LES ENJEUX ENVIRONNEMENTAUX ASSOCIÉS AU DRAGAGE D ENTRETIEN DE LA VOIE NAVIGABLE ET DE ZONES PORTUAIRES DU FLEUVE SAINT-LAURENT



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Transcription:

OLIVIER BOUCHARD LES ENJEUX ENVIRONNEMENTAUX ASSOCIÉS AU DRAGAGE D ENTRETIEN DE LA VOIE NAVIGABLE ET DE ZONES PORTUAIRES DU FLEUVE SAINT-LAURENT Essai présenté à M. Jacques Bérubé dans le cadre du programme de maîtrise professionnelle en biogéosciences de l environnement pour l obtention du grade de maître ès sciences (M.Sc.) Biologiste CJB Environnement Inc. Firme conseil en environnement au Canada et à l étranger 2014 Olivier Bouchard, 2014

Résumé Le dragage d entretien des chenaux de navigation et des zones portuaires engendre plusieurs impacts environnementaux qui sont plus ou moins importants selon les conditions du milieu. Ces perturbations peuvent principalement affecter la qualité de l eau, la faune et les habitats aquatiques à proximité des opérations de dragage, la remise en suspension et la dispersion de sédiments contaminés dans la colonne d eau et les prises d eau résidentielles et commerciales. Les objectifs de cet essai sont de dresser un portrait des principaux travaux de dragage réalisés sur le Saint-Laurent, d identifier les enjeux environnementaux associés à ces opérations et d évaluer l efficacité des mesures de contrôle et d atténuation appliquées lors de ces projets. La région d étude englobe le chenal de navigation du Saint-Laurent, situé entre Montréal et Cap-Gribane, les ports de Montréal, de Trois-Rivières et de Bécancour de même que le chenal maritime à Grande- Entrée aux Îles-de-la-Madeleine. Cette analyse des activités de dragage a été réalisée à partir d une revue de littérature de plusieurs études d impact et de suivis environnementaux, dans le but de faire ressortir les éléments sensibles de chacun des milieux et les mesures d atténuation appliquées dans les zones à l étude. De plus, une recherche de documentation récente sur la valorisation des sédiments dragués a été effectuée afin de démontrer l utilisation potentielle de ces matériaux à des fins bénéfiques pour les zones à l étude et dans d autres régions du monde. Les résultats de cette analyse montrent que chacune des interventions de dragage étudiées est aux prises avec au moins un impact négatif sur l environnement. En effet, la mise en dépôt des sédiments dragués dans la voie navigable cause une détérioration au niveau de l habitat du poisson. Les perturbations retrouvées au port de Montréal et de Trois-Rivières agissent quant à elles au niveau de la remise en suspension et de la dispersion de sédiments contaminés lors du dragage et de la mise en dépôt. Le dragage au port de Bécancour comporte des risques de colmatage de la prise d eau de la centrale nucléaire Gentilly-2. Les parcs d aquicultures situés près du chenal maritime de Grande-Entrée aux Îles-de-la-Madeleine peuvent être affectés par l augmentation de la turbidité et des matières en suspension ainsi que par la présence de contaminants dans les sédiments dragués, soit directement, soit par le biais des processus de bioaccumulation dans ces organismes. ii

Table des matières Résumé... ii Table des matières... iii Liste des Tableaux... v Liste des Figures... vi 1.0 Introduction... 1 1.1 Objectif principal... 5 1.2 Objectifs spécifiques... 5 2.0 Région d étude... 6 2.1 Origine de la vallée du Saint-Laurent... 7 2.2 Dynamique hydrologique et glaciel du fleuve Saint-Laurent... 7 2.2.1 Masses d'eau du Saint-Laurent... 7 2.2.2 Marée... 8 2.2.3 Vitesse des courants... 9 2.2.4 Débit... 11 2.2.5 Couvert glaciel... 12 2.3 Processus d érosion et de sédimentation... 13 2.4 Concentrations de MES retrouvées dans le fleuve Saint-Laurent... 15 3.0 Méthodologie... 17 4.0 Résultats... 18 4.1 Dragage sur la voie navigable du fleuve Saint-Laurent... 18 4.1.1 Volumes de sédiments dragués dans la voie navigable du Saint-Laurent... 18 4.1.2 Type de drague par secteur... 19 4.1.2.1 Drague mécanique... 19 4.1.2.2 Drague hydraulique... 19 4.1.3 Granulométrie, par secteur, de la voie navigable du Saint-Laurent... 20 4.1.3.1 Secteur du lac St-Pierre... 20 4.1.3.2 Secteur de Bécancour Batiscan et Traverse Cap-Santé... 20 4.1.3.3 Secteur Traverse du Nord... 21 4.1.4 Concentration de matières en suspension (MES) dans la zone d influence de la drague dans le secteur Traverse du Nord... 21 4.1.5 Enjeux environnementaux liés au dragage d entretien de la voie navigable du Saint-Laurent... 22 4.1.6 Mesures d atténuation et de contrôle appliquées dans la voie navigable... 23 4.2 Dragage d entretien au port de Montréal... 24 4.2.1 Description des activités de dragage... 24 4.2.2 Description des éléments du milieu... 24 4.2.3 Enjeux environnementaux au port de Montréal... 25 4.2.3.1 Suivi de la turbidité et de la qualité chimique de l eau lors de la mise en dépôt... 25 4.2.3.2 Suivi de la turbidité et de la qualité chimique de l eau lors du dragage.. 26 4.2.4 Mesures d atténuation et de contrôle appliquées au port de Montréal... 27 4.3 Dragage d entretien au port de Trois-Rivières... 28 4.3.1 Description des activités de dragage... 28 4.3.2 Description des éléments du milieu... 29 4.3.3 Enjeux environnementaux au port de Trois-Rivières... 29 iii

