Plan froid bruxellois et lutte contre l exclusion sociale



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Transcription:

Plan froid bruxellois et lutte contre l exclusion sociale Décembre 2005 Bernard Horenbeek Conseiller au cabinet de la Ministre Evelyne Huytebroeck

Résumé introductif Le décès de deux SDF fin novembre 2005 à Bruxelles a mis en évidence la question des structures d'aide d'urgence qui répondent aux demandes et aux besoins des personnes. Quels sont les dispositifs existants? Comment l aide d urgence s organise en Région bruxelloise? Comment améliorer ce qui existe? La présente analyse fait le point sur une problématique dont on ne connaît généralement que les aspects les plus dramatiques et les plus spectaculaires. Mais s il faut évidemment faire face à l urgence, il importe également d encourager les mécanismes d'insertion sociale basés sur le long terme et de travailler à l'identification des mécanismes d'exclusion pour assurer une véritable lutte contre l'exclusion sociale. 1. Etat des lieux du secteur 1.1 Le secteur des sans-abris bruxellois 1.1.1 Bref historique La problématique des sans-abris n est pas neuve. Elle a été très longtemps réglée par des législations qui prévoyaient une mise à disposition administrative, c est-à-dire un emprisonnement (la loi de 1891, d application jusqu en 1993). Des institutions caritatives se sont créées à cette époque. Il s agit la plupart du temps de grandes maisons d accueil pour hommes, confessionnelles (l Armée du Salut) ou laïque (Home Baudouin). L après-guerre a vu la construction de notre système de sécurité sociale. La plupart des maisons d accueil se sont crées dans les années 50 à 70. Elles sont généralement plus petites (20 à 40 lits). Nombre d entre elles se sont constituées à l origine pour recevoir les détenus à leur sortie de prison. Les années 90 et la dépénalisation du vagabondage et de la mendicité ont été une période d ouverture et de découverte de ces réalités sociales jusqu alors cachées et très méprisées. Cela s est concrétisé à Bruxelles par des mouvements revendicatifs et identitaires des SDF euxmêmes (le Château de la Solitude et la Croisade des SDF) et des initiatives citoyennes pour faire face aux urgences (l Opération Thermos et la distribution de repas dans les gares) ou publiques et associatives professionnelles pour offrir de nouvelles formes de réponses : accueil inconditionnel et anonyme1 (Pierre d Angle), mise en place d un travail de rue (Diogenes), recherche de nouvelles forme d aide au logement (habitats accompagnés, AIS, ). Depuis une douzaine d'années tous les lieux publics qui pouvaient servir de refuge aux SDF se sont fermés expressément pour empêcher les SDF d'y trouver refuge. Si un système hivernal s'est mis en place, c'était pour soulager les gardes des hôpitaux qui recevaient les SDF en cas de situation difficile et qui ne le voulaient plus. En outre, les prisons «n'hébergent» plus les vagabonds depuis l'abrogation de la loi de 1891 sur le vagabondage en 1993 une très bonne chose bien sûr mais le fédéral s'est ainsi dégagé d'un problème sans jamais créer de contrepartie ou d'aide aux régions pour assurer la mission). 1 L abrogation de la loi de 1891 a entraîné la fermeture des établissements pénitentiaires à l accueil des vagabonds (St-Hubert et Merksplats). Aucune politique d accueil spécifique n a été développée pour compenser. Au contraire les gares et nombre de lieux publics se sont fermés aux SDF.

