CARCINOME ADENOSQUAMEUX DE BAS GRADE DU SEIN Etude anatomo-clinique à propos de 7 cas



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Transcription:

CARCINOME ADENOSQUAMEUX DE BAS GRADE DU SEIN Etude anatomo-clinique à propos de 7 cas

SOMMAIRE 2

INTRODUCTION... p 5 1. Classification OMS (Organisation Mondiale de la Santé) des carcinomes mammaires infiltrants... p 6 2. Carcinomes métaplasiques du sein... p 8 3. Carcinome adénosquameux de bas grade... p 8 MATERIEL ET METHODES... p 10 RESULTATS... p 13 1. Caractéristiques cliniques... p 14 2. Caractéristiques histologiques... p 15 Microbiopsie... p 15 Pièces opératoires mammaires... p 15 a- Pièce opératoire initiale... p 15 b- Pièce opératoire de la rechute... p 16 Analyse du statut des ganglions axillaires... p 17 3. Caractéristiques immunohistochimiques... p 17 REVUE DE LA LITTERATURE... p 19 1. Clinique... p 20 2. Critères cytologiques... p 20 3. Critères morphologiques... p 21 4. Critères immunohistochimiques... p 23 Récepteurs hormonaux... p 23 Récepteur HER2... p 24 Autres marqueurs immunohistochimiques... p 24 5. Diagnostics différentiels... p 25 Autres carcinomes métaplasiques (de haut grade)... p 25 Adénome syringomateux du mamelon... p 25 Adénomyoépithéliome... p 25 Fibromatose... p 26 Tumeur phyllode... p 27 Lésions sclérosantes... p 27 Carcinome tubuleux... p 27 6. Traitement... p 28 Chirurgie mammaire... p 28 Chirurgie ganglionnaire... p 28 Traitements complémentaires... p 29 7. Evolution... p 29 3

DISCUSSION... p 31 1. Données cliniques... p 32 2. Diagnostic positif... p 34 Avant la chirurgie... p 34 Pièce opératoire : morphologie, récepteurs hormonaux et HER2... p 34 Immunohistochimie complémentaire... p 36 3. Pathogénie... p 37 CONCLUSIONS... p 39 TABLEAUX... p 42 ANNEXE... p 53 ICONOGRAPHIE... p 55 BIBLIOGRAPHIE... p 63 4

INTRODUCTION 1. Classification OMS (Organisation Mondiale de la Santé) des carcinomes mammaires infiltrants 2. Carcinomes métaplasiques du sein 3. Carcinome adénosquameux de bas grade 5

Le cancer du sein est en constante progression et affecte environ 10% des femmes dans les pays occidentaux (1). Il reste une des causes majeures de mortalité et de morbidité dans cette population. Le pathologiste joue un rôle clé pour la prise en charge de ces tumeurs. Il établit le diagnostic de carcinome infiltrant, fournit les éléments du pronostic (taille, grade de Scarff-Bloom-Richardson [SBR], statut ganglionnaire, invasions vasculaires) et les facteurs prédictifs de réponse aux thérapeutiques hormonales (récepteurs hormonaux) ou ciblant HER2 (Human Epidermal growth factor Receptor). Ces dernières années, le développement de puces à ADN a permis de définir des signatures moléculaires transcriptomiques (2, 3) qui classent les tumeurs en 2 (2) ou 3 (3) groupes pronostiques qui seraient plus pertinents que les facteurs pronostiques usuels fournis par l anatomie pathologique. Par ailleurs, une classification moléculaire des cancers du sein a vu le jour en 2000 (4) permettant de définir 4 phénotypes caractérisés par le niveau d expression de groupes de gènes et par leur pronostic. Le phénotype luminal A de meilleur pronostic est associé à l expression du récepteur aux œstrogènes, le phénotype luminal B de pronostic un peu moins bon, est caractérisé par l expression du récepteur aux œstrogènes mais comporte des critères d agressivité (surexpression de HER2, grade III de SBR ou expression de p53). Deux phénotypes sont de plus mauvais pronostic : il s agit du phénotype basal (absence d expression des récepteurs hormonaux et de surexpression de HER2) et le phénotype HER2 (surexpression de HER2 sans expression du récepteur aux œstrogènes). Ces approches moléculaires du cancer du sein sont certes intéressantes, mais pour l instant, elles ne dispensent pas du diagnostic positif de carcinome infiltrant porté par le pathologiste et qui repose sur la classification de l OMS. Cette classification qui a peu d intérêt pronostique garde toute son importance pour aider le pathologiste à reconnaître les formes histologiques très variées que peuvent prendre les carcinomes mammaires. 1. Classification OMS (Organisation Mondiale de la Santé) des carcinomes mammaires infiltrants : La première classification OMS (1981) définissait 14 types histologiques sur un plan purement morphologique. La nouvelle classification 2003 (5) des carcinomes infiltrants prend en compte les données morphologiques et immunohistochimiques et répertorie 21 tumeurs. Le carcinome infiltrant à prédominance in situ a été supprimé. D autres types histologiques excessivement rares ne représentant que quelques dizaines de cas décrits dans la littérature figurent dans la liste. Actuellement, l Organisation Mondiale de la Santé (2003) individualise les entités suivantes : 6

- Carcinome infiltrant de type non spécifié (canalaire sans autre indication) : o Carcinome de type mixte o Carcinome pléomorphe o Carcinome avec cellules géantes ostéoclastiques o Carcinome avec aspects choriocarcinomateux o Carcinome avec aspects mélanocytaires - Carcinome lobulaire infiltrant - Carcinome tubuleux - Carcinome cribriforme infiltrant - Carcinome médullaire - Carcinome produisant du mucus : o Carcinome mucineux o Cystadénocarcinome et carcinome à cellules cylindriques sécrétantes o Carcinome à cellules en bague à chaton - Tumeurs neuroendocrines du sein : o Carcinome neuroendocrine de type solide o Carcinoïde atypique o Carcinome à petites cellules o Carcinome neuroendocrine à grandes cellules - Carcinome papillaire infiltrant - Carcinome micropapillaire infiltrant - Carcinome apocrine - Carcinome métaplasique : o Carcinome métaplasique de type épithélial pur : Carcinome épidermoïde Adénocarcinome métaplasique à cellules fusiformes Carcinome adénosquameux Carcinome mucoépidermoïde o Carcinome métaplasique mixte à composante épithéliale et conjonctive - Carcinome à cellules riches en lipides - Carcinome sécrétant - Carcinome oncocytaire - Carcinome adénoïde kystique - Carcinome à cellules acineuses - Carcinome à cellules claires (riches en glycogène) - Carcinome sébacé 7

