L'AQUARELLE AU SERVICE DES " ANTIQUITÉS " : L'ALBUM ARCHÉOLOGIQUE DE CHARLES COURNAULT



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Transcription:

L'AQUARELLE AU SERVICE DES " ANTIQUITÉS " : L'ALBUM ARCHÉOLOGIQUE DE CHARLES COURNAULT par M me J.-M. DEMAROLLE, membre associé libre Charles Cournault (1815-1904) d'après un dessin d'h. UMBRICHT Bien connu en Lorraine, le nom de Cournault doit sa notoriété au graveur Etienne Cournault (1891-1948) qui s'est illustré dans la taille douce. Les biographies de cet artiste (*) soulignent l'influence qu'a exercée sur lui son grand-père Charles Cournault (1815-1904), peintre lui-même certes, mais aussi archéologue averti ( 2 ) et collectionneur éclairé. Personnalité complexe, pittoresque, tout-à-fait représentative des milieux artistiques et archéologiques lorrains de la deuxième moitié du siècle dernier, Charles Cournault a laissé un "Album archéologique" en dix volumes, fruit de ses activités de conservateur mais surtout de ses missions dans les grands musées de Suisse, de Rhénanie, d'autriche, d'allemagne, de Hongrie. Cette œuvre de grande ampleur n'a guère retenu l'attention jusqu'à présent ( 3 ) : c'est pourtant un ensemble remarquable par son intérêt documentaire et par ce qu'il nous apprend des pratiques de travail du premier conservateur du Musée Lorrain (1861-1890).

Dans "l'album archéologique", Charles Cournault met son art de peindre au service de la mémoire de tout un ensemble de découvertes archéologiques qui posent les premiers jalons de notre connaissance des cultures de la Préhistoire et la civilisation mérovingienne. Les dix volumes de "l'album" offrent donc l'heureuse synthèse de deux activités de Charles Cournault, la peinture et l'archéologie. Pour mieux comprendre ce travail, il est nécessaire de présenter ces deux aspects de la personnalité de Charles Cournault. Une formation parisienne : Charles Cournault émule de Delacroix Si Charles Cournault naquit à Langres le 9 novembre 1815, soit moins de six mois après le désastre de Waterloo, il n'est pas sans liens avec Metz. En effet, son père, le colonel Henry Cournault, était passé, après Polytechnique, par l'ecole d'application du Génie de Metz. D'autre part, mis en non-activité dès 1814 après avoir servi dans toutes les campagnes napoléoniennes, il revint au service peu après : on le retrouve ainsi au II e Régiment du Génie de Metz comme lieutenant-colonel (1816-1819) puis comme colonel (1831-1833). Retiré à Toul en 1836, il s'adonna alors à l'écriture, aux sciences et à l'histoire locale jusqu'à sa mort en 1856. Charles Cournault comptait dans son ascendance maternelle Joseph Aved, ami de Chardin, peintre de portraits ( 5 ) et ses antécédents familiaux le rattachaient donc aux milieux de l'art et des "antiquaires". Après ses premières études à Langres même, le jeune homme entra au Lycée Louis-le-Grand. Deux de ses condisciples devaient ensuite jouer un rôle important dans sa vie : Jules Quicherat, futur Directeur de l'ecole des Chartes et futur ministre et Alfred Arago (1816-1892), deuxième fils de l'illustre savant, élève d'ingres qui, entre 1841 et 1851, exposera diverses œuvres de caractère historique. Bachelier ès lettres en 1833, Ch. Cournault se tourne vers la peinture. La même année, tout en menant des études de droit ( 6 ), Alfred Arago l'entraîne en effet à l'atelier de Nicolas-Toussaint Charlet (? ), rue de Sèvres. Cet artiste, connu surtout pour son travail de glorification des campagnes napoléoniennes mit le jeune Cournault en contact avec la technique de l'aquarelle et lui montra les possiblités d'un habile crayon. Mais bien plus importante encore fut la rencontre avec Delacroix, dont Charles Cournault fréquente l'atelier en 1839-1840 et avec lequel il entretient des relations particulièrement actives de 1847 à 1851. Depuis 1822 où il avait envoyé au Salon son "Dante et Virgile", Delacroix n'a cessé de s'affirmer comme le maître du Romantisme mais il bénéficie de surcroît, depuis la Révolution de 1830, de la faveur officielle ( 8 ). Au moment où Charles Cournault entre dans l'atelier du maître, celui-ci termine "La Prise de Constantinople par les Croisés". Ces deux années

