Objet : Protestation contre la discrimination au sein de la Société civile Burundaise : La Belgique n aurait-elle pas évolué depuis 1929?



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Transcription:

Bujumbura, le 20/01/2015 Transmis copie pour information à : - Son Excellence Monsieur le Président de la République avec les Assurances de notre plus Haute Considération - Son Excellence le Premier Vice-Président de la République avec les Assurances de notre Haute Considération - Son Excellence le Deuxième Vice-Président de la République avec les Assurances de notre Haute Considération à BUJUMBURA A Son Excellence Monsieur Le Premier Ministre du Royaume de Belgique à BRUXELLES Réf : COSCD/001/2015 Objet : Protestation contre la discrimination au sein de la Société civile Burundaise : La Belgique n aurait-elle pas évolué depuis 1929? Excellence Monsieur le Premier Ministre, Nous, Organisations de la Société civile burundaise discriminées, avons l honneur de nous adresser à votre Excellence pour vous faire part de notre profonde indignation face à un scandale provoqué par votre mission diplomatique à Bujumbura. 1

En effet, le mercredi 7 janvier 2015, alors qu une délégation belge conduite par le Vice-premier Ministre Didier REYNDERS et le Ministre Herman De CROO séjournait au Burundi, les services de l Ambassade belge ont programmé une réunion avec les membres de la Société civile du Burundi. Malheureusement, ces services ont choisi, comme cela avait été le cas antérieurement avec l ONG belge 11.11.11, lors d une conférence organisée à Bruxelles le 22 septembre 2014, d inviter uniquement une tendance de cette société civile sur les trois principales tendances qui composent le paysage associatif chez nous, la même tendance qui avait été à Bruxelles. Une association du groupe de celles discriminées, en l occurrence ONELOP-BURUNDI, qui pensait que la réunion était ouverte à toute la société civile et dont un délégué s est présenté sur le lieu de rencontre, a subi une humiliation sans nom : l Ambassadeur de Belgique a tenté personnellement de le faire sortir de la salle de réunion. Devant la résistance de l intéressé, il a finalement accepté qu il puisse rester en tant qu observateur, sans droit à la parole. Alors que pour la conférence suscitée nous avions pensé qu il y avait eu méconnaissance de la composition de la société civile burundaise, l exclusion opérée sur place dans notre pays a définitivement montré qu il s agit d une attitude réfléchie et assumée. Cela nous pousse naturellement à faire recours à Vous, Excellence, pour vous informer que l approche peu diplomatique utilisée par vos représentants au Burundi est une source de tension entre les composantes de la société civile, aux fins de prendre les mesures qui s imposent. Deux collectifs de la société civile et d autres organisations ont donc été écartés d un débat sur les questions nationales d importance capitale. Une des premières questions que nous nous sommes posées était de savoir si l Ambassade belge au Burundi exerçait les prérogatives d agrément des organisations de la société civile au Burundi. Si c était le cas, il n y aurait rien à redire puisqu aucune de nos organisations n a demandé cet agrément. Mais puisque jusqu à ce jour, toutes les organisations doivent être reconnues par le Ministère de l Intérieur burundais et qu il en a été ainsi pour l ensemble des associations, survient alors la deuxième question qui est de savoir sur quelles bases certaines sont invitées et d autres pas, surtout en rappelant qu il s agissait d échanger sur des questions burundo-burundaises. L Ambassade serait-elle accréditée pour travailler avec la population en général ou avec une petite partie de la population de son choix? Opérer une discrimination au sein d une frange de la population, en l occurrence dans la société civile, et au grand jour, dénote un mépris sans nom vis-à-vis de cette population et une méconnaissance profonde des réalités et des enjeux sur le terrain. C est une attitude que nous ne pouvons que dénoncer. Cette discrimination subie est un choc qui réveille les blessures qui commençaient à cicatriser et nous ne pouvons l accepter : la discrimination entre Burundais de la société civile vient de nous être imposée par votre ambassadeur. L a-t-il fait en connaissance de cause ou a-t-il été manipulé? La réponse lui appartient. Nous devons tout simplement ici montrer le souvenir douloureux qu il a réveillé dans l esprit du peuple burundais. Ce souvenir commun à tous les 2