- Carcinome inflammatoire 2. Carcinomes métaplasiques du sein : Ils représentent selon l OMS (5) un groupe hétérogène de tumeurs comportant généralement des zones adénocarcinomateuses intriquées à des territoires prédominants de remaniements métaplasiques (de type épidermoïde, à cellules fusiformes, chondroïde et osseux ou mixte). Ce sont des tumeurs rares représentant moins de 5% des tumeurs malignes du sein. Au sein de ce type histologique, la classification de l OMS distingue encore plusieurs sous-catégories : le carcinome avec métaplasie malpighienne (partielle ou totale), l adénocarcinome avec métaplasie à cellules fusiformes, le carcinome adénosquameux dit de «bas grade», le carcinome mucoépidermoïde et le carcinome mixte épithélial et conjonctif (carcinosarcome), et le carcinome avec métaplasie osseuse ou avec métaplasie chondroïde. A part le carcinome adénosquameux qui peut être de bas grade, la plupart des carcinomes métaplasiques sont de haut grade. Pour certains auteurs, les carcinomes métaplasiques du sein et plus particulièrement le carcinome adénosquameux de bas grade sont apparentés à des tumeurs myoépithéliales. Ils expriment d ailleurs souvent des marqueurs myoépithéliaux tels que la protéine p63 ou rechutent sous la forme d un carcinome myoépithélial. C est plus particulièrement le carcinome adénosquameux de bas grade que nous avons ciblé en raison d une part des problèmes de diagnostic qu il peut poser et d autre part parce qu il fait partie d un nouveau groupe de tumeurs de phénotype basal dites «triple négatives» récemment individualisé par les études moléculaires (6). De plus, il s agit de tumeurs rares, souvent méconnues qui ne représentent que 61 cas au total dans la littérature (7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14). 3. Carcinome adénosquameux de bas grade : En 1980, Woodward et al. (15) rapportent des aspects de différenciation adénosquameuse dans des cancers du sein. Ils attribuent la composante malpighienne à une métaplasie des structures canalaires du carcinome. La première description de l entité à proprement parler qui remonte à 1987 est faite par Rosen et Ernsberger (7). Elle est décrite comme un carcinome mammaire infiltrant particulier qui est composé de structures glandulaires, d une métaplasie malpighienne plus ou moins proliférante et d un stroma collagène important. Pour ces auteurs, il s agit d une tumeur maligne qui rechute localement. En 1991, Suster et al. (8) rapportent 4 tumeurs intra-mammaires de même aspect qu ils dénomment «tumeurs syringomateuses et malpighiennes du sein». Ils les décrivent comme des syringomes eccrines en raison de leur parenté morphologique avec les tumeurs 8

annexielles de la peau mais elles sont situées en profondeur dans la glande mammaire et n ont pas de connexion avec le mamelon. Ils les considèrent comme des tumeurs bénignes sur les arguments suivants : i) elles sont bien limitées et ne paraissent pas envahir le tissu mammaire adjacent, ii) il n y a pas eu de rechute dans un délai de 1 à 6 ans malgré une simple tumorectomie, iii) il n y a pas de carcinome in situ associé ni de figure mitotique. Comme ces tumeurs n expriment pas les récepteurs hormonaux, certains auteurs préfèrent les considérer comme des tumeurs annexielles plutôt que comme des formes débutantes de carcinome adénosquameux de bas grade. En 2000, Denley et al. (12) rapportent 5 cas de carcinomes adénosquameux de bas grade associés à des lésions sclérosantes complexes. La coexistence de ces deux processus lésionnels avait aussi été notée par Rosen (7). La question soulevée est alors celle de la relation entre ces deux entités. Les lésions sclérosantes représenteraient-elles un précurseur à partir duquel se développent des carcinomes infiltrants dont le carcinome adénosquameux de bas grade pourrait être une forme? A l inverse, le carcinome adénosquameux de bas grade pourrait-il simuler des lésions sclérosantes complexes? Ce n est finalement qu en 2003 (5) que le carcinome adénosquameux de bas grade a été introduit dans la classification OMS des cancers du sein en tant que variante histologique des carcinomes infiltrants métaplasiques. Afin de mieux définir ce type de tumeur aussi bien sur le plan clinique, diagnostique, immunohistochimique et pronostique, nous avons extrait des archives du Centre Léon Bérard et analysé morphologiquement et en immunohistochimie les 7 cas diagnostiqués ou vus depuis 2004. 9

MATERIEL ET METHODES 10

Cette étude porte sur une série rétrospective de 7 cas de carcinomes adénosquameux de bas grade du sein : six cas répertoriés dans le Service d Anatomopathologie du Centre Léon Bérard entre 2004 et 2008 et un cas diagnostiqué en 2008 à l Hôpital de la Croix-Rousse à Lyon (aimablement mis à disposition par le Professeur Devouassoux). Les données cliniques (antécédents, histoire de la maladie, évolution) et radiologiques ont été obtenues à partir du dossier patient informatisé et/ou de courriers aux médecins traitants. Les lames colorées par l HPS (Hématoxyline-Phloxine-Safran) ont été relues de façon conjointe avec le Dr Treilleux selon une grille préétablie, qu il s agisse des microprélèvements ou des pièces chirurgicales issues du premier geste ou de la rechute. Une immunohistochimie complémentaire a été effectuée dans chaque cas à partir des blocs dont nous disposions (microbiopsie, chirurgie initiale et/ou rechute) avec les anticorps suivants : Anticorps Fournisseur Référence Clone Dilution Restauration antigénique Anti-Kératines AE1/AE3 Dako M3515 AE1-AE3 1/50 Oui Anti-Kératine 5/6 Dako M7237 D5/16B4 1/50 Oui Anti-Kératine 7 Dako M7018 OVTL 12/30 1/100 Oui Anti-p63 NeoMarker / LabVision MS-1084 Ab-4 1/200 Oui Anti-Actine muscle lisse Dako M851 1A4 1/200 Non Anti-ER Dako M7047 1D5 1/40 Oui Anti-PR Dako M3569 636 1/40 Oui Anti- C-ErbB2 Dako A485 Polyclonal 1/150 ou 1/300 Oui Anti-PS100 Dako Z311 Polyclonal 1/800 Non Anti-EMA Dako M613 E29 1/150 Oui A partir des blocs de tissus fixés et inclus en paraffine, des coupes de 4 microns sont déposées sur des lames de verre de type Super Frost Plus (Menzel - Germany). Après 11