4.3.4 Mesures d atténuation et de contrôle appliquées au port de Trois-Rivières... 30 4.4 Dragage d entretien au port de Bécancour... 31 4.4.1 Description des activités de dragage... 31 4.4.2 Description des éléments du milieu... 31 4.4.3 Enjeux environnementaux au port de Bécancour... 32 4.4.3.1 Modes de disposition des déblais de dragage considérés au port de Bécancour... 32 4.4.3.2 Faisabilité des deux options retenues... 33 4.4.3.3 Centrale nucléaire de Gentilly... 34 4.4.4 Mesures d atténuation et de contrôle appliquées au port de Bécancour... 35 4.5 Dragage d entretien du chenal maritime de Mines Seleine à Grande-Entrée, Îles-dela-Madeleine... 35 4.5.1 Description des activités de dragage... 35 4.5.2 Description des éléments du milieu... 36 4.5.3 Enjeux environnementaux liés au dragage d'entretien du chenal de Mines Seleine à Grande-Entrée, Îles-de-la-Madeleine... 38 4.5.4 Mesures d atténuation et de contrôle appliquées dans le chenal maritime de Mines Seleine à Grande-Entrée, Îles-de-la-Madeleine... 39 5.0 Discussion... 41 5.1 Synthèse des informations liées aux différentes activités de dragage à l'étude... 41 5.1.1 Impacts du dragage des sédiments sur la qualité de l eau... 44 5.1.2 Impacts de la mise en dépôt des sédiments sur la qualité de l eau... 44 5.1.3 Impacts du dragage sur la faune et les habitats aquatiques... 45 5.1.4 Impacts de la mise en dépôt sur la faune et les habitats aquatiques... 46 5.1.5 Impacts du dragage sur la qualité chimique de l eau... 47 5.1.6 Impacts de la mise en dépôt sur la qualité chimique de l eau... 48 5.1.7 Impacts des activités de dragage sur les prises d eau commerciales et résidentielles... 48 5.2 Lacunes et recommandations pouvant être envisagées dans le futur... 49 5.2.1 Voie navigable... 49 5.2.2 Port de Montréal... 50 5.2.3 Port de Trois-Rivières... 51 5.2.4 Port de Bécancour... 51 5.2.5 Chenal maritime de Mines Seleine à Grande-Entrée, Îles-de-la-Madeleine... 52 5.3 Valorisation des sédiments... 53 5.3.1 Valorisation des sédiments dragués dans la voie navigable et dans les zones portuaires du Saint-Laurent... 53 5.3.2 Valorisation des sédiments en milieu terrestre... 56 5.3.3 Valorisation des sédiments en milieu aquatique... 57 6.0 Conclusion... 60 Bibliographie... 63 Annexe... 66 Annexe 1 Volumes annuels de sédiments dragués dans la voie navigable du Saint- Laurent... 66 Annexe 2 Résultats des analyses granulométriques effectués dans les secteurs compris dans la voie navigable du Saint-Laurent... 69 iv

Liste des Tableaux Tableau 1 : Marnage des marées sur le fleuve Saint-Laurent de Trois-Rivières jusqu à l île d Orléans... 9 Tableau 2 : Vitesses moyennes des courants près du fond dans le chenal et les battures latérales au flot et au jusant en aval de Bécancour... 10 Tableau 3 : Vitesse moyenne des courants sur le fleuve Saint-Laurent du port de Montréal jusqu'à l'île d'orléans... 11 Tableau 4 : Modules annuels du fleuve Saint-Laurent et de ses principaux affluents entre Montréal et Deschaillons... 12 Tableau 5 : Concentrations naturelles de MES (mg/l) dans les échantillons d eau récoltés à différentes profondeurs en périphérie de la zone d influence de la drague à succion autoporteuse à élinde traînante... 16 Tableau 6 : Concentrations de MES (mg/l) des échantillons d eau récoltés à différentes profondeurs dans la zone d influence d une drague à succion autoporteuse à élinde traînante... 22 Tableau 7 : Accumulations de sédiments dans le chenal de la Grande-Entrée... 37 Tableau 8 : Synthèse des principaux enjeux environnementaux associés au dragage d entretien et à la mise en dépôt retrouvés dans la voie navigable et dans les zones portuaires du Saint-Laurent... 42 Tableau 9 : Nature des matériaux et statistiques volumétriques des dragages d entretien annuels de la voie navigable.... 66 Tableau 10 : Granulométrie des matériaux dans les secteurs de dragage du lac St-Pierre et les aires de mise en dépôt du lac St-Pierre et de St-Pierre-les-Becquets.... 69 Tableau 11 : Granulométrie des matériaux dans les secteurs de dragage de Bécancour à Batiscan et de la Traverse Cap-Santé ainsi que dans les sites de mise en dépôt des secteurs St-Pierre-les-Becquets et de Donnaconna.... 70 Tableau 12 : Granulométrie des matériaux dans les secteurs de dragage et les sites de mise en dépôt de la Traverse du Nord.... 71 v

Liste des Figures Figure 1 : Localisation du fleuve Saint-Laurent ainsi que des zones portuaires à l'étude.. 6 Figure 2 : Origine des différentes masses d eau du fleuve Saint-Laurent... 8 Figure 3 : Les différents types de sédiments de surface récents et anciens du Saint- Laurent, du lac Saint-Pierre jusqu à Portneuf... 15 vi

1.0 Introduction De tout temps, les opérations de dragage ont été associées étroitement à la navigation et aux installations portuaires. Plus particulièrement, le dragage d'entretien est une opération nécessaire dans le chenal de navigation du fleuve Saint-Laurent ainsi que dans les ports commerciaux ou les marinas, surtout durant les périodes d'étiages, et qui consiste à retirer la couche de sédiments récemment déposée sur le fond afin de permettre le passage sécuritaire des navires ou des bateaux (Bekari et al., 2010). Une fois ces sédiments enlevés, ils sont soit immergés suffisamment loin au large des côtes ou stockés à terre (CETMEF, 2008). En plus des activités d entretien, deux autres types de dragage peuvent être entrepris dans le Saint-Laurent : les dragages d approfondissement du seuil de navigation et les dragages visant l aménagement de nouvelles aires portuaires (Bekari et al., 2010 ; Geode, 2012). Dans le Saint-Laurent, on distingue principalement deux grands groupes d'équipements de dragage, soit les dragues mécaniques et les dragues hydrauliques (École centrale de Nantes, 2010). Le dragage mécanique se fait à l'aide d'une pelle mécanique posée sur une barge ou d'une benne preneuse opérée par une grue montée sur un ponton et qui dépose les déblais sur des chalands ou directement à terre. Ce type d'équipement est stationnaire lors de l'opération. Les matériaux déposés dans le chaland déplacent l'eau qui y est présente et en causent la surverse. Quant au dragage hydraulique, il consiste à extraire les sédiments à l'aide d'une pompe et d'un tuyau qui aspire le lit du plan d'eau. L'opération de pompage hydraulique se fait soit en état stationnaire (drague suceuse simple ou à désagrégateur) ou en marche très lente (drague suceuse porteuse). De plus, deux autres types de dragage sont utilisés ailleurs dans le monde : le dragage hydrodynamique, qui consiste à injecter de l'eau ou de l'air sous pression dans les sédiments pour les mettre en suspension et les déplacer en utilisant la force des courants, et le dragage pneumatique qui fonctionne par aspiration à l aide d un système à air comprimé (École centrale de Nantes, 2010). Par la suite, une fois les sédiments retirés du fond, trois méthodes de mise en dépôt sont disponibles, soit le rejet en eau libre, le dépôt en berge et le dépôt en milieu terrestre (Rieussec, 2008). Le premier mode de gestion consiste à transférer les sédiments du lieu 1

