Sémiotique des Médias. Le genre du documentaire audiovisuel



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Transcription:

1 Sémiotique des Médias. Le genre du documentaire audiovisuel Cours I : La description d un document audiovisuel Séminaire de DESS à l'institut National des Langues et Civilisations Orientales (INaLCO) Paris, 2001-2002

2 Sommaire 1) INTRODUCTION...3 2) QU'EST-CE QUE C'EST, LA DESCRIPTION?...4 3) LE SIGNE AUDIOVISUEL...10 4) SIGNE AUDIOVISUEL ET RÉALITÉ...14 5) LA DESCRIPTION DU SIGNE AUDIOVISUEL...16 6) LA DESCRIPTION DU CONTEXTE DU SIGNE AUDIOVISUEL...24

3 1) Introduction Dans ce cours, seront traités les points principaux suivants : - a) qu'est-ce que c'est une description en général, pourquoi procède-t-on à la description d'un objet, d'un signe sémiotique et peut-on distinguer entre diférents types de description? - b) qu'est-ce que c'est un signe audiovisuel et y peut-on distinguer entre différents types de signes audiovisuels? - c) qu'est-ce que c'est la description d'un signe audiovisuel, à quoi sert-elle et y peut-on distinguer entre différents types de descriptions? d) c) la description de la description «théorie», «langage de description»

4 2) Qu'est-ce que c'est, la description? Très généralement parlant, la description, est : - un acte interprétatif - et/ou son résultat (i.e. une interprétation d'un objet - dans notre cas, d'un signe, d'un document audiovisuel) Note : cf. à ce propos, l'usage de la métaphore visuelle : une description, c'est une "vision", une "vue" sur un objet, un signe audiovisuel (dans notre cas) Une description au sens d'un acte interprétatif, d'une interprétation, présupose toujours : - un point de vue (un point à partir duquel un "agent" interprète, décrit, "voit" l'objet) - un intérêt (un besoin, un objectif), c'est-à-dire une certaine intention qui oriente la description Note : la description peut être comprise comme une réponse (plus ou moins appropriée, plus ou moins réussie, ) à une question qui est une demande d'information (i.e. la conséquence d'un manque d'informations auquel la description est censée de rémedier)

5 Exemple : La description, l'interprétation d'une photo de famille - - Point de vue historique : telle ou telle date (dans la vie familiale) - Point de vue anecdotique : tel ou tel événement dans la vie familiale - Point de vue poétique : la représentation du genre (de la "scène") en question - Point de vue esthétique : la composition des éléments de la photo - Point de vue technique/technologique : les procédures de réalisation utilisées - Point de vue physique : le support de la photo - Etc. Cet exemple possède un caractère général, i.e. tout signe (en principe) et notamment tout texte (au sens linguistique du terme) est susceptible de "lectures multiples" plus ou moins divergentes, plus ou moins complémentaires, etc. Nous y reviendrons plus loin. Nous avons dit qu'une description présuppose un point de vue et un intérêt. Le point de vue fait partie d'une certaine culture, c'est-à-dire: - D'un système de connaissances et de valeurs - Partagé par un actant collectif (un groupe social, un groupe professionnel, une institution, une classe sociale, etc.) En d'autres termes, la description d'un objet quelconque et d'un signe audiovisuel en particulier révèle toujours une certaine connaissance dudit objet (signe audiovisuel).

6 Exemple : C'est ainsi qu'on parle d'une "connaissance historique" d'un document, d'une "connaissance de bibliothécaire ou de documentaliste" du même document, d'une "connaissance linguistique", etc. Chaque type de connaissances : - est donc partagées par un actant collectif (les documentalistes, les historiens, les linguistes, ), - développent sa propre vision de l'objet (du document) qui ne peut pas (toujours) être réduite à, absorbée par une autre vision concurrente ou complémentaire, - évoluent selon leur dynamique (i.e. les connaissances sont de nature historique : les connaissances historiques à l'aide desquelles on interprètent un document évoluent, se transforment; ) Une des problématiques principales est justement de comprendre comment différentes visions, différentes "vues" sur un objet (un document) s'articulent les unes par rapport aux autres et quelles sont leurs fonctions et tâches dans un contexte donné. L'intérêt qui est obligatoirement présupposé par une description montre que celle-ci est toujours produite dans un certain contexte social (aussi : contexte pragmatique) et donc servant à - des acteurs, i.e. une institution - des activités et tâches plus moins précisement circonscrites

