Projet de loi NOTRe Analyse après la 1 ère lecture Cette note présente les points d alerte identifiés au fil de l examen en première lecture du projet de loi NOTRe à l Assemblée Nationale. Les députés ont adopté définitivement le projet de loi en 1 ère lecture le 10 mars. Selon nos informations, la seconde lecture devrait débuter au Sénat en juin et se conclure à L Assemblée Nationale avant la fin juillet dans le cadre de la session extraordinaire. Cette première lecture a permis de conserver les grands équilibres acquis en commission des Lois au terme d un débat difficile, révélateur d un climat moins favorable au monde urbain. En témoigne la nécessité de recourir à une seconde délibération pour revenir sur un certain nombre de dispositions renforçant les prérogatives régionales au détriment de l équilibre recherché par nos associations, tout en contrevenant aux acquis de la loi MAPTAM. Une grande vigilance et une grande mobilisation seront donc nécessaires dans les prochaines semaines pour défendre l équilibre obtenu. I. Préserver le rôle économique des territoires urbains La mobilisation de l AMGVF et de l ACUF en faveur d un maintien des acquis de la loi MAPTAM a permis de conforter en séance publique l équilibre régions-métropoles en matière de développement économique. De réelles avancées ont ainsi été préservées, permettant à la région de renforcer sa dimension stratégique tout en préservant la capacité d action des collectivités infrarégionales, au premier rang desquelles les grandes intercommunalités et métropoles. Ainsi, si la région est responsable de la définition des orientations en matière de développement économique sur son territoire et des aides directes aux entreprises, elle n est désormais plus seule compétente pour décider des interventions économiques. De plus, dans le respect de la loi MAPTAM et comme le demandaient l AMGVF et l ACUF, les métropoles co-adoptent avec la région les orientations du SRDEII applicables à leur territoire. A défaut d accord, elles élaborent leur propre document d orientations stratégiques, qui prend en compte le schéma régional. L équilibre défendu par nos deux associations est ainsi restauré. Concernant les communautés urbaines et d agglomération, le texte précise que le projet de SRDEII est élaboré par la région en concertation avec ces EPCI à fiscalité propre. Leurs actes en matière de développement économique restent compatibles avec les orientations du schéma régional. Cependant, l AMGVF et l ACUF ont milité avec succès pour que les collectivités du bloc communal, notamment les grandes intercommunalités et les métropoles, puissent continuer à intervenir en matière d aides aux entreprises dans le cadre d une convention passée avec la région. Malgré ces avancées, une vigilance particulière s impose. La restauration de cet équilibre a en effet nécessité une seconde délibération, demandée par le Gouvernement suite au travail d alerte et de sensibilisation effectué par nos associations. II. Atténuer la prescriptivité du SRADDET Conscient de la nécessité d avancer sur le sujet du SRADDET, le Gouvernement s est déclaré prêt à engager avec nos associations un travail de fond sur le contenu de l article, avant le début de la deuxième lecture. Il s agit d une réponse positive à l inquiétude formulée à plusieurs reprises par l AMGVF et l ACUF sur les conséquences du texte dans sa rédaction actuelle, et sur l impact réel de sa prescriptivité renforcée. Si certaines avancées sont à noter, la première lecture à l Assemblée Nationale s est globalement traduite par un retour à la version initiale du projet de loi, source d inquiétude pour nos territoires.