d'excavation à un site de rejet ou de confinement en milieu aquatique. Les sites de rejet en eau libre peuvent être de type non-dispersif, où les sédiments restent en place suite à leur rejet ou de type dispersif, lorsque les sédiments rejetés sont pris en charge par les courants et remis en suspension dans la colonne d'eau. Le rejet en milieu aquatique est le mode le plus utilisé au Québec. La gestion en berge repose quant à elle sur le dépôt des déblais de dragage près de la côte ou le long du littoral, dans la zone qui est affectée par les variations du niveau de l'eau ou les marées. Enfin, le dépôt en milieu terrestre consiste à ramener sur la terre ferme les sédiments dragués avant de les gérer adéquatement (Rieussec, 2008). Il est à noter que lorsque des sédiments sont gérés en milieu terrestre, ils sont considérés comme des sols et doivent être soumis à la politique de gestion des sols et de réhabilitation des terrains contaminés ou au règlement sur l'enfouissement des sols contaminés (Rieussec, 2008). De plus, il s'agit de la seule option permettant de ne laisser aucun impact résiduel à long terme sur le milieu aquatique. Le choix de la méthode la plus appropriée pour un secteur en particulier est déterminé en tenant compte des contraintes spécifiques du milieu récepteur et des caractéristiques physico-chimiques des sédiments dragués. Les sédiments qui se retrouvent dans les fleuves ou tout autre plan d'eau d'importance proviennent essentiellement des matériaux qui sont arrachés aux bassins versants sous l'action de la pluie et de l'écoulement de surface, de l'érosion des roches et des berges ainsi que du lessivage des sols, et qui terminent leur course dans les parties les plus calmes ou les plus profondes des cours d'eau (Bekari et al., 2010 ; Rieussec, 2008). Ces matériaux sont essentiellement composés d argiles, de limons, de sables ainsi que de particules organiques et minérales d origine naturelle ou anthropique, issues de la décomposition de la matière organique animale et végétale ou des rejets d eaux usées urbains et industriels (Maes, 2006). Plusieurs paramètres sont à considérer avant d'entreprendre des opérations de dragage et une bonne connaissance des éléments caractérisant le secteur à draguer est indispensable. Parmi ces éléments, on compte entre autres les vitesses des courants, les effets des marées, les processus d'érosion et de sédimentation ainsi que la granulométrie et la qualité des matériaux à draguer. De plus, le dragage d entretien et la mise en dépôt des 2

déblais en milieu aquatique posent des enjeux environnementaux importants sur plusieurs dimensions du milieu. En effet, ces activités vont principalement toucher la qualité de l eau en faisant augmenter la turbidité et la concentration des matières en suspension (MES) dans l eau aux sites d excavation et de dépôt des sédiments (CJB, 1994). De plus, le dragage et la mise en dépôt peuvent disperser des contaminants, comme des hydrocarbures ou des métaux lourds, qui présentent des risques pour le milieu aquatique. Ces polluants proviennent principalement des activités anthropiques et ils sont le plus souvent soit adsorbés sur les particules fines qui finiront par sédimenter au fond du plan d'eau, soit dissous dans l eau interstitielle (Maes, 2006). Une caractérisation des sédiments à draguer doit donc être effectuée avant chaque dragage, afin de s assurer qu aucun dépassement des critères de qualité en vigueur ne survienne et ainsi être en mesure de déterminer la méthode de dragage et de gestion des déblais la plus appropriée pour le milieu (Babut, 2001 ; Maes, 2006 ; Proulhac, 2011). Il faut noter que les critères de qualité actuellement en vigueur au Québec départagent les sédiments en différentes classes en fonction des concentrations mesurées pour une trentaine de substances chimiques. Utilisés conjointement avec les teneurs naturelles, ces critères constituent un outil de dépistage qui permet d évaluer le degré de contamination des sédiments et, notamment, de gérer adéquatement les matériaux dragués (EC et MDDEP, 2007). Les différents critères font référence à un degré croissant de risques pour la vie aquatique : la concentration d effets rares (CER), la concentration seuil produisant un effet (CSE), la concentration d effets occasionnels (CEO), la concentration produisant un effet probable (CEP) et la concentration d effets fréquents (CEF). Les activités de dragage et de mise en dépôt en eau libre peuvent aussi affecter l habitat d espèces aquatiques (aire d alimentation et de reproduction), entre autres par l ensevelissement ou la perturbation de la faune benthique et des sites de fraie des poissons, en exposant les organismes aquatiques à des substances toxiques ou en changeant, de façon temporaire ou permanente, les caractéristiques de ces habitats (CJB, 1994). De plus, une augmentation de la turbidité de l eau peut nuire à la faune aquatique au niveau de la respiration et de la chasse. En effet, les particules en suspension peuvent obstruer les branchies des poissons, diminuant ainsi leur capacité d'absorption d oxygène. Les MES peuvent également réduire la visibilité des poissons et compromettre la 3

prédation (Vachon, 2003 ; Maes, 2006). Par ailleurs, des processus de bioconcentration et de bioaccumulation peuvent s opérer dans la chaîne trophique en présence de polluants, notamment sur les espèces se retrouvant dans le haut de la chaîne et celles qui se nourrissent par filtration (Vachon, 2003 ; Maes, 2006). Enfin, l activité des équipements de dragage et de mise en dépôt peut produire des perturbations au niveau des prises d eau résidentielles et commerciales (CJB, 1994). En effet, l excavation et le dépôt des matériaux dragués peuvent dégrader temporairement la qualité de l eau jusqu à colmater certaines prises d eau ou rendre l eau impropre à la consommation (CJB, 1994). Les déblais de dragage peuvent néanmoins être revalorisés afin d éliminer les impacts résiduels à long terme sur les milieux aquatiques et terrestres. En effet, chacune des méthodes de gestion présente des impacts qui peuvent être plus ou moins importants sur le milieu récepteur et une avenue pouvant être envisagée afin d atténuer ces impacts est l utilisation des sédiments de dragage à des fins bénéfiques (Raymond, 2008). Certains de ces sédiments de dragage peuvent donc être utilisés pour faire la restauration ou la création d habitats (marais, îles) ou comme matériaux de construction, par exemple pour fabriquer du béton, de la brique ou de la céramique (Cloutier, 2009). Cependant, des contraintes techniques liées au transport ou à l assèchement de ces déblais, la viabilité économique du projet ainsi que le respect de plusieurs critères environnementaux doivent être pris en compte avant de pouvoir utiliser ces sédiments. Cet essai vise donc à faire ressortir les enjeux environnementaux associés aux principales activités de dragage sur le Saint-Laurent, plus particulièrement au port de Montréal, de Trois-Rivières, de Bécancour, dans le chenal maritime de Mines Seleine situé à Grande- Entrée aux Îles-de-la-Madeleine et dans le chenal de navigation du fleuve Saint-Laurent ainsi que les mesures de contrôle et d atténuation utilisées afin de diminuer les impacts sur le milieu aquatique. De plus, il a comme objectifs de formuler des recommandations ainsi que de revoir les avenues de valorisation des déblais de dragage qui pourraient être envisagées dans le but de réduire au minimum l'empreinte de cette opération sur l'environnement. 4