furent décisives pour l'orientation de Charles Cournault. Il contracta en effet la passion de " l'orient " - ou plus exactement de l'afrique du Nord et de la culture islamique ( 9 )- à laquelle il resta fidèle jusqu'à la fin de sa vie, et il ne put aussi qu'affiner sa technique de l'aquarelle dont les œuvres mêmes de Delacroix lui montraient toutes les possibilités de coloriste et tout l'intérêt pour un travail de documentation. C'est fort de l'exemple de Delacroix que Charles Cournault accomplit deux voyages en Algérie, l'un en 1843, l'autre en 1846 ( 10 ). Au terme de ces années de formation au contact des milieux parisiens, s'affirme l'engouement de Charles Cournault pour la civilisation musulmane, qui se concrétisera par l'aménagement à Malzéville à partir de 1856 d'une demeure "orientale", la Douïra ( n ). Ses talents de coloriste, sa passion de collectionneur ( 12 ) ne s'affirment pas moins et marqueront ultérieurement l'élaboration de " l'album archéologique ". En 1852, Charles Cournault épouse Adélaïde, fille du commandant Hamberger qui possédait une propriété à Malzéville : ce mariage ( 13 ) va non seulement enraciner définitivement Charles Cournault en Lorraine mais il va modifier ses centres d'intérêt. Désormais vont passer au premier plan sa curiosité pour l'archéologie et l'histoire locales ( 14 ), ses engagements dans les " sociétés savantes ", ses fonctions au Musée Lorrain. Au service de l'histoire locale Etabli en Lorraine, Charles Cournault s'intègre très rapidement à l'élite intellectuelle et artistique locale ( 15 ), "mi-aristocratique, mi-bourgeoise". Alexandre de Metz-Noblat, son ami et cousin par alliance, joua un rôle décisif dans cette intégration, au moment où la capitale ducale était animée d'un intense dynamisme intellectuel et en passe d'être dotée d'importantes structures culturelles avec en 1854, grâce à l'action décisive du baron Prosper Guerrier de Dumast, la restauration de l'université. Or si, à la différence de son frère Edouard ( 16 ), sous-préfet de Mirecourt en 1848, Charles ne s'est engagé ni en politique ( 17 ) ni dans le mouvement lotharingiste, ses relations, sa passion pour l'archéologie locale le portent tout naturellement vers les sociétés qui incarnent alors à Nancy la vitalité scientifique et l'exaltation du passé lorrain. Alexandre de Metz-Noblat présente en 1858 la candidature de Charles Cournault au rang de membre correspondant de l'académie de Stanislas, année où ce dernier entre également à la " Société d'archéologie Lorraine" ( 18 ) née dix ans plus tôt. La grande affaire est alors la création du Musée Lorrain pour lequel un Comité avait été mis en place. C'est aussi en 1858 que Charles Cournault est accueilli au sein de ce Comité. Trois ans plus tard, à l'instigation encore d'alexandre de Metz-Noblat, ce même Comité choisit Charles Cournault pour inaugurer la fonction de Conservateur ( 19 ).

Il l'occupa jusqu'en 1890 : âgé de soixante-quinze ans il devint alors Conservateur honoraire. Mais c'est seulement en 1902 qu'il renonça à siéger à la Commission administrative du Musée où, pendant plus de quarante ans, il joua un rôle de premier plan dans le développement des collections du Musée ducal. Pendant ce demi-siècle de résidence et de fonctions nancéiennes, Charles Cournault s'est partagé entre la participation à la vie artistique régionale, le travail muséographique, la publication d'éclectiques recherches. Cette intégration nancéienne parfaitement réussie n'est pas en effet synonyme de repliement, bien loin de là. Charles Cournault continua à fréquenter Paris régulièrement. De nombreuses visites de Musées lui permirent de déposer au Musée des Antiquités Nationales de St-Germainen-Laye, que Napoléon III venait d'ouvrir, deux gros volumes de dessins. Gardant le contact ave le milieu parisien, ne cessant de peindre pour son plaisir à la Douïra où il reçoit force artistes jusqu'à ses dernières années, Charles Cournault se mêle de près à la vie artistique lorraine. Comme bien d'autres villes françaises, Nancy et Metz avaient créé une "Société des Amis des Arts", la première en 1833, la seconde en 1834. Membre de la Société Nancéienne, Charles Cournault était en relations étroites avec "l'ecole de Metz", ayant de nombreuses affinités avec ces "Messieurs", fervents admirateurs de Delacroix et de l'orient ( 20 ). Charles Cournault représente ainsi Nancy au jury de l'exposition universelle de 1861 lancée par l'académie de Metz ( 21 ). Il eut des rapports personnels plus étroits avec Migette -impliqué comme lui-même dans le travail muséographique ( 22 )- et surtout avec Théodore Devilly (1818-1886) lorsque celui-ci vint s'établir à Nancy après l'annexion. Charles Cournault ne fut pas étranger à la nomination de Devilly -qui en 1882 devint Directeur de l'ecole des Beaux-Arts- comme Conservateur du Musée de Peinture. Charles Cournault s'était aussi préoccupé d'organiser une Exposition à Nancy en 1866 en collaboration avec l'association strasbourgeoise des " Amis des Arts " et c'est au peintre d'origine alsacienne Umbricht qu'on doit plusieurs représentations du Conservateur du Musée Lorrain ( 23 >. Il put également s'entremettre pour faire venir à l'une des expositions de la " Société Lorraine des Amis des Arts" (il en fut le Président vingt-quatre ans durant) un tableau de Monet ( 24 ). Mais, à partir de 1861, Charles Cournault est pleinement absorbé par l'organisation du Musée au Palais Ducal. Il s'agissait d'abord d'enrichir les collections qui avaient à l'origine été rassemblées par la Commission des antiquités, auxquelles s'était ajouté le produit des fouilles menées par Dugas de Beaulieu. Mais le Comité du Musée, sous l'impulsion de Guerrier de Dumast, ne fit pas appel en vain à la générosité des Lorrains, par la voie des souscriptions (la première avait été ouverte en 1850) et des dons. Or Charles Cournault lui-même donna l'exemple de donations ( 25 ).