On 7 15 3 3 3 Page 2 sur 9 A tout cela s'ajoute les passages de réfugiés, d'ailleurs régulièrement envoyés par l Office des Etrangers elle-même vers les structures d'accueil pour sans-abris. Ces dernières semaines on a vu arriver des familles jusqu'à 12 enfants!!! envoyés à l'asile de nuit qui n'est pas un lieu d'accueil correct pour des enfants et des familles et a un impact direct sur les capacités d'hébergement. Les années 2000 ont amené une gestion publique plus forte de la problématique et le développement d outils de «gestion des flux» (SAMU social) ou de tentatives de regroupement et de mise en place de collaborations entre services. Cela s est accompagné à Bruxelles d une volonté de récupération politique et médiatique qui a abouti à une crise grave dans le secteur. 1.1.2 Les services proposés aux SDF A/ les maisons d accueil : 14 maisons dépendent de la Cocof, 5 de la CCC (dont une émane du CPAS de Molenbeek) et 5 de la Vlaamse Gemeenschap (on peut également citer Transit, dépendant du Fédéral mais se limitant à l accueil de personnes toxicomanes). Elles offrent environ un millier de places sur la région bruxelloise. distingue2 : maisons pour hommes seuls 414 places maisons pour femmes (avec ou sans enfants) 344 places maisons pour tous 112 places maisons pour jeunes 25 places maisons avec un public spécifique (toxicomanes, victimes de la traite des êtres humains, ) 60 places T= 955 places Les maisons d'accueil offrent un accompagnement social et un hébergement à moyen ou long terme, La durée de séjour a tendance à s'allonger à cause de la difficulté à trouver un logement correct à un prix acceptable pour les petits revenus, B/ l hébergement d urgence : le Centre d accueil d urgence Ariane (23 places) offre un accueil le plus limité possible en attendant une orientation vers les maisons d accueil notamment. Pierre d Angle (48 lits) est la seule institution à encore réaliser un accueil inconditionnel et anonyme. Son service est volontairement minimal. Le CASU, est l héritier du SAMU Social ( minimum 60 places). C est le seul organisme à être à la fois francophone (financé par la Cocof) et bicommunautaire (financé par la CCC). C/ le travail de rue : initié en 1995 par Diogenes, il propose un travail ethnopsychologique basé sur des relations à long terme avec les habitants de la rue et une orientation des personnes en fonction de l émergence de demandes. Le Samu-social a ajouté en 2000 la Maraude, réalisé avec des camionnettes, il s agit d essayer de ramener les gens vers les centres d hébergement ou de leur offrir un café pendant la soirée. 2 Source : étude du Germe en 2000

D/ l habitat accompagné : Il s agit de poursuivre un accompagnement social et une aide à la gestion pour des personnes qui ont le plus souvent eu un parcours en maison d accueil. 5 structures dépendent de la Cocom (dont deux émanent de CPAS, Bruxelles et St-Gilles) et 4 de la VG. E/ L accueil de jour : essentiellement basé sur des structures volontaires, il peut prendre diverses formes. Les plus nombreux sont les restaurants sociaux (La Rencontre, le Clos-Ste-Thérèse, Nativitas, Bij Ons, ) qui offrent des repas pour un prix modiques et, suivant les cas, diverses formes d aides sociales ou d accompagnement social ambulatoire. Certains sont plus spécialisés : la Fontaine qui offre une aide en soins infirmier et en hygiène corporelle, Article 23 qui proposent des douches et des machines à laver. D autres encore proposent des activités socio-culturelles : Hobo et le dernier né «Jamais sans toit». 1.2 Le rôle de la Commission Communautaire Commune de la région de Bruxelles Capitale (la COCOM ou la CCC) A/ L initiative et l innovation : La CCC a traditionnellement pris une part active dans l aide d urgence et dans le soutien à des projets innovants et des initiatives en la matière : soutien aux abris de nuit, au travail de rue, à l habitat accompagné ; création de la Concertation, plus récemment l espace de parole. Cela a donné à la CCC un rôle central dans la politique d aide aux sans-abris. En 2004, la CCC finançait le secteur à hauteur de 3.398.624 (dont 73.5 ETP, en 2006, le budget du secteur sans-abri s'élève à 4.240.000 ). B/ Travail de rue : 250.000 3 Diogenes C/ Maisons d accueil : (budget 2004 si connu ) 1.600.000 - Open deur 22 places femmes avec ou sans enfants - Les foyers d accueil 13 Jeunes femmes et étudiantes - Le Relais 53 maison pour tous - Pag-asa 16 victimes de la traite des êtres humains - Talita 22 femmes avec ou sans enfants D/ Hébergement d urgence : 1.350.000 - Ariane 23 Centre d urgence pour tous - Pierre d Angle 48 Asile de nuit inconditionnel - CASU 60(?) (chiffres de 2005+ subvention Cocof) - Dispositif hivernal 45 Supplément d hébergement durant l hiver E/ Habitat accompagné : 890.000 - Le nouveau 150 - Fami-Home - Armée du Salut - CPAS Bruxelles - CPAS St-Gilles - Zorgwonen (Pag-asa) 3 Tous les chiffres cités sont ceux du budget 2006

