Québec, le 21 mai 2013



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Québec, le 21 mai 2013 Monsieur Sam Hamad Président de la Commission de l'économie et du travail Hôtel du Parlement 1045, rue des Parlementaires 3 e étage, Bureau 3.01 Québec (Québec) G1A 1A4 Objet : Projet de loi n o 36 Loi sur la Banque de développement économique du Québec Monsieur le Président, Dans le cadre de son mandat, le Protecteur du citoyen prend connaissance de l ensemble des projets de loi et de règlement présentés à l Assemblée nationale ou publiés à la Gazette officielle. Lorsqu il l estime nécessaire, il intervient en vertu de l article 27.3 de sa loi constitutive, qui lui confère le pouvoir d appeler l attention d un dirigeant d organisme ou du gouvernement sur les réformes législatives, réglementaires et administratives qu il juge conformes à l intérêt général. C est ainsi que j ai pris connaissance du projet de loi cité en objet, présenté par la ministre déléguée à la Politique industrielle et à la Banque de développement économique du Québec le 24 avril 2013, et qui fait présentement l objet de consultations de la Commission. Notre veille législative nous amène à porter une attention particulière, en regard de la compétence du Protecteur du citoyen, aux organismes publics dont le statut est modifié ou qui sont nouvellement créés. C est uniquement dans cette perspective que je vous écris aujourd hui, laissant aux intervenants spécialisés le soin de se prononcer sur les aspects d opportunité et de mise en œuvre de la création de la Banque de développement économique du Québec (BDÉQ ou Banque). 525, boul. René Lévesque Est, bureau 1.25, Québec (Québec) Téléphone : 418 643-2688 Sans frais : 1 800 463-5070 Télécopieur : 418 643-8759 protecteur@protecteurducitoyen.qc.ca http://www.protecteurducitoyen.qc.ca

- 2-1 La Banque de développement économique du Québec : Un nouvel organisme non soumis à la compétence du Protecteur du citoyen La BDÉQ résultera de la fusion d Investissement Québec actuellement non soumis à la compétence du Protecteur du citoyen et des bureaux régionaux du ministère des Finances et de l'économie (la partie économie, qui appartenait à l ancien ministère du Développement économique, de l Innovation et de l Exportation ou MDEIE) actuellement soumis à la compétence du Protecteur du citoyen. Je constate que, dans l état actuel du projet de loi n o 36, la nouvelle société BDÉQ ne sera pas soumise à la compétence du Protecteur du citoyen. En effet, l article 14 de la Loi sur le Protecteur du citoyen 1 prévoit qu un organisme public est assujetti à sa compétence dans la mesure où le personnel de cet organisme est nommé suivant la Loi sur la fonction publique 2. Ce n est pas le cas de la nouvelle société BDÉQ, dont les membres du personnel seront nommés selon le plan d effectifs établi par le conseil d administration (art. 76 du projet de loi 3 ). Ce constat m a amenée à certaines réflexions, dont je désire vous faire part. 1.1. Le contexte de l actuelle société Investissement Québec La mission de l actuelle société «Investissement Québec», précisée à l article 4 de la Loi sur Investissement Québec 4, consiste à «contribuer au développement économique du Québec conformément à la politique économique du gouvernement», à «stimuler la croissance de l'investissement et à soutenir l'emploi dans toutes les régions du Québec. Pour accomplir sa mission, la société soutient la création et le développement des entreprises de toute taille par des solutions financières adaptées et des investissements, et ce, en cherchant à compléter l'offre de ses partenaires. Conformément au mandat que lui confie le gouvernement, elle assure la conduite de la prospection d'investissements étrangers et réalise des interventions stratégiques». Les articles 5 et 18 LIQ précisent que, dans le cadre de sa mission, en plus de la prestation de services financiers, la société doit administrer les programmes d aide financière que peut élaborer le gouvernement, ainsi que tout autre programme d aide financière qu il peut désigner. Lorsqu elle exécute des mandats confiés par le gouvernement, l article 23 LIQ mentionne que la société doit respecter les directives que lui donne le ministre du Développement économique, de l Innovation et de l Exportation une fonction exercée depuis septembre 2012 par le ministre des Finances et de l'économie. 1 Chapitre P-32. 2 D autres organismes, qui ne répondent pas à ce critère, sont tout de même soumis à la compétence du Protecteur du citoyen en vertu de l article 15 de la Loi sur le Protecteur du citoyen. 3 Il en est de même des filiales de la Banque : «76. Le secrétaire et les autres membres du personnel d une société sont nommés selon le plan d effectifs établi par le conseil d administration de cette dernière.» 4 Chapitre I-16.0.1, ci-après LIQ.