Il s'occupa très activement de la mise en valeur de ces collections ( 26 ) et de l'aménagement muséographique de la galerie des Cerfs, inaugurée le 20 mai 1862. Il eut la satisfaction d'y guider V. Duruy en 1864 et l'empereur François-Joseph en 1867. Il y fit servir les deux grands banquets commémoratifs du Centenaire de la réunion de la Lorraine à la France, présidés en juillet 1866 (les 16 et 17) par l'impératrice Eugénie et le Prince impérial. Mais il eut aussi la tristesse de voir ses dix premières années de travail anéanties par le terrible incendie qui ravagea le Palais Ducal dans la nuit du 16 au 17 juillet 1871. Une émouvante photographie ( 2? ) le montre en train de fouiller les décombres à la recherche des plus menus vestiges, en compagnie de René et Lucien Wiener. Toutefois, le labeur acharné de Charles Cournault assisté de Lucien Wiener, les négociations du Comité, de Guerrier de Dumast, d'henri Lepage ( 28 ) et de tous leurs émules "lotharingophiles", le succès d'une souscription, permirent moins de quatre ans plus tard la réouverture. Connaissant bien les collectionneurs locaux, guidé par une fine sensibilité aux "objets" archéologiques, Charles Cournault put procéder à des acquisitions d'un grand intérêt scientifique. Ainsi fit-il acheter en 1872 le célèbre "Trésor de Frouard" ( 29 ). De surcroît, l'activité d'archéologues lorrains tels que le D r Bleicher ou le comte Jules Beaupré accrut les richesses du Musée dans cette même période. Conservateur du Musée ( 30 ), Charles Cournault a aussi diligente une importante série de fouilles (pierriers du bois d'allain, vallées de la Meurthe, de la Seille, en particulier en aval de Liverdun, sur la rive droite de la Moselle)( 31 ). Là, c'est par harsard que les travaux de construction d'une maison (en avril 1870) mirent au jour un sarcophage en pierre et de nombreux ossements : il s'agissait en fait d'une vaste nécropole mérovingienne (plus de mille squelettes). Le Conservateur du Musée Lorrain fit immédiatement le rapprochement avec le "Champ des Tombes" de Pompey qui avait livré en 1852 une série de sarcophages. Des fouilles eurent lieu en 1870-71 dont il rendit compte dès le 25 avril 1870 à son ancien condisciple Jules Quicherat, devenu ministre, Une série de lettres ( 32 ), accompagnées de dessins, témoigne du souci de faire profiter le Musée Lorrain -"établissement public ouvert tous les jours aux travailleurs "-du produit des fouilles ( 33 ), mais aussi des préoccupations archéologiques ( 34 ) et scientifiques ( 35 ) de Charles Cournault. Des notations techniques, de multiples comparaisons enrichissent ce rapport, toutes caractéristiques également mises en œuvre dans " l'album archéologique ". La variété des expériences picturales et muséographiques de Charles Cournault a pour effet principal l'éclectisme de ses publications. Outre de nombreuses notes dans diverses revues de sociétés savantes locales (comme les publications de la " Société d'archéologie Lorraine ") ou nationales (le Bulletin de la Société Nationale des Antiquaires de France), on lui doit des

Fig. 2 Objets de parure de la nécropole mérovingienne de Liverdun (Musée Lorrain) (Album archéologique).

contributions ou des ouvrages plus étoffés. Reprenant le rapport que nous venons de citer, il présente dans les Mémoires de la Société d'archéologie Lorraine de 1871 ( 36 ) les " Sépultures du Cimetière mérovingien de Liverdun (Meurthe) " contribution riche de descriptions très détaillées du matériel et en particulier des fibules dont plusieurs sont d'un intérêt exceptionnel : une pièce quadrilobée en or à décor de filigranes, une autre signée du nom de l'orfèvre Grimoald ou encore une fibule estampée sur un médaillon romain ( 37 ). Mais les deux travaux majeurs de Charles Cournault ont été consacrés à deux grands artistes lorrains, le premier en 1882 à Ligier-Richier ( 38 ), le deuxième à Jean Lamour en 1886 ( 39 ). Charles Cournault fait œuvre de vulgarisation intelligente et solide en prenant en compte la bibliographie antérieure ( 40 ), en analysant avec soin les grandes œuvres -un chapitre entier est consacré au retable d'hattonchâtel- en présentant d'heureuses comparaisons. Il a pour objectif de mettre en valeur la spécificité " lorraine " de chacun de ces artistes ( 41 ). Aujourd'hui on s'étonne cependant d'une lacune : le premier conservateur du Musée Lorrain n'a pas entrepris le premier catalogue de ce musée. " L'Album archéologique " Sans nier l'intérêt de ces écrits, il est légitime de penser que le meilleur des activités de chercheur scientifique de Charles Cournault est passé dans Y Album archéologique soit, rappelons-le, environ 1 200 planches qui correspondent à environ 10 000 dessins. Tels qu'ils se présentent actuellement, les dix volumes ( 42 ) de l'album Archéologique" sont composés de planches signées ( 43 ), le plus souvent datées ( 44 ). Elles reproduisent des découvertes locales, de nombreuses pièces entrées dans des collections privées locales - y compris la collection Cournault - ou étrangères, les ensembles des principaux musées de Suisse, d'autriche-hongrie, d'allemagne. Ces missions officielles d'études dans des musées étrangers lui furent confiées de 1873 à 1880. Mais les planches peuvent aussi comporter des copies de dessins dus à d'autres archéologues ou déjà publiés ( 45 ). Pour le fermeté du trait, la précision du rendu, les comparaisons tournent toujours à l'avantage de Charles Cournault ( 46 ). Lorsque Cournault effectue ses missions, la photographie s'est déjà mise au service de l'archéologie, mais plus pour représenter des sites ou des travaux de fouilles que des mobiliers. La technique du dessin à l'aquarelle rehaussée de gouache (surtout du blanc) a elle-même reçu ses lettres de noblesse depuis l'expédition d'egypte, comme le montrent des publications de grande envergure ( 4? ).