La première lecture à l Assemblée Nationale se traduit par un retour à la version initiale du projet de loi, source d inquiétude pour nos territoires. Ont ainsi été rétablies les «règles générales» du SRADDET, dont ne sont définis ni le contenu ni la portée et avec lesquelles les documents d urbanisme seront rendus compatibles (au premier rang desquels les SCOT et PCAET). Le logement a quant à lui été extrait du champ du schéma. Ces règles seront regroupées dans un fascicule spécifique qui facilitera leur identification 1. La principale avancée renvoie à la simple possibilité pour les échelons infrarégionaux de faire des propositions sur le contenu du fascicule. Si les métropoles sont désormais associées de plein droit à l élaboration du SRADDET, une réelle co-construction n est pas garantie. Dans le même temps, le dispositif de majorité de rejet qu avaient introduit les sénateurs en première lecture a par ailleurs été supprimé 2, malgré les amendements de l AMGVF et l ACUF visant à le préserver. Est enfin rétablie la possibilité pour le Gouvernement de clarifier par ordonnance, dans les 12 mois suivant la promulgation de la loi 3, l architecture du SRADDET. L AMGVF et l ACUF avaient obtenu au Sénat la suppression de cette disposition, et se mobiliseront à nouveau en ce sens afin que les zones d ombres pesant sur cet article - périmètre, portée juridique - soient clairement établies au cours du débat parlementaire, au regard des conséquences potentiellement lourdes pour les collectivités infrarégionales Il pourrait être envisagé pour la seconde lecture d indiquer 1/ que le renforcement de la prescriptivité du schéma ne peut en aucune manière se traduire par des dépenses supplémentaires pour les territoires infrarégionaux, sauf dans le cadre de conventions bilatérales volontairement établies (de type «contrats de territoires»). D autre part, 2/ un renversement des rapports de prescriptivité existants pourrait être proposé : les documents d urbanisme seraient ainsi compatibles avec les orientations stratégiques et les grands objectifs du SRADDET, mais ne ferait que «prendre en compte» les règles générales du fascicule. III. La transformation facilitée en communautés urbaines des futures ex-capitales régionales Il faut tout d abord noter l adoption en séance publique de l amendement proposé par l AMGVF qui permet aux communautés d agglomération dont la ville-centre perdrait le statut de capitale régionale de se transformer en communauté urbaine avant 2020 4. Il faudra néanmoins obtenir une modification du régime de FCTVA pour ces communautés d agglomération afin de ne pas pénaliser leur trésorerie. Par ailleurs, les députés ont finalement décidé, à la suite de la demande de seconde délibération du Gouvernement, de ne pas revenir sur les critères d accès au statut de métropole de droit commun. L amendement déposé visait notamment à faire accéder à ce statut les EPCI à fiscalité propre regroupant au moins deux pôles urbains ainsi que les EPCI à fiscalité propre, centres d une zone d emploi de plus de 400 000 habitants. IV. L introduction du suffrage universel direct pour l élection de l ensemble des conseillers communautaires (des communautés de communes aux métropoles) Alors que la loi MAPTAM avait introduit le suffrage universel direct comme mode d élection d une partie des conseillers métropolitains en 2020, les députés ont adopté un amendement élargissant cette disposition à l ensemble des conseillers communautaires, confirmant le vote de la commission des Lois. Si cette disposition devait être supprimée dans le courant du débat, il faudrait être vigilant au maintien des dispositions relatives aux métropoles de la loi MAPTAM. Pour rappel, une loi électorale adoptée 1 Fascicule qui répond à une demande formulée par le Conseil d Etat, désireux de pouvoir identifier clairement les dispositions opposables du document, dans un souci de contrôle juridictionnel facilité. 2 Si 3/5èmes des EPCI à fiscalité propre ou 50% des départements exprimaient un avis défavorable sur le projet de SRADDET, il devait être modifié. 3 18 mois au Sénat. 4 Ce choix relève d une décision locale prise à la majorité qualifiée. Rien n est imposé.
avant 2017 doit venir préciser les modalités d élection des conseillers métropolitains au suffrage universel direct. V. Préserver l action des territoires urbains face au renforcement des départements Enjeu majeur, le transfert de la voirie départementale aux métropoles a été rétabli en séance publique dans le respect des dispositions de la loi MAPTAM, conformément aux souhaits de l AMGVF et de l ACUF. Nos associations avaient alerté le Gouvernement en ce sens, afin que la suppression du transfert département-région ne remette pas en cause la possibilité, pour les métropoles, de récupérer la voirie sur leur territoire. Répondant favorablement à cette alerte, le Gouvernement a donc déposé un amendement précisant qu à défaut de convention avant le 1 er janvier 2017 entre le département et la métropole, cette dernière récupère toute la voirie