- 3 - Les personnes admissibles aux services offerts par Investissement Québec sont les entreprises à but lucratif, les coopératives et les autres entreprises d économie sociale (art. 11 LIQ). La Loi précise enfin que la société peut subordonner la prestation de services financiers aux conditions et au respect des obligations qu elle détermine (art. 16 LIQ). En cas de défaut de respecter ces conditions, la société peut suspendre la prestation du service ou y mettre fin, ou encore augmenter ou diminuer ses obligations envers l entreprise, en changer les modalités ou prendre toute autre mesure qu'elle juge nécessaire à la conservation de ses droits (art. 17 LIQ). Dans le cadre de sa mission, Investissement Québec offre des services directs aux entreprises québécoises et étrangères. En 2009-2010 (avant la fusion avec la Société générale de financement), plus de 1 600 entreprises ont bénéficié de l appui financier d Investissement Québec, et plus de 1 450 entreprises admissibles devaient avoir bénéficié de crédits d impôt en 2010 5. En 2011-2012, l actuelle Investissement Québec a réalisé «1 412 interventions financières, notamment des prêts, des garanties de prêt et des investissements, pour appuyer 1 116 entreprises au Québec» 6. La société s est dotée d une Déclaration d'engagement envers la clientèle 7, ce qui dénote d emblée un contact et des services directs avec des citoyens corporatifs. Cette déclaration affirme notamment que le personnel d Investissement Québec s engage à faire preuve d objectivité, d indépendance et à traiter équitablement ses clients et ses partenaires. La société a également une procédure de gestion des plaintes 8 dans laquelle elle s engage à ce que toutes les plaintes soient traitées avec diligence et impartialité. 1.2 Le contexte des bureaux régionaux du ministère des Finances et de l'économie Le ministère des Finances et de l'économie opère actuellement des bureaux dans 17 régions du Québec. Selon le rapport annuel de gestion 2011-2012 du MDEIE 9, le secteur des Services aux entreprises et affaires territoriales de ce ministère (qui 5 Investissement Québec, votre partenaire d'affaires, brochure générale, disponible sur le site Internet d Investissement Québec, [ http://www.investquebec.com/fr/index.aspx?section=6], consulté le 8 novembre 2010 (n est plus accessible). 6 Investissement Québec, Propulser l entrepreneuriat pour propulser le Québec Rapport annuel et rapport de développement durable 2011-2012, p. 5, [En ligne]. [http://www.investquebec.com/documents/fr/publications/raiq_2011-2012_fr.pdf] (consulté le 14 mai 2013). 7 Site Internet d Investissement Québec [ http://www.investquebec.com/fr/index.aspx?page=2000] consulté le 14 mai 2013. 8 Idem. 9 Ministère du Développement économique, de l Innovation et de l Exportation, rapport annuel de gestion 2011-2012 Notre expertise votre réussite, [En ligne]. [http://www.economie.gouv.qc.ca/bibliotheque/publications/page/rapports-15489/] Consulté le 17 mai 2013.

