuillus mésothermophiles ont encore des pourcentages assez élevés qui décroissent de la base au sommet de ces zones. L'augmentation des connections avec le lit vif du fleuve est attestée par l'abondance du phytoplancton d'eau douce. Ceci se traduit dans l'état de la matière organique qui est de "type colloïdale" alors que dans tous les autres niveaux analysés, la matière organique est constituée de grands restes de tissus végétaux et de fragments de bois. Indices de l incidence du rôle des sociétés Les pollens remaniés du Mésozoïque et du Cénozoïque sont présents en faibles pourcentages ( 1%) dans tous les sondages et à toutes les profondeurs. Toutefois, nous avons constaté dans toutes les carottes analysées une très forte augmentation du taux des pollens remaniés durant le Subatlantique. Ces taux qui atteignent parfois 10% ne sont pas constants mais forment des pics dans tous les diagrammes polliniques. Ces pics correspondent à un apport plus important pendant un temps restreint de ces pollens remaniés. Ils sont interprétés comme une augmentation de l'érosion des formations mésozoïques et cénozoïques qui les contenaient. Compte tenu du caractère paroxismal de ces pics, nous émettons l'hypothèse qu'ils caractérisent des augmentations brutales et de relative courte durée de l'érosion liée aux activités anthropiques. Les pics les plus marqués se produisent à l'âge du Bronze et à l'époque gallo-romaine. Cet impact anthropique est suggéré par ailleurs, par l'augmentation importante des taux polliniques cumulés des Composée liguliflores, Composées tubuliflores Caryophyllacées et céréales. Dans le sondage M27b, un échantillon prélevé à 2,95m a permis d'observer une feuille carbonisée. Entre 2,95 et 3,11m, les palynofaciès sont caractérisés par de très nombreux débris charbonneux. Ces horizons sont les témoins d'indices de feu dont l'origine anthropique peut-être suspectée ce qui corrobore les observations cités plus haut. L évolution de la matière organique conjointement à l enrichissement en plancton d eau douce dans les sondages M25b et M19c marquent des évolutions dans les connexions entre les bras morts et le lit vif du fleuve. Il semblerait qu au cours du Subatlantique, les apports d eau du fleuve dans les bras mort aient augmenté. A titre d hypothèse, l augmentation de ces apports d eau pourraient être en liaison avec une augmentation du débit moyen de la Loire et/ou une augmentation de la fréquence des crues affectant plus régulièrement les bras morts. Toutefois, l absence de détritique grossier et de sable indique clairement que les bras mort restent en dehors de la zone à fort hydrodynamisme. Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

20 Le Val d Avaray (M.Garcin, G.Farjanel, D.Giot) Age (ka) Périodes M30b R. M27b R. M25b R. M19c R Subatlantique Subboréal Pinus (Alnus, Quercus, Corylus), Filicales Maximum Pinus, Filicales Maximum Pinus, Filicales, anthropisation, Phyto. eau douce Chute d'alnus, Querc., Cory., Fagus et monolètes augmentent Maximum d'alnus, apparition de Fagus Hiatus Pinus augmente (Corylus, Quercus, Tilia) Maximum Tilia, apparition Alnus (Corylus, Quercus) Quercus, Corylus (Tilia) Maximum Pinus, Filicales, Phyto. eau douce Diminution Quercus, Alnus, Fagus, hygrophyles Quercus, Alnus, Fagus Atlantique Boréal Maximum Alnus Hiatus Hiatus Maximum Corylus (Quercus, Ulmus) 10 Préboréal Maximum Pinus 11 Tardiglaciaire Hiatus Pinus, Artemisia 12 Age en milliers d années 14 C ;périodes de l Holocène ; «M30b» : nom de forage ; R. : importance du remaniement Figure 6 : Evolution de la végétation au cours de l Holocène (d après Garcin et al modifié) Implication pour la dynamique fluviale L un des apports de l étude de la sédimentation dans ces bras mort a été de démontrer l absence totale d intercalations de détritique grossier ou de passée sableuse au sein de la sédimentation palustre des bras morts étudiés. Ceci implique que les événements hydrologiques majeurs (inondations) des derniers ans n ont pas occasionné d ensablement des bras mort. Bien que ceux-ci n étaient pas très éloignés des chenaux vifs contemporains, ils restaient suffisamment isolés de la zone à fort hydrodynamisme, lors des inondations, pour ne pas être ensablés. Par contre ces mêmes événements ont nourri les bras morts en particules fines argileuses. Certains ont put être responsable de la troncature des dépôts antérieurs ce qui pourrait être une autre interprétation des hiatus. Par contre, dans les chenaux affectant les corps sédimentaires plus récents (B, C, D et E), les sédiments se sont révélés quasi - exclusivement sableux. Il semblerait qu il y a eu une modification de la dynamique fluviale au cours de l Holocène récent. Cette modification dont l origine est à démontrer a été renforcée dans les périodes historiques récentes par l établissement par les sociétés de levées pour protéger les terres des inondations. Ces levées, préviennent le débordement du fleuve jusqu à un certain seuil, si ce seuil est franchi (rupture de levée, sur-verse), le débordement s effectue de manière violente et avec une énergie telle que les sédiments apportés ne sont plus des limons ni des argiles mais des sables et des graviers. Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

21 Le Val d Avaray (M.Garcin, G.Farjanel, D.Giot) Evolution morphologique récente La cartographie géologique des corps alluviaux (figure 4) montre une série de corps étroits et allongés localisés à proximité de la rive droite du lit mineur de la Loire actuelle. D après notre interprétation de la mise en place de ces dépôts et les datations obtenues sur les argiles organiques piégées dans les bras mort, ces corps seraient d âges très récents. En effet, la partie supérieure de la carotte traversé par le sondage M19B couvrirait des périodes évalués entre 2000 et 1000 ans BP. De ce fait, les corps B, C, D ne peuvent correspondre qu à la période historique. Cette attribution stratigraphique semble par ailleurs confirmée par l étude du sondage M21c (corps B) partiellement réalisé par L. Marambat (1998) qui attribue à cette carotte un âge couvrant les deux derniers millénaires. La confrontation de cette hypothèse avec les cartes historiques de cette zone nous a parut être l un des moyens de corroborer cette hypothèse. La figure 7 illustre l évolution historique de 1770 à nos jours du secteur de Muides. Elle a été élaborée à partir des cartes de Cassini, cartes d état major de 1845, 1904 et de la carte IGN de 19XX. Elle montre clairement, si on la compare à la figure 4, que les corps C, D et E sont bien des unités sédimentaires historiques. Par ailleurs, les îles de Nouan et Muides qui ne sont plus fonctionnelles actuellement dont ils ne subsistent que les morphologies (plus ou moins dégradées) et des traces dans la toponimie étaient bien actives au XVIII ème siècle. L observation de ces cartes diachrones réalisées à des intervalles de 60 à 80 ans montre d une part la tendance locale de l évolution du lit mineur dans lequel les îles vont du XVIII ème au XX ème siècle peu à peu devenir coalescentes pour ne laisser place qu à des rios (début XX ème siècle la «petite Loire» pour l île de Muides (le Collier), au XIX ème siècle pour l île de Nouan). La déconnexion de ces rios s effectue par ensablement de la passe amont (fin du XIX ème pour l île de Nouan, courant XX ème pour l île de Muides) puis par déconnexion complète de ces annexes hydrauliques. Les anciennes îles sont alors intégrées au lit majeur. Ces observations sont aussi valables pour l île de St-Dye qui était encore active au XVIII ème siècle, la levé de rive droite s arrêtait alors au niveau de Domino, preuve de l activité hydraulique du système. Ce n est que postérieurement que la levée a été complétée vers l aval jusqu au lieu-dit le «Val». La tendance d évolution du lit qui s en dégage montre un lit mineur assez large à chenaux multiples et îles qui évolue vers un chenal unique plus étroit. Cette tendance a de plus été amplifiée dans la seconde moitié du XX ème siècle par l enfoncement du lit induit par les forts volumes de granulats extraits dans le lit mineur. Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

22 Le Val d Avaray (M.Garcin, G.Farjanel, D.Giot) Figure 7 : Evolution des îles de Nouan et de Muides du XVIII ème au XX ème siècle Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

23 Le Val d Avaray (M.Garcin, G.Farjanel, D.Giot) Conclusion Les études réalisées ont permis de proposer un nouveau modèle de remplissage du lit majeur de la Loire moyenne. Ce mode de mise en place, bien que susceptible de se reproduire dans d autres segments du fleuve, n est pas généralisable à l ensemble de la Loire moyenne et a fortiori à l ensemble de la Loire. Il permet toutefois de mieux appréhender les modalités de la création du fond de vallée et de sa sédimentation. La mise en place des différents corps sableux par aggradations successives éclaire la complexité des relations entre les sites archéologiques et les sédiments. Certaines questions restent en suspend notamment celles relatives à l'évolution qualitative et quantitative de l hydrologie du fleuve. De surcroît, comment se raccorde ce segment de la Loire moyenne avec les zones situées immédiatement à l amont et à l aval? La poursuite de cette étude est envisagée par la réalisation de sondages dans les remplissages de bras mort qui permettraient de compléter et d affiner nos connaissances d une part du Tardiglaciaire et d autre part sur la période historique. Par ailleurs, la poursuite de l interprétation des données géochimiques déjà recueillies devrait nous permettre de caractériser l évolution géochimique de l hydrosystème durant l'holocène. Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

24 Le Val d Avaray (M.Garcin, G.Farjanel, D.Giot) Bibliographie Beaulieu J.L. de, Guiot J Mur de Sologne in Rapport CEA.BC.4548, 11-18, 1 diagramme (inédit). Carcaud N. et al Géoarchéologie de la Loire moyenne et de ses marges (région centre). DRAC- SRA Centre, Orléans, Rapport annuel n 1. Chorley R.J, Schumm S.A., D.E. Sugden Geomorphology. Ed. Methuen 605 p. Garcin M., Farjanel G., Giot D. (2001) - Eléments radiochronologiques et palynologiques sur les alluvions du lit majeur de la Loire (Val d Avaray, Loir-et-Cher, France). Quaternaire, 12, (1-2), p Garcin M., Giot D., Farjanel G., Gourry J.C., Kloppmann W., Negrel Ph. 1999a. Tardiglacial and Holocene deposits in the Middle Loire River, the Val d Avaray case study (Loir et Cher, France). C. R. Acad. Sci. Paris., Série IIa, 329, Garcin M., Giot D., Farjanel G., Kloppmann W., Negrel Ph., Gourry J.C. 1999b. La Loire moyenne au Quaternaire récent dans le Val d Avaray. Etudes Ligériennes, 2, p Gigout M., Cadet J.P., Horemans P Carte géologique de la France à 1/ Feuille de Beaugency. Gigout M., Cadet J.-P., Horemans P., Rasplus L Carte géologique à 1/ Feuille de la Ferté-Saint-Aubin n 398 Jalut G Analyse pollinique de la tourbière de l Archet. Pollen et Spores, IX, 2, p Macaire J.J Contribution à l étude géologique et paléo-pédologique du Quaternaire dans le Sud- Ouest du Bassin de Paris (Touraine et ses abords). Thèse doct. Etat, Sciences, Tours, t. 1, 304 p., t. 2, 146 p. Macaire J.J Evolution du réseau hydrographique dans le Sud-Ouest du Bassin de Paris pendant le Pliocène et le Quaternaire. Bull. Ass. Fr. Et. Quat., 4, p Macaire J.J Les vallées et formations alluviales plio-quaternaires dans le Sud et le Sud-Ouest du Bassin de Paris : genèse et signification dynamique. Bull. Ass. Fr. Et. Quat., 1.2.3, p Macaire J.J., Corcita C., De Luca P., Gay I., Goër de Herve A Origines, âges et évolution des systèmes lacustres tardi- et postglaciaires dans le bassin du lac Chambon (Puy-de-Dôme, France). C. R. Acad. Sci. Paris, 315, série II, p Marambat L Analyse palynologique d échantillons provenant d un chenal dans la plaine alluviale de Muides, rapport préliminaire. Archéolabs ARC97/R1969P/1. Miall A.D The geology of fluvial deposits. Ed. Springer 596 p. Planchais N Analyses polliniques en forêt de Prémery (Nièvre). Bulletin de l Association française pour l étude du Quaternaire, 3, p Planchais N Tardiglaciaire et Postglaciaire à Mur-de-Sologne (Loir-et-Cher). Pollen et Spores, XII, 3, p Richards K Rivers. Forms and Processes in alluvial channels. Ed. Methuen. 358 p. Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

25 Le Val de Tours (résumés des maîtrises de Ch. Blin, Ch. Taberly, O. Marlet) LE VAL DE TOURS (RESUMES DES MAITRISES) CH. BLIN CH. TABERLY O. MARLET Résumé Trois résumés de maîtrises sont présentées, elles ont été soutenues aux Universités d'angers et de Tours en 1998, 1999 et Ces trois maîtrises portent sur la fenêtre de Tours et ont visé à intégrer les données géologiques avec les données archéologiques disponibles sur cet espace. Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

26 Le Val de Tours (résumés des maîtrises de Ch. Blin, Ch. Taberly, O. Marlet) Contribution à la géoarchéologie et la morphogénèse de la Loire dans le val de Tours. Constitution d une base de données géologique Christophe Blin, Mémoire de maîtrise, Université d Angers, juin 1998 Maîtrise de l'université d'angers réalisée en collaboration avec le BRGM et le Laboratoire d Archéologie Urbaine de Tours. Objectif L'objectif de ce travail de maîtrise a été de réaliser une base de données cohérente sur la fenêtre de Tours qui comprend l'ensemble du lit majeur de la Loire. Cette base de données, l'édition des documents graphiques et les traitements ont été réalisés sous GDM ( logiciel BRGM). Méthodologie La démarche suivie a été la suivante: - Récolte des données brutes de sondages auprès des organismes et sociétés détenteurs de l'information (CEBTP, la SOPENA, la Banque du Sous-Sol (BRGM) et le Laboratoire d Archéologie Urbaine de Tours). - Création de la structure de la base de données. - Saisie des données et homogénéisation des descriptions lithologiques - Contrôle des données de forages notamment en utilisant les fonctions d'interpolation qui permettent de mettre en évidence les incohérences. Les forages dont les données sont aberrantes ont été supprimés après contrôle. Après validation, la base de données contient 504 forages géoréférencés sur les Varennes de Tours. - Création et édition de log lithologiques - Création, édition et premières interprétations lithostratigraphiques. Principaux résultats Constitution d'une base de données de l'ensemble des forages réalisés dans le val de Tours (504 forages géoréférencés). Premières ébauches d'interprétation lithostratigraphiques, identification de zones à remplissage argileux suggérant la présence de bras mort non seulement sous le centre ville de Tours mais aussi près du coteau sud des Varennes. Les premières interpolations ont permis de mettre en évidence l'importance du "remblai anthropique" tant en terme d'épaisseur que de géométrie notamment sous les deux centres historiques de Tours. Interprétation lithostratigraphique sur la fenêtre de Tours. Intégration des données géologiques, palynologiques et archéologiques Christine Taberly, Mémoire de maîtrise, Université d Angers, octobre 1999 Maîtrise de l'université d'angers réalisée en collaboration avec le BRGM et le Laboratoire d Archéologie Urbaine de Tours. Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

27 Le Val de Tours (résumés des maîtrises de Ch. Blin, Ch. Taberly, O. Marlet) Objectif L'objectif de ce travail a été à partir de la base de données réalisées par Ch. Blin d'ébaucher des interprétations lithostratigraphiques et sédimentologiques du lit majeur de la Loire dans le secteur de Tours. Méthodologie La méthodologie utilisée est en partie celle utilisé par le BRGM sur le Val d'avaray avec une différence de taille due à l'impossibilité de réaliser des forages à la tarrière (contrôle ou de complément) et de la géophysique dans le contexte urbain ou péri-urbain de Tours. Les traitements ont été réalisés avec GDM et ont permis l'édition des documents et cartes suivants: - Carte du toit du substratum sous les alluvions. - Identification des zones de creusement et des interfluves dans le substratum, hypothèse sur la localisation des paléochenaux - Identification des corps argileux et superposition avec la carte de la géométrie du substratum. Analyse des cohérence entre remplissage et géométrie du substrat. - Identification d'ensembles lithostratigraphiques et interprétation en terme de processus sédimentaires - Première confrontation entre l'interprétation lithostratigraphique et les données archéologiques sur la ville de Tours. Principaux résultats La constitution de la plaine alluviale est polyphasée et complexe (3 phases majeures), des systèmes chenalisés à remplissage argileux ont été identifiés. Une confrontation plus fine devra être réalisée entre les interprétations lithostratigraphiques et les données archéologiques acquises à Tours lors des fouilles. Les paléochenaux dans la plaine alluviale de Tours Olivier Marlet, Mémoire de maîtrise, Université de Tours, 2000 Objectif L'objectif de ce travail a été, dans un premier temps, de compléter la base de données de forage par les données archéologiques que possède le LAT sur Tours puis, dans un second temps, de tenter la confrontation et l'analyse croisée entre ces deux approches. Méthodologie La base de données de 504 forages a été complétée par 180 points d'observations issus des relevés stratigraphiques effectués lors de fouilles archéologiques à Tours. La fenêtre d étude a été recentrée selon ces points entre l autoroute à l est et le ruau Sainte-Anne à l ouest. Les données ont ensuite été homogénéisées. Des cartes synthétiques ont ensuite été réalisées: - une carte de l altitude du toit du substratum où l on peut observer les points hauts et les incisions, - une carte de l épaisseur des argiles permettant de situer les accumulations, - une carte de l altitude de la surface des sables alluviaux donnant l état de la topographie de la plaine alluviale avant les premières occupations, Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

28 Le Val de Tours (résumés des maîtrises de Ch. Blin, Ch. Taberly, O. Marlet) - une carte de l épaisseur des remblais informant sur l importance de l anthropisation. Principaux résultats Malgré une étude centrée sur la recherche de traces de paléochenaux de la Loire, peu de précisions ont pu être apportées pour alimenter les hypothèses formulées par les archéologues au sujet des observations faites sur les sites 11, 023 et 024. En revanche, par la localisation précise des points de sondage dans le Système d Information Géographique de Tours sur fond de cadastre napoléonien, des anomalies sont apparues pour des cours d eau disparus au 19 e siècle tels que le ruau Sainte-Anne et le ruau de l Archevêque. Le réseau des «Boires», plus ancien, a laissé aussi quelques traces, mais plus ténues. La surface du toit du substratum est très irrégulière (entre 39 et 47 mètres NGF). Des mouilles et des incisions sont identifiables sur le tracé du lit de la Loire, aux «Boires», au ruau de l Archevêque et au ruau Sainte-Anne. Aucune incision significative, autre que celle des «Boires», n a pu être identifiée pour les traces observées sur les sites 11, 023 et 024. Le toit des sables alluviaux présente quelques anomalies remarquables : d abord ce qui pourrait être un bourrelet de rive le long de la Loire ; plus au sud, une bande dépressive qui pourrait correspondre au réseau des «Boires» ; enfin, dans la partie sud de la plaine, une large courbe qui correspond vraisemblablement au ruau de l Archevêque. Enfin l épaisseur des remblais dans la plaine alluviale de Tours traduit l importance de l occupation humaine. En effet, on constate très clairement un espace assez bien délimité où l épaisseur des remblais est supérieure à 3 mètres et atteint même 6 mètres sous Saint-Martin. Cet espace correspond assez clairement avec l espace urbanisé ancien : la ville s est exhaussée principalement là où l occupation est la plus ancienne. Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

29 Les modifications du trait de la rive gauche de la Loire dans l'ouest de Tours (H.Galinié, X. Rodier) LES MODIFICATIONS DU TRAIT DE LA RIVE GAUCHE DE LA LOIRE DANS L'OUEST DE TOURS Henri Galinié CNRS, UMR 6575, Laboratoire Archéologie et territoires, 3 Place Anatole France 37000, Tours, galinie@univtours.fr Xavier Rodier CNRS, UMR 6575, Laboratoire Archéologie et territoires, 3 Place Anatole France 37000, Tours, rodier@univtours.fr Résumé La confrontation de différentes sources met en évidence une avancée de la ville de Tours dans le lit mineur de la Loire de plusieurs dizaines de mètres (de 40 à ± 200 m) entre l'antiquité et le 18 e siècle, de façon discontinue. Ce gain dans le fleuve est surtout sensible dans la partie ouest de la ville préindustrielle. S'il existe ailleurs, il est limité et ne peut être daté avec exactitude. Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

30 Les modifications du trait de la rive gauche de la Loire dans l'ouest de Tours (H.Galinié, X. Rodier) Introduction Présent sur près de deux kilomètres le long de la rive gauche du fleuve, le "centre historique" de Tours, la ville préindustrielle, peut être subdivisé en deux partie, une moitié est dont le trait de rive semble avoir été peu été modifié, une moitié ouest qui, en revanche, a beaucoup gagné dans le lit du fleuve. L'analyse plus ou moins systématique des différentes sources existantes fait apparaître un gain dans le fleuve, presque toujours à l'initiative des habitants de Tours, des origines de la ville jusqu'à la fixation du trait de la rive gauche par la construction de nouveaux quais aux 18 e et 19 e siècles. Pour restituer cette progression, il est possible de mettre successivement en oeuvre les sources archéologiques, écrites, planimétriques et architecturales. Les sources archéologiques fiables sont peu nombreuses ; elles peuvent facilement être mobilisées. Elles documentent, pour l'essentiel, les douze premiers siècles quoique de façon intermittente. Les actes de la pratique n'ont été mis en oeuvre de façon systématique que depuis leur apparition au 9 e siècle jusqu'au 12 e siècle parce qu'un dossier cohérent et explicite pouvait aisément être constitué pour l'ouest de la ville et confronté aux sources archéologiques ainsi qu'aux plans plus tardifs. Il n'existe pas de dossier comparable pour la moitié est. Pour les siècles suivants jusqu'au 19 e, ce sont les relevés géométraux qui existent depuis le 17 e siècle et surtout le cadastre de 1836 qui forment l'essentiel de la documentation examinée dans le but de localiser des phénomènes antérieurs. Cette documentation couvre tout le trait de rive de la ville. Les sources écrites, utilisées de seconde main, ou archéologiques ne constituent alors qu'un appoint. Les données architecturales correspondent aux aménagements récents (18 e -20 e s.) encore visibles. C'est dire que cet article constitue une première approche de la question et que des recherches dans les sources écrites depuis la fin du Moyen Age, de même qu'un réexamen des plans, seront nécessaires pour détailler l'évolution du gain dans la Loire à partir du 12 e siècle. Selon l'origine de la documentation, on peut mettre en évidence trois types d'informations : - des aménagements construits au tracé identifié, sous la forme de linéaire continu ou discontinu ; - des limites sur les plans qui peuvent être associées au trait de rive plus ancien, entendu comme une bande plus ou moins large où placer le partage entre la terre ferme et l'eau. Ce tracé correspond aux terres exondées à un moment donné et peut être précédé d'une grève sujette à inondation ; - la présence, sous des niveaux exondés, d'une grève plus ancienne, ce qui signifie soit exhaussement artificiel du niveau du sol soit modification du cours ou du régime du fleuve. L'information collectée Une série de constats ayant des incidences topographiques peut être établie entre le 1 er et le 18 e siècle pour suivre la progression de la ville dans le fleuve. Il est possible de les ordonner selon la chronologie. Le site 3 à l'est de la ville et le castrum du 4 e siècle Les premières constructions réalisées sur le site 3, au 1 er siècle, sont accompagnées d'un remblaiement de quelques dizaines de cm pour aplanir le sol de la grève, créer une terrasse (Galinié et al. 1978). La relation au fleuve n'est pas connue, oblitérée par le rempart du castrum du 4 e siècle. Néanmoins ce dernier, par sa présence depuis cette date, montre que le gain dans le fleuve est ici assez faible et discontinu puisque, par exemple au début du15 e siècle, on supprima la grève pour assurer la défense de la ville, au pied du château, alors qu'en 1480 on projeta et entama un remblaiement dans la Loire en vue d'une extension urbaine vite abandonnée. Les quais du 18 e siècle montrent un gain d'une quarantaine de mètres, au plus, par rapport au rempart du 4 e siècle. Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

31 Les modifications du trait de la rive gauche de la Loire dans l'ouest de Tours (H.Galinié, X. Rodier) Les aménagements et la grève à l'ouest sur les sites 8 et 06 au 1 er millénaire La fouille du site 8 (Galinié, Randoin 1980 : ) a révélé un aménagement de rive du 1 er siècle de notre ère, sous la forme d'un mur de soutènement formant quai. Les alluvions accumulées contre la face nord du mur attestent un fleuve actif à cet endroit jusqu'au 8 e -9 e siècle. Un foyer creusé dans les alluvions, y atteste la présence d'une grève, encore au 8 e siècle (Guédez-Hicks 1980 : ). Le gain sur cette grève commença au 9 e -10 e siècle (datations céramiques). Les observations moins fiables (site 06) conduites à l'est du site 8 (Galinié, Kemp 1980 : ) ont, elles aussi révélé un aménagement de berge antique, constitué d'un mur massif situé quelques mètres (± 5) plus au sud que le précédent, alors qu'il est distant de cinquante mètres au plus. La facture différente des deux murs et leur disposition posent la question de leur nature, de leur fonction ou de la chronologie de leur réalisation : aménagements privés ou publics, tracé linéaire continu ou discontinu sous la forme de quais, construction en une ou en plusieurs phases? Ces deux murs attestent le trait de rive sur une centaine de mètres de longueur, avec un gisement de 90 (Rodier 2000). On ne peut toutefois exclure totalement que ces murs appartiennent non pas à la rive mais à un port. Le trait de rive se trouverait alors plus au nord. La grève et le trait de rive dans l'ouest de la ville du 10 e au 14 e siècle Des limites de fiefs peuvent être reconstituées avec précision pour le 18 e siècle (Galinié 1981). Elles font apparaître plusieurs informations utiles si l'on accepte le postulat selon lequel les limites de fiefs sont à peu près stables depuis l'origine : Le fief du bourg Saint-Père (Fig. 2) Ce fief s'étend au nord du castrum de Saint-Martin ; il est encadré par les fiefs de Saint-Julien à l'est et à l'ouest, par celui du cellerier au nord. Dans sa configuration du 18 e siècle, il fige une situation dont on peut faire remonter l'origine à 919 (Galinié 1981, Galinié et al à paraître). L'information utile ici est que la limite septentrionnale du fief correspondrait au trait de rive tel qu'il existait au début du 10 e siècle. Le fief de Saint-Julien ouest (Fig. 2) Le fief de Saint-Julien qui encadre celui du Bourg Saint-Père, dans sa configuration du 18 e siècle, fige à l'ouest une situation qui remonte à 943 (Lorans 1980, Galinié 1981, Galinié et al à paraître). L'information utile ici est la confirmation du tacé du trait de rive donné par le Bourg Saint-Père et sa poursuite vers l'ouest (1.3.1). Site 4 (Fig.1) Une maison construite au 11 e siècle sur le site 4 (datation céramique), dans le fief de Saint-Julien, marque la première occupation permanente du lieu sur des sables grossiers.elle traduit un gain sur la grève. (Rocque 1999). Le fief du cellerier de Saint-Martin (Fig. 2) Le fief du cellerier de Saint-Martin forme une bande large de 50 à 80 mètres, en avant des fiefs du bourg Saint-Père et de Saint-Julien ouest (Galinié 1981). Il est postérieur à 943 (cf et 1.3.2) et antérieur à (1.3.6). Il est très certainement établi avant 1080, date d'un procès entre les abbayes de Saint-Martin et de Saint-Julien au sujet de limites paroissiales entre le bourg Saint-Père et le fief de Saint-Julien est (Lorans 1980). Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

32 Les modifications du trait de la rive gauche de la Loire dans l'ouest de Tours (H.Galinié, X. Rodier) Le fief de Saint-Julien est (Fig. 2) Dans sa configuration du 18 e siècle, il résulte de la situation d'origine de 943 (cf et ) augmentée vers le nord par des gains contemporains de ceux que représente le fief du cellerier de Saint-Martin et qui sont l'objet du différend qui vient d'être évoqué (1.3.4). Lui aussi fige une situation antérieure à Le fief du roi (Fig. 2) Dans son tracé du 18 e siècle, l'emprise du fief du roi correspond au tracé du rempart de la ville et de son fossé établis entre 1356 et 1361(Chevalier 1975). Diverses observations ponctuelles ont mis en évidence des tronçons de cette enceinte. Il est impossible de dire si l'enceinte enserra alors tout l'existant, tel que figuré sur le plan et correspondant au fief du cellerier (1.3.4), ou si l'on dut procéder à la destruction de gains antérieurs qui se seraient avancés plus avant dans le lit du fleuve. De telles destructions sont attestées sur le flanc ouest du rempart. Les aménagements de quais à l'époque moderne (Fig. 1) Les quais apparaissent dans les plans à partir des environs de On peut les répartir en deux phases, avant 1679, date du premier plan et aux environs de 1779, en relation avec la construction du nouveau pont accompagnée d'un recalibrage du fleuve. Le front de Loire fut entièrement réorganisé et réhaussé après les grandes inondations de 1846 et Le plan de 1679 Le plan géométral de Tours des environs de 1679 (Bisson 1995 n 59) est le premier d'une série qui met en évidence les aménagements de quais réalisés en avant de l'enceintes du 14 e et participant de celle du 17 e siècle (vues dans Bisson 1995 n 59, Petitfrère 1998). Jusqu'à la construction du nouveau Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

33 Les modifications du trait de la rive gauche de la Loire dans l'ouest de Tours (H.Galinié, X. Rodier) pont et des quais qui l'accompagnent en 1779, les plans font apparaître une courbure marquée du trait de rive, dans l'ouest de la ville. Les relevés ou projets de la fin du 18 e siècle et le cadastre de 1836 Les relevés du 18 e siècle, à partir de 1756 (Bisson 1995 n 75) montrent les aménagements des quais projetés tels qu'on les retrouve sur le cadastre de Désormais, après la suppression de l'île Saint- Jacques, le trait de rive, formé de plusieurs tronçons rectilignes, attenue cette courbure qui demeure visible dans le parcellaire. Le gain dans le fleuve dans l'ouest de la ville (Fig. 3) Le centre historique de Tours se partage en deux parties à peu près égales de part et d'autre de la percée du 18 e siècle qui a fait basculer l'axe de la ville d'est-ouest à nord-sud. N'est documentée que la Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