1.1 Objectif principal L'objectif principal de l'essai est d'évaluer dans quelle mesure les activités de dragage dans le Saint-Laurent sont réalisées, en tenant compte des spécificités du milieu naturel et de manière à diminuer au maximum l empreinte de cette opération sur le milieu aquatique. 1.2 Objectifs spécifiques Les objectifs spécifiques de l'essai sont énumérés ci-dessous : 1. Dresser un portrait des principales activités de dragage sur le fleuve Saint-Laurent : o Sites des principaux travaux de dragage ; o Volumes dragués ; o Équipement de dragage utilisé et méthode de gestion des déblais 2. Dresser un portrait des impacts sur l environnement liés aux activités de dragage dans le Saint-Laurent : o Décrire les enjeux environnementaux des activités de dragage et de mise en dépôt dans la voie navigable et dans les zones portuaires ; Effets sur la qualité physique et chimique de l eau Effets sur la faune et les habitats aquatiques et marins Effets sur les prises d eau o Évaluer les mesures d atténuation et de contrôle qui sont appliquées dans le cadre des activités de dragage dans le Saint-Laurent ; o Identifier les lacunes et les voies de valorisation des sédiments qui peuvent être envisagées dans le futur 5

2.0 Région d étude La région d étude porte sur l ensemble des principales zones de dragage actuelles du fleuve Saint-Laurent et non sur une région en particulier. Le Saint-Laurent s'étend sur une distance d'environ 1200 kilomètres et se divise en deux sections ; le tronçon fluvial de Kingston en Ontario jusqu'au lac Saint-Pierre, et l'estuaire, débutant au lac Saint-Pierre et s étendant jusqu'à la pointe ouest de l'île d'anticosti (ec.gc.ca). L estuaire est divisé en fonction de l influence des marées et de la salinité de l'eau, soit l estuaire fluvial, le moyen estuaire et l estuaire maritime (planstlaurent.qc.ca). La figure 1 présente les sections du fleuve Saint-Laurent ainsi que les zones portuaires à l'étude. Figure 1 : Localisation du fleuve Saint-Laurent ainsi que des zones portuaires à l'étude 6

2.1 Origine de la vallée du Saint-Laurent Des recherches sur l'histoire du Quaternaire de cette région ont permis de déterminer que l'action des glaciers a joué un grand rôle dans la formation de la vallée du Saint-Laurent. En effet, le retrait du glacier Laurentien, datant d'environ 12 500 ans BP, ainsi que la dépression sur la lithosphère qu'il imposait sous son poids, ont donné naissance à la mer de Champlain. Ce bassin glaciomarin est responsable du dépôt d'environ 30 à 50 mètres d'argile, et ce sont ces sédiments qui constituent majoritairement le lit et les rives du Saint-Laurent actuellement (Rondeau et al., 2000). La rivière, qui est maintenant un fleuve, a quant à elle été formée dans un système de drainage, il y a environ 5 000 ans, par l'action des différents mouvements du lit rocheux associée aux variations du relèvement isostatique du sol (Rondeau et al., 2000). Le Saint-Laurent coule présentement dans la faille de Logan ainsi que dans la formation géologique appelée <<plate-forme du Saint-Laurent>> (planstlaurent.qc.ca). 2.2 Dynamique hydrologique et glaciel du fleuve Saint-Laurent 2.2.1 Masses d'eau du Saint-Laurent Le fleuve Saint-Laurent compte cinq masses d'eau principales, aux caractéristiques physico-chimiques naturelles différentes; soit les eaux des Grands Lacs qui se retrouvent en amont et en aval de Montréal, les eaux de la rivière des Outaouais, les eaux de mélange de la rivière des Outaouais et l'assomption (mélange Outaouais - rive nord), les eaux de mélange des tributaires de la rive sud et des Grands Lacs (mélange Grands Lacs - rive sud), les eaux de la région de Québec ainsi que les eaux de tous les principaux tributaires du Saint-Laurent (ec.gc.ca). Dans la région de Montréal, les Grands Lacs contribuent à environ 80 % des apports en eau tandis que la rivière des Outaouais compte pour 16 %. La figure 2 illustre la provenance des différentes masses d'eau du fleuve, de Cornwall jusqu'à la ville de Québec. 7

Figure 2 : Origine des différentes masses d eau du fleuve Saint-Laurent Source : Environnement Canada, 2013 2.2.2 Marée Les marées présentes dans le fleuve Saint-Laurent sont de type semi-diurne, c est-à-dire qu il y a deux marées hautes et deux marées basses par jour. Des marées de type semidiurne mixte, avec des hauteurs et des durées inégales, sont quant à elles retrouvées dans le secteur de Bécancour. Le flot est le courant qui est dirigé vers l amont du fleuve et qui est généré par la marée montante tandis que le jusant est le courant dirigé vers l aval du fleuve et qui est créé par la marée descendante. L'étale est le moment où le courant devient nul, durant une période variable selon le lieu, et se produit entre les deux phases de courant de marée. Le phénomène des marées est absent de Montréal au lac St-Pierre et devient de plus en plus important en aval de ce secteur. Toutefois, les périodes d étiages et de crues peuvent faire varier le niveau d eau de cette partie du Saint-Laurent entre -0,1 m et +2,5 m au-dessus du zéro des cartes marines. En aval du lac St-Pierre, le marnage des marées, qui est la différence entre le niveau de pleine mer (marée haute) et de basse mer (marée basse), fait varier ce niveau de 0,3 mètre dans la région de Trois- Rivières et d environ 6 mètres près de Québec. Les informations présentées au tableau 1 montrent les variations du marnage en aval de Trois-Rivières. 8

