L ENERGIE. V M, vous tous mes F et mes S en vos grades et qualités,



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Transcription:

L ENERGIE V M, vous tous mes F et mes S en vos grades et qualités, Il y a plusieurs approches possibles pour traiter cette question dont l actualité redevient brûlante avec les guerres d Irak, l élection et la réélection de Bush, représentant déclaré du lobby pétrolier texan et plus concrètement avec l augmentation régulière du prix du pétrole qui dépasse maintenant les 60 $ le baril. Tout porte à croire, et vous en serez certainement convaincus après cette planche, que ce n est qu un début, que le coût de l énergie, sous toutes ses formes, ne fera qu augmenter dans les prochaines années, avec certainement beaucoup de conséquences y compris celles qu on ne saurait prévoir aujourd hui. On peut être tenté d aborder cette question sous son aspect géostratégique. C est un thème intéressant certes mais on débouche très vite sur des perspectives purement spéculatives. J ai donc préféré traiter cette question sous ses aspects historiques et sociétaux. En effet, depuis deux siècles, l énergie abondante et bon marché est l une des bases du développement de nos sociétés occidentales et de notre mode de vie au quotidien. Deux questions se poseront inéluctablement : - cela peut il durer, sinon comment s en sortir dans les prochaines décennies? - d autres, les asiatiques, en particulier, peuvent ils suivre cette voie? J ai prévu faire deux planches : - la première, celle-ci sur la situation actuelle, - la seconde, sur les issues possibles. * Plan * * 1 - Définition de l énergie 2 Rappels historiques 3 La découverte des énergies fossiles 4 L émergence de la fée électricité 5 - Le cas de l énergie nucléaire 6 La science de l énergie 7 Les consommations mondiales d énergie 8 Le cas de la France 9 Les réserves mondiales d énergie et le pic de Hubbert 10 L effet de serre 11 Conséquences 12 Les voies d issue

* * * 1 DEFINITION DE L ENERGIE Le mot, d origine grecque, signifie «force en action». C est intuitivement vrai, l énergie dans son acception la plus large évoque le mouvement, l action, ce qui est nécessaire pour faire déplacer un objet, faire tourner un moteur, chauffer de l eau, etc. Dans son sens commun, aujourd hui, l énergie c est du charbon, du pétrole, du gaz, qui sont pour l essentiel les sources actuelles dont dispose l Humanité. Elles sont couramment désignées «énergies (ou combustibles) fossiles» en raison de leur formation au cours des temps géologiques, à partir des organismes animaux et végétaux. Ce sont toutes des composés du carbone ce qui explique que leur combustion dégage inévitablement du dioxyde de carbone CO 2. 2 RAPPELS HISTORIQUES Jusque à la fin du 18 ème les seules sources d énergie dont disposait l Humanité étaient : - l énergie animale des ânes, des bœufs, des éléphants, plus tard du cheval et celle de l homme, ou plus fréquemment esclave dans le monde antique, et aussi dans le monde moderne en Amérique jusqu en 1870. - l énergie dégagée par la combustion du bois pour les usages domestiques et du charbon de bois pour la métallurgie du bronze ou du fer, - l énergie hydraulique, ce sont les romains (Vitruve) qui découvrent le moulin à eau au 1 er siècle avant notre ère. D abord utilisé à moudre le grain, la force motrice des rivières va être à la base du développement de l industrie du papier, de la forge du fer. L équipement des rivières constitua des pôles de développement économique et de peuplement, - l énergie du vent, les premiers moulins à vent apparaissent en Europe vers le 12 ème siècle, 3 LA DECOUVERTE DES ENERGIES FOSSILES Les trois grandes sources modernes d énergie fossile sont : - le charbon, - le pétrole, - le gaz naturel. 3 1 Le charbon Les affleurements de «charbon de terre» sont exploités depuis très longtemps, par exemple dans le centre de la France, au Creusot, à Saint Étienne (à partir du 14 ème siècle), dans le Dauphiné à La Mure. Mais l exploitation industrielle des mines de charbon commence en France avec la découverte des gisements du Nord - Pas de Calais, en 1720, dans la région de Anzin. 2