34 Les modifications du trait de la rive gauche de la Loire dans l'ouest de Tours (H.Galinié, X. Rodier) partie ouest, et encore de façon discontinue. Dans l'est, entre le pont du 18 e siècle et le castrum s'étend une zone, au droit del'abbaye de Saint-Julien, pour laquelle les informations font défaut. On ignore si cette zone est plutôt stable comme la partie est (au droit du castrum) ou sujette à un gain dans le fleuve. la discussion ci-dessous est limitée à la moitié ouest de la ville. phases dans la moitié ouest Trois ou quatre moments sont distingués qui forment, sur le terrain, pour la seule moitié ouest de la ville, un éventail d'ouest en est, et de l'antiquité au 18 e -19 e siècle. On observe : - au sud-ouest (site 8 et 06), une centaine de mètres d'aménagement de l'antiquité puis la berge jusqu'au 8 e -9 e siècle, puis un gain dans le lit du fleuve à partir du 9 e -10 e siècle. Il n'est pas exclu que dans l'antiquité, on ait eu là un port. - au centre en remontant vers le nord, le relais pris pour les 10 e -14 e siècle, par les gains de Saint- Martin et de Saint-Julien. - enfin à l'est le gain n'est tangible qu'à la fin du 17 e siècle. Cet éventail correspond au primat des sources qui se modifie lui aussi : archéologiques, puis écrites, puis planimétriques. C'est reconnaître que le rythme de l'évolution tel qu'il ressort du schéma ci-dessus risque fort de refléter celui des sources. Gain naturel et gain artificiel - Il est acquis que dans l'ouest, la rive du fleuve se trouvait, il y a 2000 ans mais après aménagement, 150 mètres à l'intérieur des terres par rapport à l'actuel. La mise en place du mur de soutènement du site 8 se concrétise par un apport de remblai de sable destiné à créer une terrasse au sud du mur. Peutêtre correspond-elle à un aménagement portuaire. L'avancée dans le fleuve est manifeste à cette occasion mais elle ne peut être évaluée entre quelques mètres et une à deux dizaines de mètres, au vu de l'épaisseur des remblais sur la grève. Il en va de même sur le site 06, immédiatement à l'est. Par ailleurs, à l'origine, le site 1 (Fig. 1), quoique légèrement plus au nord que le site 8 se trouvait dans les terres, ce qui signifie l'existence d'une courbure du trait de rive il y a 2000 ans. Cette disposition générale semble accréditer l'existence de la liaison Loire-Cher par ce qui est connu bien plus tard sous le nom de Ruau Sainte-Anne. De nombreux problèmes restent à élucider dans cette zone, pour la ville antique, notamment l''éventualité d'installations portuaires dont les sites 8 et 06 constitueraient la limite sud. - Toujours dans l'ouest, un gain dans le fleuve apparaît au 9 e -10 e siècle sur le site 8, alors que Saint- Julien ouest est réorganisé sur des terrains qui sont pour partie dans l'ancien lit du fleuve (site 06) en 943. On ne dispose pas d'explication pour ce gain dont on constate la réalité. Il semble être effectué rapidement, en quelques décennies, vers 900, puis être stabilisé puisque la maison du site 4, au 11 e siècle, est bâtie sur la grève. - Au centre, (Bourg Saint-Père) au 10 e siècle, le trait de rive se trouvait en retrait d'une centaine de mètres par rapport à la rive actuelle, sans que l'on sache où il se trouvait il y a 2000 ans, sinon au nord du site 1. On peut donc considérer un gain d'une cinquantaine de mètres en un siècle, en comparant ouest et centre entre le 9 e et le 10 e siècle. - Toujours au centre, entre le 10 e et le 11 e siècle, un gain de l'ordre de 80 mètres est attesté (fief du cellerier de Saint-Martin), matérialisé par le système défensif du 14 e siècle. Les travaux de défense contre le fleuve à partir du Bas Moyen Age semblent avoir figé la situation jusqu'à la construction de l'enceinte du 17 e siècle. Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

35 Les modifications du trait de la rive gauche de la Loire dans l'ouest de Tours (H.Galinié, X. Rodier) Conclusion : des gains sont attestés pour l'ouest de la ville entre le 9 e et le 11 e siècle La progression de la ville dans le fleuve s'effectue de deux façons : - soit par des gains minimes, comme cela semble être le cas au 1 er siècle, à l'ouest comme à l'est dela ville, puis aux 17 e et au 18 e siècles au centre, à l'occasion de travaux d'urbanisme. Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

36 Les modifications du trait de la rive gauche de la Loire dans l'ouest de Tours (H.Galinié, X. Rodier) - soit par un gain de l'ordre de 150 à 200 mètres, localisé à l'ouest de la ville. Ces gains sont ceux qui ont laissé des vestiges et dont on peut donc retracer l'histoire. D'autres ont pu n'être que temporaires et ne pas marquer le tissu urbain. Pour l'instant, il est impossible d'interpréter les travaux de l'époque gallo-romaine car les références au centre font défaut. Pour le dernier millénaire, les gains ont été réalisés d'abord et pour l'essentiel en une longue phase qui s'étend du 9 e siècle au milieu du 11 e siècle, donc sur à peu près deux siècles pour les 150 à 200 mètres de l'ouest. Ce phénomène est d'ordre socio-spatial. Quoique limité à quelques hectares seulement, il correspond à un accroissement sensible de la superficie de la partie ouest de Tours, au Moyen Age, la ville de Châteauneuf (Galinié 2001, Galinié et al. à paraître). Il résulte de l'activité qui est concentrée dans cette zone ouverte vers l'extérieur, comme en témoigne l'organisation de la structure viaire commandée par le fleuve. Bibliographie Bisson D Villes en représentation en Région Centre, Tours. Carcaud N. et al Géoarchéologie de la Loire moyenne et de ses marges (région centre). DRAC- SRA Centre, Orléans, Rapport annuel n 1. Chevalier B Tours, ville royale, Paris. Dubant D Le site de Tours du Ier siècle au milieu du XIXe siècle, de l'adoption à l'astreinte, thèse de doctorat, ms, Université de Tours. Chouquer L'étude des paysages, Paris. Galinié H. et al Fouilles archéologiques sur le site du Château de Tours ( ), rapport préliminaire, Bull. de la Soc. Archéol. de Touraine 38, Galinié H. et al Fouilles archéologiques à Tours, 1980, rapport préliminaire, Bull. de la Soc. Archéol. de Touraine 39, Galinié H La notion de territoire à Tours aux IXe et Xe siècles, Recherches sur Tours 1, Tours, Galinié H Genèse du paysage urbain, dans B. Chevalier Histoire de Tours, Toulouse, Galinié H Reflections on Early Medieval Tours ( AD),Actes du colloque Rebirth of Towns in the West, (Londres 1986) CBA Research Report 68, Londres, Galinié et al à paraître. Galinié H., Chouquer G., Rodier X., Chareille P. à paraître. Téotolon, doyen de Saint-Martin, évêque de Tours au Xe siècle, et urbaniste?, in Pour une approche morphologique des espaces urbanisés, travaux du GDR Société et cadres de vie au Moyen Age, MSH Villes et territoires, Tours. Galinié La Cité de Tours et Châteauneuf, ville double et double ville, autrement, in Tours, série Villes. Lorans E Le fief de Saint-Julien de Tours au Moyen-Age, recherches de topographie et d'histoire urbaines, m.m. d'histoire, université de Tours, Petitfrère C Une ville mise en scène : Tours d'après l'iconographie générale des XVIe- XVIIIe siècles in Images et imaginaires de la ville à l'époque moderne, collection Sciences de la Ville, MSV,Tours Randoin B Fouilles archéologiques à Tours, Rapport préliminaire, Bull. de la Soc. Archéol. de Touraine 40, Rocque G L'équipement céramique d'une maison médiévale de Tours (site 4) mm Histoire univ.tours. Rodier X X. Rodier, Le système d'information géographique TOTOPI :TOpographie de TOurs Pré-Industriel, Les petits cahiers d'anatole, n 4, 22/12/2000, signes, 5 fig., Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

37 La communauté urbaine de Tours et la Loire à la fin du Moyen Age (Ch. Bouquet) LA COMMUNAUTE URBAINE DE TOURS ET LA LOIRE A LA FIN DU MOYEN AGE Ch. BOUQUET UMR 6575, Archéologie et territoires, 2 Place Anatole France Tours Résumé Les moulins, les écluses, les pêcheries, les ports, les turcies et les bateis sont autant de témoignages d'une occupation intense de la Loire par l'homme médiéval à la fin du Moyen Age. Cet aménagement de la Loire semble être cependant issu d'une relation complexe et dualiste entre un fleuve impétueux et capricieux et une communauté urbaine entreprenante dans la réalisation de ces grands travaux dans le cours même du fleuve. Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

38 La communauté urbaine de Tours et la Loire à la fin du Moyen Age (Ch. Bouquet) Introduction La Loire à la fin du Moyen Age a-t-elle été considérée par l'homme médiéval comme un espace privilégié dans lequel il aurait, sans relâche, construit et entretenu divers et multiples aménagements dans un seul but, celui d'une exploitation rigoureuse des ressources que pouvait lui procurer ce fleuve? Si l'on en juge par les sources écrites issues des comptes de la communauté urbaine de Tours durant la deuxième moitié du 14 e siècle et tout au long du 15 e siècle, la Loire apparaît incontestablement comme un espace privilégié ou du moins s'avère être considérée comme tel. Les pêcheries et les moulins, les ports, les écluses, les batéis et les ponts sont autant d'aménagements révélant cette réelle volonté de la part de la communauté urbaine d'intégrer le fleuve comme une entité à part entière dans son environnement quotidien. Fleuve instable, la Loire pourtant reste difficilement maîtrisable: le cheminement du courant alternant d'une rive à l'autre, les étiages prononcés et les crues empêchent la réalisation d'un aménagement durable du cours de la Loire. Les comptes urbains témoignent de cet état de fait durant les périodes de "crises" liées aux intempéries où la communauté doit entreprendre dans l'urgence des grands travaux de construction ou de réaménagement d'ouvrages de protection contre les crues appelés turcies. L'aménagement de la Loire à la fin du Moyen Age ne pourrait-il donc être issu d'une relation complexe et dualiste entre une communauté urbaine entreprenante et un fleuve rétroagissant continuellement à l'action volontariste de l'homme médiéval? Un encombrement du lit mineur de la Loire Moyenne à la fin du Moyen Age Dans un souci de contrôle et d'exploitation du courant, les sociétés médiévales ont fortement occupé la Loire et ses affluents par divers et nombreux aménagements. Un effort d'imagination est alors nécessaire pour tenter de percevoir cette occupation fluviale aujourd'hui disparue et dont les aménagements principaux : ports, pêcheries, écluses, moulins et digues encombraient l'espace qui, de surcroît, était partagé par de nombreux acteurs dont les intérêts, bien souvent incompatibles, engendraient de nombreux conflits. Les lettres patentes, sans cesse renouvelées, des rois de France condamnant fermement cet encombrement de la Loire et de ses affluents, sont les témoins de l'importance que tenait la place des relations des sociétés avec le fleuve à la fin du Moyen Age. Ainsi Charles VII délivre-t-il à Tours, le 5 octobre 1433, une lettre patente ordonnant de faire "oster, couper, abattre et démolir tous empeschemens" tels que "brayes, combres moulins, portes, escluses, pescheries, bois et hayes" qui empêchent les "Marchands fréquentant la Loire" de naviguer sans risques et de mener à bon port leurs marchandises (notamment le sel qui devait approvisionner les greniers établis dans différentes villes de la Loire)(Mantelier 1987, texte n 295). A la fin du Moyen Age, pour la Loire Moyenne aux environs de la ville de Tours, les sources écrites et notamment les comptes urbains de la ville attestent la construction de ces différentes structures dans le cours même de la Loire. Les aménagements du lit mineur à Tours : les écluses, pêcheries et moulins L'étude menée à partir des sources écrites sur les écluses, les pêcheries et les moulins du lit mineur à Tours (Durrenberger 1999) n'a pu mettre en évidence les techniques et la nature des constructions de ces aménagements. En revanche, la mention d'écluse dont le terme, à travers les textes, semble définir des fonctions multiples sur une même portion du cours de Loire, atteste de leur utilisation à Tours dès le 10e-11e siècle, au plus tard au 12e siècle. Une évolution probable de la fonctionnalité des écluses pourrait être avancée : liées à la meunerie, les écluses délaisseraient, au 14e siècle, les moulins pour laisser place à une activité piscicole (Durrenberger 1999, p.94). Trois zones d'aménagement des écluses ont pu être dégagées : Saint-Julien dès le 10e-11e siècle, Marmoutier dès le 12e siècle, Saint- Cyr/Vaugenois au 14e-15e siècle. (Durrenberger 1999, p.58). Outre dans le lit mineur de la Loire, des pêcheries se localisent également dans les fossés et les douves de la ville et de ses environs. Octroyées à la communauté urbaine par le roi, ces pêcheries sont Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

39 La communauté urbaine de Tours et la Loire à la fin du Moyen Age (Ch. Bouquet) affermées annuellement dès le 14e siècle et contribuent à alimenter les revenus de la communauté urbaine de Tours. C'est ainsi que "Jehan Mouette, fermier de la pescherie de touz les fossés et doves (sic) qui sont entour et à l'environ des murs et rerefoussez de ladite ville de Tours, à lui affermée pour ledit an" doit verser, "C solz tournois" à la ville (registre CC 19, f 5v, chapitre des recettes de l'année comptable du 1er novembre 1421 au dernier jour d'octobre Archives municipales de Tours ). Les moulins encombrent également le lit de la Loire. Localisés à la fin du 14e siècle aux grands ponts de Tours, sur une même portion de chaussée appelée dans les textes "rue des moulins" (Boisseuil 1992, p.26), les moulins "penduz" fixés aux ponts semblent laisser la place à des moulins construits sur bateau et attachés aux piles des ponts. Les comptes urbains du 15e siècle mentionnent régulièrement le versement d'une somme à la ville par les meuniers pour l'attache de leur moulin aux grands ponts de Loire. C'est ainsi que Jehan de Lorenne, Guillaume de Metayer, Perrin Guillot, Perrin Rié, Estienne Jouet dit "Charron" payent chacun au receveur de la ville de Tours un droit "pour l'at[t]ache de leur mo[u]lins" durant l'année comptable comprise entre le 1er novembre 1429 et le dernier jour d'octobre 1430 (CC R. 24, f. 147v, Archives municipales de Tours). Les ports Si l'on en juge par les mentions recensées dans les sources écrites, les aménagements portuaires à Tours durant le Bas Moyen Age se multiplient. Sur une vingtaine de ports comptabilisés, trois seulement, "La Coherie", "Foire-le-Roy" et "L'Ospitau", semblent avoir fait l'objet de la part de la communauté urbaine de Tours d'un aménagement volontaire et organisé en fonction des contraintes de la Loire. Ainsi le port de "la Coherie", situé à proximité du courant sur la rive gauche du fleuve, est renforcé sur les berges par un bateis construit à partir d'un "pilotage" de pieux servant de base à la construction d'un ponton de bois recouvert d'une assise pavée. Les travaux engagés découleraient par conséquent de l'aménagement de la rive qui, surélevée, protégeait la zone portuaire des crues mais limitait les possibilités d'échouage. Cette intervention des élus coïnciderait donc avec une entreprise de raffermissement des berges de la rive gauche au niveau de Tours et qui débuterait vraisemblablement dans la seconde moitié du XIVe siècle (Durrenberger 1999, p.49 et p.94). Si les comptes urbains témoignent de l'activité de ces trois ports considérés comme les ports principaux de la ville de Tours et qui sont sans doute liés au commerce fluvial, les autres zones portuaires interprétées comme de simples "ports d'échouages" (Dubant 1993, t.1, p ) sans structures particulières, sont régulièrement fréquentées par les nautoniers qui approvisionnent la ville en matériaux de construction. En relation directe avec la navigation sur la rivière du Cher, l'implantation de ces ports semble fortement conditionnée, d'une part, par la mauvaise communication entre le Cher et la Loire à Tours effectuée par un réseau de boires (anciens bras d'eau de la Loire réalimentés temporairement) et un chenal actif appelé le ruau Sainte-Anne et, d'autre part, par la localisation des grand chantiers orchestrés par la ville. Cet approvisionnement de la ville par eau reste extrêmement lié avec les aléas du réseau hydrologique. En période d'étiage, le ruau Sainte-Anne ne permet bien souvent ni une navigation active, ni le transport par bateau de matériaux lourds. Ainsi les "voicturiers par eaue" ou "noctonniers" sont-ils obligés d'abandonner leur marchandises à la limite de la voie non navigable et de passer le relais aux "voicturiers par terre" qui par charrettes acheminent les matériaux à Tours. Le port de la "Saulaye Ronde" ou bien le "port du Fort des Boires" sont attestés périodiquement comme lieux de transbordement des matériaux. Le recensement systématique des mandements concernant l'approvisionnement en pierre de construction à partir des comptes de la ville de Tours, de 1385 à 1485, devrait permettre de pousser l'analyse et de déterminer l'existence ou non d'un réseau d'approvisionnement principalement axé sur la rivière du Cher. Les ouvrages de dérivation : les bateis. Le bateis, orthographié différemment dans les comptes de la ville de Tours (bateis, bateiz, bateys, batis, batteis, batteys...), est un ouvrage de pieux battus en site aquatique destiné à faire protection contre les eaux. Il peut servir de base à la réalisation d'un batardeau (digue provisoire établie pour mettre à sec un endroit où l'on veut bâtir), d'une digue, d'un argeau (enceinte de pieux remplie de moellons, destinés à protéger les piles d'un pont des affouillements et du flot), d'un quai ou d'une berge de fossé ou de rivière (Boisseuil 1992, p.82). Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

40 La communauté urbaine de Tours et la Loire à la fin du Moyen Age (Ch. Bouquet) Le bateis, de même composition que la turcie, semble apparaître à la fin du XIVe siècle. C'est une structure néanmoins plus résistante et renforcée par certains matériaux comme le bois, qui apparaît être le squelette du "bateis", ou bien encore la pierre. Le "bateis" est destiné à être en contact direct avec le fleuve et, si son rôle de renforcement de berge et d'argeau" est attesté par les sources écrites, le "bateis" a comme fonction principale le rôle d'épi de dérivation (Audibert 1998, p.61). Les différentes études menées sur les aménagements de la Loire à Tours (Audibert 1998, Durrenberger 1999, Vannier 1999, Lagadic 1999) ont permis de mettre en évidence ce rôle de dérivation du cours de la Loire par ce type d'ouvrage. En effet, dès la fin du 14e siècle, les comptes urbains de Tours attestent la volonté de la communauté urbaine de dévier la Loire pour faire passer son cours devant les murailles de la ville dans un but défensif puis, la guerre de Cent Ans terminée, dans un souci sanitaire et économique. Appelé "grand bateis", l'ouvrage construit en amont de Tours en face de la "Madeleine" devait séparer le lit de la Loire jusqu'à la hauteur des grands ponts de Loire et assurer la jonction des ponts avec l'île Saint Jacques située plus en aval. Un siècle a été nécessaire pour passer à la concrétisation du projet par la construction d'une succession de bateis reliés entre-eux à partir des îles de la Loire, et considérés comme des points d'ancrage à la construction de l'ouvrage (Lagadic 1999, p.177). Les nombreux mandements de paiement attestés dans les comptes permettent de mettre en évidence, même si elle reste à affiner, une chronologie sommaire de la construction "du grand bateis". Une première phase est visible, durant laquelle le projet semble être pensé par la communauté urbaine de Tours, mais reste difficile à mettre en place (1386/1425). Une seconde phase (1425/1447) est caractérisée par la période de la construction du "grand bateis" par petits tronçons. Cette période de construction de l'ouvrage précède un conflit entre Marmoutier et la ville de Tours au sujet de la construction d'une autre digue réalisée par les religieux. Durant la phase suivante (1447/1479), la communauté urbaine consolide, répare et achève le grand bateis avant d'engager de nouveaux travaux au "grand bateis" après l'échec du projet d'agrandissement de la ville de Tours "devers la Loire", envisagé par le Roi Louis XI (1479/1498). Le projet de construction d'un grand bateis pour dévier le cours de la Loire devant la ville peut se présenter selon la chronologie suivante : 1386 : arpentage des grèves de la Loire ordonné par les élus de la ville de Tours et réalisé par des nautoniers, pour faire venir le cours de la Loire devant le château 1417 : le projet de construction du grand bateis est décidé et les premiers travaux engagés à la hauteur de la Madeleine, en amont de Tours : les travaux sont interrompus par la Duchesse d'alençon : reprise des travaux près de la Madeleine et poursuite de la construction du "grand bateis" de Marmoutier jusqu'à l'île Audion 1439 : construction d'un bateis "au droit" de l'église de Saint-Pierre-des-Corps 1442 à 1444 : construction d'un bateis le long de l'île de Guillaume Goussart et poursuite des efforts de la construction de l'ouvrage à Saint-Pierre-des-Corps ; construction d'une bateis "au droit de la tour Saint Anthoine" entre 1445 et 1447 : construction d'un bateis à double rang de "paux" de Saint-Pierre-des- Corps à la tour Saint Anthoine. L'ouvrage se poursuit devant le château de Tours jusqu'aux grands ponts de Tours et en octobre 1446, l'île Saint Jacques est reliée au pont par une "chaussée réalisée à la façon d'une turcie" : conflit entre la communauté urbaine de Tours et Marmoutier à propos de leur digue qu'ils auraient construite à l'entrée d'une boire "au dessus de l'île d'emprès Maremoutiers" (appelée aussi "Belle île") pour protéger l'abbaye de la Loire. Les élus mettent en cause la construction de cette digue dans la rupture des ouvrages de protection de Saint Loup et l'inondation des Varennes durant cette période. Un procès durant l'été 1450 est engagé et Charles VII ordonne aux religieux Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

41 La communauté urbaine de Tours et la Loire à la fin du Moyen Age (Ch. Bouquet) de détruire leur bateis. Il semble que la mesure n'ait pas été appliquée puisqu'en 1480 il sera question de détruire à nouveau le bateis 1454 : réparation du bateis "entre les ponts de pierre des grands ponts de Loire et l'île Goussart" : construction d'un bateis pour "retourner" la rivière devant l'île d'estienne le Long" 1476/1481 : projet d'agrandissement de la ville de Tours. Ce projet est préparé dès 1476 et les premiers arpentages réalisés par ordre du roi en En 1479, les travaux sont engagés de novembre à décembre : il s'agit d'ouvrir une tranchée au niveau d'une boire devant Marmoutier pour y faire passer la Loire. En 1480, après une nouvelle inondation, le bateis des religieux est à nouveau mis en cause. Louis XI intervient et ordonne de faire détruire le bateis malgré la forte opposition des religieux (sentence d'excommunication lancée à l'encontre du Roi). Les travaux sont entrepris mais, le 28 septembre 1481, suite, semble-t-il, à des conditions climatiques particulièrement défavorables, Louis XI, par lettre patente, renonce au projet et ordonne la reconstruction des digues de Marmoutier / 1497, les élus font terminer le "grand bateis" de la "tour Saint-Anthoine à la bastille des grands ponts de Loire" reconstruit après l'échec du projet d'agrandissement de la ville de Tours. La communauté urbaine de Tours et les aménagements de protection contre les crues et les inondations les turcies et les dos d'âne Afin de lutter contre les inondations de la Loire et du Cher et de protéger les Varennes de Tours, la communauté urbaine construit des digues, appelées turcies dans les textes, tant en amont qu'en aval de la ville, le long de la Loire de Montlouis au Bec du Cher ainsi que sur les rives du Cher. Le dictionnaire de Furetière au 17e siècle définit la turcie comme "une levée de terre ou de pierre, en forme de quay ou de digue, pour empêcher les inondations d'une rivière". La "levée", quant-à elle, serait une "eslévation de terre, de pierres ou d'autres matériaux en forme de quay, de digue, de chaussée pour arrester des eaux, des inondations. On le dit particulièrement des levées de la rivière de Loire. On fait plusieurs lieues de chemin sur la levée. (...). Ce mot vient de levata, qui (...) [qui signifie] chaussée, levée de terre". Les études menées sur les aménagements de la Loire (Audibert 1998, Vannier 1999) apportent de nouveaux renseignements sur cet ouvrage. Formées d'un squelette de pieux de bois, d'un remplissage de terre, de sablon, de fumier, voire de fagots et renforcées par une plantation de saules dont le but est d'assurer la stabilité des berges et de freiner la vitesse des crues, les turcies se différencient des bateis par leur mode de construction et leurs fonctions. Il semble que la différence fondamentale entre le bateis et la turcie résulte de la place moins conséquente de matériaux solides (Audibert 1998, p.56), de l'emploi de pièces métalliques dans la construction de la structure (Vannier 1999, p.49) et d'une construction moins résistante et moins complexe. Il semble cependant que les sociétés urbaines de Tours aient entrepris, dès la deuxième moitié du 14e siècle une "politique" de consolidation des turcies et dont l'objectif serait à mettre en relation avec la volonté de créer une structure insubmersible, si l'on en juge par les mentions de réhaussement de ces ouvrages par rapport à ceux construits antérieurement. Il convient donc de nuancer la définition de la turcie médiévale de Roger Dion qui était "une digue submersible faisant office d'un barrage noyé" et dont le rôle initial était seulement de freiner le courant de la crue sans empêcher les eaux de se répandre au-delà" (Audibert 1998, p.46). Outre ces turcies, il est fait mention également de "dos d'âne". Selon les études menées, ils s'apparenteraient aux turcies sur le plan de leur composition, mais à une échelle plus réduite. Ce seraient de petites digues qui ne se juxtaposeraient pas aux turcies mais les prolongeraient. Ces Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

42 La communauté urbaine de Tours et la Loire à la fin du Moyen Age (Ch. Bouquet) structures de terre semblent être en relation directe avec les fossés de la ville de Tours et s'apparentent à des digues de défense contre les inondations en complément des turcies (Audibert 1998, p et Vannier 1999, p.33) Crues, inondations et embâcles à Tours au 14e-15e siècle La recherche a consisté, à partir des sources écrites des 14e-15e siècles que sont les comptes et les registres de la communauté urbaine de Tours, dans un premier temps, à recenser les périodes durant lesquelles les embâcles et l'augmentation du débit hydrologique de la Loire et du Cher étaient telles qu'elles ont marqué les esprits et les mémoires des contemporains de cette période et, dans un deuxième temps, à déterminer différentes phases de "crises" liées aux intempéries. Ces "crises" qui correspondent à des laps de temps plus ou moins longs peuvent être perceptibles : - par le caractère ponctuel ou par la récurrence des aléas climatiques et/ou hydrologiques : - par la mobilisation de la communauté urbaine pour éviter les destructions que les débordements violents des eaux, les embâcles et les débâcles pouvaient occasionner, pour parer rapidement à la reconstruction des ouvrages nécessaires à la protection contre les intempéries (turcies et bateis) ou encore pour reconstruire les ouvrages indispensables afin d'assurer la communication de la ville de Tours avec l'extérieur (ponts et chaussées). Le choix chronologique présenté ( ) résulte tant de l'état d'avancement du traitement des données historiques issues des sources écrites que de l'émergence de "crises" nettement perceptibles à travers les textes durant cette période. Depuis l'année du premier compte de la communauté urbaine de Tours datant de 1358, c'est, semble-t-il, durant l'anné 1385 que la communauté urbaine, pour la première fois, prend des décisions importantes dont le but est de parer aux inondations de la Loire et du Cher. De même, à la fin du premier quart du 15e siècle, les mentions concernant la montée de la Loire et/ou du Cher se multiplient et la mémoire collective laisse des traces écrites de ces intempéries qui semblent marquer profondément une population impuissante à réagir. Cinq "crises" liées aux intempéries ont pu être ainsi décelées durant les année Une première "crise" correspond aux années durant lesquelles la communauté urbaine de Tours doit faire face à la violence des crues qui ravagent les Varennes de Tours. Cette "crise" est perceptible par la réorganisation de la communauté urbaine : les élus et le receveur représentants de la dite communauté pour une année sont nommés prématurément en août 1385 et non au jour de la Toussaint comme il est d'accoutumée. Face à l'urgence des violentes crues qui ont ravagé les aménagements des environs de la ville de Tours, ils sont chargés, outre de la réparation des fortifications et des ponts de la ville comme ils en ont ordinairement la tâche, de la gestion des turcies. Ces turcies assimilables à des monticules sont construites principalement en terre et en bordure du cours de la Loire et du Cher. Elevés pour canaliser les cours du fleuve et du Cher et protéger la ville de Tours et les Varennes de l'afflux des eaux, ces ouvrages deviennent, au même titre que l'enceinte et les ponts, des aménagements privilégiés et considérés comme essentiels que la communauté urbaine doit réparer, construire ou reconstruire. Outre la réorganisation de la communauté urbaine de Tours, c'est la levée d'une taille exceptionnelle accordée par l'autorité royale durant trois années ( ) pour la réparation des ponts et des turcies de la ville de Tours et de ses environs qui révèle l'état d'urgence dans lequel se trouve la communauté urbaine de Tours face aux débordements de la Loire et du Cher. Cette taille, appelée "arpentaiges" dans les textes, consiste à percevoir deux sous tournois pour chaque arpent de terre, de pré, de vigne ou de saulaie situé dans une zone bien délimitée entre Montlouis et le Bec du Cher, c'est à dire dans les Hautes et Basses Varennes de Tours. Sont ainsi taxés les propriétaires laïcs aussi bien que les ecclésiastiques. Enfin, l'entreprise de grands travaux de réparation, de réfection et surtout de reconstruction des turcies de la ville de Tours et de ses environs suivant de nouvelles normes témoigne de la volonté de la communauté de Tours à se protéger de la Loire et du Cher et ce, dès la fin du 14e siècle. Les travaux durent trois années et se concentrent dans des zones bien spécifiques, des zones sensibles où la Loire Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

43 La communauté urbaine de Tours et la Loire à la fin du Moyen Age (Ch. Bouquet) et le Cher, régulièrement, viennent provoquer des affouillements et percer des brèches dans les ouvrages, laissant ainsi la voie libre à leur cours pour envahir les Hautes et Basses Varennes de Tours. Les travaux se localisent ainsi : le long de la rivière du Cher, dans les Basses Varennes où de nombreux tronçons de turcies font l'objet de travaux dès le mois de juin 1386 et ce, jusqu'en Ces turcies, difficilement localisables avec précision, sont reconstruites selon de nouvelles normes : la largeur à la base de la turcie varie d'une toise et demie (valeur la plus courante) à deux toises selon les lieux alors que son sommet quant à lui varie d'une demi-toise à quatre pieds (valeur la plus courante) voire dans certains cas une toise. le long de la Loire où des tronçons de turcies font l'objet de réparations et de renforcement par l'apport supplémentaire de terre, par le réhaussement des ouvrages (selon les lieux, d'un à sept pieds), par la construction de "bateis" de pieux ou bien encore par la plantation de saules. En amont de Tours par exemple, deux zones sensibles à Conneil et au lieu appelé la "Quarte" font l'objet de tels travaux alors qu'en aval, c'est la turcie des environs de "Brethenay" qui porte toutes les attentions des ouvriers de 1386 à 1388 (construction d'un "bateis" de pieux rempli de fagots, élargissement et réhaussement de l'ouvrage et construction d'un nouveau tronçon). aux alentours de la ville, le ruau Sainte-Anne réalisant la jonction entre la Loire et le Cher à l'ouest du rempart de la ville de Tours est délimité par une turcie qui protège tant la ville que les Varennes. Dès 1386, la communauté urbaine décide de réparer cette turcie pour finalement entreprendre de grands travaux de reconstruction en La nouvelle turcie qui semble terminée en août de la même année est "maçonnée, battue et foullée". Elle mesure environ trente-huit toises de long, quatre toises de large à sa base, deux toises de large à son sommet et a été réhaussée d'un pied. De même, l'enceinte de la ville de Tours, implantée le long de la Loire, est également protégée en 1388 au niveau la porte de "l'ospital" par la construction d'un "bateis" de pieux. Si les sources écrites ne peuvent laisser entrevoir une continuité dans la réalisation de grands travaux de protection contre les inondations, en revanche, elles témoignent de la montée et de la force des eaux durant certaines années. Au cours de l'année 1389, certaines interventions ponctuelles sont attestées aux ponts de Vençay et de Saint-Sauveur, au lieu-dit "la Quarte" en allant vers Montlouis ou bien encore à Conneuil. En 1390, 1392 et 1395, la montée des eaux semble rester un problème majeur à tel point que, durant l'année 1395, une somme est allouée par les élus à Martin Langlois "receveur des deniers et revenus appartenant à la réparation des turcies" afin de réparer les turcies. En octobre 1396, une nouvelle alerte sérieuse mobilise à nouveau la communauté urbaine de Tours : "les grandes inondations des eaux" sont "environ la dite ville". Pour faire face à l'urgence et à la peur des dommages que pourraient exercer les crues du fleuve sur les ponts et les turcies, le lieutenant du bailli à Tours nomme deux élus et un receveur pour deux mois (de novembre à décembre 1396) avant même que les gens d'eglise, bourgeois et habitants ne se réunissent comme d'accoutumée pour cet objet. Ils sont chargés d'une part, de veiller à ce que les ouvriers fassent le travail nécessaire pour que les crues ne causent aucun dommage irréversible et d'autre part, de distribuer convenablement les deniers de la "recette" de la communauté urbaine pour la réalisation de ces travaux. Durant trois mois, d'octobre à décembre, les travaux se focalisent outre à Conneuil, "la Quarte", et au ruau Sainte Anne, au bout des grands ponts de Loire où un "bateis" de pieux comblé de terre, de pierres et de fagots est construit afin d'obstruer une brèche faite par la crue de la Loire. Les sources écrites de l'extrême fin du 14e siècle et du tout début du 15e siècle restent muettes. Il semble cependant qu'une troisième "crise" puisse être déterminée entre 1402 et 1405 (une chronologie fine ne pouvant être réalisée) durant laquelle une grande tempête et "désordonnance" du temps caractérisé par un hiver rigoureux (forte gelée et "grande abondance des pluies et des eaux") détruisent les blés, les vignes, les prés et les foins des Varennes. La détresse est telle que le roi autorise en avril 1405 que les habitants de Tours et de ses environs qui ont perdu leurs biens durant les inondations soient dispensés de "l'aide" qui leur est demandée par le roi pour le fait de la guerre. Une quatrième "crise" d'ordre climatique durant l'hiver mobilise de nouveau la communauté urbaine. La dernière semaine de janvier, l'alerte est donnée. Par prévention contre les Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

