Intervention d un panel international autour du thème «La stratégie de la France et de l Europe vue de» Introduction par l Amiral Louis Michel Guillaume: «Messieurs les officiers généraux, les directeurs, Mesdames et Messieurs. Bienvenue pour cette seconde séance plénière et si vous me le permettez, malgré les risques que ça représente pour moi d abord, mais surtout pour vous, je vais poursuivre ce panel international en anglais. Nous avons décidé d'ouvrir le CSFRS à l'international, au-delà du risque nous avons décidé de considéré cela comme une opportunité ; une opportunité d'entendre différentes approches. Nous voudrions que la communauté stratégique que nous créons avec vous, progresse. Donc nous avons demandé à la France de nous aider, et la France est toute à fait prête à aider lorsqu on on lui présente un défi, ou quand nous sommes dans les ennuis. La question posée est simple, que pensez-vous des stratégies françaises et européennes? Nos amis ont accepté d'être avec nous cet après midi et nous devons leur en être tout à fait reconnaissant. Permettez-moi de les présenter. Tout d'abord Xu Weidi de l'institut d'études stratégiques à l'université de défense nationale de l'armée populaire de Chine. Le professeur est né en 1956 a commencé sa carrière stratégique en 1976 quand il a intégré l'armée populaire. Il a un doctorat de l'université de sciences et technologies, il est devenu l un des plus jeunes membres de l'institut d'études stratégiques de cette même université. Parmi ses devoirs, il a servi comme un observateur militaire et chef d'équipe de la mission de maintien de la paix de l'onu au Sahara Occidental. Son grand intérêt pour les questions stratégiques l'a amené à passé six mois comme professeur invité de l Institute of London, avant de devenir membre du Royal College of Defense Studies de Londres. C'est un chercheur invité au Collège d'australie, à l institut national japonais d études de défense. C'est un expert bien connu quand aux sujets de sécurité dans le Pacifique, un spécialiste des questions de désarmement et des contrôles diplomatiques de l'armement. Il est très difficile de présenter Louise Shelley. Professeur à l'université George Mason de Virginie, elle y enseigne à l'école des public policy. Coprésidente du World Economic Forum, elle est aussi l'auteur d'ouvrages sur le trafic d êtres humains.
Le docteur Jamie Mc Intosh après avoir servi dans l'armée britannique est devenu chercheur au ministère de la Défense. Il se concentre sur la capacité d'action décisive et la nécessité d'apprendre et de s'informer sur l'environnement urbain instable. Ses recherches l'ont conduit à occuper plusieurs postes en cabinet ministériel ou auprès des décideurs du Royaume-Uni. A la demande du secrétaire du cabinet, le docteur Mc Intosh a travaillé sur le concept de résilience face aux crises pour le gouvernement britannique au printemps 2001. Il est maintenant directeur des programmes à l'académie de défense du Royaume-Uni. Nous allons donc écouter nos invités, tout d abord le docteur Shelley, le docteur MacIntosh, suivis par le professeur Xu. Notre invité indien nous a informés que pour des raisons personnelles, il était incapable de participer à cette réunion aujourd'hui.» Louise Shelley : «C'est un grand honneur d'être avec vous aujourd'hui mais je vais parler en anglais. Assister à vos débats fut tout à fait fascinant pour moi et j'ai quelques observations sur ce que je pense qu'il manque dans vos discussions. Cela correspond beaucoup aux discussions stratégiques auxquelles j'ai participé aux États-Unis, où l'on aborde les thématiques de l'irak ou de l'afghanistan, sans pour autant parler de ce qui se passe au sud en lien avec nos frontières avec le Mexique. De la même manière aujourd'hui, je n'ai rien entendu sur les événements en cours en Afrique du Nord, de l'ouest ou de l'est. Travaillant moi-même sur les migrations illégales, je considère comme un phénomène majeur le mouvement de populations d'afrique du Nord essayant d'atteindre l'europe après le «printemps arabe». C Il a causé des conflits importants et a miné le processus de Schengen. Le conflit qui a éclaté entre la France et l'italie sur cette immigration illégale aura des conséquences très profondes sur la communauté européenne. De la même façon, pour quelqu'un qui se concentre sur les problèmes de sécurité humaine, je n'ai rien entendu dire sur les problèmes liés à la drogue en Afrique du nord et sur ses conséquences pour la France, où nous savons qu il y a un mouvement massif de drogues. Je n'ai pas entendu parler de l'intervention en Libye et particulièrement sur ce qui se passe en Libye du Sud au confluent du crime organisé et du terrorisme. Je n'ai rien entendu sur les conséquences pour la sécurité française. J'entends à peu près les mêmes problèmes qu'aux Etats-Unis, où nous avons douze millions d'immigrants illégaux, un crime organisé qui fonctionne dans deux cents villes et communautés
américaines provenant d Amérique latine et de Mexico. De la même façon que vous avez des problèmes avec les réseaux illicites venant d'afrique du nord et avec ces immigrants qui veulent venir vivre honnêtement dans votre pays, ils ne peuvent pas survivre à cause de cet environnement. Donc mon collègue chinois a également un transparent et nous allons tous parler du problème d'insécurité qui s'étend de l'afrique du Nord jusqu'au Caucase. Et nous voyons cela comme extrêmement sérieux. Pour vous ce problème de l'immigration illégale est encore plus aigu que pour nous qui sommes un pays d'immigrants. Vous, vous ressentez l'immigration illégale comme un défi vis-à-vis de l'identité nationale, qui est extrêmement forte. Et la façon dont vous absorbez les nouveaux venus dans votre pays, particulièrement ceux qui arrivent illégalement, est un problème. J'ai entendu des discussions sur l'afghanistan. Je sais que Monsieur MacIntosh va nous parler de cela, mais c'est beaucoup trop étroit de penser simplement