Pipeline au Portugal (Traroth Wikimedia Commons) Mythes et Realites Investir dans les infrastructures d'energie pour redresser l'economie
la crise? Quelle crise? Le développement de vastes infrastructures d énergie et de transport reliant l Europe avec les pays riches en ressources est l une des mesures prises pour contrer la crise économique dans le continent. En 2010, la Commission Européenne a établi la liste des projets prioritaires du Réseau Trans-Européen d Energie (TEN-E), comprenant dix projets de transport de gaz et d électricité allant de la petite ligne de transmission transfrontalière jusqu aux gazoducs transcontinentaux. Ces investissements visent à diversifier les ressources d énergie disponibles en Europe. Sous le couvert de la «sécurité énergétique», cette stratégie se focalise sur l exploitation à grande échelle des ressources naturelles, exploitation comportant des impacts environnementaux et sociaux pour les populations locales. Pour une mise en contexte, l UE dans les dernières décennies a considérablement externalisé sa production industrielle «polluante» vers les pays non-européens, donnant un coup de pouce à la production d énergie à partir de ressources fossiles dans ces pays. Or, la plupart des Etats européens sont parmi les plus riches du monde et consomment une large partie des réserves globales d énergie. Une quantité significative d énergie est exportée depuis les pays en développement vers l Europe, comme le pétrole et le gaz provenant du Nigéria et du Tchad, le charbon de Colombie, d Indonésie et d Afrique du Sud, et la biomasse d Indonésie et du Brésil. En dépit de cela, les revenus issus de l extraction pour les pays en développement sont inférieurs aux flux dirigés vers l Europe. Cela laisse à penser que les surplus générés dans les pays en développement retournent au final en Europe. Ainsi, pour sortir des crises financières et économiques actuelles, c est ce type de développement que l UE s applique à faire perdurer, à des coûts toujours plus lourds pour les sociétés et l environnement dans les pays en développement. Mais réintroduire ces industries énergétivores au sein des frontières européennes pour contrer la crise ne serait pas non plus une solution. L énergie est à l origine du changement climatique et de la majorité de la pollution de l air. L UE a pris un engagement international pour réduire ses émissions de gaz à effet de serre au niveau qui permettrait de limiter l augmentation de la température du globe à 2 C. Les investissements dans les gazoducs, les raffineries, les terminaux et les infrastructures de transport vont à l encontre des ambitions de la politique climatique européenne. Réseau électrique raccordant une centrale nucléaire au Royaume-Uni photo Zorba the Greek Wikimedia Commons)
les crises economiques et financieres Au cours de la décennie précédant la crise financière, le stock d actifs financiers (actions, prêts, hypothèques, dette et dérivés) a explosé. Le crédit bon marché était accessible, mais avait été créé sur la base d une profusion d actifs «de papier» sans suffisamment de valeur «réelle» en termes de services et de biens. Avec la crise, la bulle du crédit a explosé. Immédiatement après l explosion de la bulle du crédit, les économistes, les gouvernements, et les institutions financières internationales ont fait pression pour le retour des investissements publics dans l économie réelle. L hypothèse commune était que les institutions publiques peuvent continuer d investir dans l économie réelle des individus, des biens, de la production et des services lorsque les investisseurs privés ne le font pas. Réseau raccordant des centrales thermiques au lignite en Roumaniephoto Bankwatch des mesures anticycliques : les investissements dans les infrastructures d'energie L UE met actuellement l accent sur les projets d infrastructures pour dynamiser le redressement économique et créer des emplois, notamment dans le secteur de l énergie et des transports. La politique de redressement a notamment été mise en place en Grèce, où la banque de l Europe, la Banque européenne d investissement (BEI), investit des sommes considérables pour construire des routes, des terminaux et des ports l'exemple de la Grece A l été 2010, la BEI a prêté 2,4 milliards d euros à la Grèce pour le développement des infrastructures et annoncé un prêt supplémentaire de 1,4 milliards d ici 2015 pour ce même type de projets. Sur la liste des projets approuvés par la BEI à la Grèce depuis 2008 se trouvent des centrales, des lignes de transmission, des gazoducs, des raffineries de pétrole, et des centrales d aluminium énergivores. l'economie VERTE n plus du développement des infrastructures pour contrer la crise, l UE s est engagée dans des investissements d énergie propre, d énergies renouvelables et d efficacité énergétique. Le but est de poursuivre la croissance verte de l économie globale, puisque ces technologies bénéficient à l économie en créant de la croissance. Concrètement, cela signifie par exemple l investissement dans les agrocarburants comme substituts au pétrole et au charbon. Les efforts sont mis pour faire perdurer les modèles de production et de consommation en Europe. L efficacité énergétique et la technologie verte sont utilisées pour étendre la longévité du modèle économique actuel. La tendance à recourir à des infrastructures d énergie de large échelle et centralisées, construites pour une économie carbonée, doit rester intacte. Or, ce sont les investissements dans des énergies solaires ou éoliennes décentralisées et hors-réseau, ainsi qu un débat sur la quantité d énergie réellement requise et sur la mise en place d un modèle européen allant au-delà de la croissance, qui seraient bien plus utiles pour le nécessaire changement vers une économie plus équitable et véritablement verte.
il faut une Europe alternative Les mesures de résolution de crise proposées par la BEI pour améliorer la capacité de l Europe à atteindre une économie plus résiliente et soutenable sur le plan environnemental doivent être réévaluées. Si la construction des routes, des centrales, des terminaux, des gazoducs, des oléoducs et des lignes de transmission créé des emplois sur le court terme, les bénéfices sur le plus long terme sont douteux. De tels projets sont associés à de sérieux impacts environnementaux et sociaux, qui sont autant de coûts pour le secteur public, et un fardeau en termes de dette. La trajectoire énergétique actuelle enferme les pays dans une dépendance aux énergies fossiles génératrices d émissions de CO2 pour les décades à venir. En parallèle, ce que l on présente comme des alternatives, à l instar des agrocarburants, accaparent des terres, menaçant l autosuffisance des activités fermières dans les pays en développement. Pour en savoir plus Beyond our borders, a critique of the external dimension of the EU energy policy and its financing mechanisms, CRBM, January 2012. http://www.counterbalance-eib.org/wp- content/uploads/2012/04/beyond-our- BORDERS.pdf Changing Perspectives How the EU budget can shape a sustainable future, CEE Bankwatch a.o., November 2010. http://bankwatch.org/publications/ changing-perspectives-how-eu-budgetcan-shape-sustainable-future Reflections on the new green economy, The Corner house, Larry Lohmann, May 2012. http://www.thecornerhouse.org.uk/ resource/reflections-new-green-economy Energy for whom? For What?, The Corner House, February 2012 http://www.thecornerhouse.org.uk/ resource/energy-security-whom-what Panneaux solaires sur le Georgia Tech Aquatic Center photo Georgia Tech Research Institute
Cette publication a été réalisée avec la contribution financière de l'union européenne. Les contenus sont de la responsabilité de Counter Balance et ne reflètent en aucune manière les opinions officielles de l'union européenne. Construction du parc éolien Thortonbank en Belgique photo Hans Hillewaert - Wikimedia Commons