44 La communauté urbaine de Tours et la Loire à la fin du Moyen Age (Ch. Bouquet) dégâts que pourraient occasionner les glaces qui descendent le cours de la Loire et du Cher, les élus décident de faire ôter les planches des ponts et de faire délivrer la voie de dessous les ponts de Saint- Sauveur. Malgré des interventions ponctuelles, les ponts sont détruits par les "glaces, les gelées et les inondations" (les grands ponts de Loire, les ponts de Vançay et de Sainte-Anne) auxquelles s'ajoute parfois l'action du vent (les ponts de Vançay). De nouveau, une taxe sur la ville de Tours et sa banlieue est levée pour assurer le financement des réparations liées aux dégâts des cours de la Loire et du Cher. Ecclésiastiques et laïcs sont soumis à cette taxe, à l'exception des habitants demeurant dans les Varennes et qui ont perdu leurs biens. Durant les dix années qui suivent, les comptes urbains de la ville de Tours laissent difficilement entrevoir de véritables "crises" liées aux intempéries, à l'exception de quelques alertes de crue et de montée des eaux signalées en 1409?,1410 et Pourtant en octobre 1410, le bilan paraît désastreux si l'on en juge par une plainte de la communauté urbaine de Tours déposée auprès du roi. La ville est "demeurée désemparée et les murs, chaussées, ponts et turcies dicelle et d'environ rompuz et desmoliz en plusieurs et divers lieux", la réparation de ces ouvrages ayant été empêchée par l'absence de financement à cause essentiellement de certains receveurs des années précédentes qui n'ont pas rendu à la communauté les restes de leurs comptes. Afin de pallier à ce méfait, quatre personnes sont chargées, par décision royale, de vérifier les comptes des receveurs des années passées et de faire restituer les sommes dues à la ville. La fin du premier quart du 15e siècle est à nouveau sujette à de fortes intempéries. De 1420 à1425, la communauté urbaine de Tours concentre ses efforts sur des interventions ponctuelles de protection contre l'action des crues et des glaces : - comblement des fosses par où dérivait le cours de Loire dans les Varennes (décembre 1421) - déplacement des matériaux de construction des zones susceptibles d'être recouvertes par les eaux à l'intérieur de l'enceinte de la ville (1421) - dégagement des voies de dessous les ponts de Saint-Sauveur prises par les glaces qui descendent du Cher (janvier 1423) - chargement à l'extrémité des ponts de bois des grands ponts de Loire par une grande quantité de pierres et de sablon pour résister à la force des glaces (février 1423) - construction d'un mur de pierre au bout des ponts de Sainte-Anne pour soutenir les "traisnes" du pont et éviter que l'eau "lorsqu'elle est grande" ne provoque des affouillements et ne fasse tomber le pont (août à octobre 1424) - construction d'un "bateis" de pieux au long du talus du fossé de la Coherie pour protéger le fossé de l'eau lorsqu'elle croît (septembre 1425). Malgré l'intervention de la communauté urbaine de la ville de Tours, la répétition régulière des inondations durant les années , associée parfois à des hivers rigoureux (embâcle de la Loire et du Cher), entraîne la destruction des ponts notamment ceux des grands ponts de sur Loire (janvier 1421; mai 1421? ; février 1423) et de Sainte-Anne (hiver ) et des inondations de la Loire ou du Cher dans les Varennes (octobre-novembre 1421 ; septembre 1423 ; janvier 1424 ; hiver 1425). L'étude réalisée à partir des registres de comptes urbains de la communauté urbaine (CC R. n 8 à 22 - archives municipales de Tours) et d'un compte spécial de l'année (CC 1 boite - archives municipales de Tours) a donc permis de recenser cinq "crises" liées aux intempéries durant la période couvrant le dernier quart du14e siècle et le premier quart du 15e siècle. Quatre crises, dont deux de longue durée (quatre à cinq années) et deux de courte durée (un hiver), se caractérisent, semble-t-il, à partir des informations historiques issues des textes médiévaux, par une forte recrudescence du débit de la Loire et du Cher (celles des années et de l'hiver 1396) alors que les "crises" de l'hiver et des années se traduisent par l'augmentation du débit hydrologique associée à des hivers rigoureux durant lesquels embâcles et débâcles provoquent la destruction des ouvrages de la ville. Il semblerait donc que la communauté urbaine de Tours doive faire face, outre aux inondations de la fin du 14e siècle, à des hivers particulièrement rudes, perceptibles dès les premières années du 15e siècle et révélés par la "crise" de dont les bornes chronologiques restent floues. Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

45 La communauté urbaine de Tours et la Loire à la fin du Moyen Age (Ch. Bouquet) Des zones sensibles, le long de la Loire (à Conneuil, à la "Quarte" à "Brethenay"), le long du ruau Sainte-Anne et du Cher, font l'objet de grands travaux de réfection, de construction ou de reconstruction des ouvrages de protection (turcies et "bateis"). Malgré une mobilisation importante de la communauté urbaine de Tours, les conséquences des aléas de la Loire et du Cher durant ces "crises" provoquent des dégâts importants, tant sur les cultures dans les Varennes de Tours (détérioration des vignes et des blés) que sur les ouvrages de communication (ponts et chaussées). La difficulté à gérer, à financer et à entreprendre de grands ouvrages de protection (turcies et "bateis"), qui sont par ailleurs réalisés bien souvent dans l'urgence devant la menace des crues, semble accentuer l'incapacité de la communauté urbaine, qui n'était apparemment pas préparée, à se protéger correctement face à la menace des intempéries durant les années Perspectives Les études menées en 1998 et en 1999 dans le cadre de travaux universitaires à partir des comptes urbains de la communauté urbaine de Tours ont permis de montrer les relations complexes qu'entretenaient les sociétes urbaines avec la Loire. L'implantation des écluses, des pêcheries et des moulins dans le lit mineur de la Loire à Tours au 14e et au 15e siècle sont les témoins de cette occupation du fleuve aujourd'hui disparue. Les ouvrages divers et multiples, continuellement construits dans le lit de la Loire pour en détourner son cours (bateis de dérivation) ou bien encore sur les berges du fleuve pour se protéger des inondations (turcies) démontrent la volonté réelle de la communauté urbaine de Tours à maîtriser et à contrôler le fleuve pour leurs propres intérêts. Parallèlement à cette relation intime qui semble s'établir entre la communauté urbaine de Tours et la Loire à la fin du Moyen Age, les textes attestent des hivers particulièrement rigoureux qui obligent la ville de Tours à renforcer et à reconstruire ses défenses. Le réhaussement des turcies dès la fin du 14e siècle ne pourrait-il pas laisser penser que les levées, définies comme des ouvrages du 16e siècle, pourraient être de conception médiévale? La poursuite du dépouillement des comptes urbains et la confrontation des mandements de paiement concernant les ouvrages liés à la Loire durant les 14e et 15e siècle devraient ouvrir de nouvelles perspectives sur l'histoire des relations qu'entretenaient la ville de Tours avec la Loire. Bibliographie Sources Furetiere A Dictionnaire universel contenant généralement tous les mots français tant vieux que modernes et les termes de toutes les sciences et les arts, 1690 ; réé. Le Robert, Paris, Mantelier P Histoire de la communauté des marchands fréquentant la rivière de Loire et fleuves descendant en icelle, vol. 2, documents, rééd. et augmentée par Jeanson, Les travaux universitaires Audibert C Les digues de la Loire à la fin du Moyen Age, mémoire de maîtrise, Tours, Bouquet C Les villes et le fleuve histoire des relations entre les sociétés urbaines et la Loire Moyenne à la fin du Moyen Age, mémoire de D.E.A., Tours, Dubant D Le site de Tours du Ier au milieu du XIXe siècle de l'adoption à l'astreinte (étude historique), Thèse, Université de Tours, 3 tomes, Durrenberger 1999 Durrenberger V D'une rive à l'autre de la Loire (les aménagements du lit mineur de la Loire du 11e au 15e siècle dans les sources écrites, de Rochecorbon à Saint-Cyr), mémoire de maîtrise, Tours, Lagadic V Interaction Homme/Milieu : les îles de la Loire à Tours au 14e et 15e siècle, mémoire de maîtrise, Tours, Vannier R La ville de Tours et la Loire à la fin du Moyen Age d'après les registres des comptes municipaux, mémoire de maîtrise, Tours, Publications Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

46 La communauté urbaine de Tours et la Loire à la fin du Moyen Age (Ch. Bouquet) Boisseuil D Le pont sur la Loire à la fin du Moyen Age, in : Recherches sur Tours, n 6, 4e supp. à la R.A.C.F., Tours, Chevalier B La ville de Tours et la société tourangelle, , Université de Lille III, (service de reproduction de thèses), 2 vol., Dion R Le val de Loire: étude géographique régionale, rééd. de 1934, Lafitte Marseille, Dion R Histoire des levées de la Loire, Paris, Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

47 Le monastère de Saint-Martin de Tours et la Loire aux IX-Xe siècles (H. Noizet) LE CHAPITRE DE SAINT-MARTIN DE TOURS ET LA LOIRE AUX IX-X E SIECLES H. NOIZET UMR 6575, Archéologie et territoires, 2 Place Anatole France Tours helene.noizet@caramail.com Résumé Les diplômes carolingiens accordés au chapitre de Saint-Martin de Tours permettent de restituer le patrimoine de cette institution en Val de Loire. L insertion de ces possessions dans le réseau hydrographique du bassin-versant de la Loire apparaît de façon remarquable. Après avoir mis en relation cette caractéristique hydro-géographique avec les réseaux d approvisionnement mis en place par le chapitre, les relations entre le centre tourangeau et ses villae périphériques semblent d une nature plus complexe et profondément différente de celles que l on peut déceler entre les abbayes parisiennes de Saint-Germain-des-Prés et de Saint-Denis, et leurs possessions. Dans la mesure où celles-ci disposent d un environnement fluvial similaire (la vallée de la Seine pourrait jouer le même rôle que la vallée de la Loire), je propose d expliquer cette différence de pratique par la perception de ces milieux fluviaux qu en ont les différents acteurs, chanoines tourangeaux et moine parisiens. Abstract The carolingian deeds given to the chapter Saint-Martin of Tours allow to restore the property of Saint-Martin in the valley of Loire. The insertion of these possessions in the hydrographical net of the basin side of the Loire appears remarkably well. After connecting this hydro-geographical feature with the nets of supplying of the chapter, the relationships between the canonical center in Tours and its peripheric villae seem to be more complex and extremely different than the ones between Saint-Denis and Saint-Germain-des-Prés in Paris and their possessions. Insofar as these monasteries have a similar river environment (the valley of Seine could play the same role than the valley of Loire), I suggest that difference is linked to the perception of these river environments by the different actors, canons from Tours et monks from Paris. Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

48 Le monastère de Saint-Martin de Tours et la Loire aux IX-Xe siècles (H. Noizet) Introduction Dans le cadre d un mémoire de maîtrise, effectué sous la direction d Henri Galinié, et qui portait sur les relations entretenues par le chapitre de Saint-Martin de Tours avec ses possessions à l époque carolingienne, j avais posé le problème de la place de la Loire au sein du système d approvisionnement de la collégiale tourangelle. J aimerais dans le cadre de cette contribution reprendre cette question. Elle permet en effet, à travers l exemple san-martinien, d approfondir la réflexion sur le thème des interactions de l homme et du milieu. J ai examiné les sources afin de voir si oui ou non les chanoines tourangeaux s étaient intégrés dans le val de Loire par le biais de leur patrimoine aux IX e et X e siècles. Les principales sources dont nous disposons pour cette période sont les diplômes accordés par les souverains carolingiens pour confirmer les privilèges et possessions de ces établissements. Il convient de préciser que ces actes ont une mauvaise réputation chez les historiens qui les ont très peu étudiés jusqu ici. En effet, nous ne possédons plus que trois originaux sur les 83 diplômes recensés pour la période allant de 774 à 998 : tous les autres ne sont connus que par des copies réalisées essentiellement à l époque moderne par des érudits tels que Baluze et dom Housseau. Pour l état diplomatique des actes de Saint-Martin (actes sincères, remaniés ou faux), la très précieuse thèse de l Ecole des chartes de P. Gasnault (GASNAULT 1953) présente ces documents diplomatiques jusqu en 1150 et permet de distinguer les actes sincères de ceux qui sont ayant été interpolés ou remaniés. Organisation du patrimoine de Saint-Martin de Tours dans le Val de Loire Concernant Saint-Martin de Tours, nous disposons de neuf actes qui confirment la globalité des biens du chapitre du VIII e au X e siècle (MÜHLBACHER 1906 n 97 p. 139 ; Actes de Charles le Chauve n 239 p. 32 ; Actes d Eudes n 41 p. 177 ; Actes de Charles le Simple n XLVI, p. 102, n LXIII, p. 143, n CI, p. 239 ; Actes de Raoul n 15 p. 69 ; Actes de Louis IV, n IX, p. 29 ; Actes d Hugues Capet, RHGF, t X, n III, p. 552). La forme actuelle de certains de ces documents est certes remaniée, mais G. Tessier et P. Gasnault ont montré qu ils ont été réalisés à partir d actes sincères (TESSIER 1951 ; GASNAULT 1953, p ). On peut donc dresser un état relativement complet du patrimoine du monastère san-martinien car, d acte en acte, la liste des possessions s allonge. Si l abbaye intègre de nouveaux biens, on retrouve toujours les villae précédemment confirmées. Globalement, j ai pu repérer ainsi quatre grandes étapes dans l évolution du temporel san-martinien, dont je n évoque ici que la partie située en Val de Loire : - villae présentes dès l acte de Charlemagne du VIII e siècle : Ligueil, Ports, Saint-Epain, Courcay, Thuré, Châtenay, Blaslay, Doussay, Chenu, Mayet, Genneteil, Noyant, Suèvres, Précigné, Parcé-sur- Sarthe, Vouvray-sur-Loir. - villae présentes à partir de l acte de Charles le chauve, en 862 : Vouvray-sur-Loire, Restigné, Mosnes, Notre-Dame-d Oé, Antoigné, Curçay-sur-Dive, Léré, Marsat. - villae mentionnées à partir de [ ] dans l acte d Eudes et ceux de Charles le Simple : Martigny-sur-Loire, Bannay. - villae mentionnées à partir de [ ], dans les actes de Raoul et Louis IV d Outremer : Saint- Avertin avec Joué-les-Tours et Berthenay, Chétigné, Vulton (dans la banlieue de Saint-Aignan), Verrue, Rivière, Chantepie-sur-Cher. Outre les villae, l abbaye se fait restituer ou donner quelques manses. En général, les manses n apparaissent qu une seule fois dans les sources, c est-à-dire dans l acte de confirmation initial. Cela s explique peut-être par leur rattachement à une villa : ils sont en effet souvent présentés comme un point d ancrage qui constitue un prolongement, une extension d une villa appartenant à l abbaye. Je peux notamment citer un acte de Charles le Chauve qui attribue, vers 844/845, un demi factus, dans la villa de Rets, située au confluent de la Loire et de la Vienne (Actes de Charles le Chauve n 62, p. Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

49 Le monastère de Saint-Martin de Tours et la Loire aux IX-Xe siècles (H. Noizet) 177).. En 862, un autre acte de Charles le Chauve donne un manse situé près de la villa de Thuré, dans le pagus de Tours, dans la viguerie de Sonzay, au lieu-dit La Lande (Actes de Charles le Chauve, n 242, p. 48). En examinant la répartition géographique de ces villae à une échelle relativement grande, j ai remarqué que la très grande majorité des villae san-martiniennes se répartissent dans les vallées fluviales du bassin-versant de la Loire. Au nord du bassin ligérien, on peut dénombrer neuf villae : - Sarthe : Parcé, Précigné. - Loir : Genneteil, Noyant, Mayet, Chenu, Vouvray, Thuré. - Choisille : Châtenay. Sur la Loire, se trouvent huit villae : Restigné, Berthenay, Martigny, Vouvray, Mosnes, Suèvres, Léré, Bannay. Au sud du bassin ligérien, nous avons quatorze villae : - Indre : Courcay. - Cher : Vulton, Chantepie-sur-Cher, Joué-les-Tours, Saint-Avertin. - Vienne : Rivière, Saint-Epain, Ports, Ligueil, Blaslay, Doussay. - Dive/Thouet : Chétigné, Antoigné, Curçay. La Loire est le fleuve qui draine la plus grande quantité de domaines san-martiniens. En aval de Tours, il convient de remarquer que Saint-Martin ne possède pas d autre villa au-delà de Restigné, c est-àdire à la limite de la Touraine et de l Anjou. Son patrimoine n est donc pas orienté vers l Atlantique. En amont, la situation est différente. En Touraine, Saint-Martin possède des villae régulièrement espacées depuis la limite angevine jusqu en Blésois. Mais elle possède aussi deux autres villae beaucoup plus en amont : Léré, près de Cosne Cours Sur Loire, et, de façon assurée à partir de 920, Bannay, non loin de Léré. Ces deux villae étaient situées au bord de la Loire. La Vienne est le deuxième fleuve, après la Loire, qui concentre le plus grand nombre de domaines de Saint-Martin : elle draine à elle seule plus d 1/5 e du patrimoine de Saint-Martin en val de Loire. La vallée de la Vienne correspond à un axe essentiel dans la formation de son patrimoine. Dans le sud du bassinversant, les chanoines possèdent des biens dans trois autres vallées fluviales importantes, c est-à-dire celles du Cher, de l Indre et du Thouet. Ainsi, le chapitre tourangeau était présent dans toutes les vallées fluviales du sud de la Touraine. Aucun affluent de rive gauche de la Loire n est laissé de côté. Au nord de la Loire, les possessions de l abbaye sont plus concentrées autour de deux axes majeurs, la Sarthe et le Loir, un affluent de la Sarthe. Seule la villae de Verrue n est pas située dans une vallée fluviale spécifique. Je peux donc faire le constat suivant : une grande majorité des villae de Saint-Martin de Tours est située dans une vallée fluviale de la Loire ou l un de ses affluents. Mais, si je réduis l échelle afin d examiner plus précisément la localisation des possessions san-martiniennes, on s aperçoit que ces villae, non contentes de s intégrer dans ces vallées fluviales, se situent toutes à proximité d un cours d eau, que ce soit un grand fleuve comme la Loire, ou une modeste rivière comme l Esves. Ce constat est très frappant dans le cas des 32 possessions san-martiniennes situées dans les vallées fluviales. Nous avons déjà vu que huit villae étaient situées directement en bordure de Loire (Restigné, Berthenay, Martigny, Vouvray, Mosnes, Suèvres, Léré, Bannay). Onze autres villae se trouvent près des affluents importants de la Loire : Parcé sur la Sarthe ; Vouvray sur le Loir ; Vulton, Saint-Avertin, Joué et Chantepie sur le Cher ; Courcay sur l Indre ; Rivière et Ports sur la Vienne ; Antoigné et Curçay sur le Thouet. Enfin, je peux distinguer une troisième catégorie comprenant douze villae situées à proximité de petites rivières, dont les largeurs et les débits sont beaucoup plus modestes que les cours d eaux précédemment cités : Précigné sur la Boutonne, Mayet sur le Gandelin, Genneteil sur le Cartes, Noyant sur la Marconne, Chenu sur la Fare, Thuré près de l Escotais, Chatenay sur la Choisille, Chétigné sur le Douet, Doussay sur l Envigne, Blaslay sur le Pallu, Ligueil sur l Esves et Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

50 Le monastère de Saint-Martin de Tours et la Loire aux IX-Xe siècles (H. Noizet) Saint-Epain sur la Manse. Seule Notre-Dame d Oé n est pas localisée à proximité immédiate d une rivière, la plus proche étant la Choisille. Ainsi, l accessibilité à l eau constitue une caractéristique essentielle pour la très grande majorité des possessions tourangelles de Saint-Martin. L insertion des villae dans le réseau hydrographique est remarquable. Les cartes que nous avons dressées mettent en valeur le fait que les possessions de ces établissements se répartissent le long des vallées fluviales. Il me semble donc intéressant, dans un deuxième temps, de chercher à comprendre et interpréter un tel fait. Potentialités de ces possessions situées près de cours d eau La proximité de l eau recherchée par les chanoines À ce sujet, la première question qu il convient de poser consiste à savoir si une telle localisation résulte d un choix délibéré de la part des chanoines, ou si elle est due au hasard des donations. Cette question est délicate pour les villae tourangelles, puisque nous ne connaissons pas leur origine : nous ne possédons pas les actes de donation, mais simplement des actes de confirmation postérieurs qui ne nous renseignent pas sur la manière dont les chanoines ont acquis ces domaines. Cela dit, il me semble que, quelle que soit leur origine (privée ou publique), les acquisitions de biens sont le résultat de démarches actives menées par les frères et ne sont pas simplement liées au hasard des donations. D une part, ce phénomène est bien attesté pour les autres possessions du chapitre tourangeau ou pour d autres établissements religieux : il est relativement bien connu que, la plupart du temps, les donations étaient souvent sollicitées par les religieux qui pouvaient faire pression sur le roi ou sur certains fidèles pour obtenir tel ou tel domaine. Nous savons par exemple que l acquisition des possessions éloignées de cette même institution (les villae de Bourgogne, les possessions italiennes) résultait effectivement d une politique volontariste des chanoines car les actes de donation attestent les requêtes et le désir du chapitre de posséder ces domaines en particulier. D autre part, un facteur témoigne en faveur de l hypothèse selon laquelle l accessibilité aux rivières ne résulte pas seulement du hasard des donations, mais également de la volonté des chanoines : les remarquables cohérence et permanence du patrimoine de l abbaye induite par les actes de confirmation. Le fait que la liste des possessions s allonge d acte en acte tout en conservant à chaque fois les villae précédemment confirmées suggère une forte motivation des chanoines pour conserver ces villae et non pas d autres biens. Ceux-ci avaient multiplié les requêtes auprès des souverains carolingiens pour qu ils confirment ces possessions : ainsi, du VIII e au X e siècle, certains biens sont confirmés neuf fois, ce qui prouve la très grande stabilité du bien-fonds san-martinien. Visiblement, leurs possessions n étaient pas interchangeables : au contraire, il s agissait pour eux de garder précisément ces villae comme si elles avaient quelque chose de particulier, de différent par rapport à d autres biens. L énergie dont ont dû faire preuve les chanoines pour perpétuer cette structure patrimoniale m'incite à penser que ces possessions ne se contentaient pas de verser du numéraire à l institution san-martinienne, comme pourrait le faire n importe quelle villa : elles fournissaient sans doute des ressources plus spécifiques. La conjugaison de cette très grande stabilité du bien-fonds san-martinien et de ces caractéristiques fluviales suggère que les relations établies par le chapitre et ses possessions n étaient pas simplement d ordre juridique, mais physique : il est possible que le potentiel hydraulique ait été utilisé et exploité par les chanoines, auquel cas l accessibilité à l eau n est pas une caractéristique passive simplement due au hasard des donations. Trois types d utilisations possibles des cours d eau par les sociétés au Haut Moyen Age Afin d infirmer ou confirmer cette hypothèse, il est nécessaire de réfléchir sur les différentes possibilités d exploiter ce potentiel hydrologique. Les sources carolingiennes suggèrent-elles que les chanoines mettaient en valeur ce patrimoine? En clair, pourquoi les frères auraient-ils pu vouloir posséder telle villa sur tel cours d eau? À quoi servait ce réseau hydrographique? Nous connaissons trois utilisations principales des rivières au haut Moyen Age. Les cours d eaux et leurs vallées Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

51 Le monastère de Saint-Martin de Tours et la Loire aux IX-Xe siècles (H. Noizet) pouvaient être utilisés pour la culture des zones en bordure de rivière bénéficiant d une irrigation permanente, pour le fonctionnement des moulins et des pêcheries, ou encore pour la navigation. La culture fourragère La thèse selon laquelle les zones inondables étaient favorables à la pâture et à la culture fourragère correspond à une théorie déjà ancienne (DION 1934). Sans la systématiser, elle est encore couramment admise, et notamment par J. Chapelot. Dans son étude concernant la Charente, cet auteur remarque que le lit majeur est recouvert chaque année par les eaux sur une largeur de plusieurs centaines de mètres et qu il est occupé sur les deux rives par des prairies : ces auteurs rappellent que ces prairies sont localement appelées rivières ou prées, mot du français général dérivé du pluriel latin Prata et resté dans la langue locale pour désigner ces secteurs caractéristiques des basses vallées de la Charente et des principaux affluents de son cours inférieur, la Seugne et la Boutonne. Elles ont joué un rôle essentiel dans la vie rurale locale en approvisionnant en fourrage, dès le Moyen Age, les villages environnants (CHAPELOT RIETH 1995). Du point de vue géographique, il n est pas impossible que ce phénomène ait également existé pour les villae qui se situent dans les vallées de la Loire et de ses affluents : le Cher est par exemple bien connu pour ses crues. Mais, dans ce cas, je ne peux vérifier cette hypothèse pour deux raisons. Tout d abord, nous n en avons aucune attestation dans les textes carolingiens. Le seul indice pourrait être les nombreuses mentions de prés et pâtures dans la description des villae san-martiniennes : il est possible que ceux-ci aient été favorisés par le dépôt d alluvions. Mais ceci n est qu une vague indication qui n a sans doute rien à voir avec ce phénomène : en effet, de très nombreuses villae sont décrites ainsi sans plus de précision. Surtout, et c est là la deuxième raison qui m empêche de confirmer cette hypothèse, on ne peut travailler à très petite échelle avec les mentions toponymiques fournies par les diplômes carolingiens. En effet, nous ne sommes pas assurés que l espace foncier des villae carolingiennes corresponde à celui des actuelles communes héritières du toponyme latin. Prenons par exemple le cas de la villa de Restigné : nous savons qu elle appartient au patrimoine san-martinien car le nom de Restiniacus est cité dans les actes de confirmations. Mais nous ne savons rien de plus : si Restiniacus a donné par la suite Restigné, nous ne connaissons pas pour autant les limites précises du terroir de cette villa à l époque carolingienne. S il est raisonnable de considérer que Restiniacus se situait non loin de Restigné, nous ne pouvons en aucun cas assimiler les limites de cette villa à celles de la commune actuelle : il est ainsi impossible de savoir si le territoire de cette villa incluait ou non les terrains situés en bordure de Loire et pouvait éventuellement bénéficier des dépôts d alluvions. Nos sources carolingiennes ne nous permettent pas de situer les toponymes à petite échelle. Ainsi, cette question reste insoluble dans la mesure où les textes ne nous fournissent pas d indications précises. Il est possible que la proximité des cours d eaux ait favorisé la culture fourragère ; mais ce n est pas avec nos sources que nous pouvons le prouver. Fixation de structures productives : pêcheries et moulins La deuxième utilisation possible des rivières concerne l installation de structures productives telles que les pêcheries et les moulins. Que nous apprennent les sources diplomatiques à ce sujet? Nous savons par un acte émis par Robert en 900 (Actes de Robert, n 43, p. 166) que les chanoines tourangeaux avaient mis en place une pêcherie près de l ancienne île Saint-Côme, à quelques kilomètres en aval de Tours. Cet acte qui concède en précaire la villa de Martigny stipule en effet que toute la villa est concédée en précaire sauf ce qui est réservé aux écolâtres et au cellérier : Haec vero omnia supra commemorata, alodos videlicet quos ipsi dabant et Martiniacum, Sancti Martini villam, cum praedictis omnibus rebus, id est mansis supradictis XVII, [...], et excepta insula, quae dicitur Ad Sanctum Cosmam, quam fratres ad ministerium cellerarii fratrum et tractum piscationis ipsorum.... Cette pêcherie, qui était gérée par le cellérier du chapitre de Saint-Martin, était destinée à approvisionner régulièrement les chanoines en poissons frais. L île Saint Côme n existe plus depuis que Louis XI a construit des levées sur la Loire : le bras de la Loire qui entourait cette étendue de terre a été en partie remblayé. Le milieu a donc été réaménagé assez tôt. Je peux simplement dire qu il s agissait certainement d une structure permanente et complexe. L intérêt qu elle suscite de la part du chapitre tourangeau plaide en faveur d une installation importante. Je peux souligner le fait que l emplacement de cette pêcherie procurait deux avantages principaux : d une part, cela ne gênait pas la Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

