Micro-don : Les petits ruisseaux feront-ils les grandes rivières?



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Transcription:

www.morguefile.com : Les petits ruisseaux feront-ils les grandes rivières? Très en vogue dans les pays anglo-saxons le principe du micro-don encourageant un don plus démocratique représente, en théorie, une manne pour le tiers secteur. En France, les associations commencent à s y intéresser, mais se heurtent à d importantes difficultés de mise en œuvre, tant techniques que culturelles. Résultat, dans l immédiat, le micro-don coûte cher en énergie et s avère peu rentable. Mais n est-il pas aussi l avenir? Enquête. Donnez peu, mais donnez nombreux. Sans doute aussi vieux que le fundraising (voir la «Mamie Mystère», p. 22-23), le principe du micro-don a fait, ces dernières années, une entrée remarquée dans la sphère de la collecte professionnelle. Dès 1990, l opération «Pièces Jaunes» consistant à se délester de sa petite monnaie dans des petites boites en carton disposées un peu partout, fait un tabac. Comme, neuf ans plus tard, la campagne «1 franc par jour» de Médecins sans frontières. «Un franc, c est peu, mais c est déjà le prix d un vaccin contre la méningite, une maladie mortelle», martèle alors l association qui a convaincu, depuis, 350 000 personnes de donner «1 euro par semaine» via le prélèvement automatique. www.piecesjaunes.fr Dès 1990, l opération «Pièces Jaunes» fait un tabac! n Quand l union fait la force Dopé par les nouvelles technologies, le micro-don connaît aujourd hui un regain d intérêt. Qu il s agisse des cartes bancaires solidaires (voir encadré), du don par SMS lors des urgences humanitaires (voir notre dossier sur Haïti dans Fundraizine n 23) ou d initiatives du genre de «Mailforgood» (à chaque mail envoyé contenant une bannière publicitaire pour le développement durable, un petit montant est reversé à une association), le don mini a la grande cote. Dernière tendance en date, le crowdfunding. Mis en lumière par l incroyable campagne de Barack Fundraizine 27 JUIN 2011 11

Obama en 2008 (400 millions de donateurs dont la moitié a donné moins de 200 dollars), le «financement par la foule» se développe à vitesse grand V. sur le modèle de l Internet 2.0. Réunissant des dizaines, voire des centaines ou des milliers de petits donateurs autour d un projet ou d une personne à financer, il a par exemple donné lieu, dans le secteur non-profit, à l explosion des courses solidaires organisées par un nombre croissant d associations... Et a inspiré bien d autres secteurs comme le monde de la musique (voir l initiative de Mymajorcompany), ou les médias, avec la création, début avril 2011, de la plateforme «J aime l info». Lancée par Rue89, elle rassemble une centaine de journaux en ligne désireux de faire financer des projets éditoriaux biens précis. Pour l instant, «ça reste modeste, et en dessous de nos espérances», reconnaît Xavier Frison, responsable éditorial du site Politis.fr qui a lancé un appel à dons pour un reportage aux USA sur les gaz de schiste : au bout de deux mois, 375 euros ont été collectés sur un objectif de 2 500 euros et c est l un des sites les mieux lotis n Une tendance de fond Si un vrai savoir-faire pour collecter des fonds ne serait sans doute pas de refus chez nos gratte-papier, sur le principe, «le crowdfunding a du potentiel, estime Frédéric Bardeau, co-fondateur de l Agence Limite et spécialiste du don en ligne. Cette conscience du collectif, de l agir ensemble, est un moteur très intéressant et moderne». Auquel il faut toutefois ajouter un ingrédient primordial pour que le mini don génère un maxi effet : la multiplication des opportunités de dons, afin de créer un effet d échelle et de démultiplier les sommes. Et si, à chaque passage d un tourniquet du métro, 30 centimes étaient reversés pour la lutte contre le sida? Et si 0,01 euro était envoyé aux enfants d Haïti à chaque appel sur un portable? Et si, à chaque menu Mac Donald s englouti, un euro était reversé à la lutte contre