séchage pendant une nuit à l étuve sèche à 51 C, les lames sont déparaffinées dans du xylène et réhydratées dans des bains d éthanol de degré décroissant puis d eau déminéralisée. Pour les anticorps anti-kératines AE1/AE3, anti-kératine 5/6, anti-kératine 7, anti-p63, anti-actine muscle lisse, anti-protéine S100, et anti-ema, la technique est entièrement réalisée sur automate de type Benchmark XT (Ventana Medical Systems - Tucson - Arizona) avec ou sans étape de restauration antigénique (voir tableau ci-dessus). Cette dernière consiste en un traitement des lames par la chaleur dans un tampon tris de ph légèrement basique (Cell Conditoning Solution 1, CC1 réf 950-124 Ventana Medical Systems - Tucson - Arizona). Le prétraitement est assuré par l automate. L amplification du signal et sa révélation sont réalisés avec un kit de révélation de type Polymère / Peroxydase / Diaminobenzidine (UltraView Detection Kit, réf 760-500, Ventana Medical Systems - Tucson - Arizona). Ces étapes sont suivies d une contre coloration nucléaire par une solution d hématoxyline. Les préparations sont ensuite déshydratées et montées entre lame et lamelle. Pour les anticorps anti-récepteur aux œstrogènes et anti-récepteur à la progestérone, le démasquage antigénique est réalisé par chauffage à 98 C pendant 45 min au bain-marie dans un tampon citrate à ph6. La révélation est assurée par un système de type Streptavidine / Biotine / Peroxydase / Diaminobenzidine (Kit LSAB+ - Dako). Pour l anticorps anti-c-erbb2 la technique est réalisée sur automate de type NexES (Ventana Medical Systems Tucson - Arizona) après restauration antigénique par chauffage à 98 C pendant 45 min au bain-marie dans un tampon citrate à ph6. La révélation est assurée par un système de type Streptavidine / Biotine / Peroxydase / Di-Amino-Benzidine (Basic DAB détection Kit, réf 760-001 - Ventana Medical Systems - Tucson - Arizona). L anticorps primaire est dilué au 1/150 e pour les coupes de tissus fixés en formol tamponné à 10%, au 1/300 e pour les coupes des tissus fixés au liquide de Bouin de Hollande. La lecture des immunomarquages a été faite de façon conjointe avec le Dr Treilleux selon une grille de lecture préétablie. 12

RESULTATS 1. Caractéristiques cliniques 2. Caractéristiques histologiques Microbiopsie Pièces opératoires mammaires a- Pièce opératoire initiale b- Pièce opératoire de la rechute Analyse du statut des ganglions axillaires 3. Caractéristiques immunohistochimiques 13

1. Caractéristiques cliniques Tableaux I et II. L âge moyen au moment du diagnostic est de 63 ans avec des extrêmes allant de 49 à 84 ans. Sur les 6 patientes dont le statut hormonal était connu, toutes étaient ménopausées. La tumeur se présentait sous la forme d un nodule palpable (3/6), d une rétraction du mamelon (1/6) ou d une image mammographique à type de nodule irrégulier infraclinique (2/6). Cinq tumeurs sur 7 siégeaient dans le sein gauche et 2 dans le sein droit. Elles étaient localisées dans la région rétromamelonnaire (2/6), le quadrant supéro-externe (2/6), la jonction des quadrants externes (1/6) ou le quadrant supéro-interne (1/6). La taille de la tumeur était en moyenne de 13 mm avec des extrêmes de 4 à 25 mm. Lors de la prise en charge initiale, 6 patientes sur 7 ont bénéficié d une tumorectomie suivie dans 4 cas d une radiothérapie locale. Une patiente a été mastectomisée. Un geste axillaire n a été réalisé initialement que chez 4 des 7 patientes puis chez 6 des 7 patientes après rechute. Il a consisté en la recherche du (ou des) ganglion(s) sentinelle(s) 3 fois sur 6, et en un curage axillaire dans 3 cas. Une chimiothérapie adjuvante n a été proposée que pour une patiente et il n y a pas eu d hormonothérapie adjuvante. Le suivi n est évaluable que pour 5 patientes. Il est inconnu pour une (cas 1) et trop court pour une autre (cas 7). Il est en moyenne de 22 mois avec des extrêmes de 6 mois à 54 mois. Deux des patientes ont rechuté sur le site initial de la tumorectomie dans un délai de 10 mois (cas 1) et de 32 mois (cas 2). Pour ces deux cas, le diagnostic initial retenu sur la pièce de tumorectomie était en faveur de lésions bénignes : mastopathie complexe proliférante avec remaniements inflammatoires et carcinome lobulaire in situ dans un cas (cas 1), lésions sclérosantes complexes dans l autre (cas 2). Aucun traitement complémentaire n avait été proposé et la résection n était pas passée en zone saine. Lors de la rechute, la taille de la tumeur était respectivement de 20 mm (cas 1) et de 30 mm (cas 2). Une mastectomie avec curage axillaire a été effectuée secondairement chez ces deux patientes. Elle a été suivie de radiothérapie et de chimiothérapie adjuvante pour la tumeur de plus grande taille. 14

2. Caractéristiques histologiques Tableau III Microbiopsies Cinq des patientes de cette série ont eu des microbiopsies à l aiguille (cas 1, 2, 4, 6 et 7) : quatre au stade initial de la maladie et une lors de la rechute (cas 1). Un diagnostic de carcinome infiltrant a été porté ou discuté dans trois cas seulement (cas 4, 6, 7) même si le type histologique précis de la tumeur n était pas toujours totalement adéquat (un carcinome tubuleux, un carcinome avec métaplasie malpighienne) pour deux patientes. Toutes les tumeurs avec un diagnostic de carcinome infiltrant sur la microbiopsie comportaient soit une répartition homogène des trois contingents, glandulaire, malpighien et fusocellulaire (cas 4 et 6), soit une prédominance du contingent glandulaire (cas 7). En revanche, un diagnostic de tumeur bénigne voire de lésion inclassée avec une suggestion de résection chirurgicale avait été formulé pour deux patientes. Dans ces cas, une tumeur phyllode de bas grade (cas 2) et une tumeur myofibroblastique ou myoépithéliale (cas 1) avaient été discutées. Trois microbiopsies sur cinq ont été revues, incluant les deux tumeurs non diagnostiquées (cas 1 et 2). Même en connaissant le diagnostic porté sur la pièce de résection chirurgicale, il a été difficile de retrouver a posteriori les critères diagnostiques du carcinome adénosquameux de bas grade. En effet la population prédominante était faite de cellules fusiformes et il n y avait pas de composante malpighienne ni de composante glandulaire facilement identifiable. De minimes atypies cyto-nucléaires et quelques figures mitotiques étaient présentes dans un des cas (cas 1) et des aspects glandulaires pseudo-infiltrants étaient observés dans l autre. Il n y avait ni carcinome in situ, ni hyperplasie atypique. Pièces opératoires mammaires Les pièces opératoires initiales (6 tumorectomies et une mastectomie) ont toutes été revues ainsi que les deux rechutes observées (2 mastectomies). a- Pièces opératoires initiales Sur la pièce opératoire initiale, les trois contingents, glandulaire, fusocellulaire et la métaplasie malpighienne, étaient présents dans toutes les tumeurs. Le contingent fusocellulaire prédominait dans 3 cas sur 7 (cas 1, 2 et 3) représentant 70% à 80% de la 15