52 Le monastère de Saint-Martin de Tours et la Loire aux IX-Xe siècles (H. Noizet) circulation fluviale sur la Loire ; d autre part, les courants étaient sans doute moins forts dans un bras de la Loire que dans la Loire elle-même, ce qui devait considérablement faciliter la construction et l utilisation d une telle structure. Cet emplacement sur un bras du fleuve était donc très avantageux et permettait de réserver cet espace à la capture de poissons. Une telle localisation permettait certainement une efficacité maximale étant donné l absence d obstacles majeurs liés à la navigation. La présence d une telle structure constituait effectivement une gêne pour le passage des embarcations, comme en témoignent les nombreux exemples, au Moyen Age et à l époque moderne, de litiges et contentieux entre les pêcheurs et les bateliers qui perdaient parfois leur bateau dans les pêcheries. Nous ne connaissons rien de la structure précise d un tel piège. P. Nowacki-Breczewski avait montré l importance de l archéologie dans ce domaine, notamment pour les pêcheries de la Dordogne (NOWACHI-BRECZEWSKI 1989). Il est possible que la pêcherie de l île Saint-Côme soit du même type que le schéma global reconstitué par cet auteur. La pêcherie fixe cherche à piéger les poissons migrateurs et sédentaires lors des transits qu ils effectuent, soit pour se nourrir, s abriter ou pour aller vers les lieux de reproduction. Celles-ci sont composées de digues faites de pieux et de blocs calcaires, sans doute aussi de clayonnages, et peut-être de filets. Ces digues, appelées ailes, forment un ou plusieurs V à la pointe de chacun desquels est placé un piège. L orientation de ces V détermine la provenance des poissons, et donc la fonction du piège. En ce qui concerne les moulins, nos sources contiennent quatre mentions de moulins pour les possessions san-martiniennes. Les deux termes utilisés sont farinarium ou molendinum, sans que l on puisse faire de distinction entre les deux termes qui désignent tous deux des moulins à eaux. La première mention concerne les 23 villae de l acte de 862 de Charles le Chauve. Bien que nous ne puissions être assurés de ce que toutes ces villae possédaient des moulins, ce type de bâtiment était suffisamment répandu pour que l acte les mentionne parmi les composantes essentielles de ces villae : en effet, le fait que les moulins fassent partie, au même titre que les prés, les forêts ou les culturae, de la description synthétique de l acte de 862 suggère qu une grande partie des 23 villae ainsi décrites comportait des moulins. Cette mention est donc aussi intéressante que problématique : si nous pouvons en déduire qu un grand nombre des terres de Saint-Martin possédait des moulins, nous sommes dans l incapacité de savoir lesquelles - à moins qu elles en soient toutes pourvues, ce que nous ne pouvons vérifier car les autres diplômes sont muets sur cette question. Les autres mentions de moulins ne concernent que trois endroits différents. L acte de Charles le Simple de 919 mentionne un pré, proche de Canabas, qui comporte un moulin. Celui-ci serait rattaché à la villa de Courçay tout en étant extérieur au territoire de Courcay : Curciacus in pago Turonico cum ecclesia et omnibus aliis rebus sibi pertinentibus ac prato in villa Canabas sito atque farinario, pro ipso quondam dato.... On peut ajouter deux actes privés qui mentionnent des moulins à Vulton, sur le Cher et des terrains pour construire des moulins sur la Choisille (MABILLE 1866, n XCIII, p. 114 ; GASNAULT 1953, n 128), dans un acte du 31 décembre 914 (MABILLE 1866, n CVI, p ; GASNAULT 1953 n 115). Dans ce dernier cas, il s agit d une concession en précaire, accordée par le trésorier ainsi que le doyen du chapitre, Théotolon, de deux terrains sur la Choisille pour y construire des moulins, l un près de Monnaie, l autre proche de Carcannacus, soit Charcenay selon E. Mabille et P. Gasnault. E. Mabille précise que cette concession en précaire est accordée à Gui, qui est granicarius du chapitre, ce qu il traduit par grangier. Les moulins seront construits par un certain Aucher et les revenus seront à partager par moitié entre Gui et Aucher. Les deux hommes doivent payer un cens annuel de seize deniers chacun. Ils auront la faculté de transmettre leurs parts des moulins à des proches, à condition qu ils payent le cens. Cet acte nous renseigne donc sur la politique suivie par les chanoines pour la mise en valeur de leurs terres. Pour améliorer leur réseau de moulins, ils concèdent en précaire des terrains, à charge pour les précaristes de construire effectivement les moulins : en échange, ceux-ci peuvent jouir des revenus engendrés par une telle infrastructure pendant deux générations. Puisqu il s agit d une concession en précaire, on peut légitimement supposer que ces moulins retombaient ensuite dans l escarcelle du chapitre. Les chanoines récupéraient ainsi leurs terrains avec une forte valeur ajoutée due à la présence des moulins : ceux-ci vont leur rapporter des revenus intéressants, et ce sans qu ils aient eu à financer quoi que ce soit. Cela dit, nous ne savons pas si ces moulins ont été effectivement construits. Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

53 Le monastère de Saint-Martin de Tours et la Loire aux IX-Xe siècles (H. Noizet) Ainsi, les sources nous indiquent que les chanoines avaient effectivement exploité le potentiel fluvial de ces cours d eaux par le biais des pêcheries et surtout de moulins. Mais, excepté les moulins de Vulton sur le Cher et ceux devant être construits sur la Choisille, nous ne connaissons jamais les cours d eaux sur lesquels les moulins des villae de Saint-Martin étaient construits. Parmi les affluents importants de la Loire, nous savons que, dès Grégoire de Tours, l Indre avait été aménagé pour installer des moulins notamment dans le Lochois (DE IZARRA 1993, p. 69) : il n est donc pas impossible que la villa appartenant à Saint-Martin située au bord de l Indre possède des moulins. Il faut signaler à ce sujet que R. Guichané a réalisé une thèse sur les moulins en Indre-et-Loire, thèse qu il soutiendra dans quelques jours en janvier 2001 : je tiens d ailleurs à le remercier de m avoir expliqué concrètement le fonctionnement d un moulin à bief et d avoir présenté certains de ses résultats. Il est ainsi certain qu il n y avait pas de moulins à bief aménagés directement sur la Loire : la mise en place d un bief nécessite en effet de construire une retenue d eau sur toute la longueur du cours d eau, ce qui ne semble pas avoir été entrepris aux IX-X e siècles. Pour cette raison technique, les moulins à bief étaient plus souvent installés sur des petits affluents que sur des grandes rivières comme la Loire ou la Vienne. Enfin, il faut tenir compte du fait que la présence d un moulin à bief gênait la circulation fluviale. Cette remarque m incite à examiner la troisième utilisation possible des rivières : la navigation. La navigation À cette époque, la navigation fluviale était un moyen de transport courant notamment pour les denrées pondéreuses. Il ne fait pas de doute que, excepté l Indre, les cours d eaux tels que la Loire, la Vienne, le Thouet, le Cher, la Sarthe, le Loir, étaient navigables. Plusieurs actes royaux concèdent des exemptions de tonlieux pour des bateaux appartenant aux établissements religieux disposant de ce privilège, comme Saint-Martin. Or, les rivières exemptées sont citées : la Loire, la Vienne, le Cher, le Loir, la Sarthe, ainsi que la Mayenne et l Allier pour Saint-Martin (MÜHLBACHER 1886, n 2, p. 139). Cela prouve donc non seulement que ces fleuves et rivières étaient navigables à cette époque, mais également que Saint-Martin disposait des moyens techniques (12 bateaux) et juridiques (exemptions et cessions de taxes) nécessaires pour des voyages réguliers. Il n en est pas de même des petits affluents : nous ne savons pas par exemple si l Esves, l Escotais, le Pallu ou les autres petits cours d eaux proches des possessions de Saint-Martin étaient navigables. Plusieurs phénomènes peuvent empêcher de circuler en bateau sur ces rivières : la présence des moulins, la faiblesse du débit, l insuffisance de la profondeur de la rivière. Nous avons déjà évoqué le problème des moulins : si les premières mentions de moulins ne remontent pas au-delà du XI e siècle sur ces rivières, il est possible que des biefs aient été aménagés, comme il en était question avec la Choisille. Mais ceci n est qu une hypothèse dans la mesure où nous ne possédons pas de sources carolingiennes. En ce qui concerne l épineux problème des caractéristiques des rivières (débit, profondeur), nous avons rassemblé sous forme de tableau les relevés de débits effectués par le ministère des Travaux Publics en Indre-et-Loire en 1879 pour certaines des rivières qui nous intéressent. Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

54 Le monastère de Saint-Martin de Tours et la Loire aux IX-Xe siècles (H. Noizet) Débits des affluents traversant certaine villae de Saint-Martin, relevés effectués par le ministère des travaux Publics en Indre-et-Loire en 1879 Villa Rivière Localisation précise Largeur (en m) Chenu la Fare du départ. de la Sarthe au confluent du ruisseau de l Audillère Débit ordinaire (en m 3 /s) Débit d étiage (en m 3 /s) 4,5 0,45 0,12 Thuré l Escotais de la Sarthe au ruisseau de la Clareté 5 0,36 0,09 du ruisseau de la Clareté au ruisseau de Luenne Saint-Epain la Manse de la Vienne au confluent du ruisseau des Roches du confluent du ruisseau des Roches à Montgoger 4 0,25 0, ,7 0,2 5,5 0,55 0,15 Ligueil l Esves de la Creuse au confluent du Ligoire 7 0,9 0,25 du confluent du Ligoire au confluent de l Estrigueil Châtenay la Choisille du confluent de Saint-Roch à Semblanay 5 0,5 0,15 5 0,8 0,2 de Semblancay à Saulay 4 0,6 0,15 A priori, ces débits sont assez faibles et rendraient difficile la navigation sur ces cours d eaux, et ce même en période de crue. Evidemment, ceci n est qu un point de vue très approximatif, qui se fonde sur des données chiffrées du XIX e siècle et sur une observation sur le terrain de certaines rivières pour Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

55 Le monastère de Saint-Martin de Tours et la Loire aux IX-Xe siècles (H. Noizet) évaluer les possibilités de navigation. Il conviendrait de réaliser des études beaucoup plus précises et sérieuses : il est en effet plus que probable que les caractéristiques hydrologiques ont changé depuis le VIII e siècle. On a longtemps considéré que le niveau de l eau était plus haut au Moyen Age et qu ainsi de nombreux ruisseaux contemporains étaient à cette époque des cours d eaux navigables. Mais F. de Izarra pense qu il faut en finir avec cette thèse déjà ancienne d un âge d or des voies navigables. Des études plus récentes accréditent même l hypothèse inverse, et notamment pour la Loire et ses affluents : d après F. de Izarra, la situation de la villa d Athée-sur-Cher, qui se trouve actuellement dans une zone inondable au bord du Cher, laisse supposer que la rivière a monté d un mètre au moins depuis l Antiquité (DE IZARRA 1993, p. 33). D une façon plus générale, R. Dion a conclu de l existence de villae antiques dans des zones submersibles des bords de Loire à un relèvement du niveau moyen des grandes crues. Mais seule la géoarchéologie pourrait éventuellement nous renseigner sur ces problèmes. Force est de constater notre impuissance à répondre à cette question. Simplement, au vu de la présence de certains moulins et de la faiblesse des débits actuels de ces quelques cours d eaux, il me semble difficile, mais non impossible, d envisager une navigation sur ces rivières. Malgré ces difficultés, on peut se demander si des produits étaient transportés par bateau depuis les possessions de Saint-Martin jusqu à Tours. Cette question renvoie au problème de l approvisionnement du chapitre san-martinien et des relations établies par celui-ci avec ses possessions. Pour cela, j examinerai dans un premier temps le versant sud du bassin ligérien, puis le versant nord dans un second temps. Je dispose à ce sujet d un texte qui suggère en effet que la communication s effectuait par voie fluviale, au moins depuis les villae situées sur le Thouet et la Vienne. Cet acte de Saint-Martin indique que cet établissement possédait des terrains dans la villa de Rets à Candes, au confluent de la Loire et de la Vienne, pour servir de relais dans les réseaux de communication entre les villae et le centre monastique. En 844 ou 845 (Actes de Charles le Chauve, n 62, p. 177), le chapitre san-martinien obtient villam Curciacum, cum omni integritate suisque adjacentiis, sitam in pago Pictavo, et medium factum in villa Resti ad ea deponenda quae exierunt de Curciaco villa, eisdem fratribus, quam olim genitor meus piae recordationis, domnus Hludowicus, ad habendum capas concesserat.... Ainsi, cette source nous apprend que les produits de la villa de Curçay devaient être transportés jusqu à Candes. Cette villa, ainsi que celle d Antoigné située quelques kilomètres en aval de Curçay, sur la Dive, ayant été concédées aux frères pour leur fournir des chapes, il est très vraisemblable que ces produits étaient de la laine ou d autres matières premières textiles. De plus, ces deux villae fournissaient encore de la laine aux frères au XII e siècle. Dans son dictionnaire topographique, Carré de Busserolle a publié, sans le préciser, des censiers du XII e siècle. En effet, à l article de Saint-Martin de Tours (CARRE DE BUSSEROLLE , t VI, p ), il dresse l état des hommages qui étaient dus au trésorier, qui exerçait la haute justice dans tout le domaine au XIIIe siècle. Mais à la suite de cette liste, il a publié, sans les distinguer de l état des hommages qui étaient dus à ce dignitaire, des censiers du XII e siècle qui mentionnent ce que les villae san-martiniennes devaient payer au chapitre. Parmi ces villae, nous retrouvons Antoigné, Curçay, Noyant, Parcé, Précigné, Genneteil, Restigné, Mosnes, Joué-les-Tours et Saint-Avertin, Berthenay, Châtenay, Vouvray-sur-Loire, Saint-Epain, Courcay. Les droits perçus sur ces villae au XII e siècle consistent essentiellement en des cens et droits divers - census et decimas panis, primacias, capitena, terragia, pasnagius... - dont rien ne nous permet de savoir s il s agissait de droits perçus en espèces ou en nature. Seules les villae d Antoigné et de Queurcai comportent une originalité dans la mesure où il est fait mention de laine : Apud Antoneium habet capitulum Beati Martini Turonensis census et decimas panis, vini, et ecclesiam, et primicias, et lanam, et capitena. Apud Curciacum census XIII solidorum et IIII denariorum et ecclesiam S. Petri, et ecclesiam S. Gervasii et capellam B. Mariae et decimas panis et vini, et primicias, et lanam, et capitena. A. Giry avait déjà écrit que ces villae étaient situées dans un pays où l élevage de moutons existait depuis longtemps : la villa Restis désigne sans aucun doute possible une villa ancienne située à l emplacement de Montsoreau, où se trouve depuis l Antiquité un port au confluent de la Loire et de la Vienne (GIRY 1896). Si nous réfléchissons à l itinéraire qui était emprunté pour transporter ces produits (laine, mais peut-être aussi cuir et lin) depuis les villae de Curçay et Antoigné jusqu à Candes puis jusqu à Tours, la solution la plus simple - même si elle n est pas explicitement mentionnée - Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

56 Le monastère de Saint-Martin de Tours et la Loire aux IX-Xe siècles (H. Noizet) consiste à descendre par bateau la Dive, qui devient le Thouet, puis la Loire jusqu à Candes. Là, les produits étaient stockés dans le demi manse, puis acheminés par bateau, lorsque le besoin s en faisait ressentir, jusqu à Tours. Cette hypothèse me semble très probable au vu de la localisation des points à relier : ces villae, Candes et Tours sont tous situés au bord d un axe navigable. Candes constitue un relais, une étape dans les réseaux de communication qui ont été mis en place par ce centre canonial et leurs possessions. Ainsi, les chanoines exploitaient le domaine foncier de leurs villae qui leur fournissaient les ressources nécessaires à leur fonctionnement, et pas simplement du numéraire : nous avons la preuve que les relations établies entre le chapitre et ses dépendances tourangelles n étaient pas simplement d ordre juridique, mais également physique. De plus, il me semble que la Loire et ses affluents jouaient un rôle majeur dans ces relations entre le centre canonial et ses possessions périphériques. Les réseaux d approvisionnement de Saint-Martin Malheureusement, nous ne possédons pas d autres textes qui nous renseignent de manière aussi précise pour les autres villae. Nous sommes donc obligés de faire des suppositions et de se contenter d hypothèses fragiles. J ai développé dans mon mémoire les autres raisons qui nous font croire que les villae san-martiniennes fournissaient également les céréales, le vin, les légumes et d autres produits nécessaires à l entretien des chanoines. Ce n est pas le lieu ici de redétailler ma démonstration, dont l élément essentiel reste l acte que j ai cité à propos du demi manse à Candes : simplement, à partir de cette hypothèse de l existence de réseaux entre le centre san-martinien et sa périphérie, nous pouvons tenter de retrouver, selon la situation géographique des villae, les itinéraires utilisés pour le transport de ces produits. Je voudrais ainsi proposer quelques hypothèses à propos des circuits qui ont pu être organisés afin d approvisionner le chapitre (cf. carte). Le versant sud du bassin ligérien Concernant les produits issus des autres villae situées sur les bords du Thouet et de la Vienne, c est-àdire Chétigné près du Thouet, Ports et Rivière sur la Vienne, il me semble que, là encore, le plus simple consistait à les transporter par bateau jusqu à la Loire puis de remonter celle-ci jusqu à Tours. Rien n empêche que le demi manse utilisé pour le stockage de la laine provenant de Curçay serve également à stocker les produits des autres villae : même s ils n y étaient pas stockés, ce point d ancrage pouvait servir de relais pour faire une pause dans le voyage jusqu à Tours. En dehors de la Dive et de la Vienne, d autres villae sont localisées sur des fleuves importants dont il ne fait pas de doute qu ils étaient navigables à l époque carolingienne, c est-à-dire la Loire elle-même et le Cher. En effet, si de nombreux moulins étaients construits sur le Cher, ceux-ci ne gênaient pas la circulation fluviale dans la mesure où des écluses avaient été aménagées pour permettre le passage des bateaux. Il est donc possible d envisager que la liaison entre les villae situées sur la Loire ou le Cher et Tours s effectuait par la voie fluviale. Les villae san-martiniennes concernées sont celles de Restigné, Vouvray, Suèvres, Mosnes, Léré et Bannay sur la Loire, Vulton sur le Cher. Nous rappelons que l Indre n étant pas navigable, la communication entre Courçay, la seule villa du chapitre Saint-Martin située sur l Indre, et Tours devait s effectuer par la route. Il en est de même des villae sanmartiniennes de Martigny, Chatenay, Notre-Dame d Oé, Joué, Chantepie, Saint-Avertin : celles-ci sont trop proches de Saint-Martin pour préjuger du mode de transport des produits. Il est tout à fait possible que ceux-ci aient été transportés par la route jusqu à Saint-Martin. Il reste donc à examiner, dans ce versant sud du bassin ligérien, le cas des villae qui ne sont pas situées directement dans les vallées des grands axes fluviaux telle la Vienne, mais qui peuvent cependant s y rattacher par le biais des affluents de ce fleuve. Pour Saint-Martin de Tours, les villae situés sur des affluents de la Vienne sont Ligueil, près de l Esves, Saint-Epain sur la Manse, Blaslay sur le Pallu, Doussay sur l Envigne, ainsi qu un petit domaine sur la Veude. La question primordiale est de savoir si ces cours d eaux étaient navigables à l époque carolingienne. Nous avons vu combien il était délicat de répondre à une telle question : a priori, il me semble difficile de naviguer sur ces rivières. Mais, dans la mesure où la présence des moulins n est pas explicitement attestée sur ces cours d eaux pour la période carolingienne, et dans la mesure où nous ne connaissons pas les régimes et les débits à cette Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

57 Le monastère de Saint-Martin de Tours et la Loire aux IX-Xe siècles (H. Noizet) époque, j ai indiqué les deux possibilités pour ces trajets sur la carte. Les produits pouvaient être transportés par la route depuis chaque villa jusqu à Tours, ce qui nécessite tout de même l existence d un réseau routier bien entretenu. L autre hypothèse consiste à acheminer les marchandises jusqu à un point d embarquement sur les grandes rivières comme la Vienne ou le Thouet afin que des bateaux prennent en charge le transport des denrées jusqu à Tours. Bien que cette hypothèse reste particulièrement fragile en l absence de toute attestation dans les sources, j aurai tendance à privilégier la deuxième solution puisque la navigation fluviale était, à cette époque, un moyen de communication au moins aussi important - si ce n est plus - que la circulation terrestre. J. Chapelot (CHAPELOT RIETH 1995 p. 126) signalent que les denrées pondéreuses et à faible valeur ajoutée, comme le vin, les grains, les matériaux de construction, étaient le plus souvent transportées par bateau. En effet, le transport terrestre était sans doute moins utilisé que la navigation fluviale étant donné les nombreux inconvénients et risques qu impliquaient de tels voyages, alors qu ils n offraient finalement que peu d avantages : la longueur des voyages, les dangers de la route durent rendre préférable le transport fluvial pour les produits pondéreux. C. Clark et M.-R. Haswell avaient comparé les performances des bateaux et des autres moyens de transport : ils en concluaient que le bateau était bien plus efficace en terme de transport de marchandises que le portage, le roulage ou l utilisation d animaux de bât. Dans la mesure où les produits concernés correspondaient effectivement à ce type de denrée pondéreuse, et non pas à des produits chers ou fragiles, nous serions donc favorables à la deuxième hypothèse. Le versant nord du bassin ligérien Jusqu ici, j ai observé que les relations entre Saint-Martin et sa périphérie pouvaient aisément s effectuer par le biais des cours d eau. Aucun obstacle physique n empêchait les bateaux de descendre les vallées des divers affluents, puis de remonter la Loire jusqu à Tours. Mais si ce scénario peut s appliquer au versant sud du bassin ligérien, la situation est plus complexe pour le versant nord. En effet, nous avons déjà vu qu un quart environ du patrimoine ligérien était concentré autour des vallées de la Sarthe et du Loir. Or, en regardant une carte, on s aperçoit que, pour rejoindre Tours par bateau, il fallait nécessairement descendre la Sarthe et le Loir jusqu à leur confluent avec la Maine, puis, à partir d Angers, remonter la Loire jusqu à Tours. L itinéraire fluvial me semble trop long et trop dangeureux - en raison des nombreuses confluences à passer -pour pouvoir en faire l hypothèse. Au contraire, il existait un itinéraire routier bien connu, datant de l Antiquité, permettant de rallier le Loir à Tours, c est-à-dire la voie antique Laval-Tours. Or, les chanoines se sont débrouillés pour obtenir un manse situé le long de cette voie, c est-à-dire à Thuré, au lieu-dit Les Landes. La donation de ce manse a fait l objet d un diplôme spécifique de Charles le Chauve en 862, c est-à-dire peu de temps après la grande restitution accordée par ce même souverain : cela tend à faire de ce terrain un endroit stratégique, suffisamment en tout cas pour refaire une démarche auprès du roi pour lui demander un autre acte, alors même qu il venait de confirmer la globalité des possessions et privilèges de Saint-Martin. Si mon interprétation s avère exacte, la villa de Thuré aurait été le point de passage obligé pour les produits provenant des villae des vallées de la Sarthe et du Loir. Ils pouvaient ensuite être stockés dans les domus du manse La Lande, avant d être transportés jusqu à Tours grâce au réseau de voies antiques dont l existence est attestée. Il y aurait peut-être dans cette zone un point de rupture de charge, avec éventuellement le passage du transport fluvial au transport routier si les produits issus des autres villae de cette région étaient transportés par bateau sur le Loir, ce que nous ne savons pas. Un approvisionnement mensuel Ainsi, il me semble que les chanoines tourangeaux ont su exploiter au maximum de ses possibilités le potentiel hydrologique de leurs possessions : l insertion des villae san-martiniennes dans le réseau hydrographique ligérien correspondrait donc bien à une caractéristique active. J ai déjà vu que si les sources diplomatiques ne permettaient pas de savoir si la culture fourragère favorisée par les crues des rivières était pratiquée dans les domaines du chapitre, elles indiquent par contre que ces rivières étaient effectivement utilisées pour installer des pêcheries, des moulins et pour le transport des produits issus des villae et destinés à répondre aux besoins des chanoines. Ceux-ci ont mis en place un système complexe de relations entre leur centre - Saint-Martin - et leur périphérie - leurs possessions. Des flux, réguliers dans l espace, mais également dans le temps permettaient d approvisionner le chapitre. Au VIII e siècle, un système particulier de perception des produits semble avoir été mis en place. En effet, Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

58 Le monastère de Saint-Martin de Tours et la Loire aux IX-Xe siècles (H. Noizet) deux diplômes montrent qu un système de mensualités avait été organisé afin que les denrées alimentaires et vestimentaires arrivent régulièrement à Saint-Martin. L acte de Charlemagne de la fin du VIII e siècle instaure un système de rotation entre les différentes villae. Chaque mois, un groupe différent de villae doit donner à Saint-Martin sa quote-part annuelle de produits alimentaires : qualiter antecessor suus Autlandus abba quasdam villas instituerit, quae fratribus mensuatim per totum annum servire deberent. (MÜHLBACHER 1906, n 97). L acte de 849 de Charles le Chauve confirme le fait que la villa d Antoigné paye aux chanoines l agrarium et les mensuali pour les besoins alimentaires des frères :...ut praefata villa Antoniacus cum omni integritate suisque appendiciis deinceps per omnia deserviat fratribus sancti Martini [...] ad illorum annuatim vestimenta, excepto mensuali atque agrario in victu eorumdem jamdudum attributo. (Actes de Charles le Chauve, n 113, p. 300). D après le nouveau Du Cange, basé sur de nouveaux dépouillements, mensali est une redevance correspondant à un mois de revenu, tandis que mensata est défini comme ravitaillement pour la durée d un mois (NOVUM GLOSSARIUM , p. 379). Ainsi, cette mensualisation des revenus permettait une entrée régulière des produits, au lieu d une unique période de perception, ce qui permettait un approvisionnement plus rationnel et moins hasardeux. J ai montré que les chanoines tourangeaux ont créé un véritable territoire san-martinien en mettant en place un système de réseaux issus de leurs possessions et destinés à approvisionner le chapitre. Concernant la spatialité de ce territoire, cette étude a montré que cette unité territoriale, qui paraît très cohérente durant toute l époque carolingienne, était essentiellement articulée par les axes fluviaux : dans leur vision du monde, les chanoines avaient perçu et donc accordé une grande importance à la Loire et à ses affluents. Lorsqu ils ont créé leur propre espace économique, ceux-ci ont intégré les caractéristiques de la géographie physique dont ils ont su tirer pleinement parti. Cela dit, il me semble dit que ce modèle de constitution d un territoire spécifique, très en prise avec les données du terrain, constamment réactualisé par une rotation mensuelle des réseaux, n est qu en partie héritée des caractéristiques physiques des vallées ligériennes. Pour essayer de déterminer plus précisément l influence de ce milieu local fluvial sur un tel espace économique, j ai cherché à savoir Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

59 Le monastère de Saint-Martin de Tours et la Loire aux IX-Xe siècles (H. Noizet) ce qu il en était ailleurs : est-ce que nous retrouvons ce même type de territoire chez d autres institutions religieuses situées dans une autre vallée fluviale? Pour cela, j ai comparé le système d approvisionnement san-martinien aux dispositifs qui avaient été mis en place à la même époque pour deux monastères parisiens : Saint-Denis et Saint-Germain-des-Prés. J ai pu repérer certaines spécificités qu il convient d expliciter dans ce troisième temps de notre réflexion. Comparaison avec Saint-Denis et Saint-Germain-des-Prés sur la Seine Tout d abord, il faut constater la moindre implication de Saint-Martin dans les activités d échanges par rapport aux abbayes parisiennes. Les moines parisiens troquaient leur vin, miel, garance afin d obtenir les produits qui leur manquaient. Les chanoines ont également cherché à vendre leurs surplus - et notamment le vin - afin de se procurer ce qui leur faisait défaut, mais je ne croie pas qu ils se soient livrés au trafic régional et international des vins comme c était le cas de Saint-Germain-des-Prés (DEVROEY 1984 ; DEVROEY 1993b). Les hommes des abbayes parisiennes disposaient de privilèges plus étendus que ceux de Saint-Martin et allaient parfois fort loin pour ravitailler le monastère, comme Quentovic, Dorestad ou Marseille (LEBECQ 1983, t 2, p et p. 418), ce qui n est pas le cas de Saint-Martin. Il semble donc que les économies san-dyonisienne et germanopratine étaient plus monétarisées et plus impliquées dans les échanges que celle de Saint-Martin de Tours. Un tel phénomène s explique peut-être par le contexte géo-économique : les moines parisiens disposaient de ce formidable marché qu a été le bassin de la Seine, en relation avec les besoins des hommes du nord, notamment les Saxons et les Frisons, alors que les chanoines - même si le commerce dans le val de Loire était loin d être négligeable - n ont jamais connu de telles opportunités. Les chanoines tourangeaux restaient donc plus proches de l idéal d autarcie : comme l avait déjà remarqué P. Grierson, l achat n était pas le moyen normal pour une économie domestique de se procurer ce qui lui était nécessaire, son ambition étant de se suffire à elle-même (GRIERSON 1959 p. 128). De plus, à Tours, il me semble que les revenus procurés par ces villae étaient fournis en nature et consistaient en des produits directement consommables par les chanoines. Si mes hypothèses se vérifient, il n y aurait pas à Saint-Martin de conversion des redevances perçues sur les domaines en produits de consommation pour les besoins des chanoines. Dans le système san-martinien, il fallait que des agents au service des chanoines perçoivent ces produits, en organisent le stockage et la surveillance, et les fassent acheminer en temps voulu à Tours. Au contraire, il est certain pour Saint- Denis et Saint-Germain-des-Prés qu il existait une phase intermédiaire entre la production et la consommation. Cela implique donc une gestion différente des ressources. J.-P. Devroey, qui a étudié le polyptyque de Saint-Germain-des-Prés, a remarqué que l abbé de cette abbaye préférait affermer la perception des charges paysannes à des intermédiaires qui devaient ensuite diversifier les produits collectés (DEVROEY 1989, p ). Les tenanciers leur donnaient une partie de leur production, c est-à-dire des céréales et des bardeaux. L agent intermédiaire en revendait une partie ou l échangeait contre d autres produits nécessaires aux moines comme les céréales, mais aussi les légumes, le fromage, le beurre, le miel, le sel, le savon, la graisse. Ces officiers subalternes assuraient la transition et permettaient d adapter les prélèvements sur les productions des tenanciers aux besoins réels des moines. Cet auteur a développé des exemples intéressants, issu de la summa du groupement domanial de Boissy-Maugis. Les six officiers domaniaux, qui recevaient une fraction de la taxe d ost levée en deniers, des charrois et des livraisons de bardeaux, jouaient un rôle essentiel dans la conversion de certaines redevances domaniales. La taxe d ost, levée en monnaie, semblait payée en bœufs à l abbaye. Entre le produit direct de la taxe et le revenu perçu par le seigneur, il y a donc une opération économique réalisée au niveau du village : achat de bœufs, constructions et équipements de chars... Surtout, cette source nous permet d observer le rôle de l un de ces officiers subalternes : le forestier de Boissy. Celui-ci percevait à son profit exclusif une taxe en céréales nommée conjectus, qui est une redevance complémentaire à la taxe d ost, levée sur la tête des tenanciers ingénuiles. En échange de ces quatre-vingt dix-neuf muids de céréales, le forestier devait verser ad opus dominicum soixante muids de céréales, douze deniers, un indium, un chaudron, un setier de miel, un setier de savon, un livre de cire, deux oies, un faucon, trois éperviers ou trois sous s il ne peut s en procurer. Pour satisfaire les exigences seigneuriales, il lui faut donc élever, vendre ou acheter des volatiles et des Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