départementale sur son territoire. Ce dispositif de maintien est inséré au sein de l article 23, qui organise le champ de la convention conclue par les départements et métropoles sur au moins 3 compétences parmi 7 blocs. Les collèges ont également été ajoutés au champ de cette convention. Point de vigilance, les députés ont en revanche choisi, alors même qu il avait été supprimé en commission des Lois, de rétablir un schéma régional de développement touristique co-élaboré par le conseil régional et le département, sur la base d une simple association du bloc local. Ce dernier schéma tiendrait lieu de convention territoriale d exercice concerté des compétences. Il conviendrait de rétablir la rédaction du texte issue de la commission des Lois, qui ne faisait pas mention d un tel schéma et qui ne plaçait pas le département comme un acteur «supérieur» au bloc local en matière de tourisme. A minima les grandes agglomérations ne sauraient être contraintes par un schéma à l élaboration duquel elles n auraient pas été associées (le tourisme urbain en France représente 40% de la consommation touristique). VI. Préserver l action des territoires urbains face au renforcement des compétences régionales Point positif, les compétences régionales ont été élargies au «soutien à l accès au logement et à l amélioration de l habitat», permettant ainsi de garantir une contribution financière de la région sur ces champs de responsabilité partagée, malgré la suppression de la clause générale de compétence. De même, les prérogatives régionales en matière d ESR ont été précisées. D une part, la région n approuve la carte régionale des formations. D autre part, est votée conforme la possibilité pour les collectivités et groupements de contribuer au financement des sites et établissements ESR, ainsi qu aux œuvres universitaires et scolaires. Néanmoins, les députés ont de nouveau attribué un pouvoir règlementaire particulier aux régions, dans le cadre de ses propres compétences et s exerçant de manière subsidiaire : il ne sera mobilisable qu en cas de non-renvoi au pouvoir règlementaire de l Etat, ou en complément de celui-ci. Cette disposition, qui permettrait le cas échéant au conseil régional d adapter l application de lois au contexte local, pourrait présenter un risque d inconstitutionnalité selon certains commentateurs. Autre point de vigilance, les députés ont adopté un amendement gouvernemental supprimant la participation des présidents des EPCI à fiscalité propre aux Conseils régionaux de l emploi, de la formation et de l orientation professionnelle (CREFOP). Il convient de rétablir cette participation, au regard des actions conduites par les intercommunalités dans ces différents champs (par exemple l accompagnement des missions locales pour l emploi ou des plans locaux pour l insertion). VII. Ne pas se voir imposer de nouvelles contraintes Dès le début du débat parlementaire, dans un contexte de restriction budgétaire sans précédent, l AMGVF et l ACUF s étaient montrées vigilantes à ce que la loi NOTRe ne leur impose pas de nouvelles contraintes budgétaires, que ce soit par l attribution de nouvelles compétences ou la mise en place de nouvelles normes et de nouvelles obligations.
Introduction de nouvelles compétences : certaines avancées ont pu être obtenues, en témoigne la suppression, obtenue en commission des Lois, du nouveau schéma régional des crématoriums prescriptif et de la nouvelle compétence obligatoire «maisons de service au public» pour les communautés urbaines et métropole, a été maintenue à l Assemblée. Point notable, un report de l entrée en vigueur de la compétence GEMAPI, de 2016 à 2018, a par ailleurs été adopté en séance publique. Introduction de nouvelles responsabilités financières : l article 33 du projet de loi initial prévoyait de faire participer les collectivités aux conséquences financières des arrêts rendus par la Cour de Justice de l Union Européenne, en cas de manquement de l Etat français lié à des obligations relevant de tout ou partie de leurs compétences, sans les associer à la répartition des charges financières. Sous la pression des associations d élus locaux, le Gouvernement a révisé sa position et pris en compte les demandes formulées notamment par l AMGVF et l ACUF : pas de rétroactivité ; une responsabilité financière partagée avec l Etat ; l association des collectivités à la décision de répartition de la charge financière. Devrait ainsi être un comité consultatif Etat Cour des comptes collectivités, chargé de rendre un avis sur la répartition des sommes dues entre les différents acteurs. VIII. Dispositions financières Point très important dans le contexte de la baisse des dotations de l Etat, l AMGVF et l ACUF ont obtenu qu en cas de transfert de compétences entre un département et une métropole, la dotation de compensation ne soit plus indexée sur la dotation globale de fonctionnement. En revanche, nos demandes d une compensation de tous transferts de compétences par un transfert de fiscalité n ont à ce stade pas été satisfaites. Par