la faim? Ce monde où tout le monde donnerait tout le temps, où chaque action de la vie quotidienne serait une occasion de donner, un tout petit peu et presque sans s en rendre compte, c est ce qu on appelle désormais «l embedded» générosité. L arrondi sur salaire : un microdon en devenir? microdon jaimelinfo.fr Début avril, la plateforme «J aime l info» est lancée par Rue 89. Une générosité d avenir si l on en croit les acteurs d influence dans le monde du non-profit. En 2009 déjà, le site trendwatching.com en faisait l une des «10 tendances de consommation pour 2010». Et pour le magazine américain The Chronicle of Philanthropy, l «embedded generosity» arrive au 3e rang des «buzzwords» qui feront bouger la philanthropie en 2011 juste après les «entrepreneurs sociaux» et la «microfinance». Mais au juste, qu est-ce que la «générosité embarquée»? «C est un très petit don réalisé au moment d une transaction financière», explique Pierre-Emmanuel Grange, l un des importateurs de cette nouvelle philosophie de la collecte en France. «Mais attention, précise-t-il, rien à voir avec un produit-partage qui implique que la personne achète et que la marque reverse : dans la générosité embarquée, c est le donateur qui décide s il veut, ou non, donner de sa poche en plus de la transaction». «Et si, à chaque passage d un tourniquet du métro, 30 centimes étaient reversés pour la lutte contre le sida?» n Le don au quotidien : eldorado En théorie, il existe donc une infinité de supports à cette «omni-générosité». Les bulletins de salaires, les factures d électricité ou de téléphone, les additions de restaurant, les tickets de caisse, les achats en ligne, les billets d avion, etc. Aux Etats-Unis, 52 % des Américains réalisent chaque année une «Chekout donation». En Angleterre, 100 millions de Livres sont collectées chaque année via le «Payroll giving», le don sur salaire. «Le Payroll est presque un programme parapublic, affirme Pierre-Emmanuel Grange. C est très ancré dans les mœurs». «9 000 entreprises font du Payroll Giving en Grande-Bretagne, tempère Lyoko Myioshi, directrice associée à l agence Excel, et chez Royal Mail, l entreprise la plus engagée, moins de 30 % des employés participent au programme». Un bon score tout de même en ces temps de crise économique... Plus étonnant, le Mexique est, lui aussi, l un des pays pionniers sur la «générosité embarquée» grâce à son programme du «Redondeo» 12 Fundraizine 27 JUIN 2011

qui consiste à reverser quelques centimes de pesos aux caisses des supermarchés. Alors, si ça marche ailleurs, pourquoi pas ici? C est précisément de ce modèle d «arrondi» mexicain que s est inspiré Pierre-Emmanuel Grange, pour créer, en 2009, la «carte micro- DON», un «flyer» sur lequel est imprimé un code barres pour faire un don à la caisse d un supermarché pour une association locale. L initiative a reçu en 2009, le Prix de l Innovation en Fundraising décerné par les professionnels du secteur. Et prend aujourd hui de l ampleur puisque la région Ile-de-France a lancé une étude pour développer la carte au sein de plusieurs de ses départements. «L arrondi en caisse intéresse les enseignes qui ont tout intérêt à entrer dans des démarches de Responsabilité sociale d entreprise», souligne Pierre-Emmanuel Grange. Celui qui se définit comme un «entrepreneur social» ne s est pas arrêté en si bon chemin. Grâce au soutien de l économiste et président de Planet Finance Jacques Attali, il a lancé l année dernière, avec ADP, leader dans la gestion de paie, trois entreprises et deux associations de microfinance, le «Payroll giving» à la française. «En moyenne, 20 % de salariés participent au projet de l arrondi solidaire dans les entreprises, pour un don moyen de 50 centimes, affirme Pierre-Emmanuel Grange. Ce n est pas énorme pour l instant, mais on continue de prospecter pour trouver d autres entreprises. On est en train de créer le marché, les grosses sommes viendront mais pas tout de suite». n ou parcours du combattant? Las!, c est précisément par manque de