En France, la production cumulée de charbon aurait atteint 1,5 milliard de tonnes depuis le 15 ème siècle, dont un tiers dans la seule région de Saint Étienne. Le développement de l exploitation des mines de charbon, abondantes en Europe (Grande Bretagne, France, Allemagne, etc.), inaugure l ère industrielle à partir de la fin du 18 ème siècle. Les conséquences sont considérables : - naissance de la sidérurgie moderne. Pendant 2 500 ans environ, le fer était produit dans les «bas fourneaux» en terre où s effectuait la réduction directe du minerai de fer par le charbon de bois. Mais, la température ne dépassant pas 1 000 C, on obtenait une éponge faite d un mélange de fer et de scories «la loupe» qu il fallait ensuite séparer par martelage. Le pouvoir calorifique élevé du charbon, le double de celui du charbon de bois, permet d atteindre la température de fusion du fer (qui est de 1 535 C) dans les «hauts fourneaux» où le minerai de fer y est réduit. On récupère au bas du four un alliage fer carbone qu on appelle la «fonte», laquelle est ensuite affinée pour donner de l acier. Les premiers hauts fourneaux alimentés en charbon de terre sont installés en Grande Bretagne à partir de 1770. C est Ignace de Wendel qui installa en 1769 à Hayange en Lorraine le premier haut fourneau au coke en France. - développement de la machine à vapeur auquel sont associés les noms du français Denis Papin (1647 1712) et de l écossais James Watt (1736 1819). La machine à vapeur va apporter la force motrice dans les filatures, dans les mines, dans les aciéries pour faire fonctionner les machines et faciliter aussi l essor des grands travaux avec l invention du marteau piqueur par Someiller en 1870. En mettant une machine à vapeur sur un chariot à quatre roues, Stephenson invente la traction à vapeur sur voie ferrée. La première ligne de chemin de fer est installée en entre Manchester et Liverpool de 1826 à 1830. La première ligne de chemin de fer française fut ouverte en 1827 entre Saint Etienne et Andrézieux. Les «saint simoniens» couvrirent la France de voies ferrées au cours du 19 ème siècle. - la carbochimie à partir des goudrons et du gaz de houille. Elle est le point de départ de la fabrication des colorants, des produits pharmaceutiques, des explosifs, des engrais azotés, etc. C est la raison pour laquelle l industrie chimique du 19 ème siècle s installe à proximité des mines de charbon. - l éclairage des villes au gaz qui dura tout le 19 ème siècle. Philippe Lebon déposa en 1799 un brevet de «thermolampes» perfectionné par Bunsen. Chaque ville avait son usine à gaz qui alimentait un réseau de distribution de gaz pour usages domestiques et industriels. 3

- enfin les marchands de canon dont les activités furent florissantes en France (de Wendel) et en Allemagne (Krupp). Il faut rappeler l influence que le Comité des Forges exerça sur la vie politique française jusqu en 1936. Pierre Pucheu, en fut un membre influent. 3 2 Le pétrole Les premières découvertes de pétrole ont été faites en 1859 en Pennsylvanie aux USA. De 1870 à 1895 sont crées les premières grandes compagnies pétrolières : - aux USA, John Rockefeller fonde la première compagnie pétrolière «La Standard Oil», - en Hollande, la Royal Dutch pour exploiter le pétrole de Sumatra, - en Grande Bretagne, est créée la Compagnie Shell qui absorbera Royal Dutch en 1907. La France ne s engagera que très tardivement dans l aventure pétrolière. C est en 1924 qu est créée la CFP (Compagnie Française des Pétroles), ancêtre de Total et Elf Erap a été créée en 1965. A l origine, le pétrole (en fait le Kérosène dont il était extrait) servait principalement à l éclairage avec la «lampe à pétrole». L invention de l ampoule électrique par Edison en 1882 déstabilisa l industrie pétrolière qui fut sauvée par l invention du moteur à explosion en 1896. Le pétrole off shore est exploité depuis une quarantaine d années. On sait maintenant forer et exploiter sous 2 000 mètres d eau (Golfe de Guinée). Le pétrole est devenu la base de l industrie chimique à partir de 1960. La pétrochimie a balayé la carbochimie. C est pourquoi tous les fours à carbure ont été arrêtés vers 1960. L antériorité des pays producteurs est indiquée au tableau 1. On notera que près de 70 % des réserves prouvées de pétrole sont au Moyen Orient (tableau 2). Tableau 1 HISTORIQUE DES PAYS PRODUCTEURS DE PETROLE Année Pays 1859 USA 1873 Azerbaïdjan 1901 Iran 1901 Texas 1910 Mexique 1920 Irak 1922 Venezuela 1933 Arabie Saoudite 1938 Koweit 4

1956 Sahara et Gabon, Nigeria 1959 Libye 1969 Chine 1960 Création de l OPEP Tableau 2 RESERVES, PRODUCTION ET CONSOMMATION DE PETROLE Pays Réserves (GT) Production (MT) Consommation (MT) Arabie Saoudite 36 423 62 Irak 15 118 13 Koweit 13 104 10 Émirats Arabes Unis 13 113 14 Iran 12 182 54 Venezuela 11 176 22 Russie 7 348 122 Mexique 4 176 82 Libye 4 67 7 USA 4 350 900 Chine 3 165 230 Nigeria 3 105 6 Qatar 2 36 1 Norvège 1 162 10 Brésil 1 66 85 Algérie 1 65 9 Kazakhstan 1 40 8 Total 131 2696 1635 GT = milliard de tonnes, MT =Million de tonnes (données 2001) 3 3 Le gaz naturel Le gaz naturel a été découvert au Moyen Orient au cours de l Antiquité. Les chinois savaient l extraire à partir du début du 3 ème siècle de notre ère. Le premier puits américain fut creusé en 1821. Faute de savoir le transporter sur de longues distances, ce produit fut longtemps gaspillé en le brûlant sur les lieux de production. Le gaz est considéré comme une source d énergie plus propre et plus respectueuse de l environnement que le charbon et le pétrole : pas d émission de dioxyde de soufre SO 2, 50 % de moins d émission de dioxyde de carbone CO 2 que le charbon et 30 % de moins que le pétrole. Les gisements de gaz naturel se trouvent en profondeur, associés ou non à ceux du pétrole. Bien que la composition des gisements de gaz naturel varie d un site à l autre, le méthane CH 4 est le composé prédominant à 90 %. Les principaux pays producteurs de gaz naturel sont les États Unis et la Russie représentant chacun 23 % de la production mondiale en l an 2000. Les autres pays producteurs sont le Canada, la Grande Bretagne, l Algérie, l Indonésie, l Iran, les Pays Bas, la Norvège et l Uzbekistan. 5