surface lésionnelle. Le contingent glandulaire était prépondérant dans 1 cas sur 7 (cas 7) où il représentait 60%. Une répartition relativement homogène des trois contingents était observée pour 3 tumeurs (cas 4, 5 et 6), les contingents glandulaire, malpighien et fusiforme représentant respectivement 20% à 30% (moyenne 23%), 30% à 50% (moyenne 40%) et 30% à 40% (moyenne 37%). Dans tous ces contingents les atypies cyto-nucléaires étaient minimes et les figures mitotiques exceptionnelles. Des aspects évoquant des lésions sclérosantes étaient présents dans 5 tumeurs (cas 2, 3, 4, 5, et 6) et de l élastose dans 6 cas sur 7 (toutes sauf cas 7). Un infiltrat inflammatoire lymphocytaire était retrouvé dans 6 tumeurs sur 7, d abondance faible dans un cas, modérée dans 4 cas et importante dans un cas. Sa répartition était tantôt en périphérie de la tumeur (4 cas sur 6) tantôt diffuse dans la tumeur (2 cas sur 6). Du carcinome in situ canalaire n était observé que dans deux tumeurs. Il s agissait d un grade nucléaire intermédiaire sans comédonécrose qui occupait moins de 10% de la surface examinée dans un cas (cas 2) mais 50% dans l autre cas (cas 1). Il n a jamais été mis en évidence de carcinome in situ lobulaire ni d hyperplasie canalaire atypique. Dans une tumeur sur les 7, une hyperplasie lobulaire associée était présente (cas 1). Le grade de SBR (annexe) a été évalué à I dans toutes les tumeurs avec un score de 5 se répartissant de la façon suivante : différenciation = 2, pléomorphisme = 2, mitoses = 1. Le tissu adipeux péritumoral était infiltré par un des contingents tumoraux dans 6 tumeurs sur 7 (toutes sauf cas 1) et le collagène prenait un aspect pseudo chéloïdien dans 6 cas sur 7 (toutes sauf cas 2). Il n y avait ni embole carcinomateux ni neurotropisme. b- Pièces opératoires des rechutes Les deux rechutes (cas 1 et 2) ont été revues. Elles étaient caractérisées par la nette prédominance du contingent fusocellulaire qui représentait 80% à 100% de la surface tumorale et par l absence de contingent malpighien. Le contingent glandulaire était tantôt à peine identifiable (moins de 1%), tantôt évalué à 20%. Dans les deux cas, le grade de SBR était de II avec un score de 6 (différenciation = 3, pléomorphisme = 2, mitose = 1). La rechute avait un aspect superposable à la tumeur initiale dans un cas (cas 1) mais sensiblement différent dans l autre cas (cas 2) où elle prenait l aspect d une tumeur à cellules fusiformes «fibromatose-like» et ne revêtait plus du tout l aspect de lésions sclérosantes complexes vues initialement. 16

Analyse du statut ganglionnaire axillaire Qu il s agisse de ganglions sentinelles (3 cas sur 6) ou de curages axillaires réalisés dans le premier temps chirurgical (1 cas sur 6) ou lors de la rechute (2 cas sur 6), il n a jamais été observé d envahissement tumoral. 3. Caractéristiques immunohistochimiques Tableau IV Ont été analysées en immunohistochimie les biopsies préopératoires de 2 patientes sur 7 (cas 2 et 6), la pièce opératoire initiale de 6 patientes sur 7 et la pièce opératoire des 2 rechutes de la série (cas 1 et cas 2). L expression de la cytokératine 5/6 (CK5/6), de la cytokératine 7 (CK7), de la protéine p63 (p63), de l actine musculaire lisse (AML), des récepteurs hormonaux était analysable pour chaque patiente sur au moins un des prélèvements histologiques qu il s agisse de la microbiopsie, de la pièce opératoire initiale ou de la rechute. L expression des cytokératines avec l AE1/AE3 (CKAE1/AE3) n a été recherchée que pour 6 patientes sur 7 (toutes sauf cas 7) ainsi que le statut HER2 (toutes sauf cas 2). La composante glandulaire identifiable chez 6 patientes avait un phénotype uniforme, aussi bien pour les cellules myoépithéliales que pour les cellules épithéliales, caractérisé par une expression des CK avec l AE1/AE3 (5/5), de la CK5/6 (6/6) et de la CK7 (6/6). Ces marqueurs épithéliaux présentaient des taux de positivité très élevés (tous de 100% sauf un de 90%) pour les cellules épithéliales et myoépithéliales. Ce phénotype est inhabituel, les cellules myoépithéliales des glandes normales n exprimant habituellement ni les CK avec l AE1/AE3 ni la CK7. La protéine p63 n était exprimée que dans les cellules myoépithéliales et pas dans les cellules épithéliales (6/6). Contrairement à ce que l on observe dans les glandes normales, l actine musculaire lisse (AML) n était pas exprimée par les cellules myoépithéliales (6/6). La composante malpighienne était analysable pour 6 patientes (toutes sauf cas 2). Son phénotype était le suivant : CK positives avec l AE1/AE3 positif (5/5), CK5/6 positive (6/6), CK7 positive (6/6), p63 positive (6/6) et AML négative (6/6). Les cytokératines (AE1/AE3) étaient exprimées par 100% des cellules tumorales, la CK5/6 dans presque tous les cas par 100% des cellules tumorales sauf dans un cas par 90%, la CK7 par plus de 70% des cellules tumorales. Les marqueurs épithéliaux présentaient donc des taux de positivité très élevés. La 17

protéine p63 était elle aussi toujours exprimée dans plus de 80% des cellules à la différence de l actine muscle lisse qui n était jamais présente. Le contingent fusocellulaire qui a été analysé chez toutes les patientes avait le phénotype suivant : CK avec l AE1/AE3 positive (6/6), CK5/6 positive (6/7), CK7 positive (7/7), p63 positive (7/7) et actine musculaire lisse positive (7/7). Il est à noter que ce contingent n exprimait que focalement les marqueurs épithéliaux (CK avec l AE1/AE3, CK5/6, CK7) et la protéine p63 avec des pourcentages de cellules marquées inférieurs à 50% alors que l actine musculaire lisse était exprimée à plus de 70%. 18