résultats immédiats que le micro- don pêche. «En dehors des catastrophes humanitaires, le micro-don ne marche pas en France», constate Frédéric Bardeau. Il n échappe pas à la fameuse règle des 80 / 20. «80 % des fonds des associations viennent de 20 % des donateurs, c est pourquoi les associations se tournent davantage vers les stratégies grands donateurs, poursuit Frédéric Bardeau. A l inverse, le micro-don nécessite de déployer une énergie folle pour récolter bien peu d argent». Pierre-Emmanuel Grange, qui a passé un an et demi à convaincre les partenaires de s engager sur l arrondi sur salaire, reconnaît lui aussi que la mise en place d opérations de micro-dons s apparente à un parcours d obstacles : «Les temps de décision des partenaires sont très lents car les niveaux de décisions sont très élevés, explique-t-il. Les mentalités ne sont pas encore préparées à cette nouveauté». Fundraizine 27 JUIN 2011 13

Cartes bancaires solidaires : le don au guichet De plus en plus en vogue, les cartes bancaires dites «solidaires» représentent aujourd hui 3 % des cartes de crédit en circulation. Le principe est simple : à chaque transaction, une petite somme est donnée à une association. Depuis 2008, la Société générale verse ainsi 0,05 euros à l une de ses 14 associations partenaires chaque fois que l un des 38 000 détenteurs de sa «carte citoyenne» effectue un retrait ou un paiement. En deux ans, 500 000 euros ont été donnés par ce biais. Exemple avec l ONG CARE un partenariat global de plusieurs millions d euros lie par ailleurs l association à la banque depuis quatre ans qui, depuis presque un an, compte près de 5 000 clients porteurs de cette carte solidaire marquée du logo de l association. «En douze mois, nous avons collecté plus de 10 000 euros grâce à des personnes qui ne seraient sans doute pas sinon donatrices à l association, rapporte Fabienne Pouyadou, directrice des partenariats à CARE France. Ce n est pas énorme, mais cela nous permet de gagner en notoriété et de recruter de nouveaux donateurs». Cette opération avec le tiers secteur offre d autre part à la «Sogé» de soigner son image, malmenée depuis la crise financière. Un gain en communication qui ne lui coûte au final pas grand-chose si l on considère le fait que les clients doivent payer 12 euros pour avoir accès à cette carte de crédit un peu particulière Autre philosophie au Crédit Coopératif : ici, la carte Agir (dix ans d existence) est au même prix qu une carte «normale», et le Crédit Coop reverse, dès la souscription, 3 euros à l une des 12 associations qu il parraine. Puis 6 centimes à chaque retrait. Le client peut aussi faire un don supplémentaire de sa poche ce qui fait entrer cette carte dans une réelle démarche de «générosité embarquée». En 2011, 150 000 euros ont été reversés à une douzaine d associations triées sur le volet, grâce à 30 000 porteurs de la carte Agir (soit 70 % des clients du Crédit Coop ). Ajoutez à cela une pincée de frilosité des entreprises partenaires... Comme GDF-Suez qui rechigne à proposer un arrondi sur facture au moment même où elle annonce une flambée des prix du gaz... Ou encore ces supermarchés redoutant qu avec le don en caisse, cet endroit ultra-stratégique de l achat ne se transforme en dernier salon où l on cause... Sans parler des difficultés techniques de mise en œuvre : par exemple, distinguer dans une même action les flux «dons» et «achats» afin de respecter les règles de la fiscalité... n «Time for action» : premier essai pour ACF «C est un boulot de titan», résume Valérie Daher, directrice de la communication et du développement chez Action contre la faim (ACF), seule association française 1 à ce jour à s être lancée à pieds joints dans une opération de micro-don d envergure. Le projet «Time for action», né il y a plus d un an dans les esprits des fundraisers de l ONG, est guidé par un raisonnement simple : mettre le combat contre la faim à portée du plus grand nombre. «C est à la fois une opération de plaidoyer et de mobilisation massive, précise