Tableau 1 : Marnage des marées sur le fleuve Saint-Laurent de Trois-Rivières jusqu à l île d Orléans Sites d enregistrement des marées Marnage marée moyenne (m) Marnage grande marée (m) Trois-Rivières 0,2 0,3 Bécancour 0,6 0,8 Champlain 0,7 0,9 Batiscan 0,9 1,2 Grondines 2,1 2,8 Cap à la roche 1,6 2,1 Portneuf 3,5 4,5 Neuville 3,7 4,9 Québec (Lauzon) 4,4 5,9 Saint-François (I.O.) 4,5 6,6 Source : MPO, 2012 2.2.3 Vitesse des courants La force des courants sur le fleuve est grandement influencée par les niveaux d'eau, les marées ainsi que les infrastructures portuaires et varie considérablement durant l'année. Dans le secteur de Montréal, la vitesse des courants peut atteindre de 2 à 3 m/s, plus précisément entre l'île Sainte-Hélène et l'île de Montréal. Pour sa part, le courant dans la zone du fleuve comprise entre Varennes et Sorel atteint des vitesses d'environ 1 m/s. La force du courant varie de 0,5 à 1 m/s dans le secteur du lac Saint-Pierre et s'élève jusqu'à 1,5 m/s à Trois-Rivières. Les courants de la zone Bécancour - Batiscan sont quant à eux influencés par le débit du fleuve ainsi que par les marées semi-diurnes. De plus, le port de Bécancour semble également avoir un effet sur le régime hydraulique de cette partie du fleuve en ralentissant le courant et en favorisant la formation de hauts-fonds dans la voie navigable. L'écoulement du fleuve dans la région de Bécancour - Batiscan varie donc entre 1,5 et 2 m/s. Une fois le port dépassé, le flot de la marée diminue considérablement la vitesse du courant, le faisant passer de 1 m/s à 0,2 m/s. Par la suite, dans le secteur de Portneuf jusqu'à l'île d'orléans, l atlas des courants de marée de Pêches et Océans Canada (MPO) indique que le courant est en moyenne de 2 m/s. De plus, sous l'action du débit fluvial et des marées, la force des courants à la hauteur de Portneuf peut fluctuer entre 0 et 3 m/s. L'influence des marées dans cette région est si importante qu'elle peut provoquer un inversement du courant lors du flot. Néanmoins, la vitesse des courants est en moyenne de 1,5 m/s lors du flot et de 3 m/s lors du jusant. Pour la partie de Québec 9

(Lauzon), la force du courant est en moyenne de 1,5 m/s au flot et de 2 m/s au jusant. En ce qui concerne le secteur de la pointe est de l'île d'orléans, où l'on retrouve les plus fortes marées semi-diurnes de tout l'estuaire du Saint-Laurent, la vitesse des courants varie entre 0 et 2,0 m/s. Dans la zone de la pointe Saint-Jean de l'île d'orléans, les courants sont environ de 1 m/s à mi-marée tandis que ceux vis-à-vis du banc du Cap Brûlé sont de 1,5 m/s et ceux retrouvés aux battures de la Traverse Nord sont de 1 m/s. À Saint-François de l île d Orléans, la force maximale des courants est de 1,5 m/s et dans le secteur de Sault-au-Cochon, les courants de flot sont de l ordre de 1,3 à 2 m/s et ceux du jusant varient de 1,5 à 2 m/s. Les valeurs du tableau 2 présentent les vitesses moyennes des courants près du fond lors des différentes phases de la marée en aval de Bécancour en période d étiage et de crue. Les informations du tableau 3 montrent les vitesses de Montréal à l'île d'orléans. Tableau 2 : Vitesses moyennes des courants près du fond dans le chenal et les battures latérales au flot et au jusant en aval de Bécancour Flot Jusant Chenal (m/s) Battures (m/s) Chenal (m/s) Battures (m/s) Avril 0,6 0,4 < 1,0 0,4 Septembre 0,6 Source : CJB Environnement Inc., 2013-0,1 Rive Sud 0,8 Rive Nord 1,0 0,4 10

Tableau 3 : Vitesse moyenne des courants sur le fleuve Saint-Laurent du port de Montréal jusqu'à l'île d'orléans Secteur Phase de la marée Vitesse du courant (m/s) Port de Montréal --- 2 à 3 Varennes --- 1 à 1,2 Sorel --- 0,6 à 1 Lac St-Pierre --- 0,5 à 1 Trois-Rivières --- 1,5 Bécancour --- 2 Batiscan --- 1,5 Deschaillons --- 2,0 Portneuf Flot 1,5 Jusant 0,3 Neuville Flot 1,5 Jusant 1,5 Québec (Lauzon) Flot 1,5 Jusant 2 Saint-Jean (I.O.) Flot 1,5 Jusant 2 Saint-François (I.O.) Flot 1,5 Jusant 1,5 Source : Pêches et Océans Canada, 2012 2.2.4 Débit Les données du tableau 4 présentent le débit du fleuve Saint-Laurent et de ses principaux affluents. Aucun débit n est fourni en aval du lac Saint-Pierre à cause de l influence des marées, qui peuvent le faire changer de plusieurs milliers de mètres cubes par seconde par rapport à la moyenne. Le débit moyen du Saint-Laurent à Montréal et à Sorel est d environ 10 000 m 3 /s. À Trois-Rivières, il est évalué à 11 500 m 3 /s tandis qu à Québec, il s élève à 12 600 m 3 /s. Les débits les plus importants des principaux tributaires du Saint-Laurent sont ceux de la rivière Saint-Maurice, la rivière Richelieu ainsi que la rivière Saint-François et sont de 694, 402 et 219 m 3 /s respectivement. Tous les autres cours d eau ont des débits d environ 100 m 3 /s ou moins. 11

Tableau 4 : Modules annuels du fleuve Saint-Laurent et de ses principaux affluents entre Montréal et Deschaillons Module (débit Bassin Versant* Période de Cours d eau Site (km 2 moyen annuel en ) m 3 mesure /s) Saint-Laurent Aval de Montréal** 923 000 9 930 1960-90 Saint-Laurent Sorel (amont de Richelieu) ** 940 000 10 180 1960-90 Richelieu Exutoire 23 720 402 1937-92 Yamaska Exutoire 4 784 116 1983-92 Saint-François Exutoire 10 228 219 1925-92 Nicolet Exutoire 3 399 77 1966-92 Saint-Maurice Exutoire 43 200 694 1924-92 Bécancour Exutoire 2 620 64 1970-92 Batiscan Exutoire 4 686 103 1931-92 Saint-Anne Exutoire 2 692 70 1919-92 * : Le débit à certains sites provient d une séparation du courant et les superficies du bassin versant applicables à ces sites sont alors impossibles à déterminer. ** : Les stations à l aval de Montréal et à Sorel sont des stations virtuelles. Les débits montrés ont été reconstitués en ajoutant à la station LaSalle les débits annuels moyens de tous les tributaires. Source : CJB Environnement Inc., 2013 2.2.5 Couvert glaciel Le régime des glaces sur le fleuve Saint-Laurent a grandement été étudié ces dernières décennies et a démontré la très grande variabilité interannuelle du couvert de glace dans l'estuaire. Plusieurs paramètres influencent le type, la dispersion, la formation et la dérive des glaces, comme la température de l'air, la vitesse et la direction des vents (variables météorologiques) ainsi que la vitesse et la direction des courants de surface et la convection dans la couche de surface (variables océanographiques) (Centre Saint- Laurent, 2005). Le couvert de glace est généralement présent du début décembre jusqu'à la mi-avril dans le secteur du Saint-Laurent entre Montréal et Cap-Gribane. De plus, durant cette période, cette glace protège les côtes du fleuve de l'action des vagues, jouant donc un rôle important dans la dynamique sédimentaire de ce secteur. Néanmoins, lors du dégel au printemps, la glace se brise en morceaux et ceux-ci servent de véhicules pour le transport des sédiments de l'estuaire vers le golfe (Centre Saint-Laurent, 2005). 12