Burundais, évoqué et consigné dans le texte de l Accord pour la Paix et la Réconciliation signé à Arusha explique le désarroi dans lequel l attitude de vos représentants à Bujumbura vient de nous replonger. En effet, à la page 12 de l Accord d Arusha, sous le titre «Nature et causes historiques du conflit» burundais, à l article 2 qui traite de la période coloniale, il est écrit ceci : «l Administration coloniale, allemande d abord, belge ensuite, sous mandat des Nations et la tutelle des Nations Unies, a joué un rôle déterminant dans le renforcement des frustrations chez les Bahutu, les Batutsi et les Batwa et dans les divisions qui ont conduit à des tensions ethniques. Dans le cadre d une stratégie visant à diviser pour régner, l administration coloniale a inoculé et imposé une vision raciste et caricaturale de la société burundaise, accompagnée de préjugés et de clichés portant sur des considérations morphologiques destinées à opposer les différentes composantes de la société burundaise sur la base des traits physiques et des traits de caractère etc. Elle a également introduit une carte d identité portant la mention de l appartenance ethnique, renforçant ainsi une conscience ethnique au détriment d une conscience nationale. Ceci permettait également au colonisateur de réserver à chaque groupe un traitement spécifique selon ses théories.» Pour illustrer le fondement historique de cette analyse, l on peut citer le rapport administratif de l Administrateur territorial de Bururi (Burundi) en 1929, J.M. DETSCHEID : «Il est certain que les Batutsi soient plus intelligents, également indifférents, plus brutaux et plus énergiques que les Bahutu ; leur autorité vient beaucoup de ces qualités et même de ces défauts Placer un muhutu «intelligent» à la tête d une chefferie est toujours risqué d avance». Le Résident de l Urundi Pierre RYCKMANS (1929) ajoute : «Les Batutsi étaient destinés à régner, leur prestance leur assure déjà, sur les races inférieures qui les entourent, un prestige considérable ; leurs qualités et même leurs défauts les rehaussent encore». Ces préjugés et autres clichés ont conduit logiquement à exclure totalement une partie de la population, les Bahutu, de la participation au pouvoir : de 20% en 1929, ils étaient à 0% en 1945 du corps de l administration territoriale. Voilà le souvenir qui remonte dans nos mémoires quand une réunion se tient en excluant une composante d un groupe de notre communauté sur base de préjugés et autres clichés, comme cela a été vécu par nos grands-parents. La démarche discriminatoire a été épinglée par tous les Burundais à Arusha et la responsabilité de la Belgique dans la naissance et le développement du conflit entre Burundais souligné. Doit-on croire que la Belgique n a pas encore évolué sur cette question? Quant aux conséquences néfastes d un tel acte, elles sont prévisibles et nous ne voulons pas en arriver là. Il suffit de le mettre en parallèle avec la situation d après l indépendance que les négociateurs d Arusha ont minutieusement examiné et constaté que «les effets de la vision raciste et caricaturale de la société burundaise ont été catastrophiques: Après l indépendance, plusieurs phénomènes se sont constamment produits.massacres délibérés, violence généralisée et exclusion». 3

Nous vous ferons l économie du bilan des pertes en vies humaines mais il faut tout de même savoir qu une tragédie s est abattue sur le Burundi et que nous sommes encore tétanisés à sa seule évocation. Après l année 2000, les mécanismes politiques, mis en place pour mettre fin à la guerre civile, ont contribué à ramener la paix : la cohabitation des burundais est de moins en moins chaotique, la liberté d expression alimente un débat politique animé et l exclusion tend à s estomper ; bref un espoir pour le retour à une certaine harmonie sociale est une réalité. Mais il est aussi clair que les vieilles habitudes ont la peau dure et résistent à céder complètement la place à un débat démocratique, inclusif et apaisé spécifiquement au niveau de la société civile. Il y a une volonté manifeste d étouffer la voix et l action d autres citoyens. Quelques associations font tout pour faire de la société civile leur chasse gardée. C est le refus même du pluralisme d approches et de points de vue, en somme le refus de la démocratie. Un exemple récent l a illustré : lors de la visite de Secrétaire Général adjoint des Nations Unies, M. Ivan SIMONOVIC, le responsable de l association FOCODE, ancien délégué général du FORSC, M. Pacifique NININAHAZWE, a osé déclarer publiquement qu il refuserait désormais de participer à toute réunion où certaines autres associations seraient présentes. Voilà une manifestation d intolérance qui ne peut cohabiter avec un esprit d ouverture démocratique. Paradoxalement, c est le collectif, auquel cette association adhère, qui est aujourd hui l interlocuteur privilégié de l Ambassade belge. Qui a inspiré qui pour diviser notre société civile? Ainsi, des étiquettes, les unes plus fantaisistes que les autres, sont confectionnées pour les besoins de la cause et sont systématiquement collées au front de toutes les organisations qui osent exister en dehors de voies tracées par les associations dites «ainées» et surtout celles qui pensent avancer sans se mettre sous le joug de ces dernières. Le recours à la caricature, à la dérision et à la magouille sont donc systématiques pour isoler ces organisations. Sous le couvert de militantisme pour les droits humains, singulièrement la liberté d expression, est-il normal de refuser la parole à d autres? Est-il normal de fuir le débat contradictoire qui est pourtant source d enrichissement mutuel? Les enjeux des différentes tentatives d ostraciser certaines organisations sont plutôt d ordre politique et financier. Les propositions au cours de la rencontre citée plus haut sont révélatrices: - Les organisations présentes ont demandé qu elles soient bénéficiaires directes de l aide accordée au Burundi en lieu et place du Gouvernement, pour que, affirment-elles, cette aide puisse parvenir à la population. Mais faudrait-il d abord que l aide déjà reçue par elles ait été effectivement utilisée pour satisfaire les besoins pour lesquels elle avait été sollicitée. La population en a-t-il eu des retombées? Nous devons tout de même constater aujourd hui qu aucun audit sérieux n a encore été réalisé pour nous en informer et par conséquent un doute légitime persiste sur cet aspect. C est donc un souci que le financement accordé à la société civile puisse effectivement servir pour les populations et non détourné à d autres 4