7 Ainsi, une description possède une certaine valeur - non pas dans l'absolu mais rélative à un contexte social, un contexte pragmatique donné. Sa valeur, c'est sa préférence au détriment d'autres descriptions. L'exemple de la photo de la famille montre bien cet aspect de la valeur relative d'une description. Dans le contexte d'une recherche sur le genre "photo de famille", une description physique (i.e. du support) ou encore une description esthétique possédera probablement une valeur inférieure à une description proposant une vue, une vision sur la représentation du genre en question dans la photo, sur l'évolution du dit genre, sur sa spécificité dans la photo en question, etc. Par contre, dans un contexte professionel, par exemple de la restauration de (vieilles) photos de famille, une description physique (du support, du grammage, etc) possédera une valeur très probablement plus élevée qu'une description sur les avatars du genre "photo de famille". Nous avons donc vue qu'il peut exister toute une variété, toute une diversité de descriptions, de "vue" sur un objet en général et un document audiovisuel en particulier. Nous retenons ici une distinction importante d'un point de vue méthodologique et aussi théorique qui est celle entre : - Les descriptions dites "naturelles", "spontanées", "intuitives", etc - Et les descriptions contrôlées par une théorie, un système de connaissances explicites

8 Les descriptions "naturelles" ou "spontanées" sont des actes que nous produisons chaque jour et à toute occasion dans la mésure où nous classons, comparons, évaluons des objets, personnes, situations, etc. en nous référant à nos expériences, aux traditions, à la "normalité", etc. Les descriptions dites "contrôlées" reposent, par contre, sur des théories et des connaissances explicites (plus ou moins explicites) d'un objet (d'une classe d'objets). Par exemple, une description d'une photo de famille peut être un acte d'interprétation et d'évaluation "spontanée", "naturel" mais aussi réposer sur une théorie du genre en question, de ses origines, de son évolution, etc. Dans le deuxième cas, on parle d'une description "contrôlée" par ladite théorie. Une description "contrôlée" veut donc simplement dire qu'elle se justifie par rapport à une théorie. Cela signifie : - une théorie contrôlée peut ête évaluée par rapport à sa prise en compte de la théorie dans son acte d'interprétation - mais : une description contrôlée n'est pas obligatoirement plus vraie, plus véridique qu'une description "spontanée" (tout dépend, en fait, de la théorie à laquelle elle réfère)

9 La "méta-description" Question : comment rendre compte de descriptions divergentes, concurrentes, complémentaires. = problématique de la "méta-description" (de la description des descriptions) = problématique par excellence pour toute approche en gestion de l information et/ou de connaissance - existent-ils des critères qui sous-tendent différentes description ou interprétations d'un même signe et si oui, quels sont-ce ces critères?

10 3) Le signe audiovisuel Après avoir discuté d'une manière très générale la problématique de la description (d'un objet, d'un signe, ), voyons maintenant ce qu'est un signe audiovisuel? Au sens large du terme, un signe audiovisuel est tout signal pouvant être perçu par nos deux sens : - l'ouïe et - la vision. Est un signe audiovisuel pas seulement le film ou la video (représentants prototypiques de cette catégorie de signes) mais aussi, par exemple, nos impressions audio-visuelles qui nous fournissent une image de notre environnement (externe ou interne) Au sens plus étroit du terme, un signe audiovisuel est un certain type d'artefacts (de produits) dont se servent les hommes, qui ont été développés par les hommes pour communiquer, voir conserver des informations, des messages. On parle ici de signes textuels, de textes au sens sémiotique (et pas étroitement linguistique) du terme. Exemples de signe textuel : - L'écrit, l'imprimé, etc. - Le dessin, la peinture, les graphies - Le discours - La musique, le bruitage - L'image statique et animée - Le film et la vidéo