2.3 Processus d érosion et de sédimentation Plusieurs sources de matières fines en suspension (MES) contribuent à la charge sédimentaire du fleuve Saint-Laurent. Le lac Ontario génère environ 3 % de la charge totale mesurée à la ville de Québec, soit presque 200 000 t par année. En effet, les eaux du lac Ontario sont très peu chargées en matières en suspension, car il agit comme un immense bassin de sédimentation (Rondeau et al., 2000). Les tributaires de la rive nord sont responsables d'environ 13 % de l'apport sédimentaire tandis que ceux de la rive sud comptent pour 19 %, soit respectivement 904 000 et 1 281 000 t par année à Québec. Ceci est principalement dû au type de roche qui caractérise chacune des rives. Effectivement, les roches cristallines de la rive nord, provenant de l'ère du Précambrien, sont moins sujettes à l'érosion que les dépôts sédimentaires du Quaternaire, situés sur la rive sud (Rondeau et al., 2000). De plus, le côté nord du Saint-Laurent est généralement couvert par la forêt, limitant ainsi l'érosion, tandis que le côté sud est essentiellement occupé par l'agriculture, ce qui tend au contraire à augmenter l'érosion des sols (Rondeau et al., 2000). Finalement, l'érosion des rives et du lit du fleuve Saint-Laurent est la principale source de sédiments avec 65 % de la charge, soit 4 516 000 t pour un total d'environ 6 900 000 t de particules fines (silt et argile) en suspension qui transitent à Québec chaque année (ec.gc.ca). Le transport de sédiments dans le fleuve Saint-Laurent se fait principalement lors de période de crue et est au plus bas en conditions d étiage. Ces importantes quantités de matières en suspension finissent en grande majorité par se déposer vers les profondeurs de l estuaire marin. Toutefois, dans la partie fluviale du Saint-Laurent, ces particules sont susceptibles de sédimenter de façon momentanée ou permanente dans les zones calmes comme les battures et les élargissements du fleuve ainsi que dans les zones portuaires et certains chenaux de navigation. En plus des sédiments fins, le Saint-Laurent transporte aussi une grande quantité de sables qui proviennent essentiellement de ses principaux affluents et de l érosion de certaines de ses berges. Ces sables se déplacent par charriage ou par saltation, principalement dans les zones profondes du fleuve, comme dans les limites du chenal de navigation, où ils se présentent sous forme de dunes qui se déforment et se déplacent 13

constamment de l amont vers l aval. Donc, en général, les limons et les argiles vont voyager essentiellement par suspension tandis que les sables moyens et grossiers, ainsi que les graviers, vont plutôt se déplacer par saltation. Quant aux sables fins, ils se disperseront par suspension dans la région de Montréal et auront tendance à voyager de plus en plus par saltation à mesure que l on se déplace vers l aval du Saint-Laurent. Le lac Saint-Pierre reçoit un apport sédimentaire interannuel de 3 300 000 t/an et celui de Trois-Rivières est de 4 800 000 t/an. Un peu plus loin, dans le secteur de Champlain, la charge sédimentaire reçue est de 5 200 000 t/an et atteint 5 800 000 t/an dans la région de Deschambault. La proportion de l apport sédimentaire total causée par le charriage est estimée à 2 % pour tous ces secteurs. Le phénomène de sédimentation plus élevé retrouvé dans la partie de la Traverse du Nord, près de l île d Orléans, est quant à lui dû à l action conjointe des marées et du courant, des vagues, des vents et du charriage de sédiments. La figure 3 illustre les différents types de sédiments de surface récents et anciens qui composent le fleuve aujourd hui, du secteur du lac Saint-Pierre jusqu'à la région de Portneuf. Elle permet également de mettre en évidence les différentes zones d érosion (transport) et de sédimentation (accumulation temporaire et permanente) ainsi que les zones de dunes sableuses qui se retrouvent dans le chenal de navigation. Ce sont tous ces phénomènes de transport et d accumulation qui sont à l origine des travaux de dragage qui visent à assurer une profondeur appropriée pour le passage sécuritaire des navires dans la voie navigable et les ports du Saint-Laurent. 14

Figure 3 : Les différents types de sédiments de surface récents et anciens du Saint-Laurent, du lac Saint-Pierre jusqu à Portneuf Source : Pêches et Océans Canada, 2012 2.4 Concentrations de MES retrouvées dans le fleuve Saint-Laurent La concentration naturelle de MES dans le Saint-Laurent est très variable selon les endroits, les conditions météorologiques et les périodes de l année. Des valeurs moyennes de MES de 9 mg/l sont retrouvées dans la région de Montréal, de 13 mg/l dans le secteur des îles de Contrecœur et de 11 mg/l à Sorel. Par la suite, à Trois-Rivières, des teneurs de MES de 13 mg/l sont observées, tandis qu'à Bécancour et Neuville, des valeurs moyennes de 12 mg/l et 13 mg/l ont été mesurées respectivement (EC et MDDEP, 2013). La concentration de MES est de 18 mg/l à la hauteur de Québec. Pour sa part, le secteur Traverse Nord correspond l endroit où la concentration de MES augmente considérablement, en raison de la rencontre des eaux douces et des eaux salées du fleuve 15

ainsi que sous l'influence des marées (EC et MDDEP, 2013). En effet, des valeurs de bruit de fond variant entre 25 et 70 mg/l peuvent être observées entre l île d Orléans et Cap Gribane, pouvant parfois atteindre des teneurs de 200 et même de 400 mg/l. Ces valeurs sont des moyennes à long terme et ne représentent pas nécessairement la réalité des concentrations de MES à court terme ou lors d événements ponctuels, par exemple au printemps ou lors de tempêtes, où ces concentrations peuvent dépasser 1000 mg/l. À titre d exemple, les données du tableau 5 présentent les concentrations naturelles de MES recueillies lors d un suivi de la qualité de l eau effectué pendant des opérations de dragage dans le secteur de la Traverse Nord. Les résultats démontrent des concentrations naturelles moyennes de MES relativement élevées : en moyenne, les valeurs de MES sont de 64 mg/l à la surface, 78 mg/l à la mi-profondeur et de 144 mg/l à un mètre du fond du Saint-Laurent. De plus, les informations présentées dans le tableau 5 démontre la très grande variabilité des teneurs en MES des échantillons d eau pour toutes les profondeurs, allant de valeurs aussi faibles que 25 mg/l et pouvant presque atteindre 700 mg/l. Il faut noter que, pour des raisons de sécurité, aucun échantillon n a été récolté par mauvais temps, alors que ces événements peuvent avoir une grande influence sur les concentrations de MES dans l eau du fleuve. Tableau 5 : Concentrations naturelles de MES (mg/l) dans les échantillons d eau récoltés à différentes profondeurs en périphérie de la zone d influence de la drague à succion autoporteuse à élinde traînante Moyenne Écarttype Minimum Maximum Surface 64 51 28 315 47 Mi- Profondeur Nombre d échantillons 78 48 31 187 17 Fond 144 111 25 677 47 Source : CJB Environnement Inc., 2013 16