fins ; et que toute la société civile soit prise en compte, ce qui n est pas le cas dans la situation actuelle. Quant à la proposition de se substituer à un Gouvernement démocratiquement installé, cela démontre encore une fois que l enjeu majeur est celui du contrôle des financements extérieurs du pays et ce qui s en suit, ce qui déborde de loin l action citoyenne que la société civile est censée mener. - Ces organisations ont ensuite eu l outrecuidance de demander la suspension du financement du processus électoral, en prétextant une défaillance dans l enregistrement des électeurs qui vient de s achever. On doit remarquer que c est un discours dont l une des sources est celle d un homme politique local qui avait déjà, dès février 2014, écrit au Secrétaire Général des Nations Unies que «les Elections sont impossibles» et partant lui suggérer qu il fallait «envisager une autre voie». Cette autre voie ne correspond à rien d autre que la remise en cause de l Accord d Arusha qui prescrit la gouvernance démocratique avec des élections tous les cinq ans. De multiples manœuvres dilatoires sont actuellement observées pour n en point douter essayer de ralentir le processus, ce qui peut jouer sur les délais prévus pour les élections et conduire à un vide de pouvoir que le peuple burundais ne souhaite absolument pas ; l expérience de 1994 avec les journées «ville morte» et les négociations interminables de KAJAGA et consort, étant toujours présente dans sa mémoire. Avant de terminer notre propos, nous voudrions rappeler notre position sur les relations entre Burundais et Etrangers, spécifiquement la communauté diplomatique, y compris les diplomates belges. Nous préconisons et encourageons que des relations de fraternité soient tissées avec les Burundais mais nous conseillons en même temps que les diplomates restent suffisamment attentifs pour refuser de se retrouver dans des ghettos forgés pour eux et qui limitent leur connaissance de la société burundaise. Un phénomène assez particulier, certainement inspiré par les politiques, traverse la communauté nationale : certaines personnes préfèrent présenter le pays comme une terre d insécurité qu il vaut mieux ne pas fréquenter, d autres s adonnent à une désinformation honteuse, à la rumeur la plus abjecte et à la calomnie. Elles n hésitent pas à diaboliser une partie de la population pour en faire des monstres prêts à fondre sur l autre partie pour l exterminer. Tout cela n est que tentatives de manipulation auxquelles nous demandons aux uns et aux autres de ne pas céder. Ainsi, nous disons que, pour avoir une information crédible, l on doit être ouvert à tous les groupes de Burundais et ne pas se satisfaire des «révélations» que l on ne peut prononcer que dans les hôtels et autres lieux secrets. L information ou l analyse sur la vie nationale n a pas besoin d être confidentielle à l ère où le débat démocratique est la règle chez nous. Seuls ceux qui cherchent à induire en erreur, à manipuler dans leur propre intérêt, préfèrent agir dans l ombre. Pour conclure, nous dénonçons encore une fois la discrimination que l Ambassade de Belgique au Burundi a instaurée au sein de la société civile. Ce message est un cri d alarme destiné à arrêter cette attitude dangereuse pour notre société civile et pour la communauté nationale entière. Nous réaffirmons que nos organisations rejettent cette approche divisionniste, et que nous sommes déterminés à contribuer à l émergence d une société civile réellement au service du citoyen. 5

Veuillez agréer, Excellence Monsieur le Premier Ministre, l expression de notre haute considération. Les Signataires (en annexe) Copie pour information à: - Son Excellence Monsieur l Ombudsman de la République - Monsieur le Ministre des Relations Extérieures et de la Coopération - Monsieur le Ministre de l Intérieur - Monsieur l Envoyé Spécial du Secrétaire Général des Nations Unies au Burundi - Monsieur l Ambassadeur de Belgique au Burundi - Madame, Monsieur l Ambassadeur au Burundi (tous) - Monsieur le Représentant de l Union Africaine au Burundi - Monsieur le Représentant de l Union Européenne au Burundi - Monsieur le Secrétaire Général de la Communauté des Etats de l Afrique de l Est (EAC) - Monsieur le Secrétaire Général de la Conférence Internationale sur la Région des Grands Lacs Organisations signataires 6