Avant livraison, le gaz naturel est purifié sur les lieux d extraction. Il est expédié en gazoduc par voie terrestre. Il y a un important réseau de gazoducs en Europe pour transporter le gaz russe, batave et norvégien. Par voie maritime, il est transporté sous forme liquide dans des méthaniers dont les derniers navires lancés ont une capacité de 150 000 m 3. Pour cela, après traitement, le gaz est liquéfié à basse température (-161 C) e t déchargé liquide dans des énormes bidons qui peuvent atteindre 30 000 m 3 puis regazéifié avant d être introduit dans les réseaux de distribution. En France, il y a deux terminaux équipés pour recevoir et stocké le GNL : Fos et Montoir de Bretagne près de Saint-Nazaire. 4 - L EMERGENCE DE LA FEE ELECTRICITE Bien que ce ne soit pas une source d énergie, mais une forme d énergie facile à transporter et à utiliser, il est important d en dire quelques mots tant électricité et progrès furent longtemps associés. Ainsi l électrification des campagnes fut considérée cause nationale dans bon nombre de pays dont la France. Jusqu en 1870, la pile, inventée par Volta en 1800, était le seul moyen de produire de l électricité. Les laboratoires du 19 ème siècle pouvaient disposer d une puissance de l ordre de 10 000 W (une pile classique fait 4 à 5 watts)!!! Les découvertes sur l électromagnétisme faites au cours du 19 ème siècle par Ampère, Faraday, Oersted et Maxwell permirent aux ingénieurs de mettre au point des machines tournantes actionnées par des chutes d eau ou des machines à vapeur pour produire de l électricité. La première machine industrielle fut la dynamo inventée en 1870 par Zénobe Théophile Gramme. Cette machine produisait du courant continu et fut le début de l aventure, à partir de 1890, de l industrie de la houille blanche, de l électrochimie et de l électrométallurgie dont les traces demeurent dans notre région. Les premiers alternateurs, machines tournantes qui produisent du courant alternatif, furent construites à partir de 1890 en Europe et aux USA. Ainsi débuta l ère de l électricité industrielle avec la création de réseaux de transport sur de longues distances. Aujourd hui, on sait faire tourner des alternateurs d une puissance de 1 400 MW. Les machines à produire du courant : dynamo et alternateurs sont réversibles. Quand on les branche sur une source de courant elles deviennent des moteurs dont les usages vont se répandre dans le transport sur rail : métros et tramway dès 1900 ensuite les locomotives électriques. En 1879, les 38 lignes de tramways parisiens tirés par des chevaux nécessitaient l entretien de 16 500 chevaux (des vrais). Le moteur électrique va changer le mode de fonctionnement des usines de production en remplaçant les machines à vapeur qui actionnaient des arbres sur lesquels chaque machine puisait sa force par l intermédiaire d une courroie. 6