3.0 Méthodologie Afin de rencontrer les objectifs spécifiques de la présente étude, les travaux ont été réalisés en deux volets : (1) l'acquisition d'informations et de données et (2) l'analyse de cette information et la formulation de recommandations. Le premier volet a consisté en une revue de certaines études d impacts sur l environnement existantes portant sur les principaux projets de dragage effectués dans le Saint-Laurent, soient ceux exécutés dans la voie navigable du Saint-Laurent et dans les zones portuaires de Montréal, de Trois-Rivières et de Bécancour ainsi que ceux réalisés dans le chenal maritime à Grande Entrée aux Îles-de-la-Madeleine. Pour chacune de ces interventions, une description des éléments considérés lors des opérations de dragage et de mise en dépôt a été réalisée. Par la suite, les enjeux environnementaux présentés en introduction ont été repris afin de faire ressortir les éléments sensibles de chacun des milieux où ces travaux ont été effectués. Les mesures de contrôle et d atténuation appliquées lors de ces projets ont également été passées en revue et des recommandations ont été formulées dans le but d améliorer leur efficacité et de réduire au minimum les impacts du dragage sur l environnement. Finalement, une recherche de documentation récente sur la valorisation des sédiments a été réalisée afin de déterminer les avantages et les contraintes liés à cette opération et d identifier les domaines potentiels pour lesquels l utilisation des déblais de dragage pourrait être envisagée et bénéfique. Il faut noter que, tout au long de la réalisation de l'essai, une revue de la documentation scientifique pertinente a été réalisée pour compléter la vue d'ensemble des activités et des impacts du dragage dans le Saint-Laurent. Dans le cadre du deuxième volet de l'essai, plusieurs paramètres ont été utilisés pour décrire les enjeux environnementaux des différentes interventions, par exemple le volume et la nature des sédiments à draguer, la faune et les habitats aquatiques où le dragage et la mise en dépôt ont été accomplis, le niveau de contamination des sédiments et leurs effets potentiels sur l écosystème aquatique ainsi que la méthode de gestion des déblais. Ces informations, une fois recueillies, ont été intégrées sous forme de tableau dans un but de synthèse. 17

4.0 Résultats 4.1 Dragage sur la voie navigable du fleuve Saint-Laurent 4.1.1 Volumes de sédiments dragués dans la voie navigable du Saint-Laurent À l origine, le fleuve Saint-Laurent était relativement plat et peu profond, ce qui rendait la navigation commerciale plutôt difficile. Les premiers travaux de dragage entre Montréal et Québec ont eu lieu de 1844 à 1851 afin de créer un chenal de navigation, dont les dimensions ont augmenté au fil du temps pour ainsi permettre le passage de navires de plus en plus imposants (Villeneuve, 2001). Le chenal navigable du Saint- Laurent s étend de Montréal jusqu à Cap-Gribane, situé à 20 km à l est de l île d Orléans. Il a une largeur de 245 mètres et une profondeur minimale de 11,3 mètres entre Montréal et Deschaillons et de 10,7 mètres en aval de ce secteur (Villeneuve, 2001). Les résultats présentés au tableau 9 de l annexe 1 montrent que plusieurs secteurs de la voie navigable du fleuve Saint-Laurent ont été dragués annuellement, de 1985 à aujourd hui. En effet, certaines zones du fleuve sont plus propices à la sédimentation que d autres, soit dû à leur morphologie et leur bathymétrie naturelle, soit à leurs conditions hydrodynamiques respectives ou simplement en raison d un apport en sédiment plus considérable. À l'inverse, certains secteurs du Saint-Laurent ont un taux de sédimentation très faible et peu de dragage y est effectué. Globalement, ce sont des sables qui sont délogés du fond de la voie navigable lors des dragages d entretien. Cependant, certains travaux, notamment ceux réalisés en 1998 et 1999, visaient plutôt l approfondissement du chenal et ce sont alors en bonne partie les argiles postglaciaires qui composent le lit du Saint- Laurent qui ont été retirées. Depuis 1985, le secteur de Montréal à Contrecœur n a subi qu un seul dragage qui a été accompli en 1999, et ce afin de déloger plus de 50 000 m 3 de matériaux pour approfondir le chenal. Le secteur de Sorel a quant à lui subi un seul dragage de plus de 30 000 m 3 en 1988 et plusieurs petits de moins de 5 000 m 3. La zone du lac Saint-Pierre, propice à l accumulation de sables, a connu des épisodes de dragage de plus de 100 000 m 3 de sédiments en 1985, pour finalement se stabiliser à un volume moyen d environ 10 000 à 15 000 m 3 ces dernières années. Le secteur Batiscan à Bécancour est séparé en deux 18

parties, soit de Trois-Rivières à Bécancour et de Champlain à Deschaillons. Les volumes dragués dans le premier secteur se situent tous entre 10 000 et 35 000 m 3 de sédiments. Le deuxième secteur s est vu délogé des volumes moyens de 10 000 m 3 et n était pas visité toutes les années. Le secteur Cap-santé a pour sa part subi des travaux de dragage de l ordre de 10 000 m 3 et moins, sauf en 1985 et 1986. Le secteur de la Traverse Nord de l île d Orléans est la zone qui demande le plus d activités de dragage sur la voie navigable du Saint-Laurent. En effet, des volumes de plus de 50 000 m 3 de sables sont dragués chaque année depuis 1985. Donc, d après les résultats obtenus, des volumes allant de 75 000 à 250 000 m 3 de sédiments ont été retirés chaque année dans la voie navigable du fleuve Saint-Laurent depuis 1985. 4.1.2 Type de drague par secteur 4.1.2.1 Drague mécanique La drague à benne preneuse est obligatoirement utilisée pour déloger les hauts-fonds épars entre Montréal et St-Antoine, car ces hauts-fonds sont généralement constitués de grosses roches, de débris grossiers, de sables et de graviers ainsi que d'argiles dures, qui ne peuvent être enlevés par la drague à succion. Pour des raisons de sécurité, la Garde Côtière du Canada exige que les hauts-fonds épars dans le secteur de Deschaillons soient délogés à l aide de la drague à benne preneuse, retenue en place avec des poteaux de stabilisation, étant donné la nature des sédiments à draguer ainsi que le fort courant. Les sédiments enlevés sont alors transportés et déposés dans les sites de mise en dépôt à l aide de marie-salope tandis que les débris sont extirpés de l eau et gérés à terre. 4.1.2.2 Drague hydraulique La drague à succion autoporteuse à élindes traînantes, à fond ouvrant ou à charnières de pont, est quant à elle utilisée pour retirer les hauts-fonds sédimentaires, majoritairement constitués de sables et de graviers. Toutefois, ce type de drague demande un tirant d eau de 5 mètres et plus afin de déposer les sédiments dragués. Seuls quelques sites de mise en 19