REVUE DE LA LITTERATURE 1. Clinique 2. Critères cytologiques 3. Critères morphologiques 4. Critères immunohistochimiques Récepteurs hormonaux Récepteur HER2 Autres marqueurs immunohistochimiques 5. Diagnostics différentiels Autres carcinomes métaplasiques (de haut grade) Adénome syringomateux du mamelon Adénomyoépithéliome Fibromatose Tumeur phyllode Lésions sclérosantes Carcinome tubuleux 6. Traitement Chirurgie mammaire Chirurgie ganglionnaire Traitements complémentaires 7. Evolution 19

La revue de la littérature confirme la rareté de ces carcinomes adénosquameux : au total seulement 61 cas ont été décrits dans la littérature depuis 1987. Leur fréquence est difficile à apprécier. La comparaison de nos observations avec de cette revue de la littérature est donc difficile. 1. Clinique Les données de la littérature (7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14) qui réunissent au total 61 cas de carcinomes adénosquameux du sein, montrent que l âge moyen du diagnostic est de 58 ans et demi avec des extrêmes allant de 33 ans (9) à 88 ans (9). Certaines études étant assez anciennes (7) ou publiées dans une autre langue que l anglais (13), il n a pas été possible de récupérer les articles dans leur intégralité. Les données cliniques ne sont donc pas toujours disponibles. Ainsi la présentation clinique n est précisée que pour 47 cas (8, 9, 10, 11, 12, 14). Ces tumeurs se présentaient sous la forme de masses palpables chez 43 patientes. Les 4 cas restants avaient été mis en évidence lors de mammographies de dépistage sous la forme de nodules irréguliers et spiculés. Aucune connexion avec la peau en regard n avait été retrouvée pour ces 47 tumeurs. Au moment du diagnostic, dans la série de 61 cas, les tumeurs mesuraient en moyenne 24 mm (7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14) avec des extrêmes allant de 5 mm (8) à 86 mm (9). Le côté a été précisé dans 45 cas : 23 tumeurs siégeaient à gauche et 22 à droite. Les données cliniques et l âge de distribution de ces tumeurs ne présentent donc pas de particularité par rapport aux autres formes plus communes de cancer du sein (5). 2. Critères cytologiques Dans la littérature, 3 patientes seulement (10, 11, 14) présentant un carcinome adénosquameux du sein ont bénéficié d une ponction cytologique à l aiguille fine. Le diagnostic de ces tumeurs était très délicat car les critères de malignité étaient difficiles à objectiver. Pour ces trois patientes, un diagnostic de cellules atypiques nécessitant un contrôle histologique avait été proposé mais le type histologique précis n avait pas été précisé. La cellularité était modérée, faite d amas désorganisés avec des noyaux ronds ou ovalaires se chevauchant et s entrecroisant. Le contingent canalaire qui était majoritaire se traduisait par des cellules monomorphes de taille petite à modérée avec de très rares atypies. Dans un seul cas (11), un contingent malpighien était observé sous la forme de grandes cellules au noyau 20

irrégulier et hyperchromatique avec un cytoplasme orangeophile à la coloration de Papanicolaou. Le contingent fusocellulaire était observé dans les 3 cas mais en quantité restreinte. Le fond des étalements était inflammatoire sous la forme d un semis de petits lymphocytes. Ainsi la plupart des critères permettant un diagnostic de malignité comme la cellularité et les atypies cyto-nucléaires faisaient défaut. D ailleurs, Layfield et Dodd (16) analysant de façon rétrospective une série de ponctions cytologiques mammaires négatives ou insuffisantes ont montré qu il était difficile de faire un diagnostic de malignité en cytologie lorsque des lésions carcinomateuses de bas grade étaient retrouvées sur la pièce opératoire. En ce qui concerne le diagnostic du type de cancer, le carcinome adénosquameux de bas grade pourrait être confondu avec un carcinome canalaire infiltrant de haut grade avec métaplasie malpighienne. Cependant, dans le carcinome adénosquameux de bas grade, les atypies du contingent canalaire sont minimes et les atypies du contingent malpighien sont un peu plus marquées. Ce se serait l inverse pour un carcinome canalaire infiltrant de haut grade avec métaplasie malpighienne. En résumé, un cytopathologiste devrait évoquer un carcinome adénosquameux de bas grade devant un contingent malpighien atypique associé à une prolifération de structures canalaires même peu atypiques. Il a souvent du mal à affirmer la malignité car les atypies et la cellularité sont peu marquées. Par ailleurs, comme le contingent malpighien est rarement présent, s il affirme la malignité, il n évoquera pas en principe ce type histologique particulier de carcinome adénosquameux de bas grade. 3. Critères morphologiques Tableau VI L étude morphologique des carcinomes adénosquameux de bas grade (8, 9, 11, 12, 13, 14) réunit au total 49 cas dans la littérature. L étude de Rosen et Ernsberger (7) étant ancienne, non disponible dans son intégralité et cette référence ne comportant pas les données morphologiques, cet article a été exclu. Les carcinomes adénosquameux de bas grade comportaient trois contingents distincts dans 48 cas sur 49. Un seul cas (12) ne renfermait que 2 contingents (malpighien et glandulaire) et il pourrait s agir d un problème d échantillonnage. Pour l ensemble de ces composants tumoraux, les atypies et les figures mitotiques restaient rares. Aucune nécrose n était décrite. 21