L électroménager et l audiovisuel, réservés à une minorité fortunée jusqu en 1950, se développent à partir de 1960. Rappelons le succès du Salon des Arts Ménagers, et du Cetelem qui finançait les crédits d achat de matériel électroménager. Pour Pompidou, le bonheur des français se mesurait au taux de pénétration des appareils électroménagers. Deux remarques : - on ne sait pas stocker l électricité autrement qu en le transformant en une autre forme d énergie. Pour stocker 1 Kw/h d électricité, il faut charger au moins 28,5 kg de batteries au plomb ou remonter de 100 mètres 3 700 litres d eau. C est ce qui explique les difficultés de la voiture électrique, - toutes les tentatives pour produire de l électricité par «conversion directe» ont échoué. Ce procédé appelé MHD (magnétohydrodynamique) consiste à faire passer à grande vitesse des gaz très chauds 3 000 C env iron - dans une tuyère placée dans un champ magnétique. EDF avait monté un pilote au Centre des Renardières dans les années 70. 5 L ENERGIE NUCLEAIRE Quand on brûle des combustibles fossiles, il y a changement d état physique de certains constituants qui passent de l état solide à l état gazeux, d autres vont former des cendres, etc. Mais tout cela se fait avec conservation de la matière : «Rien ne se perd rien ne se gagne» (en masse) disait Lavoisier. Dans les réactions nucléaires, il en est tout autrement. De la matière se transforme en énergie suivant la célèbre équation d Einstein E = mc 2. Il y a équivalence entre matière et énergie, si bien que les ordres de grandeurs sont très différents. Ainsi, 1 000 kg (une tonne) d uranium fertile 235 produisent autant d électricité que 2 millions de tonnes de pétrole, le rapport est de 1 à 10 000. L énergie nucléaire relève des découvertes de la physique moderne depuis celle des rayons X par Wilhem Roentgen en 1895 et celle de la radioactivité naturelle par Henri Becquerel en 1896 et par Pierre et Marie Curie en 1898 jusqu à la découverte du neutron, particule du noyau des atomes, par Chadwick en 1932. Dans les années 1930, des physiciens, dont Joliot-Curie en France, découvrirent la fission nucléaire. Dans certaines conditions, les neutrons sont capables de casser des atomes lourds en plusieurs autres atomes plus petits avec production d autres neutrons et d énergie, sous forme de chaleur. C est la réaction en chaîne que l on contrôle strictement dans les réacteurs nucléaires. Si, volontairement, on laisse la réaction s emballer, on fabrique alors une arme nucléaire c est la bombe A - dont la première explosa le 16 juillet 1945 dans le désert de l'état du Nouveau-Mexique. Depuis 1955, on sait faire fonctionner des réacteurs nucléaires qui produisent de l électricité. Le choix d une technologie s appelle une «filière». On étudie actuellement les réacteurs de la quatrième génération, celle des surgénérateurs, qui devraient être opérationnels vers 2030 2040. 7

Pour des raisons techniques, mais aussi militaires, on s est d abord orienté vers des réacteurs à l uranium naturel ou faiblement enrichi qui ont la propriété de produire du plutonium qui sert à la fabrication de l arme atomique. La filière française «graphite gaz» (Chinon, Bugey 1) répondait à la volonté politique de de Gaulle pour doter la France de l arme nucléaire. Les réacteurs soviétiques sont parents de cette filière mais ne sont pas confinés dans des enceintes étanches, raison pour laquelle l accident de Tchernobyl a eu la gravité que l on sait. Le parc mondial actuel des réacteurs nucléaires électrogènes est de 441 unités dont 203 en Europe, 128 en Amérique du Nord et 101 en Asie. La France, en fait EDF, est équipée de 59 réacteurs. La part du nucléaire dans la production mondiale d électricité n est que de 21 %. La part de l électricité d origine nucléaire est de 40 % en Europe (dont 78 % en France) seulement 16 % en Amérique et 19 % en Asie (dont 34 % au Japon et 38 en Corée du Sud). La fusion est l autre réaction nucléaire possible au cours de laquelle deux atomes légers du deutérium et du tritium (des isotopes de l hydrogène) sont fusionnés pour former de l hélium. C est cette réaction qui se produit dans les étoiles dont le soleil. La fusion, encore appelée énergie thermonucléaire, mise en jeu dans la bombe à hydrogène, n a jamais pu être maîtrisée en dépit de recherches menées depuis 50 ans dans les grands pays industriels. Le but de ITER (International Thermonuclear Experimental Reactor) est de poursuivre les recherches qu on espère voir aboutir dans quelques décennies. L énergie nucléaire n a pas eu le développement civil que l on escomptait. Plusieurs raisons expliquent le ralentissement observé depuis 20 ans : - l histoire même du nucléaire marqué par l horreur du bombardement de Hiroshima le 6 août 1945 et du sceau du crime d État avec la bombe larguée 3 jours plus tard, le 9 août 1945, sur Nagasaki, aux fins d essai d une arme au plutonium. - le secret malsain qui a toujours entouré cette activité tant qu il y a eu interférence, voire mélange des personnels et des matériels voués au nucléaire civil et militaire. Habitudes détestables qui conduisirent les autorités de l époque en avril 1986 - à nier le passage du nuage radioactif de Tchernobyl sur le sud est de la France, - les deux accidents de centrales nucléaires : aux USA à Three Mile Island en mars 1979 et à Tchernobyl en Ukraine le 26 avril 1986 où il y a eu dissémination de produits de fission radioactifs. Il faut rappeler que les réacteurs soviétiques n étaient pas confinés. - la question des déchets, non entièrement résolue, et du démantèlement des centrales en fin de service : sait on faire, combien cela coûtera t il, que fera t on des matériaux contaminés tels que les carcasses de cuves, etc. 8