Fig. 3 Vases de la nécropole mérovingienne de Liverdun. Illustrations extraites des Mémoires de la Société d'archéologie lorraine 1871, avec la mention Ch. Cournault, del.

D'autre part, sous l'influence de l'angleterre, l'art de l'aquarelle a été promu en France tant pour la peinture de paysages que pour les " carnets de voyages" -comme le montre l'exemple de Cournault lui-même après Delacroix. Or, le premier maître de Charles Cournault, Nicolas-Toussaint Charlet a pu définir l'aquarelle comme une " sténographie ". Elle paraissait ainsi particulièrement bien adaptée à la reproduction d'objets saisis à l'occasion de visites dans les musées. Même si certains coloris ont certainement évolué ( 48 ), le travail de Charles Cournault rend parfaitement compte des valeurs et des jeux de lumière ; il excelle à restituer les bronzes fauves ou vert-de-grisés, les ors à l'éclat assourdi. Mais ces dix volumes ne sont pas moins représentatifs des orientations de la recherche en cette fin du XIX e siècle ; ils donnent la priorité à la "Préhistoire" -nous dirions aujourd'hui pré et protohistoire, du néolithique à la Tène- et à l'époque mérovingienne. Il s'agit alors de deux branches "nouvelles" de la discipline archéologique, particulièrement en honneur en Lorraine. Qu'il suffise de rappeler ici pour la première période le nom du docteur Marie-Gustave Bleicher ( 49 ) et ceux de Léopold Quintard et du comte Jules Beaupré pour la seconde ( 50 ). Par ailleurs, des découvertes spectaculaires (Trésor de Frouard, nécropoles de Pompey, de Liverdun, du Vieil-Aître, tumulus de Charmousey), stimulent le dynamisme des sociétés savantes et des érudits locaux. Des grandes découvertes européennes ne le font pas moins : c'est alors en effet que les fouilles dans la région de Salzbourg et au bord du lac de Neuchâtel révèlent les civilisations de l'age du Fer dites du Hallstatt (VIII e siècle à 450) et de la Tène (de 450 à l'ère chrétienne). Au contraire, sauf en Moselle annexée sous l'impulsion de l'éminent archéologue allemand Johann-Baptist Keune, les recherches gallo-romaines marquaient plutôt le pas. Or, dans son mémoire sur Les temps préromains en Lorraine, Ch. Cournault montre nettement sa volonté de replacer le matériel recueilli localement dans le contexte d'une vaste aire culturelle protohistorique, en dépassant la simple description. C'est d'autant plus indispensable que comme il le souligne justement, ces civilisations sont antérieures " à celles où l'on commence à écrire les faits ". Les curiosités scientifiques de Charles Cournault apparaissent donc pleinement à l'unisson du milieu nancéien de l'époque et le plus souvent d'une grande hauteur de vue. Aujourd'hui " l'album archéologique " frappe d'abord par sa volonté d'exhaustivité : alors que ni dans ses lettres à Quicherat ni dans sa communication à l'académie de Stanislas Charles Cournault n'avait jugé utile de décrire les cinquante-neuf couteaux de la nécropole de Liverdun, il ne juge pas inutile de consacrer une planche entière à vingt-huit d'entre eux ( 52 ). Il multiplie aussi les planches où s'alignent par catégories céramiques, rasoirs, fibules, faucilles à bouton,... Sans l'art du coloriste, ce ne