Le contingent glandulaire qui était constamment présent (49 cas) formait des structures tubuleuses étirées à contours anfractueux comportant une substance éosinophile amorphe dans leur lumière. Ces structures glandulaires néoplasiques étaient parfois bordées d une double assise cellulaire avec conservation inconstante de l assise myoépithéliale, ce qui gênait pour faire le diagnostic de malignité. Les cellules carcinomateuses cubiques ou cylindriques comportaient des atypies souvent modérées. Le caractère bien différencié des glandes ne permettait pas de distinguer les structures glandulaires néoplasiques de celles qui n étaient pas tumorales, ce qui posait problème pour déterminer la véritable extension de la tumeur. A la périphérie de la tumeur les glandes néoplasiques tendaient à infiltrer le tissu adjacent entre les canaux et les lobules. Le contingent malpighien était toujours présent (49 cas) mais en proportion variable. Ainsi dans l étude de Van Hoeven et al. (9) réunissant le plus grand nombre de tumeurs (32 tumeurs), le pourcentage de métaplasie malpighienne variait de 5% à 80%. Des signes de différenciation malpighienne plus aboutie étaient parfois observés comme des globes cornés, de la kératine ou de simples cellules dyskératosiques. Le contingent fusocellulaire était présent dans 48 des 49 tumeurs étudiées. Cette prolifération stromale se présentait sous la forme de cellules fusiformes comportant des noyaux souvent hypertrophiés dont la nature réactionnelle myofibroblastique ou tumorale était parfois difficile à préciser. Ce contingent entourait les glandes néoplasiques et infiltrait les structures parenchymateuses adjacentes. Il était présent en quantités variables et était plus ou moins cellulaire. Une métaplasie ostéo-cartilagineuse du stroma n était observée que dans 3 cas (9, 13). Quatre études réunissant 46 cas ont recherché la présence d un infiltrat inflammatoire (8, 9, 12, 14). Pour l ensemble des tumeurs, il a été décrit un infiltrat inflammatoire de nature lymphocytaire d abondance variable et de topographie périphérique ou centrale dans 45 des 46 tumeurs. Cette réaction mononucléée était parfois suffisamment intense pour former des images de follicules lymphoïdes et évoquer à tort un diagnostic de pseudotumeur inflammatoire. Les lésions associées aux carcinomes adénosquameux de bas grade décrites dans la littérature sont essentiellement représentées par les tumeurs papillaires et les lésions sclérosantes (9, 10, 11, 12). Il est évident que ces associations compliquaient le diagnostic initial. Dans l étude de Van Hoeven et al. (9) réunissant 32 carcinomes adénosquameux de bas grade, 12 étaient associés à une tumeur papillaire intracanalaire qui coexistait dans 3 cas avec un adénomyoépithéliome et dans 3 autres à une sphérulose collagène. Lorsqu une architecture sclérosante a été recherchée, elle a toujours été retrouvée (10, 11, 12). Denley et al. (12) rapportent 5 cas de carcinomes adénosquameux de bas grade associés soit à des 22

lésions sclérosantes complexes soit à des lésions sclérosantes papillaires. Les deux autres études (10, 11) concernent deux tumeurs intriquées à des lésions d adénose sclérosante. L intrication de lésions sclérosantes rend le diagnostic de carcinome adénosquameux très délicat. Cependant, ces deux lésions qui se ressemblent beaucoup ne doivent pas être confondues car l une est bénigne et l autre est maligne. L immunohistochimie est peu contributive car dans un cas comme dans l autre le contingent glandulaire peut conserver sa couche myoépithéliale. Les critères discriminants sont plutôt morphologiques avec en faveur du carcinome adénosquameux de bas grade, un contingent malpighien, un infiltrat inflammatoire lymphocytaire et une agressivité vis à vis du tissu adipeux. Devant des lésions sclérosantes, la règle est donc de rechercher un carcinome infiltrant associé de type tubuleux (30% des cicatrices radiaires en hébergent) et de s assurer que l on ne passe pas à côté d un carcinome adénosquameux de bas grade. Dans la littérature, les carcinomes adénosquameux de bas grade n ont pas été gradés selon le grading de Scarff, Bloom et Richardson. 4. Critères immunohistochimiques Tableau VII Récepteurs hormonaux Les récepteurs hormonaux et en particulier le récepteur aux œstrogènes ont été étudiés dans ce type de cancer (5 études). Sur les 48 tumeurs analysées (9, 11, 12, 14, 17), 46 n exprimaient pas le récepteur aux œstrogènes. Il en est de même pour le récepteur à la progestérone (9, 11, 12, 14, 17). Ces analyses avaient été faites par biochimie (9, 11) ou par immunohistochimie (12, 14, 17). Il est à noter que les deux tumeurs exprimant le récepteur aux œstrogènes et à la progestérone (9) étaient intriquées l une avec une tumeur papillaire et l autre avec un adénomyoépithéliome et que le dosage des récepteurs hormonaux avait été fait par méthode biochimique. Le faible taux de ces récepteurs dans ces deux tumeurs est donc probablement lié aux lésions mammaires bénignes intriquées à la tumeur. La non-expression des récepteurs hormonaux dans le carcinome adénosquameux de bas grade semble donc être un critère discriminant puisque dans une population non sélectionnée de cancers du sein les taux d expression du récepteur aux œstrogènes et du récepteur à la progestérone sont au contraire très élevés, respectivement de 80% pour le récepteur aux œstrogènes et de 68% pour le récepteur à la progestérone dans une série de 4 259 cancers du sein opérés au Centre Léon Bérard depuis 1996. 23

Récepteur HER2 La détermination des statuts HER (Human Epidermal Growth factor Receptor) est devenue un enjeu très important avec le développement de thérapeutiques spécifiques ciblant les cellules exprimant ou surexprimant ces protéines. La famille HER comprend 4 récepteurs assez proches dénommés HER1 (récepteur à l EGF) à HER4. Ces récepteurs ont un domaine extracellulaire capable d interagir avec des ligands spécifiques, sauf HER2 dont le ligand n est pas connu. L homo- ou l hétéro-dimérisation de ces récepteurs induit leur activité tyrosine kinase (sauf pour HER3) qui est capable secondairement de stimuler la croissance cellulaire en activant les signaux de transduction intracellulaire (18). La protéine HER2 a été analysée dans 2 études regroupant 27 cas (14, 17). L absence d expression de HER2 a été retrouvée dans 18 cas sur 27 soit 66% des cas. Ces 2 études ont utilisé l immunohistochimie comme moyen de diagnostic. Pour Drudis et al. (17), une tumeur était considérée comme HER2+ quand il existait un marquage membranaire d intensité non précisée sur au moins 10% des cellules tumorales. A l époque il n y avait pas de grille de réponse adaptée et l on ne recherchait pas forcément la surexpression de HER2 par la technique immunohistochimique. Ho et al. (14) ne décrivent pas les critères utilisés pour considérer le marquage comme positif mais compte tenu de la date de publication de l article il est probable que l immunohistochimie anti-her2 n était pas non plus calibrée pour rechercher la surexpression. Pour les tumeurs considérées comme HER2+, c était souvent le contingent glandulaire qui était positif alors que le contingent malpighien restait négatif. En résumé, il semble que les carcinomes adénosquameux du sein ne surexpriment pas HER2. On note donc que les carcinomes adénosquameux du sein de bas grade appartiennent au groupe des tumeurs dites «triple négatives» et probablement donc aux tumeurs de phénotype basal (6) comme nous le verrons plus loin, avec l expression de cytokératines basales. Autres marqueurs immunohistochimiques D autres marqueurs immunohistochimiques ont été étudiés mais de façon isolée et ces études sont peu représentatives. Drudis et al. (17) ont montré que seulement 13% des 24 carcinomes adénosquameux exprimaient la protéine p53, essentiellement dans le contingent glandulaire. Ce marquage était considéré comme positif dès qu il existait un marquage nucléaire de plus de 10% des cellules tumorales. Classiquement, une expression de la protéine p53 serait associée à un plus mauvais pronostic. Ces auteurs ont également montré que 39% de ces tumeurs exprimaient la Cathepsine D. Ce marquage était présent dans les deux contingents (glandulaire et malpighien). 24