Valérie Daher. L idée est que chacun, riche ou pauvre, jeune ou vieux, puisse agir contre la faim dans le monde». Une bien belle idée, qui colle parfaitement à la cause... mais qui s avère un véritable casse-tête dans la mise en pratique. Il faut dire que le projet, qui devrait a priori voir le jour en 2012, est ambitieux. Il s articule autour de six «moments» de dons : la validation du panier d achat sur Internet, le passage en caisse au supermarché, le paiement des factures (de gaz et d électricité, mais aussi de téléphonie et de loyer), le retrait / virement dans les distributeurs, l arrondi sur la feuille de salaire et l addition au restaurant. «Pour le moment, nous sommes encore dans la prospection de partenaires, explique Valérie Daher, même si nous réalisons d ores et déjà quelques tests dans des endroits stratégiques : au duty-free de l aéroport de Nice, dans un restaurant dont le directeur est à la tête d un syn- dicat de la restauration, et bientôt, sur un site de e-commerce. C est une énorme opération qui combine énormément de savoir-faire, notamment la constitution partenariats-entreprise». Et aussi, la capacité à motiver son conseil d administration et ses troupes en interne qui passent par des hauts et des bas Au fond, le jeu en vaut-il la chandelle? «Le monde est remplit d exemples qui fonctionnent, se rassure Valérie Daher. Et puis j estime que mon travail de fundraiser est aussi d inventer de nouvelles manières de collecter de l argent pour permettre à un maximum de personnes de faire oeuvre de générosité». ACF : seule association française à s être lancé dans une opération de micro-don d envergure. action contre la faim n Du «prosélytisme» pour la générosité S ouvrir à de nouveaux publics : tel est, en effet, l un des principaux points forts du micro-don. Conscientes que plus d un Français sur deux ne donne pas, et que les donateurs les plus vieux vieillissent, «les associations sont, en France, dans une nécessité de renouvellement générationnel, souligne Lyoko Myioshi. Or, ce type d approche permet faire goûter les jeunes générations au don». Exemple aux Etats-Unis, où 57 % des 31-46 ans et 48 % des moins de 30 ans pratiquent la «Chek out donation». «La génération Web 2.0 est particulièrement réactive à ce genre de sollicitations, analyse Pierre-Emmanuel Grange. Le micro-don répond parfaitement aux nouveaux usages». Accompagner les plus jeunes et les moins fortunés dans l acte de générosité par ces petits dons «indolores»... Soit. Reste ensuite au fundraiser la (difficile) tâche de cultiver ces 14 Fundraizine 27 JUIN 2011

www.morguefile.com Attention à l effet «zapping» des micro-donateurs. jeunes pousses de donateurs. «En touchant des personnes qui ne sont pas a priori donatrices, le micro-don permet de faire du prosélytisme pour la générosité. C est un premier pas», estime Frédéric Bardeau. «Il faut absolument transformer les donateurs, avertit Lyoko Myiosho, sinon, le microdon peut s avérer un piège en habituant les gens à donner des petites sommes». Gare, de même, à l effet «overdose» et au risque de dispersion qui, du fait du comportement «zapping» des «micro-donateurs», ferait s envoler dans la nature de toutes petites sommes. «La mise en place d opérations de micro-dons est efficace pour les grandes associations avec une vraie force de frappe, souligne Frédéric Bardeau. Dans le micro-don comme partout, il y a la prime au premier, la prime à la notoriété, la prime à la puissance de la marque Il ne faut pas croire que les cartes seront rebattues». Pas révolutionnaire, le micro-don? Plutôt un investissement sur l avenir comme un autre, qui nécessite du temps et de l argent. Et qui sera peut-être payant des années et des années plus tard Mais si l on veut récolter, ne faut-il pas d abord savoir planter? n P. G. 1 Voir aussi le partenariat entre les Pièces Jaunes et Priceminister : des «e-pièces jaunes» peuvent être versées aux hôpitaux à chaque règlement du panier d achat sur le site de e-commerce. Fundraizine 27 JUIN 2011 15