serait là que bien mornes alignements... Si Charles Cournault prend peut-être quelques libertés avec la couleur ( 53 ), la présentation des objets est faite avec une rigueur certaine. En effet, les lieux de conservation sont toujours indiqués (musée, collection privée, bibliothèque) ainsi que dans la mesure du possible les provenances ( 54 ) mais pas toujours les sites. Les objets sont le plus souvent représentés à l'identique, sinon l'échelle est portée. Charles Cournault fait aussi des coupes, mentionne les épaisseurs en divers points des lames d'épée par exemple, "restitue" par un trait simple les parties abîmées. Il déduit de l'observation d'une serpe galloromaine de Tarquimpol qu'elle a servi à un gaucher... Mais les légendes traduisent aussi parfois des préoccupations très modernes. Il arrive à l'auteur de donner des résultats d'analyses chimiques ( 55 ). Charles Cournault ajoute ainsi aux dessins des pointes de lance en bronze des stations du lac de Neuchâtel : cuivre (8,540), étain (2,08), arsenic (7,77), cobalt (2,40), plomb (0,69), nickel (0,65) soufre (0,45). Il s'attache également aux techniques de fabrication : tel casque de bronze a été "fondu d'une seule pièce puis la bombe a été repoussée aux "marteau", tandis que sur les plaques de verre des fibules "la couleur jaune était appliquée au pinceau après cuisson et salissait les doigts qui la touchaient" ( 56 ). Il rapproche telle poignée d'épée trouvée à Grand de telle autre représentée, sur une stèle du Donon, comparant objets de fouilles et objets figurés. Surtout, il n'hésite pas à dépasser les limites temporelles et spatiales en faisant appel à l'ethnographie. Il rapproche certains double-boutons de ceux qui étaient encore fabriqués à Quimperlé en 1831 et des couteaux de l'âge du bronze lui paraissent comparables à ceux qui restaient alors en usage à Ceylan ou en Auvergne. Il rappelle les superstitions qui restaient attachées encore au XVIII e siècle à des haches en "pierre de touche", merveilleuses contre la gravelle ( 5? ). Il emprunte son surnom ("Roi du bracelet de cuir ") à un gentilhomme d'andlau - qui essaya de soulever la population contre les Juifs en 1337-, pour proposer un usage fonctionnel des lourds bracelets métalliques, soit protections pour les travaux de force, soit armes de guerre. Si certains rapprochements ne manquent pas à juste titre de paraître abusifs, ils traduisent une réelle ouverture d'esprit sur la longue durée et sur une histoire " totale ". Par la masse des informations qu'il contient " l'album archéologique " est certes un outil documentaire de grande valeur ; c'est aussi un témoignage historiographique irremplaçable sur la problématique et les orientations de la recherche archéologique lorraine à la fin du XIX e siècle, mais c'est aussi un émouvant miroir d'une personnalité pour laquelle, il n'est pas interdit de le penser, la magie de la polychromie et de l'esthétique préhistorique ou mérovingienne a pu fournir une autre forme d'évasion à l'ardent collectionneur " orientaliste " que fut Charles Cournault.

NOTES 1. Voir par ex. l'ouvrage fondamental récent: Etienne Cournault, 1891-1948. Catalogue raisonné de Vœuvre gravée, Paris-Metz, 1991. Le catalogue a été rédigé par M.-A. Cournault. Toutefois, si Etienne Cournault n'a pu qu'être marqué par le cadre familial de la Douïra, l'influence directe de Charles sur son petit-fils a été limitée dans la mesure où Etienne n'avait que treize ans (il est né le 15 mars 1891) à la mort de son grand-père. Mais cette influence a été décrite de plus près dans Louis Sautier, "La Douïra, maison familiale des Cournault", Bulletin de la Société Lorraine des Amis du Musée et des Arts, 9, 1969, p. 1-5. 2. BENEZIT (E), comme le souligne la courte notice parue dans Dictionnaire critique et documentaire des peintres, sculptures, dessinât, et graveurs, nouvelle édition, t. 3, Paris, 1976, s. v. COURNAULT (Charles); "peintre, mort à Malzéville, près de Nancy, en 1904 à l'âge de 88 ans (Ec. Fr.)". Il est mieux connu pour ses "travaux archéologiques". Mais deux notices nécrologiques sont plus étoffées: Léopold QUINTARD, "Charles Cournault 1815-1904", Bulletin mensuel de la Société d'archéologie Lorraine, 1904, p. 1-3 et Charles de MEIXMORON de Dombasle, "Charles Cournault", Mémoires de VAcadémie de Stanislas, 1904-1905, p. 219-240. 3. La contribution scientifique la plus récente concernant Charles Cournault est due à Marianne BARRUCAND, "Charles Cournault, orientaliste lorrain du XIX e siècle", Le Pays Lorrain, 63, 1982, p. 25-38 avec de nombreuses illustrations. De " l'album archéologique " (qu'elle localise à tort in extenso au Cabinet des Estampes (p. 28, note 19) alors que sur les dix volumes huit seulement s'y trouvent, les deux autres étant au Musée des Antiquités Nationales), M. Barrucand écrit fort justement: "Cournault mit son art de peindre entièrement au service de ces objets infiniment modestes de pierre, de bronze, de fer, l'artiste s'effaçant ainsi totalement devant l'objet représenté ; la réserve, la modestie et aussi la rigueur de cette ultime étape de la carrière de peintre de Charles Cournault ont quelque chose d'émouvant ". 4. Bien qu'il n'ait pas appartenu à l'académie, le colonel Cournault a fait l'objet d'une notice sous la plume d'auguste SALMÓN "Etude sur M. le colonel Cournault", Mémoires de l'académie de Metz, 1869-1870, p. 193-231. Les détails que nous donnons ici sont empruntés à ce travail. 5. Il exposa en 1759 un portrait du maréchal de Clermont-Tonnerre. 6. Il devient bachelier en droit en 1836. 7. Il vécut de 1792 à 1845 et fut nommé professeur de dessin à l'ecole polytechnique en 1838. Ami de Géricault, il se rendit en Angleterre (1820-1822) auprès de Bonnington avec lequel Delacroix était également lié. On doit à Charlet un ensemble de "Réflexions et Conseils à un aquarelliste". Delacroix écrivit au sujet de Charlet : " un des plus grands artistes de notre pays dont personne plus que moi n'apprécie les incomparables mérites" (Lettre du 3 mars 1857 à Monsieur Henry de Saint-George). 8. Au Palais-Bourbon il est chargé de la décoration du salon du Roi en 1833 puis en 1844 de celle de la Bibliothèque.