Kinkor et al. (13) ont retrouvé une expression d actine musculaire lisse au niveau du contingent fusocellulaire dans 2 cas sur 3. La protéine p63 était exprimée dans les 4 carcinomes adénosquameux étudiés par Ho et al. (14) au niveau du contingent fusocellulaire de façon focale et dans l assise myoépithéliale du contingent glandulaire. Tous ces marqueurs paraissent anecdotiques. Le nombre restreint de cas ainsi que le peu de marqueurs étudiés rendent ces analyses peu pertinentes. 5. Diagnostics différentiels Autres carcinomes métaplasiques (de haut grade) Le carcinome adénosquameux de bas grade est un sous-type de carcinome métaplasique du sein. La présence de structures glandulaires aux contours étirés, la discrétion des atypies cellulaires et le stroma collagénique abondant sont des critères distinctifs qui doivent permettre de les différencier des autres carcinomes avec métaplasie malpighienne de haut grade (5). Adénome syringomateux du mamelon L adénome syringomateux du mamelon (19) se présente comme une prolifération cellulaire ressemblant à des canaux sudoraux, faite de cellules au cytoplasme éosinophile formant des cordons, des canaux et des kystes cornés. La lumière des canaux est souvent bordée d une cuticule éosinophile et d une à deux couches de cellules aplaties. Il peut exister des signes d agressivité comme un envahissement des muscles péri-aréolaires, des espaces périnerveux et périvasculaires. Un stroma scléreux ou fibro-myxoïde entoure les canaux. Bien que morphologiquement très semblable à l adénome syringomateux du mamelon, le carcinome adénosquameux est de localisation intra-mammaire et possède un potentiel évolutif plus agressif qui le distingue de cette entité. De plus, l adénome du mamelon présente une architecture plus compacte et mieux limitée que le carcinome adénosquameux qui envahit le tissu adipeux ou le parenchyme mammaire adjacent. On note également que l adénome syringomateux ne présente pas de contingent canalaire in situ, ni de contingent fusocellulaire ou ostéo-cartilagineux. Adénomyoépithéliome Le carcinome adénosquameux de bas grade peut aussi poser des problèmes de diagnostic différentiel avec l adénomyoépithéliome (20), surtout lorsque ces deux lésions sont 25

intriquées (9). Par contre, l adénomyoépithéliome se présente comme une prolifération tumorale souvent bien limitée. Elle s agence en structures tubuleuses tapissées par une double assise cellulaire : l une interne est faite de cellules épithéliales cubiques et l autre externe hyperplasique est constituée de cellules myoépithéliales fusiformes ou cubiques. Les adénomyoépithéliomes sont considérés par la plupart des auteurs comme des tumeurs «malignes» de faible grade pouvant récidiver et rarement métastaser, mais leurs facteurs histopronostiques ne sont pas encore codifiés. Pour distinguer ces deux lésions, il est à noter que l adénomyoépithéliome est mieux limité et comporte seulement deux contingents cellulaires : épithélial et myoépithélial. De plus, dans cette lésion, la différenciation malpighienne est focale ou absente. Fibromatose Lorsque le contingent fusocellulaire est prédominant voire quasi unique, le carcinome adénosquameux de bas grade peut être confondu avec une fibromatose (ou tumeur desmoïde extra-abdominale) de caractère mal limité. En effet, dans ce type de tumeur fibroblastique, la prolifération tumorale est formée de cellules fusiformes organisées en faisceaux séparés par du tissu collagène d abondance variable. Les atypies cyto-nucléaires sont absentes, les mitoses sont rares et il existe dans la moitié des cas une infiltration lymphocytaire sous la forme de nodules lymphoïdes (21). Les marqueurs immunohistochimiques épithéliaux sont alors essentiels pour distinguer ces deux entités, la composante fusocellulaire d une fibromatose n exprimant pas les cytokératines. On peut éventuellement discuter dans le diagnostic différentiel des lésions de type fibrosarcome de bas grade, fasciite nodulaire ou myofibroblastome, surtout sur une microbiopsie. Ainsi, le fibrosarcome est constitué de longs faisceaux homogènes et denses disposés en «arêtes de poisson». De plus dans les formes différenciées, on observe parfois des zones de métaplasie osseuse focale. Par contre, l immunohistochimie montre une positivité avec l antivimentine mais les anticorps dirigés contre les cytokératines et l EMA sont négatifs. Quant à la fasciite nodulaire, elle se présente souvent comme un nodule sous-cutané mal limité, pouvant infiltrer la graisse adjacente. La lésion est constituée d une prolifération de cellules d allure myofibroblastique disposées en faisceaux courts et irréguliers. De plus on peut noter des cellules inflammatoires lymphocytaires, des plages de fibrose hyaline dans les lésions plus anciennes. Les fasciites avec métaplasie osseuse ou cartilagineuse correspondent aux formes proliférantes dont les cellules tumorales sont plutôt pseudoganglionnaires. L immunohistochimie montre en règle une positivité des cellules fusiformes pour la vimentine et l actine muscle lisse, les marqueurs épithéliaux étant quant à eux négatifs. 26