60 Le monastère de Saint-Martin de Tours et la Loire aux IX-Xe siècles (H. Noizet) pièces d artisanat. J.-P. Devroey en conclut que la perception de l impôt ou des taxes paysannes prend alors le caractère d une collecte hiérarchisée, où l agent percepteur est à la fois bénéficiaire d un revenu et responsable, vis-à-vis de son supérieur, de la livraison d un bien de consommation ou de la prestation d un service. Il me semble que ce même phénomène est attesté de façon indirecte pour Saint-Denis puisque l acte de 862 (Actes de Charles le Chauve t II, n 247 p. 56) précise que des villae situées en région parisienne (Cormeilles-en-Parisis, Cormeilles et Guerny dans le Vexin, Linerolas et Féricy dans le pagus de Melun) doivent fournir 200 muids de sel : puisque ces villae ne sont situées ni au bord de la mer ni dans une région de salines, il est donc évident qu elles ne fournissaient pas directement le sel : simplement, leurs ressources servaient à l achat de ces produits. Enfin, la dernière différence importante de gestion entre Saint-Denis et Saint-Martin concerne les équipements hydrauliques, et notamment les moulins. Les aménagements hydrauliques réalisés sur les terres de Saint-Denis, tels que les a étudiés D. Lohrmann (LORHMANN 1989, p ) sont particulièrement considérables et bien connus. Le réseau hydrographique des environs de Saint-Denis comprend, hormis la Seine, quatre cours d eaux principaux : le Croult, le Rouillon, la Vieille-Mer, et le ru de Montfort. Ce dernier est le seul cours d eau naturel. Des efforts prodigieux ont été mis en œuvre à l époque carolingienne pour amener l eau courante sur le site. Après des premières tentatives au milieu du VIII e siècle, ce fut la mise en place de la dérivation du Croult sur 6,4 kilomètres qui constitua l infrastructure hydraulique majeure du complexe monastique parisien. L adduction d eau répondait alors principalement aux besoins du monastère : moulin, viviers, pêcheries, mais aussi lavoirs, égouts, latrines avaient été établis sur ce cours d eau. Nous savons qu il existait au moins un moulin, et sans doute d autres, dans les abords immédiats du monastère de Saint-Denis à l époque carolingienne grâce à un acte d Eudes de 894. Au contraire des moines de Saint-Denis avaient à leur disposition un ou plusieurs moulins, je n ai pas trouvé de moulins dans les environs de la collégiale tourangelle. Ceci est peut-être dû à une lacune des sources : mais il me semble que si un tel équipement avait existé, les sources l auraient évoqué à un moment ou à un autre. D ailleurs, on ne connaît pas de cours d eau qui passerait près de la collégiale permettant de construire un moulin à bief. Aussi, je m en tiendrai pour l instant à l hypothèse selon laquelle il n y avait pas de moulins à bief près de Saint-Martin, ce que confirme R. Guichané dans sa thèse. La différence est d importance car si le centre monastique disposait de moulins, comme à Saint-Denis, cela signifie que les frères pouvaient se faire livrer du froment pur, c est-à-dire en grains qu ils pouvaient moudre sur place avec leurs moulins. E. Champion, dans son étude sur les moulins carolingiens, a remarqué, notamment dans le polyptyque de Saint-Germain-des-Prés, que les redevances étaient exigées en grains, et non pas en farine (CHAMPION 1996, p ) : celui-ci ajoute que les céréales contenues dans les redevances n étaient pas destinées à approvisionner l abbaye en farine, sauf s il n y avait pas de moulins dans l abbaye, ce qui ne concernait qu une minorité d établissements selon cet auteur. Il semble pourtant que ce soit le cas à Saint-Martin de Tours. Dans l état actuel de nos connaissances, nous pouvons considérer que les seuls moulins existant à Tours sont des moulins-bateaux ou des moulins pendants accrochés au pont. Comme il me paraît surprenant que tous les grains puissent être moulus dans d éventuels moulins bateaux les moulins pendants ne pouvant exister faute de pont sur la Loire à l époque carolingienne -, je propose l hypothèse selon laquelle les frères se faisaient livrer directement en farine. Cette hypothèse implique donc une grande différence dans les systèmes d approvisionnement de Saint-Denis et de Saint-Martin de Tours puisque Saint-Denis pouvait se faire livrer en grains, la mouture ayant lieu sur place, lorsque cela était nécessaire. Une telle situation permet de dire que les relations entre ces monastères et leurs domaines périphériques n étaient pas de la même nature que celles établies par les chanoines. Ceux-ci étaient en effet beaucoup plus dépendants de leurs possessions que ne l étaient les moines parisiens : si par malheur la récolte était mauvaise dans les villae, c était le ravitaillement des chanoines qui était en jeu à Tours, tandis que les moines pouvaient toujours se procurer du grain ailleurs en l achetant. En cas de difficulté, les chanoines, eux, n avaient pas d autre recours que d acheter directement la farine. Ainsi, les moines parisiens n avaient conservé qu un contact indirect avec leurs possessions. Pour se ravitailler, non seulement ceux-ci avaient recours aux activités d échanges de la vallée de la Seine ainsi que des plus grandes agglomérations commerçantes du haut Moyen Age (Rouen, Quentovic, Marseille ), mais en plus les moines avaient délégué la gestion concrète de leurs domaines à des agents intermédiaires extérieurs. Les chanoines tourangeaux faisaient également appel au commerce, Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

61 Le monastère de Saint-Martin de Tours et la Loire aux IX-Xe siècles (H. Noizet) mais dans des proportions beaucoup plus modestes que les abbayes parisiennes : le chapitre sanmartinien puisait essentiellement dans les ressources de son propre patrimoine pour répondre aux besoins du victus et du vestitus. Surtout, les domaines du chapitre tourangeau fournissaient directement aux chanoines les produits qui leur étaient nécessaires : le chapitre gérait lui-même ses domaines. Il n y avait pas d agent extérieur chargé de collecter et de convertir les produits fournis par les villae en denrées consommables par les chanoines. Les villae produisaient directement ce dont ils avaient besoin. Cette connexion est encore accentuée par le fait que ce sont leurs possessions qui moulaient les grains et fournissaient la farine : les chanoines sont de cette manière plus dépendants de leurs villae que les moines parisiens. Le système d approvisionnement de Saint-Martin respecterait plus l idéal autarcique qui animait les économies monastiques du haut Moyen Age, tandis que les abbayes parisiennes disposeraient d un système de gestion plus souple et sans doute moins contraignant. Les liens des abbayes parisiennes avec leurs possessions semblent donc plus distendus que les relations mises en place par la collégiale avec son réseau de villae tourangelles. Conclusion Bilan des acquis J ai de montrer de quelle manière l espace économique san-martinien a été érigé en un réseau de possessions articulé en fonction des axes fluviaux, notamment la Loire et ses affluents comme la Vienne. L intégration de ce réseau de villæ dans le système hydrographique ligérien est particulièrement frappante : j ai essayé de comprendre le fonctionnement du système foncier de Saint- Martin en relation avec le système ligérien, ce qui m a amené à poser la question de l approvisionnement du chapitre. Ainsi, il me semble que les chanoines avaient conservé un contact direct, et non pas indirect, avec leurs possessions. Je ne perçois pas la présence, comme à Saint-Denis ou à Saint-Germain-des-Prés, d agents intermédiaires extérieurs à qui les religieux auraient délégué la gestion concrète de leurs domaines. Les chanoines seraient d une certaine manière plus dépendants de leurs villae que les moines parisiens. Le système d approvisionnement de Saint-Martin respecterait plus l idéal autarcique qui animait les économies monastiques du haut Moyen Age, tandis que les abbayes parisiennes disposeraient d un système de gestion plus souple et sans doute moins contraignant. Il semble que ce ne soit pas le cas des abbayes parisiennes : leur système d approvisionnement n était pas en prise directe avec le sol comme à Saint-Martin. Or, les moines parisiens disposaient pourtant d un environnement physique similaire : en effet, la Seine aurait très bien pu jouer le même rôle que la Loire à Tours. Les moines de Saint-Denis et de Saint-Germain-des- Prés, dont les monastères sont situés près de la Seine, auraient également pu mettre en place des réseaux d approvisionnement réguliers dans le temps et l espace en faisant venir les produits par bateaux depuis leurs villae. D un point de vue strictement physique, rien n empêche les affluents de la Seine de servir de support à de tels réseaux. Mais, visiblement, cela n a pas été le cas. Hypothèse à développer Je voudrais pour finir proposer une hypothèse afin d expliquer cette différence, hypothèse que je reprendrai dans le cadre de ma thèse actuellement en cours sur la relation à l espace urbain de Tours des communautés de Saint-Martin et de Saint-Julien (IX e -XIII e s.). Il faut peut-être tenir compte du fait que, dans leur vision de l espace environnant, ces hommes ont été influencés non seulement par les données matérielles de la géographie physique (navigabilité ou pas des cours d eaux, présence de moulins ou possibilité d en construire), mais également par l environnement humain de ces vallées fluviales qui étaient loin d être des fleuves sauvages même à cette époque. Je tiens à remarquer que la Seine était un espace partagé bien plus que la Loire : non seulement plusieurs grandes institutions religieuses se trouvaient à proximité dans la région parisienne, mais en plus, la vallée de la Seine était très ouverte sur l extérieur, en contact par exemple avec les hommes du nord, comme les Saxons et les Frisons, qui venaient vendre leurs métaux, poissons et esclaves et acheter des céréales et du vin, comme l a montré S. Lebecq. Un tel environnement humain de la vallée de la Seine a peut-être freiné une vision territoriale : au contraire, elle a pu jouer un rôle dans la constitution d un espace économique relativement souple, ouvert sur l extérieur et peu en prise avec le sol. Par comparaison, la vallée de la Loire était moins fréquentée et moins partagée : en Touraine, la présence de la collégiale Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

62 Le monastère de Saint-Martin de Tours et la Loire aux IX-Xe siècles (H. Noizet) san-martinienne était quasiment hégémonique et exclusive. Cela a peut-être favorisé une vision territoriale de leur espace économique. Les chanoines se seraient en quelque sorte approprié la Loire en se considérant chez eux en Touraine : il n y avait pas dans les environs d autre établissement religieux comparable à Saint-Martin qui était, et de loin, l institution la plus prestigieuse dans tout le val de Loire. Ainsi, cet environnement humain participe peut-être à expliquer cette vision du monde centrée sur eux-mêmes, la création d un territoire san-martinien organisé en fonction des axes fluviaux, et la volonté de maîtriser entièrement leurs réseaux d approvisionnement. Si ma fragile hypothèse s avère juste, elle montre que, déjà à l époque carolingienne, ce ne sont pas seulement les données physiques du milieu, mais essentiellement les caractéristiques humanisées de ces vallées fluviales qui influent sur la constitution des schèmes économiques. Ainsi, les interactions entre l homme et le milieu en val de Loire avaient déjà une longue histoire derrière elles à l époque carolingienne. Elles se renouvellent perpétuellement à travers le temps et participent ainsi à expliquer les comportements des agents sociaux et économiques. Questions en suspens Il reste que le problème central de l évolution des caractéristiques fluviales depuis le Haut Moyen Age n a été qu à peine effleuré. Je reconnais clairement la contradiction de mon travail : d un côté, je suis clairement consciente que les cours d eaux ont beaucoup changé, notamment du point de vue du débit et du style (méandres ou tresses), ce qui induit des conséquences très importantes dans l occupation humaine de ces milieux. Cela pose le problème de l utilisation de données contemporaines pour traiter des rivières dans le passé : dans quelle mesure a-t-on le droit de les utiliser puisque que les données sont vraisemblablement erronées pour la période que je traite? Ainsi, les généralités vagues, du type de celles de F. de Izarra, ne sont plus satisfaisantes : les apports de la géoarchéologie sont par contre essentiels à ce champ de la recherche. D un autre côté, lorsque nous ne disposons pas de données géoarchéologiques, comment faire autrement que d utiliser les données contemporaines pour analyser les relations sociétés/milieux fluviaux? C est là une contradiction qui reste à résoudre. Il faut peut-être réfléchir à la notion de seuil en deçà duquel les effets des évolutions du régime hydraulique restent mineurs sur les types d utilisations de ces milieux par les hommes (navigation, installation de moulins ). Bibliographie Sources et instruments de travail Blatt F. (éd.), Novum glossarium. Mediae latinitatis ab anno DCCC usque ad annum MCC, Copenhague, E. Munksgaard, Carré de Busserolle J.- X Dictionnaire géographique historique et biographique d Indreet-Loire et de l ancienne province de Touraine, Tours, 6 vol. (Mémoire de la Société archéologique de Touraine, 8, p ). Mabille E La Pancarte Noire de Saint Martin de Tours, Tours, Mühlbacher E Unedirte Diplome, t III, in Mitteilungen des Instituts für österreichische Geschichtsforschung, t VII, Mühlbacher E Diplomata Karolinorum, I, Diplômes de Pépin, Carloman et Charlemagne, M.G.H., Berlin, 1906 (rééd. 1956). Pertz G.- H MGH, Diplomata Regum Francorum e stirpe Merowingica, I, Hanovre, Recueil des actes d Eudes, roi de France ( ), éd. G. Tessier et R.-H. Bautier, Paris, 1967 Recueil des actes de Charles III le Simple, roi de France ( ), éd. P. Lauer, Paris, , 2 vol. Recueil des actes de Charles le Chauve, éd. G. Tessier, Paris, , 3 vol. Recueil des actes de Louis II, Louis III et Carloman II, éd. F. Grat, J. de Font-Réaulx, G. Tessier, R.- H. Bautier, Paris, Recueil des actes de Louis IV, roi de France ( ), éd. P. Lauer, Paris, Recueil des actes de Pépin I et Pépin II d Aquitaine, éd. L. Levillain, Paris, Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

63 Le monastère de Saint-Martin de Tours et la Loire aux IX-Xe siècles (H. Noizet) Recueil des actes de Robert Ier et Raoul, rois de France ( ), éd. R.-H. Bautier et J. Dufour, Paris, Recueil des Historiens de Gaule et de France, t X pour les actes d Hugues Capet, nouvelle édition sous la direction de L. Delisle, Paris, Bibliographie Barbier J. 1994, Palatium, Fiscus, Saltus. Recherches sur le fisc entre Loire et Meuse du VIe au Xe siècle, thèse de doctorat soutenue en 1994 sous la direction d O. Guillot, Paris, 2 t. Champion E. 1996, Moulins et meuniers carolingiens dans les polyptyques entre Loire et Rhin, AEDEH Vulcain, coll. Histoire et patrimoine, 1996, 96 p. Chapelot J., Rieth E. 1995, Navigation et milieu fluvial au XIe siècle : l épave d Orlac (Charente- Maritime), DAF, n 48, Paris, de Izarra F. 1993, Hommes et fleuves en Gaule Romaine, Ed. Errance, Paris, 1993, 240 p. Devroey J.-P «Un monastère dans l économie d échanges : les services de transport à l abbaye Saint-Germain-des-Prés au Ixe», Annales ESC, 39, 1984, p Devroey J.-P «Problèmes de critique autour du polyptyque de l abbaye de St Germain des prés», in H. Atsma (éd), La Neustrie de 650 à 850, vol. 1, Sigmaringen, 1989, p Devroey J.-P. 1993a. «Ad utilitatem monasterii. Mobiles et préoccupations de gestion dans l économie monastique du monde franc (VIIIe-IXe)», Revue bénédictine, 103, 1993, p Devroey J.-P. 1993b. «Courants et réseaux d echanges», in Mercati i mercanti nell Alto Medioevo, Settimana, XXXX, Spolète, 1993, p Dion R Le Val de Loire. Etude de géographie régionale, Ed. Arrault et Cie, Tours, 1934, 752 p. Gasnault P Etude sur les chartes de Saint Martin de Tours des origines au milieu du XIIe siècle, Thèse de l Ecole Nationale des Chartes, Paris, Gasnault P (éd.), Documents comptables de Saint-Martin de Tours à l époque mérovingienne, Paris, Giry A «Etudes carolingiennes», in Etudes d Histoire du Moyen Age dédiées à Gabriel Monod, Paris, 1896, p Grierson P. 1959, Commerce in the Dark Ages : a critique of the evidence, in Transactions of the Royal Historical Society, 5 e série, t 9, Lebecq S Marchands et navigateurs frisons, Presses Universitaires de Lille, 1983, 2 vol. Lohrmann D. 1989, «Le moulin à eau dans le cadre de l économie rurale de la Neustrie», in H. Atsma (éd), La Neustrie de 650 à 850, vol. 1, Sigmaringen, Thorbecke Verlag, 1989, p Nowacki-Breczewski Ph «Apports de l archéologie à l étude des pêcheries fixes de la Moyenne Dordogne», in Recherches sur l économie de la France médiévale : les voies fluviales - la draperie. Actes du 112 ème congrès national des Sociétés Savantes, tenu à Lyon en 1987, Editions du C. T. H. S., Paris, 1989, p Tessier G «Les diplômes carolingiens de Saint Martin de Tours», in Mélanges d histoire du Moyen Age dédiés à la mémoire de Louis Halphen, Paris,1951, p Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

64 Conception de la base de données ARCTO (Ph. Maurice) CONCEPTION DE LA BASE DE DONNEES ARCTO Philippe Maurice UMR 6575, Archéologie et territoires, 2 Place Anatole France Tours Résumé Une base de données a été concue et réalisée afin stocker les informations extraites des sources écrites concernant la ville de Tours au Moyen Age. C'est cette base, nommée Arcto (pour «Archives de Tours») qui fait l'objet du présent article. Bien que limitée pour le moment à la ville de Tours et au Moyen Age, cette base de données pourrait être étendue à d'autres villes. Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

65 Conception de la base de données ARCTO (Ph. Maurice) Introduction Dans le cadre d un programme de recherche sur l interaction entre les hommes et le milieu naturel, sur les versants de la Loire, à Tours, au Moyen Age, a été mise au point, sur l initiative de Joëlle Burnouf, la réalisation d une base de données destinées à contenir des informations extraites des sources écrites. Cette base, nommée Arcto, pour «Archives de Tours», restera ouverte à d autres villes que celle de Tours. De plus, les fiches constituées ne sont peut-être qu un premier pas et Arcto ne prouvera réellement sa valeur qu en s agrandissant d autres enregistrements, fruits des travaux de nouveaux étudiants et chercheurs. Présentation critique des sources Les sources suscitent deux types de questions : leur choix et les limites de la base de données utilisée pour les traiter, limites tant négatives que positives. Description des sources 1 Le choix des sources résulte tant d une direction prescrite par Joëlle Burnouf que des premières recherches réalisées par des étudiants en maîtrise. Ces derniers avaient déjà procédé au dépouillement d un certain nombre d actes 2 lorsque j ai été chargé de la création de cette base de données. Toutefois, les relevés des étudiants étaient orientés à des fins particulières, au vu d une problématique limitée par leur champ de recherche, aussi ne prirent-ils en considération qu une partie des informations, parfois quelques mots. Il a donc été nécessaire de procéder à une nouvelle transcription de l intégralité des actes inventoriés par eux pour éviter une déperdition de l information et pour assurer aux enregistrements une certaine cohérence et une unité de forme. Une infime partie de la documentation (27 actes) provient des fonds des Archives départementales de l Indre-et-Loire, à savoir des chartes prélevées dans les cotes G.55, 505, 506, H.202, 240, 315, 376, mais l essentiel (632 actes) est extrait des registres de comptes de la ville de Tours, cotes CC.1 à CC.51. Peu nombreuses et fort variées, tant par la forme que par le fond, les chartes extraites des fonds du chapitre métropolitain, de la collégiale Saint-Martin et de l abbaye de Marmoutier ne requièrent aucun commentaire. En revanche quelques éclaircissements s imposent à propos des registres de comptes. Dès le début des guerres franco-anglaises, la nécessité de protéger la ville a imposé une veille constante sur l état des fortifications de Tours. Cette obligation s est conjuguée aux efforts portés sur le contrôle des cours de la Loire et du Cher dont les crues provoquaient de graves dommages. Les élus de Tours se sont donc continuellement préoccupés de ces deux impératifs de sécurité face à l ennemi et face à la nature qui sont d ailleurs l une de leurs principales raisons d être 3. Les comptes municipaux reflètent fort bien cette réalité et les travaux de construction grèvent une partie importante du budget de la ville. Toutefois, ces grands travaux publics ne sont pas uniquement orientés vers la défense et la protection du site, ils répondent parfois à des vœux ambitieux, tel le détournement du cours de la Loire amorcé, mais jamais achevé, afin d agrandir la ville. Grâce à ces comptes, nous 1 Archives départementales d Indre-et-Loire G.55, G.505, G.506, H.202, H.240, H.315, H.376, Archives municipales, CC.1-CC.3, CC.5-CC.14, CC.18-CC.33, CC.35-CC.37, CC.39-CC Cl. AUDIBERT, Les digues de Loire à Tours à la fin du Moyen Age, UFR. François Rabelais, Tours, , V. DURRENBERGER, D une rive à l autre de la Loire (Les aménagements du lit mineur de la Loire du 11 e au 15 e siècle dans les sources écrites, de Rochecorbon à Saint-Cyr, UFR. François Rabelais, Tours, 1999, V. LAGADIC, Interactions Homme/Milieu : les îles de la Loire à Tours aux 14 e et 15 e siècles, UFR. François Rabelais, Tours, , et R. VANNIER, La ville de Tours et la Loire à la fin du Moyen Age, d après les registres des comptes municipaux, UFR. François Rabelais, Tours, B. CHEVALIER, Tours, ville royale, : origines et développement d une capitale à la fin du Moyen Age, Paris, éd. Louvain, Nawvelaerts, Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

66 Conception de la base de données ARCTO (Ph. Maurice) découvrons les transformations que l homme a parfois imposées, ou tenté d imposer, à la nature en réalisant des travaux d aménagement, simple comme la construction d un argeau ou complexe tel le détournement du cours de la Loire. Ce sont ces chantiers qui ont principalement monopolisé l attention des étudiants toutefois les chartes de donation s avèrent importantes dans la mesure où elles confèrent des droits à des possesseurs qui pourront s opposer à certaines réalisations 4. Si les comptes constituent une source assez uniforme sur une période d un siècle et demi, la consultation des relevés opérés à la fin du 14 e et dans le courant du 15 e siècle prouve que les rubriques sont beaucoup plus courtes au 14 e qu au 15 e et il semble que les travaux soient mieux décrits à la fin du Moyen Age. Tenus par des officiers et présentés aux élus de la ville, ces comptes contiennent le recensement des recettes suivi de celui des dépenses. Parmi les recettes figurent tout particulièrement les cessions en ferme des droits d appetissement du vin sur Tours et ses environs, les droits de pêche et les locations d immeubles, bâtis ou non-bâtis. Les dépenses sont nombreuses et beaucoup ne concernent pas notre problématique. Elles sont réparties par thème : achat de pierre, achat de bois, frais de bessons, frais de charpentiers, transport par terre, transport par eau, et à l intérieur de ces têtes de chapitre elles sont classées par ordre chronologique. Il n existe donc pas de groupement des dépenses par chantier et, pour retrouver toutes les informations concernant l un d eux (coût, matériaux utilisés, description des aménagements, personnel recruté), il conviendrait de regrouper les frais éparpillés dans l ensemble des chapitres. Critiques des sources Les actes retenus par les étudiants, pour leurs études, n offrent pas un ensemble cohérent. Chronologiquement, ils s étalent sur une période allant du 11 e siècle à la fin du 15 e, sans respecter de répartition proportionnelle. Si la rareté des actes recensés pour la période s étendant du 11 e au 13 e siècle est légitime puisque cette époque ne peut être étudiée que par le truchement de quelques chartes des Archives Départementales, le déséquilibre existant par la suite est dû, non pas à un problème de conservation des sources, puisque les séries de registres de comptes sont presque complètes pour la période de 1358 à 1500, mais au simple choix effectué par les étudiants. Ce déséquilibre est flagrant lorsque nous comparons les périodes (1 acte) et (94 actes). Au sein même des périodes la répartition n est pas meilleure puisque nous relevons un acte en 1380 et quatorze en Il suffit, pour bien comprendre, de considérer qu un seul acte a été prélevé dans le registre CC.43 et quarante-huit dans le CC.44 alors que ces registres contiennent tous des rubriques traitant de travaux. Répartition chronologique des actes Période actes période actes période actes période actes période actes 11 e siècle e siècle e siècle début 14 e total 659 Le second problème est géographique. Aucun chantier n a fait l objet d un relevé systématique des actes le concernant. Nous sommes donc dans l incapacité d appréhender l importance réelle de ces travaux publics, leur coût, la mise en œuvre des moyens, leur dimension et les matériaux effectivement utilisés. De la même façon, aucune construction n est régulièrement suivie dans le temps. 4 C est ainsi que les moines de Marmoutier s opposèrent au projet d agrandissement de la ville de Tours qui empiétait sur leurs droits de possession. Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

67 Conception de la base de données ARCTO (Ph. Maurice) Ce n est pas là le fruit du hasard. Les recherches sur ce thème sont assez novatrices et tout restait à faire. Il a donc fallu lancer les étudiants sur des pistes et leur demander de réaliser des évaluations. Tels des archéologues, ils ont opéré par sondage. La pratique peut sembler contestable à un historien qui préfère travailler sur des séries complètes, voire sur un corpus exploité de façon exhaustive, ou en prélevant tous les actes se rapportant à un même thème. La méthode du sondage paraît peu rationnelle, uniquement inspirée par l arbitraire, au mieux le hasard. Elle présente tout de même un intérêt certain. Les quelques étudiants concernés n auraient pas pu, à leur niveau, effectuer des recherches exhaustives sur une aussi longue période. En revanche, ils ont livré de très bonnes évaluations sur les types de matériaux utilisés pour aménager les rives de la Loire, ils ont dressé des inventaires (incomplets sans doute) des sites où se trouvaient des turcies et des ports, ils ont recensé des crises naturelles, crues et présence de glace, et ils ont ainsi pu présenter diverses hypothèses sur l aménagement des versants de la Loire. Si nous envisageons le choix des actes comme un sondage réalisé sur un espace assez vaste situé dans la région de Tours, entre les rives du Cher et celles de la Loire, et dans une période couvrant principalement un siècle et demi (1358 à 1498), nous pouvons le considérer comme riche d enseignement, ouvrant la perspective à d autres recherches et justifiant, tout en la facilitant, la mise au point d une base de données informatisée. Aperçu statistique du contenu d Arcto S il semble vain de dresser des statistiques détaillées du potentiel de recherche offert par les archives enregistrées dans Arcto, un bref aperçu pourra mettre en exergue son intérêt. Les actes se répartissent ainsi en fonction des quatre grandes catégories d aménagements : aménagement nombre d actes aménagement nombre d actes Digue 307 Digue, divers, fonctionnel, pont 1 Divers 97 Digue, pont 1 Fonctionnel 21 Fonctionnel, pont 1 Pont 196 Sans mention 36 Les types d ouvrages répertoriés sont assez nombreux, simple mur, appentis, cheminée et chemin de ronde. Les inventorier tous dans cette présentation ne ferait qu alourdir ce texte, signalons toutefois le nombre de fiches existant pour certains d entre eux : arche (22), bateis (161), berge (7), chenal (2), dos d âne (37), écluse (3), écorcherie (1), fossé (13), levée (1), moulin (6), ouverture de cours d eau (24), pêcherie (5), poissonnerie (1), port (8), pressoir (1) et turcie (57). 557 d entre eux sont localisés sur la Loire, 43 sur le Cher, 30 sur le ruau Sainte-Anne et 17 sur des boires. Présentation de la base de données «Arcto» Arcto est donc créée pour recevoir des actes permettant d identifier une évolution, une transformation ou un aménagement du milieu par les hommes. Elle a été réalisée, tout spécialement pour des actes extraits de registres de comptes dans lesquels sont consignés des travaux confiés à des artisans, par exemple, telle la construction d un bateis, ou des services effectués lors de tels travaux, tel un Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

68 Conception de la base de données ARCTO (Ph. Maurice) transport de pierres destinées à la réparation d un pont ou d un bateis. Toutefois, elle est également prévue pour recevoir des chartes aux structures, au formulaire et à la diplomatie fort différents, comme la charte de donation d une île. Ainsi, si sa structure est initialement déterminée pour l enregistrement de rubrique de comptes, elle n en demeure pas moins utilisable pour d autres sources. Le logiciel utilisé, 4 e D (4 e dimension), version , d ACI S.A., s avère d une utilisation courante aisément maîtrisable après quelques heures d apprentissage. Ses remarquables performances en font sans doute l un des logiciels les plus performants en la matière et autorisent la création d un nombre illimité d enregistrements, sans restriction du nombre de caractères dans les champs dits «texte». Les critères de recherche et la rapidité de l exécution, le mode de saisie et les nombreuses qualités de ce logiciel permettent d en recommander l usage aux historiens, quels que soient les objectifs de leur recherche. La même base de données peut aisément être convertie pour être utilisée sur PC et MAC, facilitant ainsi les échanges entre chercheurs et laboratoires utilisant des matériels différents. Chaque fiche enregistrée (enregistrement) dans Arcto se compose, à ce jour, de 41 champs, toutefois le nombre de ces derniers pourra être augmenté, au gré des utilisateurs, des sources exploitées et de l extension des thèmes de recherche. La base Arcto est constituée d une table principale de 29 champs et de deux sous-tables de 6 champs chacune. Le but étant avant tout de créer primitivement un minimum de champs permettant de recevoir le plus possible d informations plus ou moins communes à l ensemble des actes 5. Deux types de formulaires ont été utilisés, l un détaillé, l autre par liste, le premier, servant à réaliser la saisie, contient l ensemble des champs créés 6. Par la suite, pour les consultations et la recherche, chaque utilisateur pourra créer des formulaires ne contenant que les informations qu il souhaitera voir apparaître, mais il pourra également faire usage des deux formulaires d origine. La table principale Comme son nom l indique, c est la constituante essentielle de la base de données, recevant les champs les plus représentatifs. C est elle qui sert de modèle à chaque enregistrement (ou fiche) 7. L un des champs, nommé «Identifiant», (n 28) permet de recevoir la signature de la personne ayant réalisé la transcription de l acte (source) enregistré dans la base. Ce premier fonds a entièrement été transcrit et enregistré par Philippe Maurice et c est donc le nom Maurice qui apparaît dans ce champ. Quatre champs servent à présenter l acte, le n 01, nommé «Référence-acte» donne la référence archivistique de l acte et le 02 la date. L acte est transcrit dans le champ 26 et brièvement analysé dans le 27 («Type-acte»). Six champs servent à localiser l action décrite. Le 03 permet d identifier l unité spatiale dans le cadre du programme de recherche auquel se rattache l acte («fenêtre Tours») et le 29 mentionne le ou les fleuves concernés par les travaux réalisés. Ensuite, les 04 («Toponyme»), 06 («Localisation»), 08 («Site») et 10 («Site-annexe») donnent une localisation allant du général au particulier, à savoir de la ville jusqu au site le plus restreint (exemple : 04 Tours, 06 entre les deux ponts, 08 bateis, 10 mur neuf entre les deux ponts). Les champs 5 et 7 fournissent les formes originales (transcrites dans les sources) des localisations 04 et 06. Les champs 11 à 16 permettent de définir le type de travaux mis en chantier. Quatre grandes catégories des travaux ont été retenues : «digue», «pont», «fonctionnel» et «divers» (champs «objet» 11 à 14). La première concerne tout ce qui peut correspondre à des travaux d endiguement (bateis, dos d âne, turcie), même lorsque certains n en sont pas toujours, tels quelques dos d âne ; la seconde regroupe les aménagements de ponts, la troisième des constructions aux fonctions spécifiques (moulins, ports et tanneries par exemple), et la dernière sert à regrouper le reste. Le type du chantier, 5 Voir Annexe 1 : Structure de Arcto. 6 Voir Annexe 2 : Exemples de formulaire. 7 Chaque table principale correspond au modèle d une fiche et chaque sous-table contient un nombre indéterminé de sous-fiches se rattachant à la fiche principale. Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