11 Dans ce séminaire, nous nous occupons surtout du signe appelé "film" er de celui appelé "vidéo". Voici deux spécificités de cette catégorie de signes audiovisuels: - Forme d'expression syncrétique (i.e. coordination de plusieurs médias - image, parole, musique, bruitage, écrit, dessin, -) pour organiser et véhiculer un contenu, une information - Medium temporel et linéaire (i.e. l'information, le contenu se constitue au fur et à mesure, dans le temps ) Il existe une multiplicité de types de productions filmiques différents qui se distinguent selon leur appartenance à un genre audiovisuel. Parmi les genres audiovisuels les plus connus on peut citer ceux qui constituent : - l'offre télévisuelle (fiction, magazine, documentaire, jeux, ) - et plus particulièrement l'histoire du cinéma (différents types de fiction tels que le western, la comédie, le film d'action, le SF, etc). Mais la catégorie "film" et "vidéo" comporte encore toute une variété d'autres genres dont certains sont d'une très grande importance par exemple pour : - La communication professionnelle (les films de "motivation", les films "corporate", etc.) - L'enseignement et la recherche (i.e. le tournage de conférences, de séminaires, de tables rondes, de colloques, etc.) - Le transfert de connaissances et la vulgarisation scientifique (les expérimentations, ) - La constitution des mémoires dites organisationnelles (i.e. des institutions mais aussi de groupes sociaux tels que la famille, les clubs et associations, ),

12 Dans ce séminaire, nous nous occupons surtout des documentaires audiovisuels qui sont des produits commerciaux (i.e. vendues à et diffusées par des chaînes de télévision). Par contre, nous ne prenons pas en considération, par exemple, les productions scientifiques ou encore les enregistrements d'événements, etc ni encore les productions de fiction ou de divertissement. Il existe toute une panoplie d'intérêts pour mieux comprendre cette catégorie. Exemples : Recherche d'une meilleure compréhension de l'offre télévisuelle (de sa production, de son organisation, de sa "mise à jour" ou encore de son impact sur un public, ); Recherche d'une meilleure maîtrise de la reprise de l'offre télévisuelle traditionnelle dans des nouveaux contextes d'applications comme, c'est le cas pour la tv sur le web, pour la tv dite personnalisée, etc., pour la production de nouveaux produits et/ou services d'information (par exemple : intégration de scènes documentaires dans un offre de voyage; intégration de scènes documentaires dans des produits pédagogiques; intégration de scènes documentaires dans un service d'information sur un pays, une période historique, ) Plus particulièrement : spécification de nouvelles offres à thème télévisuelles à thème, voir des offres à thèmes plus souples, plus adaptés aux besoins et désirs de publics etc. Travaux et recherche sur l'indexation et la description du "contenu" dans le cadre des NTIC (portails, bibliothèques numériques, mémoires organisationnelles, )

13 Recherches sur la stéréotypie, les traditions et avatars ou encore les dimensions idéologiques, dans les médias et, plus généralement, dans celle dans l'industrie de l'information Développement de méthodes et guides de "scénarisation", de "production" (dans la phase de la spécification s'un projet, ) de documentaires audiovisuels traditionnels ou interactifs Note: Il est important de comprendre que le documentaire audiovisuel ne constiue qu'un cas particulier d'une problématique plus générale qu'est celle de savoir décrire et "manipuler" des objets, des signes audiovisuels (voir textuels, etc.). Donc : - Les différents intérêts identifiés ci-dessus pour décrire un documentaire audiovisuel restent, grosso modo, pertinents dans le cas de la description d'autres objets ou signes audiovisuels (textuels); - Les méthodes d'analyse dévéloppées au cours de ce séminaire peuvent être - au moins en partie - ré-utilisées, appliquées pour l'analyse de n'importe quel objet audiovisuel : enregistrement d'événements, production de fiction ou de divertissement, etc. Au cours de ce séminaire, nous allons présenter, d'ailleurs, un projet de recherche visant la mise en place d'un portail audiovisuel de colloques et séminaires.