9 Delacroix avait séjourné six mois au Maroc de janvier à juillet 1832 et avait rapporté de ce voyage sept albums d'aquarelles et de dessins. 10. Voir M. BARRUCAND (op. cit., supra, note 3) p. 29. Entre ces deux voyages se place en 1845 un périple en Italie (Venise, Florence, Rome, Naples) où Cournault rencontra Paul de Musset, frère aîné du poète. 11. On se reportera sur ce point à l'étude très documentée de M. BARRUCAND (op. cit., supra, note 3) p. 33-36. Depuis ce travail, la " Douïra " a été rachetée par la ville de Malzéville et nous remercions M.-F. JACOPS de ses précieuses indications à ce sujet. Cette maison est située près du pont de la Meurthe. 12. Cette collection a été recensée par M. BARRUCAND (op. cit., supra, note 3) p. 36-38 et comporte cinquante-cinq numéros. La contribution antérieure de L. JOHNSON, "La collection Charles Cournault", Bulletin de la Société d'histoire de Vart français, 1978, p. 240-262 ne faisait état que des œuvres de Delacroix et de Géricault. En effet, E. Delacroix avait couché Charles Cournault dans son testament dicté le 3 août 1863, dix jours avant sa mort : (Je lègue) à M. Cournault à Malzéville près Nancy mes deux coffres du Maroc et tous les objets venant d'alger, armes, vêtements, coussins, écharpes, etc.." dans Lettres de Eugène Delacroix publiées par Philippe BURTY, Paris, 1878, p. VII. Une lettre de Delacroix du 3 mars 1857 prouve que celui-ci, avec la permission de Ch. Cournault, avait fait des calques des dessins rapportés d'alger par le futur propriétaire de la Douïra. cf DELACROIX (Eugène), Correspondance générale... publ. par André JOUBIN (2 e éd.), 5 vol., Paris, (1935-1938), t. III, p. 375. 13. Adélaïde Hamberger était cousine du noble libéral Alexandre de Metz-Noblat. En 1902, Charles et Adélaïde Cournault célébrèrent leurs noces d'or dans l'église de Malzéville (le 29 décembre). 14. Toutefois, suivant l'exemple de son père qui avait consacré une étude aux "chaussées romaines", Charles Cournault avait adhéré dès 1844 à la "Société Archéologique et Historique de Langres ". 15. Pour l'analyse précise du milieu social on se reportera à Odette VOILLIARD dans Recherches sur une bourgeoisie urbaine : Nancy au XIX e siècle (1815-1871 ), 3 vol., Strasbourg, 1976, p. 20-53 et p. 249-278 ainsi qu'à l'ensemble du chapitre troisième : " Culture bourgeoise et vie politique ", p. 281-326. 16. Républicain modéré classé "tendance Cavaignac", Edouard Cournault, avocat, défendit les couleurs républicaines à l'occasion de divers scrutins législatifs sous le Second Empire. Il incarna l'opposition au baron Buquet, maire de Nancy pendant quinze ans, obligé de démissionner en 1869. Membre de la loge maçonnique " Saint-Jean de Jérusalem ", il a laissé quelques études philosophiques. (Exposition des principes actuels de la philosophie en 1843). Pour le discours de réception d'e. Cournault à l'académie de Stanislas, après son élection comme membre titulaire en 1859, voir Mémoires de l'académie de Stanislas, 1860, p. LXXV-XCIV. E. Cournault fournit de nombreuses contributions à l'organe de la décentralisation des provinces, VARIA, Morale, Politique, Littérature, de 1861 à 1863. 17. Servant dans la Garde Nationale, il avait participé à la répression des journées parisiennes de juin 1848.