- 4 - comprenait notamment 17 directions régionales 10 ), comptait 223 ETC au 31 mars 2012. Ces bureaux, comme le reste du Ministère, sont actuellement assujettis à la compétence du Protecteur du citoyen. Ils jouent un rôle de «première ligne» auprès des entreprises et leurs services sont, selon le site Web du Ministère, «aisément accessibles dans toutes les régions pour [les] aider à renforcer [leur] compétitivité et à accroître [leur] productivité» 11. La Déclaration de services 12 présentée dans la section Économie du site Web du ministère des Finances et de l'économie est celle de l ancien MDEIE. Le Ministère s y engage à offrir à la population des services accessibles, courtois, professionnels et respectueux; à traiter les demandes de façon rigoureuse; et à améliorer de façon continue ses services. Le Ministère offre aussi un mécanisme de plainte 13, à formuler «en toute confidentialité» auprès du secrétaire général du Ministère. 1.3 Les caractéristiques de la Banque de développement économique du Québec constituée par le projet de loi n o 36 La mission de la BDÉQ est prévue à l article 2 du projet de loi. Elle consiste à «soutenir, notamment par des interventions financières, le développement économique du Québec dans toutes ses régions, conformément à la politique économique du gouvernement» 14. Le regroupement de la société Investissement Québec et des bureaux régionaux du ministère des Finances et de l'économie vise, conformément à l article 3 du projet de loi, à créer un «guichet unifié» : «La Banque, dans la perspective de créer un guichet unifié, voit à ce qu un service-conseil d accompagnement soit offert aux entreprises pour le développement de leurs affaires ainsi que dans le cadre de leurs démarches auprès des ministères et organismes. 10 Ce secteur comprend aussi les directions de Coordination régionale, Pôles et créneaux d excellence, Développement des entreprises, Affaires économiques métropolitaines et Mission Cap Nord. La répartition des ressources dans les différentes directions n est pas précisée. 11 [http://www.economie.gouv.qc.ca/?id=136]. 12 Déclaration de services du ministère des Finances et de l'économie, 2009 (ministère du Développement économique, de l'innovation et de l'exportation) disponible à la page : [http://www.economie.gouv.qc.ca/objectifs/informer/politiques-strategies-plansdaction/page/politiques-et-orientations-10440]. 13 Idem. 14 Art. 2, 1er alinéa. La suite se lit ainsi : «Ces interventions peuvent notamment viser à soutenir : 1 la création, l implantation, la croissance et la rétention des entreprises au Québec; 2 l investissement privé, l innovation et la productivité dans les entreprises; 3 l internationalisation des entreprises québécoises et l exportation, conformément à la politique en matière de relations internationales élaborée par le ministre des Relations internationales; 4 le secteur de la coopération et l économie sociale; 5 l exploration, l exploitation et la transformation des substances minérales du domaine de l État visées par la Loi sur les mines (chapitre M-13.1) et des ressources renouvelables, ainsi que le développement des technologies vertes; 6 la prospection et l attraction des investissements étrangers, conformément au mandat que lui confie le gouvernement. La Banque exerce toute autre fonction que peut lui confier le gouvernement.»

- 5 - Ce service comprend également la coordination des interventions de ces ministères et organismes à l égard de tout projet que le gouvernement considère stratégique.» La BDÉQ est un mandataire de l État (art. 1). Elle coordonne l action de ses trois filiales (Développement économique Québec, Ressources Québec et Capital Émergence Québec) qui «sont chargées des interventions nécessaires à l entier accomplissement de sa mission auxquelles elle ne procède pas» (art. 10, 11 et 12) 15. Celles-ci peuvent aussi être désignées à titre de mandataire par le gouvernement afin de leur confier (art. 17) : «1 l administration des programmes d aide financière qu il peut élaborer ou désigner; 2 l attribution et l administration de l aide financière ponctuelle qu il détermine pour la réalisation de projets qui présentent un intérêt économique important pour le Québec; 3 tout autre mandat. Est assimilée à un mandat que le gouvernement confie à Développement économique Québec l administration des paramètres sectoriels prévus à l annexe A de la Loi concernant les paramètres sectoriels de certaines mesures fiscales (chapitre P-5.1).» Le projet de loi précise en outre que le «mandataire est tenu, dans l administration des programmes d aide financière et l exécution des autres mandats que lui confie le gouvernement, de se conformer aux directives que lui donne le ministre» (art. 20). Outre Ressources Québec, qui a pour mandat «d analyser les projets d investissements de sommes portées au crédit [du fonds «Capital Mines Hydrocarbures»], d investir ces sommes ainsi que de gérer ces investissements» (art. 36) et Capital Émergence Québec, qui «a pour mission, à l exclusion de Développement économique Québec, de faciliter le démarrage et le redémarrage d entreprises par son apport en capital de risque, par un investissement dans un groupement de personnes ou de biens ayant pour objet de faciliter le démarrage et le redémarrage d entreprises ou par le financement d un tel groupement» (art. 53), la filiale Développement économique Québec a pour mission de «contribuer au développement économique du Québec. Elle vise à stimuler la croissance de l investissement et à soutenir l emploi dans toutes les régions du Québec. Pour accomplir sa mission, Développement économique Québec soutient la création et le développement des entreprises de toute taille par des solutions financières adaptées, des interventions de nature autre que financière et des investissements. Conformément au mandat que lui confie le gouvernement, elle assure la conduite de la prospection d investissements étrangers et réalise des interventions stratégiques.» (art. 30). 15 En outre, chaque filiale a sa mission propre, précisée plus loin.