- la crainte de la dissémination des armes nucléaires (mais, c est déjà fait), - l hostilité des «écolos» dont le discours, parfois à la limite de la probité intellectuelle, est de toujours et toujours vilipender le nucléaire. 6 LA SCIENCE DE L ENERGIE L énergie, c est d abord un concept de base de la physique avec ses lois qui constitue la thermodynamique. La plupart de ces lois ont été formulées au 19 ème siècle par Sadi Carnot en 1831, par Émile Clapeyron en 1834. La thermodynamique nous enseigne quelques principes très simples, que les écologistes feignent parfois (même souvent) d oublier ou d ignorer : - pour qu un moteur thermique fonctionne, il faut une source chaude et une source froide, raison pour laquelle il y a un radiateur de refroidissement sur nos voitures. Dans toutes les centrales électriques thermiques, il y a un condenseur où la vapeur en sortie de turbine vient se refroidir. Il faut donc de l eau pour évacuer les calories, raison pour laquelle ces centrales sont toujours au bord d une rivière ou sur le littoral. - l énergie se transforme, ainsi il y a équivalence entre chaleur et travail. Il est donc possible de faire fonctionner des moteurs thermiques qui vont pousser des pistons ou faire tourner des turbines, - la conversion de la chaleur en travail se fait avec un rendement qui dépend de la différence de température entre la source chaude et la source froide. C est le rendement Carnot qui est rarement supérieur à 50 %. Les unités de l énergie L unité officielle est le Joule. L unité habituellement utilisée est le kw/h (kilo watt heure). Par commodité, pour comparer et comptabiliser les consommations d énergies fossiles, on utilise la Tep (tonne équivalent pétrole). C est la quantité d énergie obtenue sous forme de chaleur par la combustion d une tonne de pétrole (tableau 3). Tableau 3 ÉQUIVALENT PETROLE Produit Tep 1 tonne de fioul 1 1 tonne d essence 1,05 1 tonne de charbon 0,62 1 tonne de lignite 0,40 1 tonne de bois 0,30 1 tonne de GNL 1,10 1 MW/h électrique 0,086 1 baril de pétrole = 159 litres = 136 kg 9

En fait, en tenant compte des rendements des turbines et des pertes en lignes, on devrait considérer que pour produire 1 MWh d électricité, il faut 0,222 Tep. La puissance, exprimée en Watt (W) est l énergie consommée ou délivrée pendant 1 seconde. Par commodité on utilise les multiples indiqués au tableau 4. Rappelons que le cheval vapeur est une vieille unité héritée du 19 ème siècle et abandonnée depuis 50 ans. C est la puissance fournie par un cheval qui porte une charge de 75 kg au pas (vitesse de 1 m/s). Un CV = 736 watt en France et un peu plus en Angleterre 746 Watts (où les chevaux étaient peut être mieux nourris! Tableau 4 SIGNIFICATION DES PREFIXES Préfixe Symbole Valeur Kilo kw mille watts (10 3 ) Méga MW Million (10 6 ) watt ou 1 000 KW Giga GW Milliard (10 9 ) watt ou 1 million de KW Téra TW Million de millions (10 12 ) de watt ou 1 milliard de KW en anglais milliard se dit billion Dans la tableau 5, j ai indiqué quelques ordres de grandeur de la puissance de matériels. Les puissances animales sont modestes : - 200 watts pour un âne, - 500 à 700 watts pour un cheval, - 500 watts pour un homme (non dopé). Mais ces «machines» doivent se reconstituer pendant des périodes de repos obligatoire. Tableau 5 QUELQUES ORDRES DE GRANDEUR : Matériel Puissance 1 lampe de «poche» 5 W 1 lampe d éclairage 60 W 1 mixer 100 W 1 télévision 150 W 1 réfrigérateur 250 W 1 four micro onde 1 500 W 1 lave linge 3 000 W 1 lave vaiselle 3 000 W 1 moteur de voiture de 9 CV 100 KW 10

1 moteur de 38 T 500 KW Les Motrices d un TGV 7 MW 1 centrale nucléaire 1 000 MW 7 LES CONSOMMATIONS MONDIALES D ENERGIE En 2003, la consommation mondiale d énergie a approché les 10 milliards de Tep, dont 3,6 pour le seul pétrole (tableau 6). Plusieurs observations sur ces données : - production et consommation mondiales s équilibrent tout juste, ce qui explique l extrême tension sur les prix et la fragilité de nos sociétés «énergie vorace», - les USA, 300 millions d habitants, à peine 5 % de la population mondiale, consomment à eux seuls 25 % de cette énergie, - les chinois, 1 300 millions d habitants, ne consomment que 1 170 millions de Tep. S ils voulaient se hisser au niveau de la consommation américaine, il leur faudrait au moins 10 milliards de Tep et les indiens ne manqueraient pas de réclamer leur part, un petit peu moins - l électricité d origine hydraulique et nucléaire, ne représente que 12 % de la consommation d énergie. Tableau 6 CONSOMMATION D ENERGIE EN 2003 (TEP) Charbon Produits pétroliers Gaz naturel Électricité hydraulique et nucléaire Total Monde 2 600 3 600 2 300 1 200 9 700 États-Unis 570 910 570 240 2 300 Europe 535 940 980 460 2 900 Chine 800 275 30 75 1 170 Japon 110 250 70 75 500 Autres 585 1225 650 350 2 830 (chiffres arrondis 2 519 = 2 500) Tableau 7 LA CONSOMMATION MOYENNE EN TEP PAR AN ET PAR HABITANT EN 2000 Pays Tep États-Unis 8,1 France 4,3 Allemagne 4,2 Chine 0,9 Afrique 0,6 Monde 1,7 Tableau 8 PRODUCTION D ENERGIE PRIMAIRE EN 2003 (TEP) 11