69 Conception de la base de données ARCTO (Ph. Maurice) qualifié d action, est décrit dans le champ 15 (construction, réparation, renforcement, transport, etc.), alors que la motivation, lorsqu elle existe, est précisée dans le champ 16 (crainte d une crue, comblement d une brèche, protection contre les Anglais, détournement du cours de la Loire, etc.). Les champs 19 à 23 contiennent des informations liées à l exécution des travaux et permettent d envisager l aspect purement humain : régime (marché, tâche) au 22, tarification globale au 23, commanditaire, autorisation et exécutants du 19 au 21, toutefois le dernier n est pas saisissable et renvoie à une sous-table. La même rubrique de compte mentionne parfois des aménagements humains qui ne peuvent pas apparaître dans les champs précédents et qu il serait dommage de faire disparaître tant ils peuvent intéresser les chercheurs, comme la présence d un moulin, d un dos d âne, d une maison, d un pont, ou de toute autre structure qui ne figure dans le texte qu en qualité de repère, ou comme chantier annexe. Afin d éviter une perte de l information deux champs «repères» ont été ouverts (24 et 25) afin de signaler leur présence. Les relations de l homme avec son milieu sont en partie conditionnées par des crises naturelles qui sont consignées dans les champs 9 et 17. La date, lorsqu elle est connue, avec précision ou non, est indiquée dans le champ 18. Les sous-tables La présence des deux sous-tables est motivée par le désir de mettre en exergue des informations définissant mieux les données humaines et structurelles de chaque chantier. Chaque sous-table sert de modèle à des sous-enregistrements complétant chaque enregistrement de la table principale. Exécutants Le champ 21, non-saisissable, ouvre une sous-table permettant de traiter d un aspect humain particulier, celui de l identité du ou des personnages effectuant l action qui est à l origine de la rédaction de l acte. Il permet d enregistrer une fiche, elle-même composée de 6 champs, par personnage. Ainsi chaque homme ayant travaillé sur le chantier peut-il faire l objet d une fiche particulière liée à l enregistrement principal. Le premier champ procure l identité de l intervenant, le second sa profession, le troisième son lieu d origine, le quatrième la tâche individuelle qui lui est confiée, le cinquième la durée, ou la date, du chantier, et le sixième son salaire individuel. Structures Comme le précédent, le champ 13, non-saisissable, ouvre une sous-table. Cette dernière, composée de 6 champs, livre les renseignements permettant d aborder les aspects structurels du chantier. Le premier champ décrit le matériaux utilisé (pierre, bois, planche), le second la quantité, le troisième la provenance, le quatrième le prix, le cinquième sa structure et son utilisation (taille, hauteur, prévu pour une réparation), et le sixième sa destination géographique (pont, bateis). Relié à l enregistrement principal du chantier pourront donc exister plusieurs enregistrements structurels permettant d analyser la nature et l usage des matériaux utilisés. Conclusion L intérêt d une telle base de données n est pas à défendre puisque comme toutes ses semblables elle facilite grandement les recherches. Elle permet ainsi de situer les chantiers, de rapprocher tous les travaux effectués sur un même site à des périodes différentes, parfois espacées d un siècle. C est un bon instrument pour l exploitation de sources écrites par des archéologues. Toutefois, sa conception présente peut-être un défaut, aisément contourné. Quelques rubriques de comptes portent non pas sur un seul chantier mais sur plusieurs alors que la table principale ne permet d enregistrer qu un seul chantier. Il eut été possible de multiplier les champs, dans la table principale, pour y enregistrer Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

70 Conception de la base de données ARCTO (Ph. Maurice) plusieurs chantiers, mais cela eut rendu la consultation plus confuse. Nous avons donc choisi d imposer la rédaction de plusieurs fiches pour de tels actes. Cela ne présente guère d inconvénient, sauf, peut-être, sur le plan statistique puisque plusieurs fiches seront alors identifiées par une référence archivistique commune. D autres imperfections pourront être découvertes par des utilisateurs dont les objectifs de recherche seront orientés à des fins différentes de celles que nous avons prévues, toutefois le caractère évolutif de «4 e Dimension» permet de modifier, d adapter et de transformer Arcto au gré des besoins de chacun. Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

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72 Interactions Hommes / Milieux depuis la protohistoire dans le vallon de Rigny (Liard M., Vivent D., Carcaud N., Zadora-Rio E.) ETUDE DES INTERACTIONS HOMMES / MILIEUX DEPUIS LA PROTOHISTOIRE DANS LE VALLON DE RIGNY (INDRE ET LOIRE) : APPROCHES PLURIDISCIPLINAIRES. Liard Morgane Laboratoire C.O.S.T.E.L., UMR 6554, Département de Géographie, Université de Rennes II. Vivent Dominique IPGQ, UMR 5808, Université de Bordeaux 1, Avenue des Facultés, Talence cedex. Carcaud Nathalie Laboratoire de Sciences de l'environnement et de l'aménagement, Université d'angers, 35 rue de la Barre, Angers. Zadora-Rio Elisabeth UMR 6575, "Archéologie et Territoires", 3 place Anatole France, Tours. Résumé : Mots-clefs : Bassin versant de rang 1, anthropisation, Subatlantique, géoarchéologie, premier Age du Fer, époques historiques. Le site archéologique de l église Notre Dame de Rigny (XIIe siècle, Touraine) se trouve dans la partie médiane d un petit vallon de rive gauche de la Loire. Les données archéologiques et palynologiques complétées par des datations absolues ont permis de définir des repères chronologiques. L'observation des formations superficielles nous permettent de mettre en évidence deux cycles dynamiques successifs. Le premier se rapporte à une formation de colluvions/alluvions du Subatlantique caractérisée par une diminution progressive de la compétence du cours d eau et un milieu déjà anthropisé où des prairies humides dominent. Le second cycle concerne une formation colluviale dont la mise en place aurait débuté au plus tard au Haut Moyen Age. Ce cycle est marqué par un milieu fortement anthropisé où les prairies humides restent abondantes. L habitat du Haut Moyen Age se fixe sur le site de l église Notre Dame de Rigny lors de cette dernière phase dynamique. L occupation continue du site jusqu'à la première moitié du XIX e siècle a contribué à contrôler les apports sédimentaires et les flux hydriques. Abstract : Key-words : catchment of rank 1, anthropisation, Subatlantic, geoarcheology, first Iron Age, historical ages. The archaeological site of the Church of Notre Dame de Rigny (XIIth century, in Touraine) is situated in the median part of a small dale on the left bank of the Loire. The observation of superficial formations of the dale reveals two successive dynamic cycles. The first one relates to a colluvial/alluvial formation of the Subatlantic characterized by a steady decrease in the competence of the river, and an environment already anthropized in which damp meadows/grasslands predominate. The second cycle concerns a colluvial formation which may have started in the Early Middle Ages, at the latest. The latter is marked by a strongly anthropized environment where damp meadows still prevail. It is noticeable that populations of Early Middle Ages settled on the site of the church of Notre Dame de Rigny during this last dynamic phase. Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

73 Interactions Hommes / Milieux depuis la protohistoire dans le vallon de Rigny (Liard M., Vivent D., Carcaud N., Zadora-Rio E.) Introduction L étude géomorphologique du vallon de Rigny (situé en rive gauche de l Indre, entre Saumur et Tours) s est organisée autour de questionnements relatifs à l évolution de la dynamique des versants et du fond de vallon, en relation avec la présence de sociétés humaines, reconnue dès la base du Subatlantique par l'étude palynologique et à partir du Haut Moyen Age par la fouille archéologique. Le site archéologique de l église Notre Dame de Rigny (construite au XII e siècle), au centre de ce vallon, a ainsi constitué un espace privilégié d observation des dépôts de bas de pente, recouvrant les vestiges depuis la première habitation connue (construite à la fin du VII e ou au début du VIII e siècle, agrandie au milieu du VIII e pour être détruite avant 886), jusqu au XIX e siècle. Ce type de bassin d'ordre inférieur constitue un espace d étude essentiel à la connaissance des paysages passés, ayant enregistré et surtout conservé très localement les variations du milieu. Une étude paléoenvironnementale, mettant en œuvre des analyses palynologiques, sédimentologiques et micromorphologiques, a ainsi débuté en 1997, motivée par les archéologues du site (E. Zadora-Rio et H. Galinié) et le Projet Collectif de Recherche «Géoarchéologie de la Loire Moyenne et de ses marges». Le vallon y est intégré en tant qu espace d échelle inférieure en relation directe avec la vallée de la Loire. La démarche d étude adoptée a consisté à croiser les méthodes d'observation, en utilisant des techniques propres à différentes disciplines (géomorphologie, pédologie, palynologie). Une telle approche permet d identifier d éventuels changements de dynamique du milieu environnant, lorsqu'ils ont existé, et d individualiser le rôle des sociétés dans ces variations. Cette problématique est délicate à traiter à l échelle d un espace aussi restreint et potentiellement très marqué par l anthropisation passée. La méthode adoptée a consisté à observer les profils présents sur la fouille du site et à sonder profondément jusqu au substrat en deux points sélectionnés précédemment, l un sur le site archéologique, l autre en amont, plus haut dans le vallon. Problèmes, méthodes et sites d étude Les dépôts de bas de pente dans le vallon du Rigny, problèmes associés. Dès le début de la fouille du site de l'église Notre Dame de Rigny, les archéologues se sont posé des questions relatives aux rythmes de la sédimentation. Ils avaient observé une grande homogénéité des dépôts dans la stratigraphie du site, ainsi qu une forte sédimentation de bas de pente, recouvrant des vestiges allant du Haut Moyen Age au XIX e siècle. Ces interrogations, jointes aux problématiques concernant la mise en place d une paroisse et d un espace de culte (développées par E. Zadora-Rio et H. Galinié), se sont conjuguées à des problématiques environnementales. Ainsi, comment expliquer le choix d un tel lieu, inhospitalier à notre regard (le fond de vallon est étroit, peu ensoleillé et humide), pour construire une église si monumentale, barrant transversalement le fond du vallon? Dans quelles mesures les apports colluviaux provenant du versant, ou les dépôts du ruisseau, ont-ils gêné les populations du site, peut-on interpréter certaines structures comme des aménagements devant freiner ou stopper la sédimentation? La nécessité d une étude du contexte géomorphologique du site archéologique s est imposée à la suite de ces séries de questions. Un premier regard sur les formes du relief autour du site montre qu il est dominé par des versants à fortes valeurs de pente allant de 18 à 20% (fig. 1a et b). Le fond de vallée est étroit, allant de cinquante mètres à soixante quinze mètres au plus large ; cette donnée jointe au caractère pentu des versants confère au site un faible taux d ensoleillement et accentue son caractère très humide toute l année. Le ruisseau a une morphologie de chenal unique sinueux, profond de un mètre à un mètre cinquante dans les dépôts présents en fond de vallon. Ces observations ont dirigé la réflexion sur une étude des formations superficielles présentes sur les versants, en bas de versant et dans le fond du vallon ; à l emplacement du site archéologique, mais aussi dans la partie amont du vallon. Si l on connaît le fort potentiel sédimentogène attribué aux versants (Campy et Macaire, 1989), Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

74 Interactions Hommes / Milieux depuis la protohistoire dans le vallon de Rigny (Liard M., Vivent D., Carcaud N., Zadora-Rio E.) on évalue plus difficilement la part prise par les sociétés dans la stabilisation ou l accentuation de ce processus. La méthodologie appliquée à l étude du site archéologique de Rigny a ainsi tenté d apporter les informations utiles à une réflexion sur les relations homme/milieu pour les périodes concernées, et notamment le Haut Moyen Age. Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

75 Interactions Hommes / Milieux depuis la protohistoire dans le vallon de Rigny (Liard M., Vivent D., Carcaud N., Zadora-Rio E.) Méthodologie, techniques et sites d étude. Dans un premier temps, des observations de coupes ou de tariérages ont permis de caractériser les formations superficielles présentes actuellement sur les versants et dans le fond du vallon ; quant au faciès géologiques, ils ont été observés sur quelques affleurements (les conglomérats siliceux sur les plateaux, les sables et argiles à spongiaires, ainsi que les sables sénoniens sur les versants et le tuffeau jaune en bas de versant ; fig.1c). Les premières observations issues du travail de terrain en amont du site archéologique, ont complété l étude des profils présents sur la fouille du site lui-même, permettant ainsi une comparaison des caractéristiques des dépôts dans le site, et à l extérieur du site. Dans les deux cas on aura noté une forte épaisseur des dépôts en fond de vallon, ce qui ne fait donc pas du site archéologique de Rigny un cas particulier. Cette remarque faite, il était nécessaire d étudier ce remplissage, et de le comparer en plusieurs endroits. Il a été décidé d effectuer deux sondages profonds, l un sur le site archéologique de Rigny, et l autre en amont, au hameau des Duports. Cet emplacement a été choisi en raison de sa situation dans le vallon (fig.1b), il ne présente aucun vestige archéologique à priori, mais se trouve à la confluence des deux têtes de vallon du bassin du Rigny. Ces deux sondages ont fait l objet d analyses granulométriques et palynologiques, permettant d élargir l étude morphosédimentaire et pédologique à une étude paléobotanique. Les sondages ont été effectués par l équipe de Lionel Visset (Université de Nantes) avec un système à percussion utilisant des carottiers cylindriques à fenêtres de type Eijkelkamp. Cette technique présente certes des inconvénients comme des risques de tassement du matériel ou de contamination lors des échantillonnages sur place (Barbier, 1999) mais reste la plus adaptée au contexte archéologique. Le sondage effectué sur le site archéologique a permis de compléter l information stratigraphique du site sur trois mètres, ce qui a permis de descendre en tout à cinq mètres sous la surface actuelle. Au Hameau des Duports, le carottage est parti de la surface actuelle pour aller jusqu à trois mètres cinquante de profondeur, le tuffeau étant atteint. Ainsi, les méthodes adoptées pour l étude des dépôts ont varié selon l échelle d observation requise, elle-même dépendante des questions posées ; macroscopique sur les sondages, les carottages à la tarière à main ou les descriptions de profils, microscopique pour déceler des caractères de mise en place, de pédogenèse (fabrication des lames de sols à I.N.A. P-G, selon la méthode Guilloré) ou la nature des pollens. Nettoyage de coupes, tariérages manuels et sondages à la pelle mécanique où à la carotteuse ont permis l échantillonnage utile aux problématiques posées. La caractérisation texturale et micromorphologique des formations. Dans un premier temps, les résultats des analyses granulométriques effectuées sur les deux sondages profonds déjà évoqués seront développés, pour ensuite poursuivre par l étude des profils présents sur la fouille du site archéologique de Rigny. Un déroulement des résultats qui permet d observer les couches dans l ordre chronologique de leur dépôt, de la base du remplissage du fond de vallon, au sommet de la stratigraphie du site. On notera qu au hameau des Duports, aucune coupe n a été étudiée, le sondage débute au niveau de la surface actuelle. Seules des granulométries et des analyses palynologiques ont été effectuées sur les sondages. Les coupes du site archéologique ont quant à elles fait l objet de granulométries et d analyses micromorphologiques (Liard, 1998). Les données granulométriques. Le sondage des Duports a été réalisé à quelques mètres de la berge de rive droite du ruisseau du Rigny, à l altitude 64,1 mètre NGF (fig.1b). Le ruisseau coule ici au pied du versant occidental. Les formations superficielles atteignent trois mètres trente et se subdivisent en trois unités (Carcaud et al., soumis) qui surmontent le tuffeau jaune du Turonien Supérieur. Le mode de classement qui sera utilisé pour les analyses granulométriques est le suivant : graviers : > à 2 mm ; sables : de 1,6 à 0,05 mm ; limons : de 49 à 2 µm ; argiles : < à 2 µm. A la base du sondage (fig.2) on observe sur 60 cm d épaisseur une succession de séquences sableuses (87 % de sable) et de séquences gravelo-sableuse (49 % de graviers et 44 % de sables) qui sont Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

76 Interactions Hommes / Milieux depuis la protohistoire dans le vallon de Rigny (Liard M., Vivent D., Carcaud N., Zadora-Rio E.) surmontées d un niveau comprenant des fragments de bois et de végétaux. Une datation effectuée sur l un des fragments de bois donne l âge suivant : 450 ± 65.BP, cal AD 1444, à 2 sigma dans un intervalle compris entre 1400 et Les deux unités suivantes ont des granularités proches, elles sont toutes deux sablo-limoneuses, mais des variations des taux d argile et de graviers permettent de les différencier. La deuxième, qui fait 1,30 m d épaisseur, se différencie par la présence de très nombreuses coquilles et un taux d argile compris entre 17 et 18 %. On retrouve dans la dernière unité (1,40 m d épaisseur) les fractions granulométriques observées dans la précédente (les sables se maintiennent entre 38 et 48 %, la part des graviers et des argiles varie inversement entre eux) mais mêlées à des graviers de silex (8 à 23 %). Le sondage de l église Notre Dame de Rigny (fig.2) a été réalisé à proximité immédiate de la coupe IV sur le site archéologique, en position de fond de vallon (fig.1b). L altitude de surface est de 58,1 mètres N.G.F.. L épaisseur des formations superficielles traversées atteint 3 mètres au-dessus de la craie micacée du Turonien moyen (C3b). La sédimentation s organise selon 3 unités principales (Carcaud, à paraître).. A la base, l unité 1 (-3 m à -2 m, soit 1 m d épaisseur). Elle présente un granoclassement positif avec à la base des séquences grossières composées d un matériel à dominante de graviers (calcaire et siliceux, 23 à 51 %) et de sables moyens (500 à 200 µm). Un morceau de mortier brûlé y a été retrouvé. On passe ensuite à une sédimentation essentiellement sableuse où dominent les sables moyens et de nombreux fragments de matière organique. Globalement, cette unité présente des So de Trask compris dans les fourchettes de valeurs allant de <1,75 (pour S2 C1 7) à > 4,5 (pour S2 C1 4). Deux échantillons de bois prélevés dans l unité 1 ont été datés par dosage du radiocarbone 14. On obtient les âges suivants : /- 90 B.P. soit 1382 (1045) 836 B.C. (cal. à 2 sigma) pour S2 C /- 70 B.P. soit 770 (406) 266 B.C. (cal. à 2 sigma) pour S2 C1 6.. L unité 2 (-2 m à -50 cm, soit 1,5 m d épaisseur). Le granoclassement est à nouveau positif avec ici des séquences essentiellement sableuses et mal classées (57 à 75 % de sables, So de Trask compris dans l intervalle 3 < < 4 pour S1 C3 88). Le sédiment est sombre et contient des charbons de bois, excepté dans les derniers 65 cm. Un tesson a également été retrouvé à 1 mètre 20 de profondeur, au milieu de l unité.. L unité 3 (-50cm à 0 cm). Elle ne présente pas de granoclassement, le tri est moyen à nul et la fraction limono-argileuse est importante (50 à 85 %). Deux familles de séquences se distinguent par la lecture des courbes cumulatives. La première (S1 C1 5, S1 C1 8 et S1 C2 22) est claire, sableuse (entre 35 et 50 % de sables) et présente des courbes cumulatives rectilignes, légèrement convexes (absence de tri). La seconde (S1 C2 18 et S1 C1 14) présente un tri moyen, elle se distingue par sa couleur sombre, de fortes proportions de limons fins (19 à 2 µ), une quasi-absence de sables grossiers (1,6 à 0,5 mm) et la présence de graviers de tuffeau épars. Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

77 Interactions Hommes / Milieux depuis la protohistoire dans le vallon de Rigny (Liard M., Vivent D., Carcaud N., Zadora-Rio E.) Il ressort que le sondage des Duports présente un âge des dépôts plus récent que celui du sondage du site archéologique de Rigny. La date effectuée à la base des deux unités sablo-limoneuses du sommet (450 ± 65 BP) cale leur mise en place entre le XV e siècle et l actuel, à un rythme qui, s il était constant, serait de 5 mm par an. Soit une sédimentation très rapide, puisqu elle atteint 3,5 mètres en cinq siècles. Cette dynamique ne peut donc être comparée à celle du sondage effectué sur le site archéologique de Rigny dont les deux dates effectuées à 2,20 m et 2,50 m donnent 2900 ± 90 BP et 2395 ± 70 BP. Le sommet du sondage étant lui-même scellé par des couches archéologiques datées du IX e, X e siècle par la céramique. On comprend avec cet exemple le danger de construire un raisonnement à partir d un seul point de lecture stratigraphique ; sur un petit bassin-versant comme celui-ci la mémoire des processus est exacerbée à tous points de vue, tant en termes d érosion que de sédimentation. L analyse des dépôts du sondage effectué sur le site archéologique (il sera nommé sondage 1 désormais) révèle un remplissage qui débuterait au moins au 1 er Age du Fer, et dont le rythme traduit une certaine stabilité du fonctionnement du ruisseau, qui remblaie progressivement le fond du vallon. Aucune rupture brutale n intervient, seul un changement de dynamique est perceptible au sommet du sondage (passage à une sédimentation limoneuse), sur lequel on reviendra dans la synthèse. Caractérisation texturale et micromorphologique de quatre profils du site archéologique de l église Notre Dame de Rigny. Descriptions macroscopiques des profils et données granulométriques. Quatre profils relevés et étudiés sur le site ont été retenus, ils sont numérotés de I à V (fig.3) et positionnés sur la figure 7 les uns par rapport aux autres selon leur altitude, en NGF. Le sondage 1 a été replacé par rapport aux quatre profils étudiés. Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

78 Interactions Hommes / Milieux depuis la protohistoire dans le vallon de Rigny (Liard M., Vivent D., Carcaud N., Zadora-Rio E.) Une numérotation de 1 à 3 permet de suivre les trois principales couches reconnues, lors des observations de terrain, sur ces profils. La couche 1 est sablo-limoneuse, particulaire et de couleur brun rouge. Elle contient peu d éléments grossiers (5 à 15 %), quelques graviers siliceux et des charbons de bois, en petite quantité. La couche 2 est aussi sablo-limoneuse, particulaire, et de couleur brun rouge clair. Les charbons de bois y sont présents (15 à 25 %), ainsi que les graviers (0,2 à 2 cm) et cailloux (2 à 5 cm) de nature calcaire ou siliceuse. Il y a peu de pierres (5 à 15 %), qui sont majoritairement de nature siliceuse. Il faut aussi noter la présence de mortier, présent à abondant (25 à 50 %) selon le profil. La couche 3 est sablo-limoneuse là encore, particulaire, brun gris (plus ou moins foncée). Elle contient de gros charbons de bois (15%), des fragments d os (5 à 15 %), des fragments de tuile parfois, ainsi que du mortier. Les graviers et cailloux sont abondants (25 à 50 %), de nature principalement calcaire. Le passage entre la couche 1 et 2 (ou 3 pour le profil IV) est distinct (sur 2 à 5 cm) à graduel ( sur 5 à 12 cm), celui entre la couche 2 et 3 est diffus (plus de 12 cm) en raison de taches de l horizons supérieurs et inférieurs qui homogénéisent la transition. La texture des dépôts semble la même dans les trois couches, ce que confirment les résultats des granulométries (fig.4 et 5). Les dépôts sont majoritairement sableux, avec une prédominance des sables moyens (fig. 6), la fraction limonoargileuse constitue les 30 à 40 % restant (fig.5). Des granulométries effectuées sur les matériaux issus des faciès géologiques présents dans le vallon (fig.7), montrent que les sables grossiers dominent, excepté pour les argiles à spongiaires qui présentent une majorité d argiles puis de limons. Un horizon supérieur de sol, prélevé à mi-versant au-dessus du site archéologique, est lui aussi principalement sableux. Les formations superficielles issues des sables sénoniens sont présentes au dessus du site archéologique, sur le versant, et contribuent certainement à la fraction de sable grossier des dépôts du site. Si la texture des dépôts du site ne varie pas ou peu (sauf exception liée aux variations des conditions du dépôt), l importance et la variété des éléments grossiers permettent d individualiser des couches au sein de la stratigraphie du site. Les couches 1, 2 et 3 renvoient à deux grands ensembles sédimentaires reconnus sur le site archéologique. L un correspond aux couches 1 et 2 et se caractérise par une Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

79 Interactions Hommes / Milieux depuis la protohistoire dans le vallon de Rigny (Liard M., Vivent D., Carcaud N., Zadora-Rio E.) sédimentation sablo-limoneuse, de couleur brun rouge, qui comprend très peu d éléments associés aux activités anthropiques. On doit entendre par là des fragments de calcaire, de céramique, de tuile, d os, de mortier etc. Ces éléments accompagnent l ensemble suivant (la couche 3), très riche en restes de matériaux de construction, entre autres. La couche 3 est contemporaine et postérieure à la construction de l église du début du XII e siècle, période qui voit aussi les aires d ensevelissement se stabiliser (les premières sépultures sont connues dès le Haut Moyen Age). Sa couleur est plus claire que celle des couches 1 et 2. La couche 1 est antérieure au premier bâtiment connu sur le site archéologique (construit au VIII e siècle), alors que la couche 2 est sans doute à la fois contemporaine et postérieure à ce même bâtiment. E32, remblais. E31, remblais. Coupe IV, 3 Zone 2 secteur 7. Colluvions dites brun gris. Coupe III, 1 Zone 2, secteur 7. Colluvions dites brun rouge. Sable grossier Sable fin Limon grossier Limon fin Argile Zone 7 secteur 5. Colluvions dites brun rouge. 0% 20% 40% 60% 80% 100% Figure n 4 : Texture des couches du site archéologique : remblais, colluvions dites brun gris et brun rouge En % Coupe IV, 3 Coupe III, Sable grossier Sable fin Limon grossier Limon fin Argile Figure n 5 : Comparaison des textures de prélèvements effectués dans les couches 1 et 3 du site. Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

80 Interactions Hommes / Milieux depuis la protohistoire dans le vallon de Rigny (Liard M., Vivent D., Carcaud N., Zadora-Rio E.) 60 En % Zone 7 secteur 5. Colluvions dites brun rouge, de couleur grise (présence de la nappe). Zone 2, secteur 7. Colluvions dites brun rouge Graviers Sable grossier Sable moyen Sable fin Limon grossier Limon fin Argile Zone 2 secteur 7. Colluvions dites brun gris. E31, remblais. Figure n 6 : Comparaison des textures de 3 couches du site archéologique de Rigny. Coupe IV, 3 Sol sur versant, ho. sup. Sables sénoniens Argiles à spongiaires Sables éoliens Sable grossier Sable fin Limon grossier Limon fin Argiles 0% 20% 40% 60% 80% 100% Figure n 7 : Textures d une couche du site et de l horizon de surface du sol présent à mi-versant, ainsi que des formations géologiques présentes dans le vallon. Etude micromorphologique des couches du site Les cinq profils du site déjà étudiés dans le paragraphe ont fait l objet d une analyse micromorphologique, fondée sur l'étude de 23 lames de grandes dimensions - 13,6 x 6,7 cm - (fig.3). L'analyse micromorphologique a d'abord consisté en une identification des constituants puis en une caractérisation de l'agrégation et de la porosité (Bullock et al, 1985) afin de reconnaître des traits sédimentaires et pédologiques. Il est alors possible de déterminer des attributs discrimants et de définir des micro-faciès. Nous n entrerons pas dans la description complète des microfaciès, cependant il est possible de les aborder en évoquant les principaux attributs caractéristiques de phases de dépôt à Rigny. Il s agit du caractère plus ou moins carbonaté de la masse fine, de la présence ou non d une organisation des éléments de la masse basale significative de la mise en place du matériau et enfin de traits pédologique hérités d un horizon de sol démantelé ou in situ. Les coupes I, II et III présentent des caractéristiques similaires, 4 microfaciès ont été reconnus. Ils sont notés a, b, c et d sur les profils de la figure 3, et positionnés à côté de la lame étudiée. Des symboles le long des coupes et leur légende permettent d évaluer l importance des traits cités. Dans le microfaciès a la masse fine est très peu carbonatée et comprend des fragments de revêtements argileux, de couleur jaune. La masse fine est toujours peu carbonatée dans le b, en revanche les revêtements argileux de couleur jaune (ils semblent s être déposé in situ) sont abondants dans les coupes II et III. Le microfaciès b de la coupe II se différencie puisqu il présente déjà une organisation Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

81 Interactions Hommes / Milieux depuis la protohistoire dans le vallon de Rigny (Liard M., Vivent D., Carcaud N., Zadora-Rio E.) des éléments sableux et fins de la masse basale, trait caractéristique du microfaciès c. Le microfaciès c est plus carbonaté que les précédents, il est encore caractérisé par des fragments de revêtements d argile jaune mais en moindre quantité, et éparpillés (comme en a). Il montre une organisation des éléments sableux et limono-argileux, selon des couches horizontales et successives de lits de sable puis de limons et argiles (tri vertical), cette organisation se renouvelant plusieurs fois dans une même lame. Le microfaciès d est peu carbonaté et comprend quelques fragments de revêtements d argile jaune. Quant au profil V les lames étudiées révèlent une masse fine particulièrement carbonatée (se référer à la légende de la figure 3 pour constater l importance de ce caractère). Le profil IV présente un masse fine peu carbonatée à la base (dans la couche 1) et progressivement plus carbonatée en couche 3, avec des variations. Ces deux profils présentent de nombreux revêtements sombres (présence de matière organique). On constate que ces données complètent les observations macroscopiques du paragraphe précédent ( 2.2.1), elles précisent le mode de mise en place des sédiments et leur origine. Ainsi, la présence de revêtements argileux, de couleur jaune, dans les couches 1 et 2 a plusieurs signification, selon que ces revêtements avaient été fragmentés ou conservés ; on peut envisager le développement d un horizon illuvial, qui est fragmenté in situ par un remaniement des couches sur le site, dont on ne connaît pas la teneur, à moins qu il ne s agisse de fragments colluvionnés, provenant du versant, impliquant la déstructuration d un horizon illuvial présent sur le versant. Ce trait est contemporain de la conservation en certains endroits du site (couche 1 des coupes I et II) d une mise en place par ruissellement, sous la forme de multiples petites rigoles qui créent un tri des particules sableuses et limono-argileuse. Il est possible d'imaginer que ce processus s est souvent produit à Rigny, mais qu il n est pas ou peu conservé dans le sédiment, en raison de la bioturbation et des brassages exercés par les sociétés du site. Le caractère plus ou moins carbonaté de la masse fine renvoie quant à lui à une origine des colluvions de sol différente, selon qu ils proviennent de sols développés sur les sables sénoniens (non carbonatés) ou sur le tuffeau jaune. Les sols développés sur ce dernier sont carbonatés, lorsqu il s agit de profils encore peu développés (horizons proches du substrat). La couche 1 est donc riche d enseignements sur les caractéristiques des dépôts précédents et contemporains des premières occupations (début VIII e pour la structure 14). On peut émettre l hypothèse que les premiers bâtiments (structures 14 et 33 par exemple, fig.3) ont été installés sur un sol aménagé (aplanissement et enlèvement d une partie du sol existant, la couche 1), dont la surface est concernée par un processus de ruissellement avant d être scellée par le dépôt d une autre couche (la 2) qui est contemporaine du fonctionnement de ces premières habitations. Cette période du Haut Moyen Age nous intéresse particulièrement puisque la sédimentation du sommet du sondage 1 (les cinquante derniers centimètres) lui est contemporaine. Cet aspect sera discuté avec les résultats des données palynologiques, dans la synthèse. Données palynologiques. Méthode d analyse Au total 40 échantillons (29 pour Rigny l église et 11 pour les Duports) ont été dans un premier temps retenus en fonction de la nature de leurs encaissants (Vivent, 1996 et 1998) et ainsi traités. Ils sont acquis selon le protocole suivant : - Les traitements chimiques et physiques en laboratoire ont été effectués sur les échantillons selon la méthode Turon (1984). - A l aide d un microscope de marque Ausjena-laboval 4., toutes les déterminations sont effectuées à l objectif 100 (x1250) à immersion. Au préalable, le balayage du montage effectué entre lame et lamelle est réalisé à l objectif 40 (x500). - Les identifications de pollens ou spores reposent sur les critères morphologiques spécifiques retenus par Faegri et Iversen (1950), Erdtman (1952) et Pokrovskaia (1950). Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