F/ Centre de référence : 150.000 A côté de ces allocations budgétaires spécifiques, il faut ajouter de nombreux budgets d'initiatives finançant des projets tels que «l'espace de parole» des SDF et l'action des Centre d'aides aux personnes qui peut également concerné cette population. 2. Les Enjeux 2.1 Le cadre réglementaire en CCC Le secteur des sans-abris bruxellois attend depuis de très nombreuses années un cadre réglementaire qui lui assure une pérennité et des règles de fonctionnement et de subventionnement claires. Sous la législature précédente une ordonnance a permis de construire ce cadre. Ecolo a pu faire aboutir les arrêtés d application. En 2006, le subventionnement suivra donc ces règles et sera assuré à toutes les associations agréées. Cela devrait être de nature à apporter de la sérénité dans le secteur bicommunautaire. Il faudra cependant que la CCC puisse se trouver des marges financières pour pouvoir maintenir sa capacité d innovation en finançant des initiatives et des projets pilotes qui ne se trouveraient pas dans la réglementation. La CCC a toujours assumé ce rôle à Bruxelles et doit pouvoir continuer à le faire. 2.2 Le dispositif Hivernal 2004-2005 Comme chaque année, un dispositif hivernal a été mis en place par la CCC avec les principaux acteurs bruxellois de l hébergement d urgence (Pierre d Angle, Ariane, Diogenes, ). La CCC a mis 80.000 pour la réalisation du dispositif, le CPAS de Schaerbeek a mis des locaux à disposition. C est au sein de la Concertation sans-abris que le dispositif s organise. Le dispositif pouvait accueillir 45 personnes par nuit, des lits supplémentaires ont été ajoutés pendant les pics de grand froid. Les personnes étaient orientées vers le dispositif via un n vert dès que les principaux centres étaient complets. Le taux d occupation a avoisiné les 90%. Le dispositif initialement prévu du 13 décembre au 13 mars a été prolongé jusqu au 31 mars pour faire face à l offensive hivernale tardive. La Ville de Bruxelles a demandé au CASU d ouvrir également des lits supplémentaires. Il a pu fournir environ 40 lits supplémentaires. Cet hiver les sans-abris disposent en plus des places en maisons d accueil (environ 900 places sur la région) des lits d urgence suivant : - Pierre d Angle 48 lits - Dispositif hivernal 45 lits (jusqu à 49 lors des grands froids) - Ariane 23 lits - CASU 60 lits ( - 40 lits supplémentaires ----------- 216 lits d urgence cet hiver sur la Région