Le myofibroblastome du sein est une tumeur conjonctive rare (une trentaine de cas décrits dans la littérature) dont la bonne limitation, l'absence d'atypies cyto-nucléaires et de nécrose permettent d'affirmer la nature bénigne. La prolifération est faite de cellules fusiformes (en majorité des myofibroblastes), positives pour la vimentine et le CD34, négatives pour les marqueurs épithéliaux. Tumeur phyllode La tumeur phyllode correspond à une prolifération fibro-épithéliale plus ou moins bien limitée par rapport au tissu mammaire adjacent et dans laquelle prédomine le contingent stromal. Elle comporte une répartition inégale des structures épithéliales sur la surface tumorale (5). On n observe en général pas de contingent malpighien. Il est nécessaire de faire un immunomarquage avec des anticorps anti-cytokératines dont la positivité au niveau des cellules fusiformes permettra de rattacher la lésion à un carcinome métaplasique. Lésions sclérosantes Les lésions sclérosantes comme l adénose sclérosante, la cicatrice radiaire ou les lésions sclérosantes complexes du sein sont les diagnostics différentiels les plus difficiles avec les carcinomes adénosquameux du sein. L adénose sclérosante est constituée d une hyperplasie des constituants normaux de l unité terminale ductulo-lobulaire réalisant un aspect désordonné des acini remaniés par une fibrose plus ou moins importante du tissu palléal (22). La conservation de l agencement lobulaire des lésions aide au diagnostic, mais les cellules myoépithéliales persistent dans les deux cas. En faveur du carcinome adénosquameux, on peut retenir des lésions de métaplasie malpighienne, un infiltrat inflammatoire lymphocytaire et un caractère agressif vis-à-vis des structures mammaires adjacentes. Les lésions sclérosantes complexes et les cicatrices radiaires peuvent également poser des problèmes de diagnostic différentiel, d autant que ces processus lésionnels peuvent être associés. Denley et al. (12) ont rapporté 5 cas de carcinome adénosquameux de bas grade associés à des lésions sclérosantes complexes qui peuvent être parfois de grande taille et comporter une composante fusocellulaire développée. Cependant, les lésions sclérosantes ne comportent en principe pas de contingent malpighien bien que quelques cas de métaplasie malpighienne sur lésions sclérosantes complexes aient déjà été décrits (23). De plus, l infiltrat inflammatoire chronique, bien que non spécifique des carcinomes adénosquameux de bas grade, n est habituellement pas au premier plan dans les lésions sclérosantes. Enfin, ces lésions sont caractérisées par un aspect centripète, c'est-à-dire une zone centrale vers laquelle 27

convergent des lobules et des canaux, et la cytokératine n est pas exprimée dans le contingent fusocellulaire. Carcinome tubuleux Le carcinome tubuleux est un carcinome infiltrant très bien différencié constitué de tubes à une seule couche de cellules régulières entourées d un stroma fibreux abondant. Ce carcinome est de bon pronostic et peut être confondu avec un carcinome adénosquameux de bas grade. Cependant il n existe pas de contingent épidermoïde et les structures canalaires sont composées d une seule assise de cellules, ce qui peut être confirmé en immunohistochimie. De plus les carcinomes tubuleux expriment toujours le récepteur aux œstrogènes, à la différence du carcinome adénosquameux de bas grade. Un diagnostic préopératoire ou per opératoire est donc très difficile voire impossible. Il est cependant essentiel d être très attentif aux «clés» du diagnostic cytologique et histologique et de corréler la morphologie aux renseignements clinico-radiologiques, afin de ne pas faire un faux diagnostic de bénignité. 6. Traitement Tableau V Chirurgie mammaire Dans la plupart des cas (34 cas sur 56), le traitement chirurgical des carcinomes adénosquameux de bas grade consiste en une tumorectomie. Les autres patientes ont bénéficié d une mastectomie (22 cas sur 56). Comme pour les autres types de carcinome infiltrant, des limites de résection saines, sans qu une marge minimale ne soit précisée, semblent être un facteur essentiel pour le contrôle local de la maladie (9). Chirurgie ganglionnaire Parmi les 56 tumeurs publiées dont le traitement chirurgical a été précisé, 24 chirurgies mammaires ont été associées à un curage axillaire (7, 9, 11, 13, 14). Seulement 2 carcinomes adénosquameux de bas grade s accompagnaient d un envahissement ganglionnaire (9, 13). La première patiente était une femme de 40 ans présentant une tumeur de 35 mm de grand axe avec un seul ganglion envahi sur 33 (9) et la seconde présentait 2 métastases ganglionnaires homolatérales mais le nombre total de ganglions examinés n était 28

pas précisé (13). Ainsi, vu le faible nombre de statuts ganglionnaires axillaires positifs, le curage axillaire ne serait préconisé que pour les femmes de moins de 40 ans, pour les tumeurs de plus de 30 mm (9) ou en cas de ganglions suspects cliniquement. Traitements complémentaires Sur l ensemble des cas publiés, la notion d une radiothérapie ou d une chimiothérapie complémentaire est rarement précisée (8, 11, 14). Une patiente sur les 56 a bénéficié d un traitement complémentaire par chimiothérapie. Aucune n a subi de radiothérapie ni reçu d hormonothérapie. 7. Evolution Tableau V Contrairement aux carcinomes mammaires classiques, la plupart des patientes ayant bénéficié d une chirurgie d exérèse appropriée pour un adénocarcinome adénosquameux de bas grade ne vont pas présenter de récidive et l incidence de métastase reste très faible. Sur 45 patientes ayant bénéficié d un suivi clinique et paraclinique, 35 n ont présenté ni récidive ni métastase (7, 8, 9, 11, 13, 14). Dix récidives locales ont été notées, ce qui montre bien la propension de ces tumeurs à évoluer localement. Pour l ensemble de ces récidives le traitement initial avait consisté en une tumorectomie exclusive sans irradiation ni autre traitement complémentaire. Ces tumeurs avaient rechuté en 12 à 37 mois. Il n est pas précisé pour ces cas le caractère in sano ou non de la résection. Un seul cas de métastase à distance (9) a été décrit. Il s agissait d une patiente de 33 ans présentant une tumeur de 80 mm de grand axe. Malgré un curage ganglionnaire comportant 34 ganglions lymphatiques négatifs, de multiples images métastatiques pulmonaires étaient visibles sur la radiographie pulmonaire au moment du diagnostic. Après une mastectomie radicale et des métastasectomies pulmonaires par résection cunéiforme («Wedge resection»), la patiente était encore en vie un an après. L aspect histologique des métastases pulmonaires était identique à celui de la tumeur initiale. Il n a pas été rapporté de rechute axillaire ganglionnaire ou de rechute métastatique à distance, après la prise en charge initiale. Un seul décès a été attribué à un carcinome adénosquameux (9). Il s agissait d une patiente de 50 ans qui, après une rechute locale, présentait une tumeur progressivement infiltrante ayant envahi un hémithorax puis le plexus brachial. Sa mort était survenue 8 ans après le diagnostic initial. 29