- 6 - Cette filiale «offre des services-conseils aux entreprises visant le développement des affaires et le soutien de leurs démarches auprès des ministères et organismes» (art. 31) et doit «s assurer d être présente et en mesure d exercer ses activités dans toutes les régions administratives du Québec» (art. 32). Alors que selon la LIQ les personnes admissibles aux services offerts par Investissement Québec sont les entreprises à but lucratif, les coopératives et autres entreprises d économie sociale (art. 11 LIQ), le projet de loi prévoit plus généralement que «Développement économique Québec offre ses services aux entreprises, quelle que soit leur forme juridique» (art. 33). De façon similaire à Investissement Québec, le projet de loi prévoit que la Banque et ses filiales «peuvent subordonner leurs prestations aux conditions et au respect d obligations contractuelles qu elles déterminent» (art. 95) et qu en cas de défaut de respecter ces conditions et obligations, elles pourraient suspendre la prestation du service ou y mettre fin, ou encore augmenter ou diminuer leurs obligations envers l entreprise, en changer les modalités ou prendre toute autre mesure qu elles jugent nécessaire à la conservation de leurs droits (art. 96). Dans le cadre de leur mission, la BDÉQ et ses filiales, particulièrement Développement économique Québec, offriront donc des services directs aux entreprises québécoises et étrangères. 2 La pertinence d assujettir la Banque de développement économique du Québec et ses filiales au champ de compétence du Protecteur du citoyen 2.1 Le financement et la subvention des acteurs économiques par des fonds publics L activité étatique liée au financement et à la subvention des acteurs économiques (entreprises, coopératives et autres) par des fonds publics n a de cesse de croître. L intervention de l État dans l économie est une partie importante de l action des gouvernements : «L intérêt que manifeste l Administration centrale à la subvention est directement lié à l impact économique de ce procédé d action au sein de la collectivité. Cet impact s affichera notamment par la dépendance qu ont développée à son égard diverses entités sociales, œuvrant à tous les niveaux de la collectivité. [ ] En tant que moyen d action économique, la subvention commande à l État d être juste et équitable envers tous» 16 (les soulignements sont les nôtres). 16 Pierre ISSALYS et Denis LEMIEUX, L action gouvernementale Précis de droit des institutions administratives, 3e éd., Cowansville, Éditions Yvon Blais, 2009, pp. 1236-1237.

- 7 - Le concept de «subvention» que les auteurs utilisent ici concerne «toute forme d aide économique accordée par l État» 17. L Administration publique qui octroie une telle aide financière issue de fonds publics doit respecter certaines conditions : devoir d agir équitablement, équité contractuelle, respect des chartes des droits et libertés, respect des conditions et des règles administratives propres à chaque programme d aide financière. Ces conditions d exercice de cette action étatique se répercutent tant à l étape de l octroi de l aide financière, de sa mise en œuvre et de son administration, que lors du retrait ou de la fin de cette aide. À toutes ces étapes, l action de l organisme public qui octroie, administre ou retire l aide financière peut avoir des conséquences importantes pour la personne concernée (entreprise ou personne physique). Les recours ou voies de contrôle de cette forme d action gouvernementale sont peu nombreux : recours hiérarchique ou prévu dans les textes habilitant, contrôle judiciaire limité devant la Cour supérieure, recours au Protecteur du citoyen 18. L appel ou le recours en révision administrative des décisions portant sur l octroi ou l administration de programme d aide financière est exceptionnel. Dans ce contexte, il parait indiqué que le projet de loi n o 36 permette aux personnes qui bénéficient des services de la BDÉQ d avoir recours au Protecteur du citoyen afin de remédier, le cas échéant, à une situation pouvant leur être préjudiciable et découlant de l action de cette société publique. Cela d autant plus que tous les services seront regroupés en un seul organisme. 2.2 La clientèle de la Banque de développement économique du Québec et de ses filiales Le fait que la BDÉQ et ses filiales, tout comme Investissement Québec, offrirait des services directs aux entreprises, grandes ou petites, quelle que soit leur forme juridique, justifie l assujettissement à la compétence du Protecteur du citoyen. Le type d actions que mène Investissement Québec et que mènera la BDÉQ à l égard des entreprises est susceptible d entraîner des situations dont le règlement pourrait être facilité par l intervention du Protecteur du citoyen. Contrairement à une idée répandue, tant chez les entrepreneurs qu au sein de l Administration publique, la Loi sur le Protecteur du citoyen ne s applique pas uniquement aux personnes physiques. En effet, il est habilité à recevoir les demandes de service de toute personne, non seulement physique, mais également morale, notamment des entreprises. D ailleurs, le Protecteur du citoyen traite déjà des plaintes logées par des entreprises dans les secteurs de l environnement, de l agriculture et de l alimentation, des impôts, du revenu et des ressources naturelles, pour ne nommer que ceux-là. Les motifs de plaintes sont variés et peuvent notamment concerner l octroi ou le refus de subventions, l admissibilité à des programmes d aide financière, les relations 17 Idem, p. 1243. 18 Idem, p. 1296.