dépôt peuvent accueillir cet équipement, soit ceux de St-Pierre-les-Becquets, de Donnacona et ceux de la Traverse du Nord. Le secteur de la Traverse du Nord nécessite obligatoirement ce genre d équipement pour effectuer le dragage en raison des conditions de vagues et de la forte circulation maritime. 4.1.3 Granulométrie, par secteur, de la voie navigable du Saint-Laurent Les sites de dragage et de mise en dépôt en milieu aquatique de la voie navigable du fleuve Saint-Laurent ont été divisés en trois parties, soit le secteur du lac St-Pierre, le secteur Bécancour Cap-Santé et le secteur Traverse du Nord. Le substrat de chacun de ces sites, pour chacun des secteurs, a été analysé afin de connaître leur composition en caillou, en gravier, en sable, en silt et en argile pour ainsi déterminer si les matériaux dragués peuvent être déposés au site de mise en dépôt. En effet, le substrat dragué doit être d une composition assez semblable à celle du site de dépôt pour ne pas altérer la nature granulométrique des fonds. Les tableaux contenant les résultats des analyses granulométriques se retrouvent à l'annexe 2. 4.1.3.1 Secteur du lac St-Pierre L analyse granulométrique des prélèvements des sites de dragage a démontré que le principal substrat était le sable et qu il représentait une proportion de 97 à 100 % dans tous les échantillons. De plus, les sites de mise en dépôt du lac St-Pierre et de St-Pierreles-Becquets ont été caractérisés dans ce secteur. L analyse des échantillons a démontré la présence dominante de sable pour les deux sites, avec des teneurs en silt et en argile qui varient entre les échantillons. 4.1.3.2 Secteur de Bécancour Batiscan et Traverse Cap-Santé Les sites de dragage de ce secteur ont été séparés en deux tronçons, soit Bécancour Batiscan et Traverse Cap-Santé. L analyse des échantillons de ces secteurs a dévoilé une 20

présence dominante de sable (99 à 100%) tandis que les prélèvements effectués dans les sites de mise en dépôt de St-Pierre-Les-Becquets et de Donnacona présentaient une constitution similaire aux sites de dragage, sauf pour un échantillon. 4.1.3.3 Secteur Traverse du Nord Pour ce secteur, les prélèvements au site de dragage étaient tous composés majoritairement de sable (97 à 100%). Quant au site de mise en dépôt situé à Sault-au- Cochon, il présentait une granulométrie principalement constituée de sable, avec des teneurs plus élevées en silt et en argile que les sites de dragage. 4.1.4 Concentration de matières en suspension (MES) dans la zone d influence de la drague dans le secteur Traverse du Nord Peu de travaux ont été réalisés ces dernières années afin d évaluer le niveau de turbidité engendré par le dragage d entretien sur la voie navigable du Saint-Laurent. Le principal suivi a été effectué dans la Traverse Nord, près de l île d Orléans, et il a démontré qu en général les valeurs de MES dans la zone d influence et dans celle en périphérie de la zone d influence (concentration naturelle) étaient très similaires, et ce pour toutes les profondeurs. Toutefois, certaines valeurs maximales en surface et en profondeur dépassaient de façon significative les valeurs de bruit de fond, augmentant de plus de 400 mg/l à la surface et de près de 300 mg/l au fond. Selon l étude, ces valeurs élevées étaient néanmoins peu fréquentes puisque seulement 1,2 % (2/165) des échantillons de surface et 3 % (4/124) de ceux prélevés en profondeur dépassaient les concentrations naturelles maximales. Les résultats du suivi de la Traverse du Nord démontrent donc que la concentration de MES augmente considérablement aux points d impact de la drague, c est-à-dire à la surface de l eau lors de la surverse du chaland et en profondeur, causée par l aspiration de l élinde. Les concentrations de MES restent néanmoins à l'intérieur de la variabilité naturelle des teneurs ambiantes pour ce secteur, c est pourquoi aucun autre suivi n a été réalisé, étant donné que les concentrations de MES générées par le dragage 21

dans le secteur Traverse Nord ne causent aucun impact significatif. Les valeurs présentées au tableau 6 montrent les concentrations de MES dans la zone d influence de la drague à succion autoporteuse à élinde traînante. Tableau 6 : Concentrations de MES (mg/l) des échantillons d eau récoltés à différentes profondeurs dans la zone d influence d une drague à succion autoporteuse à élinde traînante Moyenne Écart-type Minimum Maximum Nombre d échantillons Surface 79 85 28 751 165 Mi- Profondeur 87 48 27 199 25 Fond 171 168 28 912 124 Source : CJB Environnement Inc., 2013 4.1.5 Enjeux environnementaux liés au dragage d entretien de la voie navigable du Saint-Laurent Le principal enjeu environnemental soulevé par les travaux de dragage d'entretien dans la voie navigable du Saint-Laurent est l impact de la mise en dépôt des sédiments dragués sur l habitat du poisson. En effet, la mise en place de grandes quantités de sables aux sites de mise en dépôt peut potentiellement affecter la faune aquatique. La Division de la gestion de l habitat du poisson (DGHP) estime que le dépôt des sédiments de dragage dans une section d un site de dépôt située au lac St-Pierre, jamais utilisé auparavant, cause la dégradation d une aire d alimentation et d abri estivale (zone profonde) pour l esturgeon jaune, le doré et le grand brochet, en modifiant la granulométrie du substrat ainsi que la profondeur du site de rejet en eau libre. À noter que l esturgeon jaune est une espèce désignée menacée par la COSEPAC au niveau fédéral et susceptible d être désignée menacée ou vulnérable au niveau provincial. Il est donc désormais nécessaire de posséder une autorisation en vertu de la Loi sur les Pêches pour disposer des déblais de dragage dans ce site, et la GCC s engage à effectuer un projet de compensation pour qu aucune perte nette d habitat du poisson, au niveau de la superficie, ne soit encourue. Par ailleurs, les résultats d une autre étude menée par la DGHP du MPO sur le site de mise en dépôt de l île Madame, situé dans le secteur de la Traverse Nord, ont démontré que la mise en dépôt contribue aux effets cumulatifs des autres activités dans ce secteur, 22