ailleurs, la réforme de la dépénalisation du stationnement payant sur voirie doit garantir le maintien des équilibres financiers antérieurs entre communes et EPCI à fiscalité propre, tout en prenant en compte les éventuels surcoûts à la charge des communes induits par la mise en œuvre de la réforme (matériel, personnel). Il importe donc de retravailler sur les dispositions adoptées par les députés en s appuyant sur le consensus défini entre associations d élus - ACUF, AdCF, Gart, AMGVF et AMF - dans le cadre de la MIDS. Les députés ont par ailleurs adopté un amendement gouvernemental visant à redéfinir le périmètre des transports urbains et non urbains. Cet amendement doit permettre aux autorités organisatrices de la mobilité de réaliser des économies en raison des différences de conventions collectives s appliquant aux exploitants des services de transports urbains (plus avantageux) et non urbains. IX. Favoriser la mutualisation La recherche d économies et d efficacité passe également par la facilitation des dynamiques de mutualisation. L AMGVF et l ACUF ont saisi l opportunité de ce texte pour favoriser ces initiatives. De réelles avancées ont d ores et déjà été obtenues. Sur proposition de nos associations, le Gouvernement a ainsi permis la création de commissions administratives paritaires communes (CAP) afin de permettre une gestion équitable des carrières en cas de création de services communs. Par ailleurs, la possibilité de créer des services communs entre un EPCI, une ou plusieurs de ses communes membres et un ou plusieurs établissements auxquels l un d entre eux est rattaché, a été adoptée en séance. Des avancées restent à obtenir, sur lesquelles le Gouvernement fait preuve d une écoute favorable et qu il pourrait reprendre à son compte en deuxième lecture. Ainsi, l AMGVF et l ACUF se mobilisent pour que ces commissions soient compétentes en matière d avancement de grade et de promotion, proposition à laquelle le Gouvernement est favorable. Elles militent également pour que soit substitué, en cas de création d un service commun, le maintien du niveau de rémunération au maintien du régime indemnitaire.
X. Métropoles du Grand Paris et d Aix-Marseille-Provence La première lecture du projet de loi au Sénat puis à l Assemblée Nationale a permis de prendre en compte une grande partie des souhaits exprimés en fin d année dernière par le conseil des élus de la mission de préfiguration de la métropole du Grand Paris : autonomie juridique des établissements publics territoriaux (EPT), perception d une part de fiscalité de ces derniers pendant plusieurs années, montée en puissance progressive de la métropole dans sa prise de compétences A la suite de l examen du texte en séance publique, le principal point de divergence renvoie aux dispositions en matière d urbanisme : si la métropole du Grand Paris n est plus compétente que pour l élaboration du SCOT, les députés ont adopté un amendement obligeant les établissements publics territoriaux à recueillir un avis conforme de la métropole sur leur projet de PLU. En outre, plusieurs questions opérationnelles, en particulier sur les procédures de prise de compétences entre différents échelons, le maintien des conseillers communautaires élus en 2014 dans les EPT recouvrant le même périmètre que certaines communautés d agglomération existantes, sans oublier les équilibres budgétaires, restent posées. Concernant la métropole d Aix-Marseille-Provence, le débat parlementaire a permis de mieux définir les compétences que la Métropole exercera en propre, le cas échéant après une période transitoire, ainsi que celles qu elle peut déléguer aux conseils de territoires. L AMGVF et l ACUF consulteront leurs adhérents pour proposer, le cas échéant, des évolutions partagées sur le texte. XI. Divers A noter, le rétablissement par les députés du Haut Conseil des Territoires qui avait été supprimée lors de l examen du projet de loi MAPTAM en commission mixte paritaire. Au-delà, de nombreuses dispositions relatives aux syndicats intercommunaux ou syndicats mixtes ont été adoptées (procédure de prise en compétences, suppression des indemnités pour les délégués ). En revanche, nos associations défendront de nouveau un amendement visant à faciliter la mise en œuvre du mécanisme de représentation-substitution pour les conseillers des métropoles et des communautés urbaines au sein des syndicats compétents en matière de distribution publique d électricité, le dispositif adopté par les députés les obligeant à de multiples nominations, là où il serait beaucoup plus opérationnel de doter un même représentant de multiples suffrages. Point de vigilance, la transposition des «dispositions pertinentes» des chartes de PNR dans les SCOT a été rétablie. Elle représente une forte insécurité juridique pour les SCOT et l AMGVF et l ACUF déposeront des amendements de suppression en ce sens. A noter enfin la possibilité de créer un SCOT à l échelle d un unique EPCI, votée conforme dans les deux chambres et ne pourra donc plus être supprimée.