au problème de l'afghanistan. Au Royaume-Uni, il y a la problématique AfPak, mais nous pensons qu elle est trop étroite, car le soutien au terrorisme et au trafic des drogues vient du nord de l'asie centrale. Cela entre au Pakistan et au-delà du Pakistan, et va créer une instabilité sur les frontières chinoises. Mais pendant que nous contemplons les printemps arabes et les problèmes qui ont découlé des gouvernements corrompus d'afrique du Nord, nous sommes aussi confrontés à une instabilité énorme en Asie centrale où les gouvernements ont été corrompus par l'argent de la drogue et l instabilité qui règne dans ces régions. Le fait de penser d'avoir une stratégie de sortie pour l'afghanistan sans regarder à la stratégie originelle est un problème que nos deux pays partagent. Une des questions particulièrement aigües lorsque l'on parle de l Afghanistan et des relations avec le Pakistan, vient de la détérioration grandissante de sa relation avec les Etats-Unis. Il faut aussi replacer la Chine dans cet ensemble de relations qui se détruisent avec les Etats-Unis et qui se renforcent avec la Chine et les implications pour ces pays qui ont des problèmes beaucoup plus graves de façon interne. Il nous faut donc penser beaucoup plus largement. J'ai entendu aujourd'hui des choses très intéressantes sur l'économie illicite et sur l'énergie, sujets sur lesquels nous devons beaucoup réfléchir. Je pense aux échanges d'unités carbone au sein de l'union européenne. L argent illicite qui rentre dans le secteur de l'énergie est également d'une importance stratégique, car dès que l'on veut adopter une politique énergétique soutenable et durable, il nous faut penser à développer une politique d énergie basée sur des investissements propres, pas seulement propres dans le domaine de l énergie mais aussi propres en ce qui concerne l argent qui va être investi pour le développement d une alternative durable et propre.
Vous avez aussi évoqué la crise financière américaine et ses effets pour la communauté internationale. Vos préoccupations sont très vivement ressenties dans mon pays, et je partage avec beaucoup d autres gens l idée qu'il n'y a pas eu réellement une réforme substantielle de nos systèmes et de nos règlements économiques. Comme Cesaria Beccaria l a dit, la certitude de la punition est beaucoup plus importante que sa sévérité. Mais nous n avons ni certitude de punition dans le secteur financier, ni sévérité. Aujourd'hui pas un seul banquier, pas un seul responsable dehedge fund, hors Madoff, n a été emprisonné ou puni d'une façon quelconque. Il y a eu aux États-Unis une absence totale de leadership de la part du gouvernement fédéral qui ne s'est pas assuré que la responsabilité soit établie dans ce domaine. La conséquence c'est que les efforts pour réformer le système bancaire, en l absence de décision de notre gouvernement fédéral, viennent des États et des banquiers. Ces derniers ont accompli des efforts notables pour tenter une réforme par l intermédiaire de Je fais référence ici à ce qui se passe à New-York où le procureur a toujours été un leader dans la lutte contre la corruption dans notre système bancaire. Cependant les Etats ne peuvent réformer le système tout entier, donc il faut nous assurer que nous n'allons pas subir une deuxième vague de problèmes financiers. Or je pense que cela va nous arriver. Il y a tellement de problèmes pour établir, réguler ou sanctionner les responsables de la première crise financière, que je ne suis pas certaine que nous allons savoir éviter la seconde. Donc, je voudrais que nous pensions un peu plus à notre interdépendance et la façon dont il faut nous concentrer aussi sur nos responsabilités vis-à-vis des pays en développement. Une partie des problèmes que nous voyons aux Etats-Unis avec nos voisins du sud, et vous avec l'afrique, c'est qu'il n'y a pas seulement une crise démographique - en ce sens qu il y a davantage de gens qui naissent que d emplois créés pour eux - mais aussi, il y a une absence de capital pour le développement. L un des sujets soulevés par le printemps arabe, c'est que ce capital a quitté ces pays et a été déposé dans des banques internationales majeures. Il ne s agit pas seulement d un problème européen. Il y a quelques années le trésor de la Guinée équatoriale a été retrouvé dans une grande banque de Washington, l une des plus renommées, comme cela est souvent le cas des trésors africains, placés dans des propriétés et dans banques. Il y a tellement d'argent que cela masque l'assistance que l'on accorde aux pays étrangers pour le développement. Donc il nous faut essayer de traiter certains de ces problèmes, si l'on ne veut pas que l'économie de la partie sud du monde (que ce soit de l'afrique ou de l'amérique) soit si dépendante du commerce de la drogue ou d'autres commerces illicites. Il nous faut travailler ensemble pour s'assurer que les ressources de capital
des pays en développement ne trouvent pas d abris dans le monde développé. Et une des choses que nous faisons au forum mondial économique est d'essayer d'étudier le problème du blanchiment d'argent par l'achat d'immobilier : c'est un problème à Londres, dans le sud de la France, en Espagne, c'est un énorme problème parce que cela révèle aux gens d où cet argent est parti que le crime paie et que on peut vivre, prospérer, et jouir des fruits de sa corruption. C est le problème auquel nous devons accorder beaucoup plus d'attention, car cela est très déstabilisant pour nous tous alors que nous avons vu, lors de ces derniers cinq mois, des choses qui ont fait des vagues au Moyen Orient : le résultat de cette corruption. Je vais conclure en disant les problèmes que nous devons confronter et que nous n'aimons pas confronter, sont les mêmes que dans la plupart des régions du monde. Ils ne sont pas simples à résoudre, peut être qu il n y a pas de façon de les résoudre, mais cela ne veut pas dire que nous devons les éviter. Merci beaucoup de votre attention.»