- 8 - avec les fonctionnaires des ministères ou organismes visés, les inspections et contrôles ou la délivrance d autorisations. Il est intéressant de noter que, malgré l absence de compétence actuelle du Protecteur du citoyen sur Investissement Québec et le fait que la possibilité pour des entreprises de s adresser à lui soit peu connue, il a déjà reçu des plaintes concernant cet organisme. Le Protecteur du citoyen a dû refuser de traiter ces dernières en raison de son absence de compétence sur cet organisme. Cela est toutefois indicateur d un besoin. 2.3 Le transfert du personnel des bureaux régionaux du ministère des Finances et de l Économie vers la Banque de développement économique du Québec : une perte de recours au Protecteur du citoyen pour les entreprises Il appert que le rôle de première ligne actuellement joué par les bureaux régionaux du ministère des Finances et de l Économie continuera d être joué par les bureaux régionaux de la BDÉQ. Toutefois, dans l état actuel du projet de loi, les citoyens qui s estimeraient lésés par des actions ou omissions de ceux-ci n auraient plus la possibilité, comme ils l ont présentement, d avoir recours au Protecteur du citoyen pour les aider. Le fait que les citoyens ne puissent se tourner vers le Protecteur du citoyen lors de la survenance de problèmes divers relatifs à la qualité des services offerts par la BDÉQ constitue pour eux une perte d un recours non judiciaire accessible et sans formalisme. 3 En conclusion Considérant la nature des activités de la BDÉQ, sa mission d intérêt général, le fait qu elle offre plusieurs services directs aux citoyens et qu elle exécute des mandats que lui confie le gouvernement en matière d aide financière, le recours au Protecteur du citoyen permettrait à des citoyens personnes morales ou autres éventuellement lésés par les actes ou omissions de cette société, de trouver un remède adéquat, et ce, sans nécessité d un recours judiciaire. Si la BDÉQ était assujettie à la compétence du Protecteur du citoyen, le rôle de ce dernier ne serait pas de substituer sa propre appréciation à celle de la Banque quant à l opportunité d accorder ou non une aide financière à une entreprise, mais bien de s assurer que cette décision est prise conformément aux procédures, politiques et normes applicables aux entreprises qui reçoivent ses services, dans le respect de l équité procédurale, en toute transparence pour les citoyens visés. En ce sens, il me parait bien fondé que la BDÉQ soit assujettie à la compétence du Protecteur du citoyen.

- 9 - En conséquence, le Protecteur du citoyen recommande : R-1 Que l article 15 de la Loi sur le Protecteur du citoyen soit modifié afin d y ajouter le paragraphe suivant : «10 o la Banque de développement économique du Québec et ses filiales». Veuillez agréer, Monsieur le Président, l assurance de ma considération. La protectrice du citoyen, Original signé Raymonde Saint-Germain c. c. M me Élaine Zakaïb, ministre déléguée à la Politique industrielle et à la Banque de développement économique du Québec M. Nicolas Marceau, ministre des Finances et de l'économie M. Stéphane Bédard, leader parlementaire du gouvernement M. Pierre Moreau, leader parlementaire de l opposition officielle M. Gérard Deltell, leader parlementaire du deuxième groupe d opposition M. Luc Monty, sous-ministre des Finances et de l'économie M. Jacques Daoust, Président et chef de la direction d'investissement Québec M me Dany Hallé, secrétaire de la Commission de l Économie et du Travail M me Anik Laplante, secrétaire de la Commission des institutions