Charbon Produits pétroliers Gaz naturel Électricité hydraulique et nucléaire Total Monde 2 500 3 700 2 300 1 200 9 700 États-Unis 550 340 500 240 1 600 Europe 430 820 920 460 2 600 Chine 840 170 30 75 1 120 Japon 1 - - 75 75 Autres 680 2 370 900 340 4 300 (chiffres arrondis 2 519 = 2 500) 8 LE CAS DE LA FRANCE Compte tenu du choix nucléaire de 1973, la situation de la France est un peu différente puisque la part de l électricité d origine nucléaire représente 40 % de la consommation d énergie (tableaux 9 et 10). Du fait de la part importante du nucléaire, la consommation des ménages ne représente 50 % des importations des énergies fossiles. La part des transports (marchandises et personnes) y est passée de 20 % en 1973 à 32 % en 2001. Tableau 9 L ENERGIE EN FRANCE EN 2003 Énergie Produc tion Consom mation Charbon 1 13 Produits pétroliers 1 92 Gaz naturel 1 40 Électricité 120 115 Énergies renouvelables 12 13 Total 137 275 Tableau 10 PRODUCTION D ELECTRICITE EN FRANCE EN 2001 Énergie primaire Part (en %) Nucléaire 75,8 Hydraulique 13,9 Solaire, éolien 0,7 Charbon 6,2 Pétrole 2 Gaz 1,4 Tableau 11 12

ÉNERGIE ET SECTEURS D ACTIVITE EN FRANCE Secteurs d activité M Tep Sidérurgie 5,8 Industrie 31,7 Résidentiel et tertiaire 68,2 Agriculture 2,9 Transports 50,3 Tableau 12 REPARTITION DE LA CONSOMMATION D ENERGIE EN FRANCE Activité % Logement 29 Activité professionnelle 16 Déplacements personnels 15 Biens et services 40 9 - LES RESERVES MONDIALES D ENERGIE Les réserves de pétroles comptabilisées constituent l ensemble du pétrole que l on peut espérer extraire à l avenir à partir des ressources connues maintenant, en tenant compte des conditions économiques et techniques qui seront celles du moment. L estimation des réserves est un exercice difficile pour plusieurs raisons dont les cachotteries ou surestimations des compagnies pétrolières ou des États, découvertes inespérées, etc. Néanmoins, en ce qui concerne le pétrole, les réserves prouvées ont plutôt augmenté au cours des dernières décennies. Dans les années 60, Le Club de Rome voyait arriver l épuisement du pétrole pour l an 2000!!! Plusieurs raisons expliquent le report de quelques décennies pas plus - de cette échéance inexorable : - les méthodes de prospection pétrolière ont fait des progrès, - les techniques de forage ont été perfectionnées, on sait forer de travers, à l horizontale, - la mise au point des techniques de l exploitation sur des fonds marins à 2 000 mètres de profondeur, - le taux de récupération du pétrole est passé de 25 à 35 % en injectant dans les puits du gaz (dont du CO 2 ) ou de la vapeur d eau, - l augmentation du prix du baril rentabilise des ressources qui étaient trop chères à exploiter avant. D après les données actuelles, 60 % des réserves de pétrole sont au Moyen Orient dont 25 % en Arabie Saoudite!!! 13

On notera que les réserves américaines qui satisfont 40 % de leur consommation actuelle devraient être épuisées dans 10-15 ans!!! En 1990, les réserves estimées étaient les suivantes : Tableau 13 RESERVES D ENERGIE PLANETAIRE EN 1990 Source GTep (milliards) Années de réserve Charbon 430 200 Lignite 110 290 Pétrole 146 40 Gaz 133 56 Schistes bitumineux Plusieurs centaines? Hydrates de méthane Plus de 1 000? Uranium (REP) 80 200 Uranium (Surgénérateur) 8 400 21 000 Années de réserve au rythme actuel de consommation REP = Réacteur à eau pressurisée On voit donc que les ressources en énergie fossiles, sauf le charbon, sont limitées à quelques décennies. Quelques mots sur les schistes et les hydrates de méthane. Les premiers sont des minéraux imprégnés de goudron (du très vieux pétrole dont les fractions légères se sont évaporées au cours des temps géologiques). On ne sait pas bien traiter ces schistes et c est horriblement polluant. Ces techniques relèvent de l industrie minière et non pétrolière. Les hydrates de méthane sont des réserves de gaz méthane enveloppées de molécules d eau (ou plutôt de glace), qui se trouvent plutôt au dessous de 1000 mètres dans les fonds marins, près des plateaux continentaux. Leur exploitation présente un danger pour l environnement à cause de l effet de serre du méthane. On ne sait pas encore aller les chercher. Pic de Hubbert Les observations de Hubbert, qui était géologue à la Shell, ont montré qu il y a un décalage de 30 à 35 ans entre la courbe des découvertes des gisements de pétrole et la courbe de production. Fort de ce constat fait en 1960, Hubbert prédit alors la décroissance de la production américaine à partir de 1970, ce qui s avéra être vrai. Cette méthode conduit à une extrapolation mondiale qui situe ce pic entre 2010 et 2020. Depuis 20 ans, on n a plus découvert de grands gisements. Au Moyen Orient, 70 % de la production provient de gisements découverts entre 1950 et 1960!!! Les pessimistes sont plutôt les géologues, ceux qui connaissent le terrain alors que les optimistes sont plutôt des économistes (et des libéraux) qui proclament que les 14