Globalement, il a pu être répondu à la demande avec généralement quelques places disponibles presque chaque soir. Pour la première fois depuis de très nombreuses années, le dispositif hivernal n a pas été submergé. Cela doit attirer notre attention sur le fait qu on ne peut pas continuer à augmenter des lits d urgence sans travailler sur la disponibilité de logements de qualité au risque de construire une politique de «dégradation sociale». Les maisons d accueil se plaignent de séjours dont la durée augmente, notamment à cause du manque de logements disponibles. Cela rend les maisons d accueil difficile d accès et cela maintien nombre de personnes dans des lits d urgence. En terme d accueil des sans-abris un dispositif cohérent existe, il faut le soulager par une politique de logements de qualité accessibles aux plus fragiles. 2.3 Le dispositif hivernal 2005-2006 Le dispositif hivernal a été organisé comme l'année dernière à Schaerbeek, rue de la Consolation dans un local mis à disposition par le CPAS de Schaerbeek. Il devait s'ouvrir le 12 décembre et rester ouvert jusqu'à la fin du mois de mars avec la possibilité de prolonger son ouverture si la situation le nécessite (comme cela a été le cas l'année dernière). Toutefois la demande de places a été nettement plus importante et la mort de deux SDF a accéléré le phénomène. Le dispositif a été élargi et l'ouverture des lits supplémentaires accélérées. Concrètement, le dispositif a été imaginé en deux phases quotidiennes: l'ouverture d'abord des dispositifs prévus et ensuite, l'ouverture en cascade de deux structures de secours selon le mode opératoire suivant: Première phase : A 20h, ouverture de l'asile de nuit Pierre d'angle: 48 places ; A 20h30, ouverture de la ligne téléphonique du CASU pour les places non réservées: 125 places ; A 20h45, ouverture du dispositif hivernal de Schaerbeek: 45 places. Seconde phase : En cas d'occupation complète des trois structures précitées, une salle communale est ouverte à St Catherine: 40 places avec un encadrement assuré par le CASU ; En cas d'occupation complète de cette salle, il y a la possibilité d'ajouter entre 15 et 30 lits de fortune dans les différentes structures. S'il s'avère nécessaire d'ouvrir une nouvelle structure, le CPAS de Bruxelles introduit auprès du Ministre de la défense une demande d'ouverture de la caserne d'evere: 50 places avec un encadrement assuré par Pierre d'angle. Actuellement: il n'a jamais été nécessaire d'ouvrir la caserne et aucune personne n'a plus été refusée. Petit à petit le nombre d'hébergement augmente (un effet d'appel?) Mais il reste une capacité d'environ 70 à 80 lits d'urgence disponibles sur les 325 prévus cet hiver. Ces 325 lits sont proposés aux personnes qui n'auraient pas pu trouver de places dans les équipements habituels. Il s'agit donc d'un mécanisme qui vient suppléer aux structures existantes mais qui reste un mécanisme d'urgence et non une structure à long terme. A cet égard, il existe près de 1000 lits sur la région bruxelloise. Les sans-abris sont orientés vers le dispositif hivernal par les structures d'hébergement ou via un numéro de téléphone vert (gratuit).