82 Interactions Hommes / Milieux depuis la protohistoire dans le vallon de Rigny (Liard M., Vivent D., Carcaud N., Zadora-Rio E.) - Les dénominations des taxons déterminés sont celles de la Flora Europaea de Tutin et al. ( ). Tous les taxons sporo-polliniques complets ou déchirés, non identifiés avec certitude, sont regroupés dans les indéterminables. - Lorsque le nombre de pollens ou spores identifiées par échantillon est supérieur à 150, on cesse l inventaire (Bastin, 1964) et pour le calcul des fréquences absolues, la méthode de Vivent est utilisée (1996 et 1998). Résultats polliniques bruts. Données polliniques quantitatives Après les identifications et les comptages des 40 échantillons analysés, 25 spectres polliniques peuvent être retenus (tab.1) d un point de vue quantitatif (Vivent 1996 et 1998). L'EGLISE RIGNY Nombre total d'échantillons analysés 40 DUPORTS Nombre total d'échantillons analysés par site Nombre d'échantillons retenus retenus non retenus retenus non retenus ou non lors des interprétations (Bastin, 1964) Nombre moyen de pollens/gr d'échantillon Nombre maximum de pollens/gr d'échantillon Nombre minimum de pollens/gr d'échantillon Nombre moyen de pollens/gr d'échantillon/site Tableau 1 A partir des 25 spectres polliniques retenus seulement 3 se rapportent au sondage de Rigny-Duports et les autres à celui de Rigny-l Eglise. En conséquence, il est impossible de tenter des reconstitutions paléo-environnementales (diagrammes et interprétations) pour le sondage de Rigny-les Duports. Cette dernière observation peut s expliquer par les résultats obtenus suite aux calculs des fréquences polliniques absolues exprimées en nombre de pollens conservés par gramme d échantillon sec analysé. En effet, on constate que les fréquences polliniques absolues des échantillons retenus sont en moyenne proches de 2700 Pol./gr tandis que les autres sont de 204 Pol./gr. De plus, on observe des taux polliniques absolus supérieurs pour les échantillons provenant du sondage de Rigny-l Eglise. Ces différences de conservation du matériel sporo-pollinique pourraient être liées à la nature et à la dynamique des dépôts encaissants (Vivent, 1996 et 1998) et non aux techniques de prélèvements. Données polliniques qualitatives Au total, à partir des 40 échantillons traités, 51 taxons polliniques différents (tab.ii) ont été identifiés. Ce résultat témoigne d une grande richesse qualitative propice à des reconstitutions palynologiques ultérieures plus fiables. Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

83 Interactions Hommes / Milieux depuis la protohistoire dans le vallon de Rigny (Liard M., Vivent D., Carcaud N., Zadora-Rio E.) Nombre total de taxons identifiés 51 RIGNY L'EGLISE Nombre total de taxons identifiés par site Nombre moyen de taxons identifiés par échantillon Nombre maximum de taxons identifiés par échantillon Nombre minimum de taxons identifiés par échantillon 4 4 DUPORTS Tableau 2 On observe également encore entre les deux sondages une différence à propos du nombre des taxons identifiés (tab. II). En effet, pour le sondage de Rigny-l Eglise on totalise 51 taxons différents identifiés contre 37 pour le sondage de Rigny-les Duports soit une différence moyenne par échantillon de 8 taxons. Ce point pourrait être corrélé avec l hypothèse de moins bonnes conditions de conservation. Pour réaliser un diagramme simplifié, nous avons classé les taxons par groupes (Vivent 1996 et 1998b). 32 taxons sur les 51 identifiés ont été retenus (fig. 8 et 9). Par échantillon, l ensemble des groupes de taxons représente au minimum 80 % des fréquences polliniques relatives cumulées. Forestier GROUPES TAXONS TAXONS Ripisylve Hygrophytes Fougères Asteroideae, Poaceae, cichorioideae Prairies Rudérales Cultures PINUS BETULA QUERCUS FAGUS CORYLUS FRAXINUS CARPINUS JUGLANS ALNUS SALIX ULMUS TAXUS JUNIPERUS ERICACEAE HEDERA POACEAE Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

84 Interactions Hommes / Milieux depuis la protohistoire dans le vallon de Rigny (Liard M., Vivent D., Carcaud N., Zadora-Rio E.) CEREALIA CANNABACEAE ASTEROIDEAE CENTAUREA ARTEMISIA CICHORIOIDEAE SCROPHULARIACEAE CHENOPODIACEAE CARYOPHYLLACEAE MALVACEAE ARMERIA RUMEX APIACEAE BRASSICACEAE CAPRIFOLIACEAE PLANTAGO POLYGONUM LABIATEAE RUBIACEAE LILIACEAE CAMPANULACEAE ROSACEAE SANGUISORBA FILIPENDULA URTICA MYRICACEAE CYPERACEA LEMNACEAE NUPHAR SPORES MONOLETE POLYPODIUM ASPLENIUM SPORE TRILETE LYCOPODIUM Figure n 8 : GROUPES DES TAXONS D APRES VIVENT 1996 ET 1998 (VIVENT 1999) - Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

85 Interactions Hommes / Milieux depuis la protohistoire dans le vallon de Rigny (Liard M., Vivent D., Carcaud N., Zadora-Rio E.) Figure n 9 Présentation des données polliniques de Rigny l Eglise. Sur toute la séquence, les taux relatifs de pollens arboréens sont faibles (<45%). Ils déclinent légèrement de la base vers le sommet. Ils sont essentiellement dominés par les taxons forestiers. Par ordre décroissant on trouve Quercus (Chêne), Pinus (Pin), Betula (Bouleau) et plus sporadiquement Fagus (Hêtre), Carpinus (Charme) et Corylus (Noisetier). La ripisylve est perceptible et semble un peu plus marquée vers le sommet de la séquence. Elle est constituée par ordre décroissant par Salix (Saule) et Alnus ( Aulne). Plus épisodiquement, on trouve Fraxinus (Frêne) et Ulmus (Orme). Il faut noter au milieu de la séquence (échantillon n S1.C3.086 à 080) que ces deux groupes accusent simultanément et momentanément un net déclin. Les pollens herbacés sont dominés par le groupe des Poaceae, Asteroideae et Cichorioideae. Ce dernier croit tout au long de la séquence pour terminer largement majoritaire. L optimum de ce groupe est localisé en milieu de séquence (échantillon n S1.C3.086 à 080). Le groupe des prairies est très peu marqué. Il est enregistré seulement au sommet de la séquence. Les hygrophytes bien représentées à la base de la séquence déclinent peu à peu. Elles sont représentées par ordre décroissant par les Cyperaceae, Lemnaceae et Nuphar (Nénuphar). Comme Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

86 Interactions Hommes / Milieux depuis la protohistoire dans le vallon de Rigny (Liard M., Vivent D., Carcaud N., Zadora-Rio E.) les hygrophytes le groupe des Fougères est bien marqué à la base de la séquence et il décline vers le sommet où il est faiblement enregistré. Le groupe des cultures et celui des rudérales ont des enregistrements polliniques similaires. En effet, ils sont perceptibles dès la base de la séquence et ils croient de la base vers le sommet excepté en milieu de séquence ou les rudérales sont très sporadiques (échantillon n S1.C3.086 à 080). Les cultures sont essentiellement représentées par Cerealia et Centaurea (Centaurée) et quelques Cannabaceae tandis que les rudérales le sont par ordre décroissant par les Chenopodiaceae, Urtica (Ortie), Rumex, et les Plantaginaceae. Corrélation des données polliniques et géomorphologiques, interprétations. Bio-chronologie relative. Sur toute la séquence pollinique du sondage de Rigny-l Eglise, d une part les activités humaines sont présentes (Cultures et Rudérales), d autre part un faible taux de pollens arboréens, dont des pollens d'alnus, Corylus et Fraxinus est enregistré. Ces éléments tendraient à indiquer que l ensemble de la séquence ainsi analysée appartiendrait à la période pollinique du Subatlantique qui commence vers 3600 ans BP (Morzadec-Kerfourn, 1974 ; Visset, 1979 ; Vivent, 1996 et 1998 ; Barbier, 1999). Des interprétations palynologiques analogues ont été décrites à partir d autres sites en Touraine (Vivent, 1996 et 1998). Notre hypothèse chronologique semble être validée par les datations radiocarbones acquises sur 2 échantillons prélevés à la base de cette même séquence (cf 2.1). Quant aux données archéologiques, elles permettent de positionner les cinquantes centimètres supérieurs du sondage (dépôt majoritairement limoneux) comme antérieurs au IX e -X e siècles. En effet une sédimentation sablo-limoneuse comprenant des tessons datés de ces périodes scelle ces couches limoneuses. Sédimentation et zonation pollinique. Trois phases se distinguent dans les analyses effectuées sur le sondage de Rigny-l Eglise (sondage 1), elles sont de la base vers le sommet : Phase I. Un paysage de prairies en fond de vallon, allié à un remplissage colluvio-alluvial du ruisseau. On observe durant cette phase une chênaie (groupe forestier) assez développée et sans doute située sur les pourtours du vallon et sur le plateau au nord. La ripisylve, qui est faiblement enregistrée, pourrait se rapporter à un écho de la vallée de la Loire, à l embouchure du vallon en aval du site. Le vallon lui même serait constitué de prairies (Poaceae, Asteroideae, Cichorioideae) très humides (nombreuses hygrophytes). La présence des Fougères pourrait confirmer la proximité du couvert forestier et le caractère humide du lieu. La présence de cultures et d essences rudérales atteste d une occupation humaine qui semble modérée. Le ruisseau connaît au même moment un remplissage sablo-graveleux dont la granulométrie des sédiments baisse progressivement au profit des fractions fine. Cette augmentation progressive des limons et des argiles se poursuit dans la phase suivante. Ce processus peut s expliquer soit par l épuisement du stock et une baisse de la compétence (il s agit d une origine "alluviale" dans ce cas), soit par une stabilisation des versants liée à la présence d une couverture végétale qui tend à augmenter. Les deux possibilités peuvent aussi se conjuguer. Les sols sont hydromorphes et le drainage du fond de vallée est probablement médiocre. Une stabilisation progressive du milieu semble s'effectuer dans le courant du Premier Âge du Fer ainsi que par la suite, parallèlement à la présence de traces d anthropisation encore discrètes, décelables dans l analyse des pollens. Phase II. Une ouverture du paysage végétal, morphogenèse faible. Un déclin de la chênaie, de la ripisylve ainsi que des rudérales est observé. En opposition, une forte extension des prairies toujours très humides s'effectue. Si nos enregistrements polliniques peuvent être considérés comme fiables, malgré des taux de conservation (Nb. De Pol/gr) assez faibles, cette zone Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

87 Interactions Hommes / Milieux depuis la protohistoire dans le vallon de Rigny (Liard M., Vivent D., Carcaud N., Zadora-Rio E.) apparaît comme une modification de la dynamique de la végétation. Ce changement pourrait être d origine anthropique (défrichement au sein du vallon pour des raisons pastorales ou agraires) mais aussi d origine naturelle (modification écologique des populations, sous l action de maladies ou de variations des conditions météorologiques), à moins que les deux ne se conjuguent. Les cultures sont bien représentées et attestent de la présence des sociétés dans le vallon. Aucun événement brutal (présence d'un seuil net visible dans la sédimentation, lié à une érosion ou à un dépôt à la dynamique différente) ne vient perturber la séquence sédimentaire au moment de cet enregistrement pollinique. Il est regrettable que les pollens n aient pas été conservés dans les prélèvements suivants, dont l analyse granulométrique continue à traduire une stabilité de la dynamique du ruisseau. Il faut supposer que celui-ci méandre, accumulant 2 mètres de sédiment sablolimoneux sur près de 1000 ans avant qu un changement n intervienne. Phase III. Vallon fortement anthropisé, associé à une modification de la sédimentation dans le chenal. Cette phase se caractérise par une occupation humaine plus soutenue (cultures et rudérales en augmentation) et la poursuite de l extension des prairies sans doute à des fins pastorales ou d habitats. Ces prairies apparaissent moins humides (régression faible pour les hygrophytes). La chênaie avoisinante reste faiblement enregistrée et la ripisylve est plus perceptible que dans la période précédente. L ensemble de ces observations indiquerait que le paysage végétal reste ouvert, s'il ne tend pas à s'ouvrir davantage. Ce paysage est contemporain d une modification de la dynamique du chenal, la sédimentation devient majoritairement limoneuse, ce qui n était pas le cas dans la phase précédente. Cette sédimentation (qui constitue l unité 3 du sondage 1), replacée dans le contexte archéologique de la fouille du site de Rigny, était surmontée d empierrements (il s'agit de F802 - le plus ancien - et du mur 103 dans un second temps). La couche archéologique qui accompagne ce second mur, construit sur le précédent empierrement, comprenait des tessons des VIII e -IX e siècles. L'unité 3 est donc contemporaine des premiers aménagements et bâtiments attestés sur la fouille (la structure 14, évoquée dans l introduction, construite au début du VIII e siècle). Il est possible de rapprocher ces observations de l étude micromorphologique des profils de la fouille. Les microfaciès nommés a, b et c (fig.3) correspondent à des dépôts peu anthropisés, peu pédogenéisés, avec un faible taux de matières organiques (0,26 à 0,3 %), et qui connaissent un "rafraichissement" constant par des apports provenant du versant (sols non carbonatés, formés sur les sables du Sénonien à ce moment là). On constate dans la couche 2 un changement, déjà discernable dans le microfaciès b, net dans le c, qui se traduit par une augmentation des éléments attribués aux activités anthropiques (mortier, charbons de bois, fragments calcaires, entre autres). Ces observations peuvent se traduire en terme de plus ou moins forte présence des sociétés sur le site, ceci de part et d autre de la construction des premiers bâtiments. Quant à la sédimentation limono-argileuse du sommet du sondage 1, on peut envisager deux hypothèses pour l expliquer : il s agit soit d un recoupement de méandre du ruisseau, laissant un chenal abandonné dans lequel sédimentent limons et argiles, soit d un aménagement anthropique qui crée un forçage (il faut plutôt envisager alors un aménagement en aval du cours, modifiant la dynamique en amont). On peut difficilement pencher pour l une ou l autre, dans un cas cette modification est représentative de la dynamique "naturelle" du ruisseau, dans l autre elle traduit une action directe des sociétés sur le milieu, et en l occurrence sur la dynamique du cours d eau. Cette action a pu aussi se traduire par une accélération du processus de recoupement, en raccordant des portions du chenal proches. Synthèse et conclusion L étude du remblaiement de fond de vallon, alliée à une analyse palynologique et aux données archéologiques, apporte des informations couplées sur l évolution des rythmes de la sédimentation, sur le couvert végétale ainsi que sur la plus ou moins forte présence des sociétés. Dans le vallon du Rigny leur présence est attestée dès le début du Subatlantique (1 er Age du Fer), et s intensifie au VIII e siècle, période à laquelle plusieurs bâtiments en pierre sont construits sur le site archéologique de l église Notre Dame de Rigny. La séquence de remplissage du fond de vallon, sur le site se traduit par une Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

88 Interactions Hommes / Milieux depuis la protohistoire dans le vallon de Rigny (Liard M., Vivent D., Carcaud N., Zadora-Rio E.) sédimentation sablo-limoneuse, sans décharge grossière (exceptée celle de la base, dont on ne connaît pas l origine), ni variation significative. L absence de modification notoire des caractéristiques de la sédimentation à Rigny semble indiquer une stabilité des processus d érosion sur les versants entre le premier Age du Fer et le Haut Moyen Age. En effet, dans les vallons de rang inférieur, la sédimentation est directement liée à l érosion sur les versants (Larue et al. 1996). Des observations similaires ont été effectuées dans le bassin de la Loire. Cette absence de bouleversements sédimentaires et de crises érosives semble indiquer que les aménagements importants réalisés par les sociétés rurales ne sont pas toujours source de bouleversements morphogénétiques (Carcaud, et al 1998 et 2000; Carcaud 1999, 2000 ; Burnouf et Carcaud, 1999, 2000). Pourtant, le Premier Age du Fer a souvent été décrit comme une période de réactivation des processus de versant, mis en relation d une part avec la fragilisation des sols (défrichements, pour des pratiques pastorales dans la vallée du Fouzon par exemple) et d autre part avec une péjoration climatique (Allée, et al, 1997 ; Bravard, 1992 ; Deloze, Gauthier 1996). Pour engendrer une crise érosive importante il faut un régime de précipitations intenses sur des sols peu couverts ou fragilisés (Larue et al., 1996). Cette seconde condition explique les variations des enregistrements d un vallon à l autre, en effet, selon l occupation du sol et les activités des sociétés, la réponse érosionnelle variera à conditions climatiques similaires. A partir du VIII e siècle à Rigny une sédimentation fortement marquée par la présence anthropique sur le site est enregistrée, masquant les processus climatiques (tel que le Petit Age Glaciaire ultérieurement). Par ailleurs, au VIIIe siècle un changement de dynamique s effectue à l emplacement du chenal étudié, la sédimentation devient majoritairement limoneuse. Un recoupement de méandre peut être à l'origine de ce changement, mais aussi un aménagement de l espace (seuil, création de bief, gué ), d'autant que les sociétés s'installent durablement sur le site (plusieurs bâtiments sont construits, ainsi que la première église, tout proche du chenal). Les couches du site sur lesquelles ils s installent enregistrent une perturbation (déstructuration d un horizon illuvial, ruissellement sur sol dénudé et dépôt de matériaux). Elle s accentuera aux cours des siècles, les activités anthropiques enrichissant les couches du site de matériaux variés (calcaire, charbons de bois, ossements, mortier), et modifiant leurs caractéristiques de couleur et de structure. Pour conclure, il faut insister sur le fait que la présence continue des sociétés humaines jusqu à la première moitié du XIX e siècle semble avoir contribué à contrôler les apports sédimentaires et les flux hydriques au sein du vallon du Rigny, contrairement à ce que l'on aurait pu croire dans un premier temps. Il est donc nécessaire de multiplier ce type d'approche, pour mieux comprendre le fonctionnement de ces petits bassins en vallée de la Loire et les relier au fonctionnement de celle-ci (Cyprien et al., 2001). Bibliographie : Allée, P., Diot M..F., Durieux J.F., Reynet J.M., Valadas B., Trois mille ans d'enregistrement sédimentaire dans les fonds de vallons des bas plateaux limousins. La dynamique des paysages protohistoriques, antiques, médiévaux et modernes, actes des XVIIe rencontres internationales d'archéologie et d'histoire d'antibes, éditions APDCA, pp Alcaydé, G., Carte géologique de Chinon (XVII-23). B.R.G.M., Service Géologique National. Barbier, D., Histoire de la végétation du nord-mayennais de la fin du Weichsélien à l aube du XXIe siècle. Mise en évidence d un tardiglaciaire armoricain, Interactions Homme-Milieu. Ed. Groupe d Etude des Milieux Naturels, vol.1, 283 p. Bastin, B., Recherches sur les relations entre la végétation actuelle et le spectre pollinique récent dans la forêt de Soignes (Belgique). Agricultura, vol. XII, 2 e série, n 2, p Bravard, J.P., Les rythmes d évolution géomorphologique des vallées françaises au Tardiglaciaire et à l Holocène. Bull. Ass. Géogr. Franç., Paris, 1992, n 3. Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

89 Interactions Hommes / Milieux depuis la protohistoire dans le vallon de Rigny (Liard M., Vivent D., Carcaud N., Zadora-Rio E.) Bullock P., Fedoroff N., Jongerius A., Stoops G., Tursina T., Babel U Handbook for soil fine section description, Wolverhampton : Waine Research Publication. 152 p. Burnouf J., Carcaud N Le val de Loire en Anjou Touraine : un cours forcé par les sociétés riveraines. Médiévales, 36, pp Burnouf J., Carcaud N L Homme et les vallées : les vals de Loire de Tours à Angers. Annales de Bretagne, tome 107, n 1, pp Campy M., Macaire J.J Géologie des formations superficielles, géodynamique faciès utilisation. Edition Masson, 433 p. Carcaud N., Mercier F., Opritesco A.., Pont C Dernières découvertes géoarchéologiques dans la vallée de l Authion, BAGF, , pp Carcaud N. (ss. La coord.) et al., Géoarchéologie de la Loire moyenne et de ses marges, rapport de synthèse , PCR, SRA Centre, rapport interne. Carcaud N. (ss. La coord.) et al., Géoarchéologie de la Loire moyenne et de ses marges, rapport n 1, PCR, SRA Centre, rapport interne. Carcaud N., Cyprien A. L., Visset L Marais et vallée de la Loire, mémoire des paysages depuis dix mille ans ; étude comparative des marais de Distré et Champtocé et de la vallée de la Loire à Montjean-sur-Loire. Archives d Anjou, un fleuve, des hommes : la Loire et ses affluents, une histoire tumultueuse, numéro spécial (4), Association des Amis des Archives d Anjou, pp Carcaud N., Liard M., soumis. La cyclicité des flux sédimentaires depuis la protohistoire dans le vallon de Rigny (Indre et Loire). Soumis pour publication dans le cadre de la publication du séminaire de Molesmes (septembre 1999). Cyprien A. L., Carcaud N., Visset L Etude paléoenvironnementale du marais de Distré (Saumurois) : géoarchéologie d'une zone humide depuis le Préboréal. Quaternaire spécial "Paléoenvironnements Holocènes et Géoarchéologie", vol.12, 1-2, pp Deloze V., Gauthier A Evolution de l environnement sédimentaire et végétal du site archéologique de la Tuille (vallée du Fouzon, Cher, France).Actes du Colloque de Périgueux 1995, supplément à la Revue d Archéométrie, pp Erdtman, G., Pollen morphology and plant taxonomy, Angiosperms. Almquist & Wiksells, Stockholm, 539 p. Faegri, K., et Iversen, J., Textbook of pollen analysis. J. Wiley &sons (ed.), 4ed., 328 p. Larue J.P., Leroyer C., Mahoué J.P Les remblaiements de fond de vallons : l exemple du Royeau dans le bassin de la Sarthe, à l ouest du Bassin Parisien (France). Géomorphologie : relief, processus, environnement, n 4, pp Liard M., Colluvionnement et anthropisation en site archéologique, le cas du site de l église Notre Dame de Rigny. Mémoire de DEA de l I.N.A. Paris-Grignon, formation doctorale Archéologie et Environnement, Maison de l Archéologie, Nanterre. Morzadec-Kerfourn, M.T., Variations de la ligne de rivage armoricaine au Quaternaire. Analyses polliniques de dépôts organiques littoraux. Mémoire de la Société Minéralogique de Bretagne, 17, Rennes, 208 p. Pokrovskaia, I.M., Analyse pollinique. Annales du Service d Information du B.R.G.M., éd. C.N.R.S., 421 p. Turon, J.L., Le palynoplancton dans l environnement actuel de l Atlantique Nord-Oriental. Evolution climatique et hydrologique depuis le dernier maximum glaciaire. Mém. Int. Géol. Bassin d Aquitaine, Bordeaux, n 17, 313 p. Tutin, T.G., Heywood, V.H. Burges, N.A. Moore, D.M. Valentine, D.H. Wlaters, M. and Webb, D.A., Flora Europaea. Cambridge University Press, 5 vol., Cambridge. Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

90 Interactions Hommes / Milieux depuis la protohistoire dans le vallon de Rigny (Liard M., Vivent D., Carcaud N., Zadora-Rio E.) Visset, L., Recherches palynologiques sur la végétation Pléistocène et Holocène de quelques sites du district phytogéographhique de Basse Loire. Société des Sciences Naturelles de l Ouest de la France, suppl, hors série au bulletin 1979, 238 p. Visset L., Pont, C., Carcaud N., Bernard J., Violot J.M., Etude paléoenvironnementale de la vallée du Lane du Néolithique au Moyen Age : Saint-Nicolas-de-Bourgueil (37), La prairie du Cassoir, Quaternaire, 10 (4), pp Vivent, D., La palynologie appliquée à l archéologie : nouvelles approches expérimentales, applications à quelques sites historiques de Tours. Thèse de Doctorat de 3 e cycle, Université de Bordeaux, n 1381, 3 tomes, 613 p. Vivent, D., Le site de Tours et son environnement : l approche palynologique. Recherche sur Tours 15, supplément de la Revue Archéologique du Centre de la France, Tours 1998, 96 p. Zadora-Rio, E., Rigny-Ussé : archéologie d une commune rurale. Ed. FERAC, 38 p. Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

91 La haute vallée de l'authion (N. Carcaud, W. David, C. Pont, A.L. Cyprien, L. Visset) LA HAUTE VALLEE DE L'AUTHION N. CARCAUD, W. DAVID LSEA, Université d'angers, 35 rue de la Barre, Angers. C. PONT AFAN, A.85 A.L. CYPRIEN, L.VISSET Laboratoire d'ecologie et des Paléoenvironnements atlantiques, BP 92208, Nantes cedex 03. Résumé Les recherches interdisciplinaires menées sur le val d'authion en précisent l'histoire holocène. Malgré son isolement partiel, la dépression latérale est intimement liée à la Loire qui dirige son évolution dynamique, lui confère la complémentarité de ses terroirs mais l'assujettit à des risques d'inondation. C'est autour de cette rencontre entre l'homme et le milieu alluvial que se construit l'évolution morphologique de cet espace. Abstract The interdisciplinary research carried out in the Authion valley supplies information about its Holocen history. In spite of a partial isolation, the lateral depression is closely linked to the river Loire, which determines its dynamic evolution, supplies it wuth complementary soils but exposes it to flood risk. The morphology of his arae evolves from these correlations between human activity and alluvial environment. Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

92 La haute vallée de l'authion (N. Carcaud, W. David, C. Pont, A.L. Cyprien, L. Visset) Introduction Entre Tours et Angers, le champ d'inondation de la Loire s'épanouit sur 77 km (34000 ha) pour former le plus grand des vals ligériens : le val d'authion (Y. Babonaux, 1970). Si cet espace est aujourd'hui protégé par une levée qui l'isole en partie de l'influence du fleuve, il n'en demeure pas moins une zone humide complexe soumise au risque d'inondation en cas de crue exceptionnelle de la Loire (Fig. 1). L'objectif de ce travail est de retracer l histoire de la dynamique holocène du val d Authion et de son aménagement dans sa partie amont, entre Ingrandes de Touraine et Vivy. Plusieurs hypothèses de départ sont à envisager. Hypothèses dynamiques Nous sommes dans un espace complexe soumis à deux séries de flux. Des flux ligériens constitués par les alimentations phréatiques de hautes eaux et les débordements qui se produisent par défluviation latérale ou par régression de l aval vers l amont pour entraîner un alluvionnement important. La présence du bec de Vienne renforce la menace par des apports à caractère plus torrentiel. Des flux issus de ses propres cours d eau (Changeon, Lane, Authion), directement tributaires de la Loire, et qui ont donc vraisemblablement enregistré les fluctuations de son niveau de base par incision ou exhaussement de leur talweg. De part ce lien ligérien, la connaissance de cet espace devrait être révélatrice des évolutions environnementales locales mais aussi de tendances à caractère plus régional. Depuis l époque médiévale, le val d Authion a été progressivement et en partie isolé de la Loire par la construction d une turcie puis d une levée régulièrement exhaussée et consolidée jusqu à l époque moderne. On peut donc supposer qu'il a connu, depuis, une fossilisation partielle de sa morphologie. Hypothèses de peuplement Elles sont fondées sur un paradoxe qui est le fait que cette partie du val a dû être très tôt convoitée par l agriculture en raison de la diversité et de la complémentarité des sols s y trouvant réunis (buttes, basses terrasses, prairies inondables). Cet espace abrite d ailleurs aujourd hui la plus forte densité de peuplement fixé dans le val. Toutefois, si la vallée peut être attractive pour ses potentialités agronomiques, elle est néanmoins sujette à l'inondation qui constitue une gêne pour son occupation. Moyens mis en oeuvre - Méthodologie La méthodologie employée a été de recenser puis de croiser des informations de surface et des données stratigraphiques afin de comprendre le fonctionnement hydrodynamique du val d Authion et son évolution. Les documents relatifs aux données de surface Les données topographiques Pour caractériser l'organisation actuelle des formes du relief et du réseau hydrographique, nous avons utilisé des cartes topographiques au 1/ e et 1/25 000e de l'i.g.n. Ces documents se sont avérés intéressants pour la compréhension générale de l'espace mais de précision insuffisante pour une analyse fine de la topographie du val d'authion. En effet, l'équidistance des courbes de niveau est de 5 mètres et le document ignore donc toute une série de petites surélévations (1 à 2m) particulièrement importantes pour le peuplement car en situation d'abri face aux inondations. De même, on ne peut pas se contenter de ces cartes générales pour une étude détaillée du réseau hydrographique et notamment des paléochenaux. Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

93 La haute vallée de l'authion (N. Carcaud, W. David, C. Pont, A.L. Cyprien, L. Visset) Figure 1: Localisation générale Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

94 La haute vallée de l'authion (N. Carcaud, W. David, C. Pont, A.L. Cyprien, L. Visset) Pour combler en partie ces lacunes, nous avons eu recours à des coupes microtopographiques de précision métrique perpendiculaires au val et réalisées par un géomètre de l'afan. Elles ont été entreprises dans les secteurs les plus complexes du val. Un certain nombre d'informations a également été déduit de l'atlas des zones inondables et de la "carte topographique du cours de la Loire" au 1/20 000e construite entre1848 et Les photographies aériennes L'outil le plus pertinent pour observer le contexte hydrodynamique actuel et repérer des traces fossiles a toutefois été la photographie aérienne ; 30 missions de l'i.g.n. agrandies au format 60/60 ont pu être étudiées. Selon la saison, l'état de la végétation, ou le taux d'humidité des sols, elles ne répondent pas toujours à notre questionnement. Les plus intéressantes se sont avérées être les missions de 1985 et Les cartes et textes anciens Une fois les bases actuelles établies, nous avons cherché à retracer l'évolution diachronique de la morphologie, de l'hydrographie et de la mise en valeur du val d'authion en utilisant des documents cartographiques anciens. Nous remontons ainsi jusqu'au XVIIe siècle dans le recensement de ces "images" ponctuelles. Si leur intérêt est indéniable, il faut toutefois rester très prudent dans leur interprétation, notamment pour les documents antérieurs au XIXe siècle. Il s'agit en effet de dessins figuratifs plus que d'une réelle cartographie, réalisés pour répondre à une commande bien précise et sur un espace souvent très limité. De même, la diversité des échelles utilisées et l'absence de points de repère géométriques rendent les comparaisons très difficiles. C'est seulement à partir de la fin du XVIIIe siècle, avec la carte de Cassini, que nous disposons d'une cartographie systématique de la vallée. Pour l'époque moderne, un certain nombre de textes, de rapports d'ingénieurs et d'ouvrages de synthèse relatant l'histoire de la mise en valeur du val ont également été consultés. Une étude approfondie de l'évolution des paysages au Moyen Age à partir des sources écrites a été réalisée par E. Zadora-Rio (E. Zadora-Rio, in. Chouquer et al., 1997) L'étude des données stratigraphiques Les cartes thématiques La compréhension globale des formations géologiques et du contexte géomorphologique s'est fondée sur l'étude des cartes géologiques au 1/50 000e du BRGM. Le val d'authion a été marqué par d'importants aménagements hydrauliques à la fin des années 1960 et au début des années A l'occasion de ces travaux plusieurs états des lieux ont été commandés tels que la carte pédologique (carte des sols et de mise en valeur) ou la carte hydrogéologique. Bien que ces documents aient été réalisés dans une optique de mise en valeur agricole et d'utilisation de la ressource en eau, on y retrouve toutefois beaucoup d'informations utiles à notre étude. Les fenêtres stratigraphiques Pour préparer la construction de l'a.85 (Angers-Tours), une campagne de sondages géotechniques a été réalisée par la société COFIROUTE. Son principal intérêt réside dans la fréquence des observations (au minimum tous les 100m) mais seul le tracé de l'autoroute a été sondé, ce qui limite fortement la compréhension des faits, d'autant que l'interprétation des rapports est souvent délicate. Nous avons donc surtout porté notre regard sur les sondages et les coupes effectués par l'équipe archéologique AFAN-A.85 lors de la prospection mécanique et plus ponctuellement sur les sites fouillés. Les stratigraphies ont systématiquement été relevées et situées dans l'espace par un Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