18. Il en devint Vice-Président en 1864, Président éphémère (1887-1888) à la disparition d'henri Lepage (mort le 29-12-1887) car il était alors trop accaparé par ses déplacements dans les musées. 19. Pour cet aspect de la vie de Charles Cournault, on consultera l'étude de : Pierre MAROT, Le Musée Historique Lorrain, I. Les origines et le développement du Musée, Nancy, éd. du "Pays Lorrain", 1936 et "Le Musée historique Lorrain, œuvre de patriotisme, instrument de culture ", Le Pays Lorrain, p. 1-59. 20. Voir Christine PELTRE, VEcole de Metz (1834-1870), Metz-Nancy, 1988. Seul cependant Emile Knoepfler (1821-1879) avait été l'élève de Delacroix. Toutefois, il est assez symptômatique que dans son "Testament" Delacroix mentionne F. Maréchal et Th. Devilly aussitôt après Charles Cournault: "Je lègue à M. Maréchal de Metz plusieurs pastels d'études pour Sardanapale plus la belle copie de Géricault d'après les Géants de Paul Véronèse. Je lègue à M. Devilly à Metz une représentation ébauchée du Christ portant sa croix plus un dessin à son choix dans mes Etudes du Maroc". Dans "Lettres de Delacroix... " (op. cit., supra, note 13) p. VII. 21. La "Galerie des Beaux-Arts" ouvrit le 18 juin et présenta notamment des œuvres de Bartholdi, Carpeaux, Corot, Courbet, Delacroix, Devilly, Maréchal, Migette. 22. A. Migette publie en 1879 le catalogue du Musée de Metz. 23. Né à Obernai en 1860 Honoré Louis Umbricht fut l'élève de Bonnet. Il a représenté Cournault en costume oriental (voir op. cit. supra note 3) p. 26 et le Musée des Beaux-Arts de Nancy conserve de lui un "Homme allumant sa pipe ". 24. C'est C. de Meixmoron de Dombasle, lui-même ardent propagandiste du mouvement impressionniste à Nancy qui le rappelle (cf. op. cit. supra note 2) p. 231. Peintre lui-même, se rattachant à l'ecole de Barbizon et marqué par Monet dès 1873, ce petit-fils de Mathieu de Dombasle apparaissait encore en 1886 comme le seul impressionniste des Salons de Nancy. 25. Voir L. WIENER, Catalogue du Musée Lorrain de 1869 s. v. Charles Cournault. 26. Les "antiquités" furent placées dans le vestibule, les sculptures médiévales et modernes dans la galerie. 27. Voir P. MAROT, " Le Musée Historique Lorrain, I, Les origines ", p. 64. 28. L'empereur d'autriche François-Joseph fit un don de 100 000 F, cf. P. MAROT " Le Musée Historique Lorrain, œuvre... ", p. 14. 29. Le "Trésor de Frouard", caractéristique de l'âge du bronze comporte comme pièce maîtresse un tintinnabulum (pièce de harnachement des chevaux), similaire à celui retrouvé à Bouzonville et conservé au Musée de Metz. Tous deux datent du bronze final. Les 42 pièces furent acquises pour 200 francs. 30. Lucien Wiener seconda Charles Cournault à partir de 1869 et devint " conservateur en titre " en 1875 sur le même plan que Cournault. 31. "Entre la rive droite de la Moselle et la lisière de la forêt de Haye, à 200 m environ du chemin de la Croisette, au lieu-dit Châtillon ".

32. Dossier du Comité des Travaux Historiques. Hd 533. 33. "J'ai la promesse que tous les objets découverts seront offerts au Musée Lorrain et on m'écrit que le cercueil en pierre a été embarqué le 24 de ce mois sur le canal de la Marne au Rhin pour Nancy ". Ibid., p. 1. 34. " Grâce à la précaution que j'ai prise de classer ensemble tous les objets trouvés dans une même sépulture et d'indiquer la place qu'ils occupent sur le mort, les études archéologiques y gagneront des éléments d'appréciation qui leur ont souvent fait défaut. J'ai aussi pensé aux renseignements que pourraient fournir les ossements et surtout les crânes et j'en ai fait mettre de côté une grande quantité ". Ibid., p. 2-3. 35. Il soumet en effet un certain nombre de crânes au Doyen de la Faculté des sciences de Nancy et inclut les résultats des observations dans son rapport : "Sur neuf têtes, il en est cinq dont le crâne est franchement dolicocéphale. Vu de haut en bas, d'après la méthode de Blumenbach, il présente une ellipse arrondie à ses deux extrémités qui sont également développées. Cette forme de crâne est par conséquent différente de celle que j'ai observé sur les habitants de nos campagnes et notamment sur les crânes en nombre très considérable que j'ai étudiés dans les ossuaires de Pagny-sur-Moselle, d'avricourt, de Bettborn, et qui se sont aussi montrés en majorité dans le sous-sol de l'ancienne église Saint-Epvre. Ceux-ci sont brachycéphales, et, vus par-dessus, ils offrent une figure ovale à une extrémité antérieure. Une seule des neuf têtes recueillies dans les fouilles de Liverdun m'a, en effet, présenté ce dernier type crânien et les trois autres des types intermédiaires ". 36. p. 65-87 37. Fort heureusement, la plupart de ces magnifiques bijoux se trouvaient alors chez un lithographe (voir les illustrations de l'article) ce qui leur permit d'échapper au désastreux incendie du Palais Ducal. Alors qu'il s'attarde sur ces bijoux, Charles Cournault juge "inutile d'entrer ici dans une description minutieuse des cinquante-neuf couteaux trouvés". Pour une présentation récente du site de Liverdun et du matériel, voir le catalogue de l'exposition "La Lorraine mérovingienne". V e -VIII e siècle, Nancy, 1988, p. 92-93 et pl. XX et XXI. 38. Ligier-Richier, statuaire lorrain du XVI e siècle, Paris, Rouam, coll. "Les artistes célèbres " n 43. 39. Jean Lamour, serrurier du roi Stanislas, à Nancy, Paris, Rouam, Londres, Gilbert Wood, 1886, 32 p. ill. pl. portr. et un album de 14 planches, dans la collection "Les artistes célèbres", n 31. 40. Souci manifeste aussi dans des contributions plus spécialisées comme celle qu'il consacre aux "rouelles gauloises", en se référant à Dom Calmet, Victor Simon, de Widranges. Là où ce dernier voyait une "antique monnaie des gaulois ", Cournault voyait - à tort également - des " boutons de vêtement, des boucles des ceinturon ". 41. Charles Cournault a également présenté au Congrès des Sociétés Savantes de 1897 une communication sur " les peintures de l'église de Malzéville " et il avait aussi publié en 1877 un " Rapport sur les Antiquités gauloises de la Suisse et du Haut-Rhin". C'est d'ailleurs sous la direction de Charles Cournault que les fresques de l'église de Malzéville avaient été restituées en 1896.