Les associations qui organisent le dispositif ont attiré l'attention des ministres sur la charge de travail importante que cela représentait pour les plus actifs d'entre eux et, en particulier pour Pierre d'angle qui assure la coordination. Aussi la Commission Communautaire Commune a financé l'engagement d'un coordinateur pour la période hivernale. Comment les sans-abris sont-ils informés? L'information circule vite et bien dans la rue. Sinon les travailleurs de rue de Diogenes font partie de la coordination et peuvent donner toutes les in formations aux personnes les plus isolées. La maraude du CASU permet de faire circuler l'information en soirée. Les structures d'accueil habituels seront elle également bien au courant, et enfin il y a la presse. Qui est accueilli? L'accueil est gratuit et inconditionnel mais supplétif. On veillera toujours à orienter chaque fois que c'est possible vers des structures plus adaptées et à plus long terme. Il est évident que des enfants, par exemple, n'ont pas leur place dans un dortoir de ce type. Les travailleurs sociaux mettent tout en place dans ce genre de circonstances pour leur trouver un hébergement plus adéquat. 2.4 Le centre de référence L étude du Germe (Andrea Rea) commanditée par la CCC avait conclu en 2001 à la nécessité de créer un Centre de Référence pour le secteur des sans-abris à Bruxelles. Ce Centre doit permettre de doter Bruxelles d un outil institutionnel d organisation du secteur et de pouvoir cibler les problématiques et trouver avec les acteurs sociaux les solutions les plus adaptées. Lors de la précédente législature ce projet n a pas pu aboutir malgré des négociations avancées pour un accord de collaboration entre les entités politiques bruxelloises. Réaliser ce Centre nécessite en effet que chacun des acteurs comprenne et accepte qu il ne dispose pas à lui seul de la solution aux problèmes des SDF. Les problèmes sont multiples et les solutions aussi. Il faut donc dépasser les clivages habituels, qu ils soient politiques (secteur public et secteur privé), philosophiques (structures laïques et confessionnelles) ou linguistiques et institutionnels (Cocof, CCC, VGC, VG). Pour que les gens apprennent à travailler ensemble il faut aussi leur assurer, au travers du Centre de référence, le respect de leurs identités, de leurs responsabilités respectives et de leurs orientations méthodologiques. Il est donc indispensable de faire de ce centre un organisme géré paritairement par les composantes publiques (CPAS) et associatives avec une participation de la Région pour lui donner un statut de service public (indispensable au vu de ces missions). Une constitution sous forme d association Chapitre XII4 serait de nature à rassurer tout le monde. Thierry Detienne a réussi ce pari en Wallonie avec les Relais sociaux qui disposent même d un décret les reconnaissant. La situation bruxelloise est plus complexe mais l état de la situation des sans-abris rend ce centre d autant plus important. 4 Suivant les conditions prévues dans le CH XII de la loi organique des CPAS qui prévoit comment ils peuvent s associer entre eux ou avec d autres partenaires.

2.5 La Concertation 2.6 L enjeu du logement La CCC s était doté il y a une quinzaine d année d une «Concertation Sans-abris». Cet interface entre le politique et les acteurs sociaux a permis dans les années 90 de faire de Bruxelles une ville pilote en Europe en matière d aide aux SDF. Aujourd hui cette concertation doit être renouvelée pour que le secteur sans-abris puisse faire face aux enjeux nouveaux : crise du logement, augmentation du nombre de familles en situation précaire, lutte contre les processus de désaffiliation sociale, accueil des réfugiés, etc Cette concertation doit également s ouvrir à d autres secteurs que ceux de l aide aux sans-abris (santé, santé mentale, logement, cohésion sociale, etc.) pour éviter de faire de la lutte contre l exclusion un secteur à part et pour l intégrer comme un axe de toutes les institutions socio-sanitaires bruxelloises. Le Germe recommandait en 2001 de confier l organisation de la Concertation au Centre de référence. Cela permettrait en effet, à côté des organes de gestion du Centre (Ch XII voir ci-dessus), de créer un organe participatif pour contribuer à une politique de lutte contre la pauvreté et les exclusions. Il faut à tout prix que la situation du logement pour les personnes à faible revenu s'améliore. Le manque de logement implique un allongement de l'hébergement en maisons d'accueil et par conséquent diminue le nombre de places d'urgence disponible. Il faut pouvoir pousser tout le monde vers le haut (logement) plutôt que vers le bas (accueil précaire en urgence). 2.7 Et en région wallonne? Thierry Detienne a organisé lors de la précédante législature les «Relais sociaux» qui organisent dans chacune des grandes villes une coordination dans l'aide aux sansabris et aux plus exclus. Ils sont structurés sous forme d'association Chapitre XII réunissant les associations locales, les pouvoirs publics locaux et la Région. Le décret de Thierry Detienne sur l'insertion sociale reconnaît et finance ces relais sociaux (et l'aide d'urgence associée) mais aussi les services d'insertion sociale (pour le travail d'insertion à long terme) et installe un Forum pour l'insertion sociale (qui doit permettre d'identifier les causes de l'exclusion et lutter contre les mécanismes d'exclusion) 5. 5 A ma connaissance ce volet n'a pas été activé par la Ministre Vienne