95 La haute vallée de l'authion (N. Carcaud, W. David, C. Pont, A.L. Cyprien, L. Visset) topographe. Les observations sont à nouveau soumises à la contrainte de l'emprise autoroutière et nous perdons la vision globale possible dans l'approche de surface. Cet inventaire nous a néanmoins fourni une bonne lecture de l'organisation et de la dynamique des formations superficielles. Il a ensuite été enrichi par des sondages carottés complémentaires réalisés sur la partie nord du val. L'analyse fine des sédiments alluviaux Les analyses granulométriques Elles ont été réalisées avec l'objectif de mieux comprendre le contexte hydrodynamique d'occupation puis d'abandon des sites archéologiques et de proposer une chronologie relative de l'évolution de ces milieux alluviaux. Les échantillons ont été prélevés tous les 10 cm dans les séquences homogènes. En cas de variations visibles et nombreuses, la maille a pu être resserrée. L'analyse granulométrique est décomposable en deux temps selon la taille des particules. La fraction grossière (diamètre supérieur à 80 micromètres ) est séparée par tamisage. La proportion des particules de diamètre inférieur à 80 micromètres est mesurée à partir de leur vitesse de décantation avec la pipette d'andreasen. Les analyses palynologiques et les datations 14 C La palynologie permet de reconstituer les paléoenvironnements et de mettre en évidence l emprise de l homme sur le milieu en étudiant les grains de pollen fossilisés dans les sédiments. Le milieu le plus propice à la conservation du pollen est un milieu à l abri de toute oxydation, par exemple les tourbières, les paléovallées comblées d argile. Selon le sédiment repéré, différentes méthodes de sondage sont utilisées. Lorsque le sédiment est relativement peu compact, la méthode de type GIK (Visset et Hauray, 1988) est adoptée. Tout un système de treuil relié à un compresseur hydraulique est installé sur un châssis. On utilise un carottier «à volet» de 45 ou 90 cm de long ; celui-ci est descendu à la profondeur désirée à l aide du treuil. L autre méthode est dite "à percussion", de type Eijkelkamp, et est utilisée dans les sédiments compacts; le carottier, cette fois-ci, est un tube à fenêtre de 1 m de longueur, enfoncé grâce à un moteur à percussion. Le découpage des sédiments suit immédiatement le prélèvement et se fait au moins par tranche de 5 cm. Chaque niveau prélevé subit des traitements physico-chimiques. Selon la nature du sédiment, tourbe ou argile, les méthodes d extraction pollinique diffèrent. En général, l observation du grain de pollen permet de déterminer la famille de la plante émettrice, parfois le genre et pour quelques rares cas, l espèce. Le comptage au hasard de 300 à 400 grains de pollen suffit statistiquement pour être représentatif de la végétation environnante. On calcule ensuite le pourcentage relatif pour chaque espèce (c est-à-dire le nombre de chaque espèce pollinique par rapport à la somme totale comptée) ; ces pourcentages permettront d établir des diagrammes polliniques. Le diagramme pollinique synthétique regroupe les taxons selon leur affinité écologique (par exemple, arbres de milieu humide, rudérales, ). Verticalement, on peut donc suivre l évolution de chacun des groupes au cours du temps et horizontalement, niveau par niveau et de bas en haut, on lit l évolution du paysage dans son ensemble. Le diagramme appelé diagramme Société/Végétation (Barbier, 1999) regroupe les espèces liées à l homme comme le chanvre, les céréales, les rudérales, les messicoles... ; on y ajoute l aulnaie, le système prairial et le système forestier. Ce diagramme permet de mettre en évidence de façon pertinente l impact des hommes sur l environnement, à travers l observation de la mise en culture, tout en gardant la vision du paysage des alentours (massif forestier, aulnaie). Ce diagramme est symétrique par rapport à l axe central ; on dit qu il est «en miroir». L échelle des profondeurs et l échelle chronologique se trouvent verticalement, tandis qu horizontalement sont notés les pourcentages des espèces polliniques. Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

96 La haute vallée de l'authion (N. Carcaud, W. David, C. Pont, A.L. Cyprien, L. Visset) Les datations radiocarbone Elles nous permettent de situer chronologiquement les événements visibles sur le paysage. Les sédiments sont envoyés à Tucson, au Laboratory of Isotope Geochemistry dans l Arizona. Le principe des datations radiocarbone repose sur le fait que tous les êtres vivants ont un taux de carbone 14 en équilibre avec celui de l atmosphère (Langouët et Giot, 1992). Les datations radiocarbone sont obtenues à la suite de comptages qui permettent de mesurer le rapport entre l activité radioactive restante de l échantillon et l activité de la matière moderne, prise comme étalon en Le comptage débute par des traitements mécaniques et chimiques qui transforment le sédiment en composé carboné solide, liquide ou gazeux. Ensuite les impulsions des particules émises par l échantillon transformé, sont comptées pendant une durée déterminée. Suite aux comptages, l âge radiocarbone mesuré est obtenu après application d une formule : par exemple, pour le site de Changeon, le laboratoire a délivré la date A 9718 de 690±55 BP (Before Present). A l aide de tables de calibration (Stuiver et al, 1998a) tenant compte de la variation de la teneur en carbone 14 de l atmosphère au cours des temps, il propose des dates calendaires dans un intervalle de calibration de 2σ, σ étant l écart ou la déviation standard, inhérente à la méthode. Ainsi, pour la date de 690±55 BP, on a : 1243 (1293) 1399 ap. J.C. ce qui signifie qu avec un écart de 2σ, il y a 95,5 % pour que la date mesurée se situe entre 1243 et 1399 après Jésus-Christ, 1293 ap. J.C. étant la date avec une fiabilité de 68 %. Contexte géomorphologique global Le cadre structural fixe la morphologie d ensemble du val d Authion Dans le val d Authion, la Loire traverse les dernières auréoles sédimentaires du Bassin parisien avant de rejoindre le Massif armoricain à Trélazé (Fig. 2). Durant ce parcours ses versants présentent une nette dissymétrie. Au sud, le versant découpe les plateaux du Saumurois avec une imposante régularité. Souvent abrupt, il est modelé dans les assises cohérentes du Bajocien et du Turonien. Vers le nord, après un parcours dans les plateaux de la Gâtine tourangelle par un couloir alluvial aux versants réguliers dans les calcaires du Turonien et du Sénonien, à partir d Ingrandes de Touraine, alors que va progressivement s épanouir la dépression latérale du val d Authion, le versant est disséqué par de nombreux affluents. Ils ont aisément déblayé les assises tendres du Crétacé supérieur (Cénomanien) et la couverture tertiaire des plateaux du Baugeois qui n apparaissent plus ici que sous la forme de buttes résiduelles (Brion, Fontaine-Guérin, Saint-George-du-Bois). Cette région de contact est touchée par une tectonique complexe où s associent des ondulations et des cassures de la couverture sédimentaire appartenant à deux générations distinctes. La première, héritée de l orogenèse hercynienne et de direction NW/SE, regroupe des accidents tels que l anticlinal de Chouzé puis le synclinal de la Vienne qui ont pu rejouer assez récemment à la fin de l Eocène et au début de l Oligocène (G. Denizot, 1972). Le second système, de direction E/W ou N/S, est probablement contemporain de la phase paroxysmale du soulèvement pyrénéen (G. Lecointre, 1959). Ces données structurales dirigent pour une large part l organisation du réseau hydrographique : orientation des vallées, densité d affluents en rive droite et épanouissement du val. La genèse du val d Authion au Quaternaire Il est probable que la contrainte structurale ait également pesé sur la construction du val au Quaternaire. Elle pourrait expliquer la migration progressive du fleuve vers le sud et le maintien en rive droite d une large dépression latérale où sont conservées quatre générations de formations alluviales étagées ou emboîtées. La plus ancienne correspond au niveau de basse terrasse conservé très nettement de Bourgueil à Allonnes. Cette banquette est perchée à 15 à 20 m au-dessus de l étiage. Il s agit d un dépôt sableux assez grossier avec des lits de graviers et de petits galets souvent recouverts par un limon sableux; son épaisseur atteint environ 8 m. Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

97 La haute vallée de l'authion (N. Carcaud, W. David, C. Pont, A.L. Cyprien, L. Visset) Un niveau de très basse terrasse sablo-graveleuse apparaît en contrebas, 5 à 6 m au-dessus de l étiage, fort bien conservé entre Vivy et Beaufort en Vallée où il atteint environ 6 m d épaisseur. Dans la plaine, subsistent de petits monticules sableux appelés montilles, perchés d environ 4 à 5 m. Ils forment un alignement régulier de la Chapelle-sur-Loire à la Varennes-sur-Loire. Au-delà, leur extension se réduit jusqu à Gennes. On les retrouve à l aval, en rive droite de l Authion, entre Longué et Mazé (marais des montils, gué de Mazé). Plusieurs hypothèses sont émises quant à l âge et la genèse de ces petits dômes. Certains sont considérés comme des bombements du substratum cénomanien recouverts superficiellement par des alluvions de très basses terrasses dont ils représenteraient des sortes de buttes témoin (J. Servant, 1968). D autres, plus massives, seraient des lambeaux d anciennes grèves ligériennes de très basse terrasse. Un certain nombre de placages sableux et d accumulations dunaires reposent sur ces niveaux de terrasses. Les plus caractéristiques sont visibles à Longué et aux Monteaux (grande dune de 32 m d altitude entièrement boisée de pins). Ces amas semblent issus d un remaniement des sables des formations alluviales et dans une moindre part du Cénomanien. Les alluvions récentes et modernes sont subdivisables en trois séries principales (Fig. 3). On constate globalement une nette augmentation de leur épaisseur à proximité de la Loire et d amont en aval (environ 4 m jusqu à la Varennes-sur-Loire, 6 à 8 m entre la Varennes et les Rosiers, 8 à 10 m en aval). Figure 2 : Le contexte géomorphologique général dans le val d'authion La série de base, reposant sur le substatum Cénomanien, est composée d un pavage de base de galets et de blocs (> à 20cm de diamètre) puis d un dépôt sablo-graveleux très bien classé. Son épaisseur varie de 1 m (à hauteur de Restigné) à 4 m. Une série d argile sombre verdâtre à bleuâtre, avec des intercalations sableuses lui succède. Très riche en matière organique et en débris végétaux, cette jalle a une épaisseur d environ 3 m mais disparaît en amont du bec de Vienne. En général, le fond du lit de la Loire actuelle incise la jalle (H. Talbo, 1971). La série supérieure présente une nature très variable selon sa localisation dans le val. En bordure du fleuve, se développent des grèves sableuses à Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

98 La haute vallée de l'authion (N. Carcaud, W. David, C. Pont, A.L. Cyprien, L. Visset) sablo-limoneuses formant le bourrelet de Loire. En contrebas, le cœur du val représente une zone basse périodiquement inondée par les crues. Cette dépression latérale, surtout visible aux abords du Lane, du Changeon puis de l Authion et notamment à hauteur des confluences, correspond à un espace de décantation dans lequel se sont déposées des alluvions fines, argileuses à limono-argileuses. La mise en place de ces différentes formations alluviales se serait déroulée selon quatre phases principales. Les niveaux de basse terrasse et de très basse terrasse se rattacheraient à des périodes glaciaires anciennes durant lesquelles la Loire occupait l ensemble du val. Ainsi la basse terrasse pourrait-elle être contemporaine de la glaciation saalienne (J. Gras, 1968). La très basse terrasse correspondrait quant à elle à un épandage du Weichsélien inférieur (J. Gras, 1968). Au Weichsélien supérieur, l ensemble de la région est touché par l abaissement du niveau marin qui atteint une altitude d environ m par rapport à l actuel et provoque une vague d érosion régressive nettement identifiée jusqu à Saumur. On voit alors se dessiner un profond talweg à proximité de la rive gauche dans les alluvions de très basse terrasse et le substratum. Il atteint 30 m sous l étiage à Nantes, 20 m à Chalonnes et 11 m à Saumur (F. Ottmann et al., 1968). Dans le val d Authion, la très basse terrasse n est que partiellement déblayée et subsistent quelques lambeaux (les montilles). Parallèlement, autour des versants de rive gauche, les vents accumulent des placages et des dunes de sables fins. A partir du Tardiglaciaire, et de la transgression flandrienne, commence à s opérer le comblement de la vallée surcreusée. La diversité des formes fluviales dans la haute vallée de l'authion Entre Ingrandes de Touraine et Vivy, deux ensembles morphodynamiques sont à distinguer : la haute et la moyenne vallée de l'authion. La haute vallée de l'authion est occupée par le Lane venant de Touraine et le Changeon, son principal affluent (Fig. 4). Dans cet espace, les ruisseaux sont enserrés dans des couloirs étroits incisés dans la très basse terrasse. Le qualificatif de dépression latérale ne se justifie pas vraiment en raison de l'abondance de ces surfaces (montilles) surplombant les talwegs. Vers l aval, on gagne la moyenne vallée d Anjou, à la naissance de l Authion issue de la confluence entre Lane et Changeon, là même où la Vienne rejoint la Loire et où le fleuve dévie son cours vers le NW. Dans cette section moyenne, on voit progressivement disparaître les niveaux anciens de terrasses alors que s épanouit la dépression latérale. L'empreinte ligérienne est frappante. Directement en rive droite du fleuve apparaît un puissant bourrelet de rive sableux de 1 à 2 km de large, régulièrement percé par des couloirs d'inondation. Sa présence gêne le drainage du val et impose des déviations brutales des affluents vers l ouest et leur dispersion en plusieurs bras ou boires. Les montilles guident le cheminement des ruisseaux qui calquent l orientation de leur tracé sur celui du fleuve (NE/SW jusqu à Bourgueil puis SE/NW à l aval du bec de Vienne). On est tenté d'associer ce phénomène à la surimposition du réseau hydrographique actuel sur un ancien réseau de chenaux secondaires de la Loire. La microtopographie, la diversité des sols et l'abondance des surfaces en léger surplomb par rapport à la dépression latérale sont vraisemblablement des facteurs déterminants pour expliquer l'ancienneté du peuplement du val. Si les "Plus Hautes Eaux Connues" (PHEC) observées en 1856 occupent toute la zone, la surélévation de 2 à 3 m observée sur les montilles ou le bourrelet de rive suffisait pour se protéger d'une inondation à forte fréquence de retour (Fig. 5). Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

99 La haute vallée de l'authion (N. Carcaud, W. David, C. Pont, A.L. Cyprien, L. Visset) Figure 3 : coupe simplifiée au travers du val d'authion à l'amont de Saumur Figure 5 : Transect de microtopographie : montille du Chêne Vert / montille de la taille Apport des fenêtres stratigraphiques Etude globale des stratigraphies alluviales de la haute vallée Séries de strate haute vallée Une première série de fenêtres stratigraphiques suivant la vallée du Lane a pu être observée au moment des prospections archéologiques et des fouilles préventives accompagnant la construction de l'a.85 (Fig. 6). A leur lecture on comprend très vite que le val d'authion n'est pas un espace marginal, siège de débordements fréquents mais de faible puissance hydrodynamique. On s'aperçoit au contraire qu'il a été soumis à une dynamique intense et complexe où se mêlent des flux ligériens puissants et des apports des ruisseaux issus des plateaux du Baugeois. Plusieurs contextes stratigraphiques se dégagent des faits rencontrés. Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

100 La haute vallée de l'authion (N. Carcaud, W. David, C. Pont, A.L. Cyprien, L. Visset) Figure 6 : Stratigraphies entre Restigné et Saint-Nicolas de Bourgueil Des secteurs vraisemblablement marqués par des flux ligériens L'alluvionnement est souvent peu épais (30 à 50 cm), ce qui souligne la grande périodicité de flux érosifs. On y rencontre des séries sableuses, indiquant des apports brutaux de charge de fond déposée en phase de décrue et succédant aux érosions de début de crue. Le phénomène est d'ailleurs fort bien décrit pour les périodes historiques (R. Dion, 1961). Ces phénomènes sont repérés dans la partie amont du val, sur tous les espaces en marge des talwegs, en situation de plaine inondable ou de très basse terrasse. A l'aval de la confluence Lane / Changeon, le phénomène paraît se généraliser et gagner les boires. Des secteurs de dynamique plus modérée Dans l'axe du Lane se dessine un surcreusement de la grave ligérienne dont la forme est souvent imperceptible en topographie. Latéralement, le surcreusement atteint 80 à 160 m pour une profondeur Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

101 La haute vallée de l'authion (N. Carcaud, W. David, C. Pont, A.L. Cyprien, L. Visset) modérée de 0,80 à 2 m. Il est fossilisé par des alluvions fines et souvent riches en matière organique, synonymes d'une faible compétence hydraulique, voire même d'une décantation en eau calme. Compte tenu de son extension, elle peut difficilement être reliée à un paléotracé de géométrie comparable au Lane actuel et qu'il est logique d'associer à un ancien bras secondaire de la Loire. Nous sommes confortés dans cette hypothèse par l'observation de la source du Lane. Située à Planchoury, elle est visiblement alimentée par des infiltrations ligériennes dans la levée. L'abandon de cet axe d'écoulement serait à mettre en relation avec le développement du bourrelet de rive qui fixe le tracé du fleuve au sud et réduit considérablement sa bande active. On perçoit donc l'intérêt de mieux comprendre cet ensemble tant pour l'analyse de l'évolution locale que pour la reconstitution de l'histoire dynamique du val d'authion. Apport des données stratigraphiques de la Prairie du Cassoir Les fouilles ont été menées au lieu-dit "La Prairie du Cassoir" (St Nicolas de Bourgueil). Rappelons qu'ici la dépression latérale se résume à un étroit couloir enserré entre deux montilles : au NE "la Taille" et au SW "le Plessis", tous deux à environ 30 m d'altitude. Ces fouilles ont permis une étude fine du comblement du paléobras de Loire. Le terme le plus approprié pour définir l'histoire environnementale holocène de cette portion de vallée est la stabilité. Il s'agit tout d'abord d'une permanence du tracé du cours d'eau, bloqué dans ses divagations par des lambeaux de basse terrasse. En favorisant la canalisation de l'alluvionnement dans un couloir étroit, d'épaisses stratigraphies fines se sont développées et se sont révélées être un atout pour la conservation des restes organiques. L histoire de son comblement peut être décomposée en 4 phases principales (Fig. 7 à 9). 1- Incision de la grave ligérienne de très basse terrasse par un chenal d'environ 100 m de large pour une profondeur de 2,8 m au maximum en rive sud. (environ 100 m). Compte tenu de son ampleur ce tracé est considéré comme un ancien bras de Loire. Sa formation n est pas située chronologiquement mais pourrait être contemporaine du Weichsélien supérieur. Le fort abaissement du niveau marin (-120 m) impose l'encaissement généralisé du réseau hydrographique. Dans le val d'authion, la Loire incisera les alluvions de très basse terrasse en ne laissant subsister que des lambeaux résiduels de terrasses et de montilles. Ces micro-reliefs chenalisent l'écoulement dans d'étroites dépressions. Les dépôts sableux observés "en rive sud dans la partie la plus profonde du talweg pourraient correspondre à la série d'alluvions grossières décrite à la base du remplissage de fond de vallée (Ottmann et al., 1968). Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

102 La haute vallée de l'authion (N. Carcaud, W. David, C. Pont, A.L. Cyprien, L. Visset) Figure 7 : le paléochenal de la prairie du Cassoir 2- Abandon partiel du chenal et dépôts de sédiments fins carbonatés. Les vases carbonatées (plus de 80 % de CaCo3) marquent un changement du contexte environnemental. Globalement, ces dépôts sont des marqueurs d'une amélioration climatique et du développement d'un couvert végétal dense. La bonne protection des versants limite le ruissellement et l'érosion mécanique. L'infiltration des eaux facilite l'altération des formations calcaires environnantes. Il paraît tout à fait logique d'établir une relation entre le dépôt de ces vases carbonatées et le début du remblaiement flandrien (L. Visset et al., 1999). Il n'est pas possible de situer précisément cet événement dans la chronologie du début de l'holocène ni d'en évaluer la durée. 3- A l'atlantique, la stabilité s'affirme et la vallée se transforme en un milieu stagnant où la décantation des sédiments fins prédomine. Les premiers sédiments organiques permettant de réaliser des datations radiocarbone se mettent en place à l'atlantique (6415 +/- 120 BP) au Pré Caslot (PS 47, Chouzé-sur-Loire), dans un contexte tout à fait équivalent de celui de la Prairie du Cassoir (4 km en aval). Ces dépôts organiques annoncent l'abandon du chenal favorisant le développement d'une tourbière dans le bras mort et le début d'un lent colmatage qui va se poursuivre jusqu'au Moyen Age (945 +/- 45 BP). La constance des conditions environnementales favorise alors l'occupation de la zone inondable. C'est à cette époque que l'on trouve les premiers sites dans la vallée : habitations du Néolithique ancien en pied de montilles à la Pierre du Lane et atelier de débitage et collecte de silex sur la berge à la Prairie du Cassoir au Néolithique final. Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

103 La haute vallée de l'authion (N. Carcaud, W. David, C. Pont, A.L. Cyprien, L. Visset) Cette évolution dynamique s'explique vraisemblablement par l'édification du bourrelet alluvial en rive droite de la Loire. Sa présence entraîne une nette réduction du lit apparent et une simplification du tracé du fleuve. Le changement se produisant à l'atlantique au plus tard (6415 +/- 120 BP), l'isolement du val d'authion pourrait donc être assez récent (N. Carcaud et al., 1998). Il faut néanmoins souligner que l'entourbement du chenal ne se produit pas systématiquement à l'atlantique. A la Prairie du Cassoir, les premiers dépôts organiques n'apparaissent qu'à la fin du Subboréal (3660 +/- 55 BP). Il est donc prudent d'envisager un abandon progressif du paléotracé qui s'étalerait de l'atlantique au Subboréal. A la Prairie du Cassoir, la stabilité dynamique se renforce à partir de la fin du Subboréal avec des vitesses de sédimentation très modérées (30 à 105 cm en 11 siècles). Les analyses palynologiques ont permis d'identifier des modifications secondaires du contexte environnemental : fluctuations climatiques, vitesse de transgression flandrienne (L. Visset et al., 1999). Ces évolutions pourraient en particulier s'exprimer par une variation du niveau de la nappe phréatique. Ainsi, entre le Bronze moyen (3660 +/- 55 BP) et le Moyen Age (945 +/- 45 BP) le bras mort est alternativement asséché et occupé par une tranche d'eau stagnante plus ou moins profonde. Les phases humides sont observées : au Bronze moyen (3660 BP) avec une faible tranche d'eau (environ 40 cm) permettant le développement d'une tourbière boisée d'aulnes, à la fin de l'age du Fer (2050 +/- 45 BP /- 45 BP) la remontée du niveau de l'eau est nette et l'aulnaie est vite remplacée par des plantes aquatiques. Les phases plus sèches sont identifiées : entre le Bronze moyen et la fin de l'age du Fer ( BP), la sédimentation tourbeuse est interrompue, durant l'époque gallo-romaine ( BP), la tranche d'eau s'abaisse et une nouvelle aulnaie s'installe. 4- La lente et longue phase de tourbification du bras mort s interrompt à l époque médiévale (945 +/ /- 40 BP). Une modification du contexte hydrodynamique lui succède, avec le retour d'une phase d'hydrologie active. Des limons de débordement à vitesse de sédimentation rapide (95 à 140 cm en 4 siècles) viennent sceller le paléochenal puis exhausser la plaine alluviale. Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

104 La haute vallée de l'authion (N. Carcaud, W. David, C. Pont, A.L. Cyprien, L. Visset) Figure 8 : Granulométrie du sondage 6.1 La Prairie du Cassoir Figure 9 : Granulométrie du sondage 6.2 La Prairie du Cassoir Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

105 La haute vallée de l'authion (N. Carcaud, W. David, C. Pont, A.L. Cyprien, L. Visset) Le cas de la vallée du Changeon et de la grande Boire Les résultats apportés par l observation de nombreuses stratigraphies sur la vallée du Lane nous ont conduit à émettre l hypothèse suivante : les autres ruisseaux drainant la haute vallée d Anjou et formant les principales têtes de l Authion (le Changeon et la Grande Boire) pourraient avoir réoccupé des paléotracés ligériens qu il serait intéressant de comparer à celui du Lane. Afin de vérifier cette hypothèse nous avons entrepris en juin/juillet 1997 une campagne de 4 séries de sondages : Série 1, sur la rive gauche du Changeon (commune de Saint-Nicolas de Bourgueil), Série 2, sur la rive droite du Changeon (commune de Saint-Nicolas de Bourgueil), Série 3, sur la rive droite de la Grande Boire (commune de Saint-Nicolas de Bourgueil), Série 4, sur la rive gauche de la Grande Boire (commune de Saint-Nicolas de Bourgueil). Sur les vallées de la Grande Boire et du Changeon l ampleur verticale du creusement de la grave ligérienne est réduite et avoisine 1 m pour une profondeur de 30 à 50 cm en marge des talwegs. Les remplissages alluviaux ont des faciès assez homogènes avec une dominante de sables bien triés associés à des limons et des argiles. Les séquences argileuses à argilo-tourbeuses sont rares. Seuls les sondages réalisés en rive droite du Changeon (série 3 : sondages 3 et 4) ont permis de repérer ce type de dépôts. Cette formation est récente et se construirait (pour ce qui en est conservé) à partir du Moyen Age (681 (878) 987 ap. J.C.). On ne retrouve donc pas le même schéma dynamique que celui observé le long du Lane où l on observait une longue phase de tourbification entre le Néolithique et l époque médiévale. Ici, les sites ont été alternativement soumis à deux types de dynamiques. Des phases d hydrologie active Comme on a déjà pu le constater sur l ensemble de la haute vallée de l Authion, la faible épaisseur des séries alluviales est vraisemblablement liée à la fréquence des flux érosifs. La granularité des dépôts, à dominante de «sable moyen» et de «sable grossier» est très proche des faciès observés sur les bancs de sable de Loire (R. Brossé, 1978). Il est malgré tout très difficile d y voir pour autant des flux ligériens compte tenu de l âge des dépôts et de l éloignement par rapport au fleuve. Il est plus probable que les ruisseaux remanient des alluvions anciennes de la Loire. Ces séquences sableuses correspondent à des apports brutaux de charge de fond déposée en phase de décrue et succédant aux érosions de début de crue. Des phases de calme hydrologique On en dénombre trois principales mais il est vraisemblable que d autres épisodes de ce type se soient produits et aient été érodés. Ces épisodes sont de courte durée (deux siècles les séparent sur le sondage 3) et rapidement interrompus par des apports sableux. Si la dynamique sédimentaire est difficilement comparable avec celle observée sur le Lane, il est néanmoins très intéressant de comparer cette formation du Changeon avec la série supérieure du Lane puisque dans les deux cas on est en présence de dépôts historiques. Sur la vallée du Lane, on observe une modification du contexte dynamique et le passage à une phase d hydrologie active entre le XIe et le XVe siècle. Elle entraîne le comblement rapide du paléochenal et l exhaussement de la plaine alluviale par des limons de débordement (80 à 150 cm en 4 siècles). On retrouve une situation comparable à importante fréquence de crues sur le Changeon entre le IXe et le XVe siècle. Les faciès de charge de fond observés dans ce cas sont liés au contexte local de plus forte compétence des cours d eau. Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

106 La haute vallée de l'authion (N. Carcaud, W. David, C. Pont, A.L. Cyprien, L. Visset) Analyses polliniques Analyses polliniques du site de Changeon à Saint Nicolas de Bourgueil. Histoire de la végétation locale : Les sondages ont été réalisés dans une peupleraie proche du ruisseau du Changeon. Quatre datations radiocarbone ont été obtenues le long des colonnes stratigraphiques: Changeon 3 : Références Niveau daté ( cm ) Matériel daté A Vase noire et charbons Age (B.P.) Datations calibrées à 2σ (en ap. J.C.) 385 ± (1479) 1651 ap. J.C. A Vase noire 690 ± (1293) 1399 ap. J.C. Changeon 4 : Références Niveau daté ( cm ) Matériel daté A Argile organique Age (B.P.) Datations calibrées à 2σ (en ap. J.C.) 410 ± (1452) 1652 ap. J.C. A Tourbe 1195 ± (783, 789, 829, 839, 864) 983 ap. J.C. Afin de synthétiser les données palynologiques, des regroupements d espèces ont été faits de la façon suivante : (diagramme de synthèse) Système forestier : Ulmus, Tilia, Fagus, Corylus. Espèces buissonnantes : Hedera, Cornus, Ilex. Arbres de milieu humide : Salix, Populus. Rudérales : Asteraceae, Artemisia, Caryophyllaceae, Chenopodiaceae, Brassicaceae, Polygonum, Plantago, Alchemilla, Urticaceae, Ranunculaceae, Lamiaceae, Fabaceae. Autres herbacées : Scrophulariaceae, Rosaceae, Geraniaceae, Centaurea. Landes : Calluna, Erica. Plantes cultivées : Fagopyrum. Apophytes : Rumex, Mercurialis annua. Paludicoles : Sparganium, Filipendula, Valeriana, Polygonum persicaria. Aquatiques strictes : Potamogeton, Lemna, Callitriche, Hottonia. Ainsi, l analyse pollinique permet de retracer l histoire de la végétation depuis le haut Moyen Age jusqu aux périodes récentes. Les résultats des deux sondages ont été regroupés sur un diagramme de synthèse (figure 10). Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

107 La haute vallée de l'authion (N. Carcaud, W. David, C. Pont, A.L. Cyprien, L. Visset) Entre 1195±60 B.P. et 690±55 B.P., la tourbière (ou par endroits la vasière) se forme sur les graves. Un marécage à graminées, à cypéracées et à aulnes occupe ce milieu; l aulnaie est toutefois assez claire. Sur les coteaux de la plaine alluviale, le système forestier est peu important. Ce phénomène, probablement anthropique, semble être lié à la viticulture (Vitis), à la céréaliculture (Cerealia) et à l élevage (importance des Poaceae, des rudérales ). De plus, la culture du chanvre (Cannabis- Humulus) dans les zones exondées, ainsi que celle du noyer (Juglans) apparaissent dès le haut Moyen Age. De 690±55 B.P. à 410±80 B.P., on n observe pas de grand changement de végétation. Le sarrasin (Fagopyrum, courbe des plantes cultivées) apparaît à la fin de cette phase. Un dépôt sableux semble attester la présence d une accélération du régime hydraulique. A partir de 385±65 B.P., sur la tourbière, l aulnaie chute à cause probablement d une augmentation du niveau de l eau ou de son abattage par l homme; à cet endroit s installe un marécage à cypéracées. Ainsi, le système arboré à aulnes évolue vers un milieu plus marécageux. Le chanvre régresse ainsi que toutes les cultures. Sur les coteaux, on assiste à un déboisement total des chênes (Quercus), des noisetiers (Corylus) et de l orme (Ulmus). A ce moment, l anthropisation est bien présente, il semble que l élevage s étende, les espèces rudérales nitrophiles se développent avec notamment les Cichorioideae, Plantago, les Brassicaceae, les Urticaceae et les Lamiaceae et les hommes cultivent le noyer (Juglans) depuis le haut Moyen Age. L histoire de la végétation est bien marquée sur ce site; vers le XVe siècle, l action anthropique fait changer le paysage, l homme déboise les coteaux, la plaine alluviale et installe un système d élevage. Le XIXe siècle est marqué par les plantations de pins. Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

108 La haute vallée de l'authion (N. Carcaud, W. David, C. Pont, A.L. Cyprien, L. Visset) Figure 10: Diagramme palynologique synthétique du Changeon Géoarchéologie de la Loire moyenne (vol. 1) Résultats

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