42. Huit volumes sont conservés au Cabinet des Estampes de la Bibliothèque Nationale sous les cotes Gb 82 c à Gb 82 j. Fol. et deux autres à la Bibliothèque du Musée des Antiquités Nationales de Saint-Germain-en-Laye. En outre, un certain nombre de planches dues à Charles Cournault figurent dans la série "l'album de documentation par département" (Meurthe-et- Moselle) du Musée des Antiquités Nationales. D'autre part, en 1887 le conservateur du Musée Lorrain avait envoyé à l'académie de Stanislas un mémoire portant sur Les temps préromains en Lorraine qu'illustraient une centaine de planches des découvertes antérieures à 1882. Ce travail est mentionné dans la notice nécrologique rédigée par C. de Meixmoron de Dombasle (p. 236). Il est conservé à la Bibliothèque Municipale de Nancy [Manuscrits, cote 1826 (1181)] et comporte 94 feuillets reliés et 91 planches. Toutes datées de 1888 ces planches, moins "achevées" que celles de "l'album" laissent mieux voir les étapes du travail du dessinateur et du peintre. Plusieurs d'entre elles sont consacrées aux antiquités romaines du Donon, d'escles, de Grand. La planche LXXIII comporte même un cliché photographique de monuments de Soulosse, mais il n'est pas dû à Charles Cournault. Contrairement à ce qu'affirme L. Quintard dans sa notice (p. 47) les deux gros volumes conservés au Musée des Antiquités Nationales ne semblent pas avoir été réunis le " 30 avril 1862 " car ils comportent des planches bien postérieures à cette date. S'agit-il de deux autres volumes? Ce travail est mentionné dans le notice nécrologique due à C. de Meixmoron de Dombasle (p. 236). Nous assurons de notre gratitude Madame Beaumont-Maillet, Conservateur du Cabinet des Estampes et Madame Bouron, Conservateur de la Bibliothèque de Saint-Germain pour leur obligeance et leur disponibilité. 43. Soit Ch. Cournault, soit Ch. Ct. 44. Les dates vont de 1886 à 1881. Léopold Quintard se méprend donc lorsqu'il indique la donation de deux volumes au Musée de Saint-Germain-en-Laye en 1862 ou alors il s'agit de planches qui n'appartiennent pas aux volumes répertoriés sous le nom d'album Charles Cournault. 45. Dessins de l'archéologue meusien Félix Liénard par exemple. 46. D'autant que Ch. Cournault se soucie des plus menus détails significatifs. 47. Voir la célèbre Description de l'egypte parue de 1809 à 1822 et le catalogue de l'exposition "souvenirs de voyage", Paris, Musée du Louvre, 1992. Le volume Mémoires d'egypte (Catalogue d'exposition, Strasbourg, 1990) donne maints exemples d'aquarelles préparatoires à des planches archéologiques (p. 56-57 par ex.). 48. Des vases à inscriptions barbotinées blanches, typiques de la céramique de Trêves, apparaissent dans Y Album d'un brun fauve au lieu du noir profond tout-à-fait caractéristique. 49. Voir N. CANET, " La préhistoire en Lorraine à l'aube du XX e siècle ", dans La Lorraine d'avant l'histoire, catalogue d'exposition, Metz, 1986, p. 25-31. 50. Voir l'étude historiographique de J. GUILLAUME, " Histoire de l'archéologie mérovingienne en Lorraine " dans Lorraine mérovingienne, catalogue d'exposition, Nancy, 1988, p. 23-29.

51. Sur le premier site une grosse partie des fouilles a été menée entre 1846 et 1863 et sur le second à partir de 1857. 52. Cabinet des Estampes, Gb 82 j. La fiche signalétique porte "Antiquités conservées dans les musées d'augsbourg, Berlin, Budapest, Colmar, Londres, Zurich, Nuremberg, Ratisbonne " mais douze planches représentent des objets conservés au Musée Lorrain. Onze d'entre elles sont consacrées aux fouilles de Liverdun. 53. On peut certes comparer la photographie couleur de la fibule quadrilobée en or de Liverdun (Lorraine mérovingienne, p. XX) et le dessin aquarelle de Charles Cournault (Gb 82 j.) mais quel est le document le plus " fiable "? 54. Une planche peinte en 1879 présente six objets (lame en fer, boucles en bronze...). Sous le n 6 on peut lire : " Fibule en argent ornée de petites plaques en verre rouge cloisonnées. Trouvée dans une sépulture mérovingienne du cimetière de Pompey (Pompania villa) à 11 km du N-O de Nancy" (Cabinet des Estampes - Gb 82 j.). 55. Musée des Antiquités Nationales, "Album Cournault", 4, p. 33 et Bibliothèque Municipale de Nancy, ms Hd 533, p. 23. 56. A propos du casque découvert à Breuvannes (Haute-Marne) (ill. n 2), le 26 avril 1882 et conservé à Saint-Germain-en-Laye. C'est un "casque à peigne" du bronze final comparable à celui du Musée Lorrain, retrouvé à Blainville-sur-l'Eau. 57. "Album Cournault", Vol. 1 p. 5 et p. 15 "hache de néphrite devenue amulette trouvée dans une sépulture mérovingienne ".