découvertes et les progrès techniques ont toujours jusqu à maintenant compensé l accroissement de la consommation donc il en sera de même à l avenir. Les optimistes ont tort car ils ne tiennent pas compte du CO 2 et le fait que le monde est fini (attention dans le sens contraire de infini). Les pessimistes n ont pas forcément raison non sur l issue ultime mais sur son échéance précise car les données géologiques ne sont pas toujours bien connues. 10 - L EFFET DE SERRE La planète Terre reçoit du soleil au sommet de l atmosphère (à 50 km d altitude) à chaque seconde d ensoleillement 1 300 W.m -2 dont la moitié arrive au sol, 30 % sont directement réfléchis dans l espace et 20 % servent à chauffer l atmosphère. Du fait de la présence de l atmosphère de notre planète, une partie seulement de l énergie solaire est réfléchie par la surface du sol. Cet équilibre entre le flux reçu et le flux réémis se traduit par une température moyenne au sol. L atmosphère de notre planète a donc un «effet de serre» naturel du fait de la présence de vapeur d eau dans l air, entre autre. Si tel n était pas le cas, la température moyenne serait de 15 C, au lieu de +1 5 C. Depuis un demi siècle, on constate un réchauffement de la planète qui est bien corrélé avec l accroissement de la quantité de dioxyde de carbone CO 2 dans l air, passée de 280 ppm/v en l an 1700 à 360 en 2000 (360 cm 3 dans un m 3 ). Ce dioxyde de carbone, dont la teneur dans l atmosphère ne cesse de croître fortement depuis 1 siècle, est du à la combustion des énergies fossiles qui sont toutes des dérivés du carbone. Les prévisions à moyen terme faites par les climatologues sont plutôt alarmistes et conduisent à une augmentation de 2 à 5 C, d ici 21 00, de la température moyenne de la planète. Ce réchauffement aura des effets considérables non seulement sur le climat mais sur la faune, la flore, voire même provoquer l arrêt du Gulf Stream. Contrairement à une idée reçue, si on se fie aux modèles climatiques, ce réchauffement se traduira par une sécheresse des zones tropicales et par un refroidissement de certaines régions dont les nôtres (avec ou sans arrêt du Gulf Stream) et une montée des océans de plusieurs dizaines de mètres du fait de la fonte des glaces polaires. Le dioxyde de carbone CO 2 n est pas le seul responsable de l effet de serre. D autres gaz sont aussi dangereux d autant plus qu ils ont plus d effet, toutes choses égales par ailleurs, que le dioxyde de carbone. Ils contribuent aussi à la destruction de la couche d ozone Ce sont : - le méthane, qui est le composé essentiel du gaz naturel mais qui est produit en grande quantité par les fuites (naturelles) des gisements de gaz et aussi des brûlis de foret, de l élevage des ruminants, des marais (dont la culture du riz), des décharges d ordures, et plus généralement partout où il y a fermentation. 15

Il est passé de 0,8 en 1700 à 1,6 ppm/v en 2000 (0,8 à 1,6 cm 3 par m 3 ). Ainsi, une vache laisse échapper 100 litres de méthane par jour (soit 70 grammes de gaz). Les 20 millions de vaches de France ont plus d effet méthane que l activité humaine de ce pays, - le protoxyde d azote qui provient des engrais azotés et de certains processus chimiques, - les halocarbures qui proviennent des systèmes de climatisation, - l ozone de la pollution urbaine. Tous ces gaz ont des durées de séjour plus ou moins longues dans l atmosphère et leurs effets, mesurés par rapport au CO 2, est considérable (tableau 14). Le protocole de Kyoto signé en décembre 1997 prévoit la réduction progressive des émissions de gaz à effet de serre. Tableau 14 GAZ A EFFETS DE SERRE Gaz Formule Durée de PRG / CO 2 séjour (années) Dioxyde de carbone CO 2 100 1 Méthane CH 4 12 23 Protoxyde d azote N 2 O 120 300 Perflurorocarbures C n F 2n+2 50 000 6 500 à 8 700 Hydrofluorocarbures C n H m F p 50 000 140 à 11 700 Hexafluorure de soufre SF 6 24 000 PRG = Pouvoir de réchauffement global de 1 kg de gaz pendant 100 ans par rapport à 1 kg de dioxyde carbone pendant 100 ans 11 LES CONSEQUENCES Sous réserve de progrès spectaculaires et inattendus dans la prospection pétrolière et gazière, dans la domestication rapide de l énergie thermonucléaire (ITER), la pénurie d énergie fossile deviendra une réalité d ici peu. Cette échéance surviendra d autant plus rapidement que la Chine (et aussi l Inde) poursuivra le modèle actuel de développement économique et que les américains exerceront une pression militaire pour s accaparer des ressources du Moyen Orient et de l Asie Centrale de manière à pouvoir continuer la dilapidation sans vergogne de l énergie fossile. 16