14 4) Signe audiovisuel et réalité Le signe audiovisuel au sens étroit du terme construit, ré-construit une réalité qui lui est propre. Même le film le plus "objectif" (exemple : enregistrement d'une conférence, d'un séminaire; enregistrement dit scientifique d'un objet d'intérêt éthnologique, enregistrement d'un concert, ) reproduit la réalité selon son langage qui connaît, par exemple : - Le choix d'un angle de vue, - Le choix d'un cadre visuel, - Le choix d'un tempo, - Le choix d'un certain eclairage, - Le choix de certaines informations (au détriment d'autres informations potentielles), - Le montage des informations choisies avec d'autres informations, - etc. La réalité filmique, i.e. la réalité dévéloppée et montrée dans le film, est un fait sémiotique, i.e. une construction qui obéit à des règles, à un langage (de la même façon que la production d'une phrase ou, plutôt, d'un texte obéit, entre autre, à des règles de la grammaire). Il existe différents plans de réalité qu'il faut distinguer d'un point de vue aussi bien théorique que méthodologique (cf. E. Hohenberger 1988) - Réalité non-filmique qui constitue le reservoir des thèmes, des sujets possibles des productions filmiques

15 - Réalité pro-filmique qui réunit toute scène, toute figure sur laquelle est fixée la caméra - La réalité du signe audiovisuel lui-même qui concerne les différents aspects de la production, de la fabrication du produit - La réalité filmique qui est la représentation d'une réalité donnée dans le film - La réalité post-filmique qui concerne la reception, l'exploitation d'un film par ses usagers, son rôle dans la vie professionnelle ou quotidienne, etc. Ce séminaire est concerné surtout par la réalité filmique et la description structurée de celle-ci. Suivant Kiener (Kiener 1999), d'une manière très générale, la spécificité d'une réalité filmique est donnée par : - L'action de la caméra et - Le montage Action de la caméra (choix de l'angle de vue, de cadre, ) et montage (composition de plans, scènes ou séquences en un tout cohérent) forment ce qu'on appelle le ou plutôt les codes cinématographique(s).

16 5) La description du signe audiovisuel Principaux paramètres d'analyse d'un signe audiovisuel : a) niveau de l'analyse b) critères de l'organisation du signe audiovisuel (du documentaire) c) "granularité" de l'analyse a) Niveau de l'analyse trois niveaux - selon besoins, intérêts d'une analyse i) niveau "collection" d'un ensemble de signes audiovisuels (de documentaires) - fonds, archives, médiathèques, - corpus ii) niveau du signe audiovisuel lui-même (du documentaire lui-même) iii) niveau d'une partie, d'un composant du signe audiovisuel (du documentaire) - séquence ou scène - plan

17 b) critères de l'organisation du signe audiovisuel (du documentaire) i) "texture"/"texte" organisation "logique" ("hiérarchique") d'une situation filmée séquences, scènes, plans, organisation spatiale notamment : composition visuelle organisation temporelle - de synchronisation - de succession ii) contenu thématique thèmes à l'aide desquels une situation filmée est presentée, racontée, interprétée dans un documentaire : personnes, activités, lieux,. rhétorique développement d'une situation filmée dans un documentaire, un signe audiovisuel : schémas rhétoriques (description, narration, témoignage, ) et figures (métaphores, métonymies, ) discursif cadrage et plan, montage, rôles (narrateurs, ) iii) expression médias d'expression rapports entre médias d'expression

18 c) "granularité" et orientation de l'analyse - niveau de "finesse", de "détails" visés par une analyse - "orientation" de l'analyse : quels paramètres les plus importants, quels autres moins importants? Exemple : Situation filmée : attroupement de personnes sur une grande place d'une ville chinoise A) niveau d'analyse plan d'une "collection" de documentaires : fonds, archives - identifier les segments dans les documentaires qui présentent ce type de situations, - identifier l'emplacement de ces séquences - identifier la longueur des séquences - proposer une description signalétique (nom du documentaire, réalisateur, intitulé de la séquence et résumé/synthèse) idem au niveau d'un documentaire pris individuellement (exemple : le documentaire : Les Villes chinoises,.) B) Analyse "hiérarchique" Décrire 'organisation "logique"(hiérarchique) interne du/des segment(s), i.e. les séquences (scènes, ) et plans qui composent, constituent la situation filmée : titre, résumé, place dans la hiérarchie, place dans l'organisation linéaire,