On pourrait bien encore évidemment amortir, financièrement parlant, le renchérissement de l énergie (qui n a pas atteint en dollars constant le niveau de 1981), mais un second écueil encore plus imparable se dresse devant ce modèle de développement économique : l effet de serre. L énergie a imprégné à un point tel notre vie quotidienne et l organisation mondiale actuelle que sa raréfaction et son fort renchérissement prévisibles à moyen terme devraient bouleverser profondément l organisation sociale, les modes de vie, les modes de production agricole, les échanges mondiaux. Prenons quelques exemples : - l urbanisation: comment organiser l espace, comment gérer des villes aussi étendues que les villes américaines, comment gérer les immeubles de grande hauteur (ascenseurs, climatisation, etc.), - le logement (25 % de la consommation) avec de grandes baies dont la conception est héritée des approches hygiénistes de la fin du 19 ème siècle, - les transports (30 % de la consommation), la très sérieuse AIE recommande ces jours-ci aux gouvernements de l OCDE de prendre des mesures drastiques pour économiser le pétrole, par exemple 90 km/h sur autoroute, covoiturage, gratuité des transports publics (ce n est pas du libéralisme), raccourcir la semaine de travail, etc. dans un document paru fin avril 2005, voir tableau 16 - les loisirs, pourra-t-on, et à quel prix, continuer un tourisme de masse vers les rivages de la Thaïlande, par exemple, - l alimentation et la filière agro alimentaire : pour ingurgiter 2000 calories journalières, on en dépense 5 fois plus en énergie, 1 kg de veau dans nos assiettes a coûté autant d énergie que parcourir 30 km en voiture, 1/3 de la circulation des camions est mobilisé par la filière agro-alimentaire!!! - la distribution dans les supermarchés situés aux périphéries des villes : son coût énergétique direct et indirect est tel qu on peut s interroger sur la pérennité de cette forme de distribution, - la mondialisation : un porte container de 65 000 tonnes (6 000 boites) met 17 jours pour faire le trajet Shanghai Europe et consomme 270 t de fioul par jour, soit 4 600 tonnes de Tep pour le voyage. Le fioul a doublé en 1 an, il valait 260 $ la tonne en mars 2005, ce qui amène le transport à près de 20 $ la tonne. Sera-t-il bientôt encore rentable de transporter des chaussettes depuis la Chine? - plus généralement quelle croissance et comment organiser la décroissance? 12 - LES ISSUES Il y a 20 ans, j ai assisté à un congrès sur l énergie thermique des mers à Washington. J ai alors compris que l Humanité ne manquerait jamais d énergie mais que nos modes de vie, notre organisation sociale et économique s en trouveront sans doute profondément modifiés. La seule certitude que l on puisse avoir aujourd hui est que ce modèle économique et sociétal (urbanisation, transports) ne pourra perdurer dans sa forme actuelle. 17

Rien ne permet de dire que le pire est certain ou que le malheur viendra inexorablement punir ceux qui ont osé vouloir moins peiner au travail, vivre plus dignement leur humanité, c est un peu le discours misérabiliste de certains «écolos». Sauf, bien sur, si rien est fait tant sur le plan de la recherche de solutions de remplacement et d économie des énergies fossiles et de la maîtrise des rejets polluants. Alors, l effondrement (dont la famine), qui est une des hypothèses du Club de Rome, devient possible à moyen terme. Mais la dépendance est telle que nous n avons pas de solution de rechange disponible «sur étagère». Le virage demandera plusieurs décennies. En attendant, le déferlement de l ultra libéralisme, qui nous oblige à brader EDF, GDF, va nous priver de moyens d action. On marche sur la tête en libéralisant le secteur non rentable et stratégique de l énergie autre que le pétrole. L exemple de la Californie est patent : augmentation du prix du KWh et coupures de courant. J envisage de vous proposer une seconde planche qui traitera des issues (non fatales) de cette crise de l énergie qui passe par des économies, le développement des énergies renouvelables, des surgénérateurs, mais qui ne sont ni l hydrogène ni la pile à combustible, la portée des puits de carbone, la biomasse, etc. 27 avril 2005 C. V. ANNEXES Tableau 15 CONSOMMATION ANNUELLE DE L ELECTROMENAGER Appareil KWh Magnétoscope 130 Téléviseur 150 Lave linge 250 Lave vaisselle 350 Réfrigérateur 400 Sèche linge 500 Éclairage 500 Congélateur 600 Four électrique 1 100 Réfrigérateur américain 1 650 18

Tableau 16 COUT ENERGETIQUE DES MODES DE TRANSPORTS (EN GRAMME PETROLE/KM/ PASSAGER) Transport g/km Automobile 54 Avion 51 Autobus 25 Ter 24 TGV 12 19