19 C) analyse du contenu - identifier et décrire les principaux thèmes organisant, interprétant la situation filmée : activités, catégories sociales, apparences physiques des gens, organisation sociale de la place, - identifier et décrire le/les schémas de développement rhétorique de la situation filmée : i.e. présentation-description, témoignage, narration, - identifier et décrire le/les principaux figures "attachés" à un thème ou à la situation filmée dans son ensemble - identifier les principaux cadres, points de vue, mvt de caméras pour filmer la situation en question - identifier les principaux rôles : qui parle (le narrateur), la situation est vue depuis quel point de vue - décrire l'importance discursive de la situation filmée (de la situation en elle-même, des différentes parties - des différents thèmes) - décrire les formes discursives d'intégration ("montage") : de la scène elle-même, des parties de la scène D) analyse de l'expression - identifier les médias (image, son, parole, ) utilisés pour exprimer les thèmes principaux de la situation filmée : thèmes visuels, thèmes "de la parole", thèmes musicaux, thèmes syncrétiques, - décrire les rapports entre le plan de la parole et celui de l'image; de la musique et celui de l'image, E) analyse de l'organisation spatiale et temporelle - Décrire la composition visuelle de la scène filmée (sous forme d'une maquette, par exemple)

20 - Décrire le déroulement de la situation filmée (durée, tempo, ) et la synchronisation des diférents médias (sous forme d'un modèle "par piste" ou d'un storyboard)

21 Tableau synthétique des principaux critères intervenant dans l'analyse d'une situation filmée (d'un documentaire). Choix de la "granularité" et de l'orientation de l'analyse Choix du niveau : collection, document AV, composant Analyse de l'organisation "hiérarchique": parties, Analyse thématique : acteurs, activités, lieux, Situation filmée Analyse de la présentation physique : spatiale, temporelle Analyse rhétorique : schémas; figures Analyse de l'expression : Médias, rapports entre médias Analyse discursive : mvts, montage, rôles,

22 Deux notions centrales ici : a) celui du scénario sémiotique (i.e. du «modèle», de la «définition-qualification») b) celui du projet d information avec, plus particulièrement, le contrat d information Le scénario sémiotique (= modèle, schéma, norme, ) - Scénarios de l'organisation "logique" (hiérarchique) d'une situation filmée (d'un documentaire, d'un signe audiovisuel) : arborescences, graphes arborescents - Scénarios de la présentation physique et du déroulement temporel d'une d'une situation filmée (d'un documentaire, d'un signe audiovisuel): maquette, storyboard, modèle par pistes, - Scénarios de l'organisation et de l''expression du contenu (schémas thématiques, index, tableaux, synopsis, )

23 Ces scénarios : - peuvent être de simples aides ou guides (par exemple dans la conception de sites web ou dans la mise en place d un thesaurus) - peuvent être aussi codés ou codables dans un standard technologique tel que XML ou integré dans un logiciel spécialisé (par exemple comme un nouveau "knowledge object" dans la bibliothèque du logiciel d'auteur Authorware, ) - peuvent être aussi accompagnés d'outils et de services d'utilisation et de gestion, ce qui les rapprochent de ce que l'on appelle maintenant les services web, comme les "composants" qu'un utilisateur se télécharge afin de développer sa propre application.

24 6) La description du contexte du signe audiovisuel 3 principaux moments : a) la production conception (synopsis, ) scénarisation (storyboard) réalisation (tournage) post-production (montage, post-synchronisation, édition) b) la réception diffusion "pénetration" réception/compréhension exploitation

25 c) la contextualisation intégration positionnement tradition innovation