APPORTS EN NUMÉRAIRES, APPORTS EN NATURE, APPORTS EN INDUSTRIE : COMMENT ÇA MARCHE?
Les apports en société Introduction Les fondateurs d'une société doivent réaliser des apports lors de sa constitution. Les biens apportés sortent du patrimoine des associés pour rentrer dans celui de la société. En contrepartie de l'apport réalisé, les associés reçoivent des droits sociaux en fonction de la valeur des apports réalisés. Il faut distinguer plusieurs types d'apports : les apports en numéraires, les apports en nature ou encore les apports en industrie. Les apports concourent à la formation du capital social de la société. C'est grâce aux apports réalisés que la société peut accomplir son objet social, développer son fonds de commerce, répondre aux commandes de ses clients. L'apport en numéraire est le plus répandu. Cependant, il peut être intéressant pour un associé d'apporter un bien à la société pour l'aider dans l'accomplissement de son objet social. Il peut s'agir d'un fonds de commerce, d'un droit au bail, ou encore d'un immeuble. Il faudra rester vigilant pour l'apport d'un bien en nature quant à son évaluation par les associés. Il faudra désigner un commissaire aux apports qui sera chargé de rédiger un rapport relatif à l'évaluation du bien. Les associés peuvent décider de passer outre ce rapport. Cependant, ils seront tenus des conséquences dommageables que pourrait avoir pour la société ou ses créanciers la surévaluation des apports en nature. 1. La définition de l'apport en société Le terme d'apport recouvre plusieurs réalités et plusieurs modes d'apports. L'apport désigne l'opération par laquelle l'associé affecte certains biens ou services à la société qu'il constitue. D'autre part, il désigne chaque bien ou service apporté c'est à dire les valeurs mises à la disposition de la société. Si les apports sont facultatifs dans une association ou GIE ils sont obligatoires dans une société. Les apports sont l'essence même de la société, ils lui permettent d'accomplir l'objet social défini par les associés. Les apports constituent en effet le capital social de la société. Plus le volume des apports est élevé et plus les partenaires financiers seront enclins à prêter de l'argent à la société. Si les associés n'effectuent pas d'apports à la société en numéraire, en nature ou en industrie, alors la nullité de la société pourrait être prononcée. Cela est fréquent lorsque les apports sont fictifs, c'est-à-dire lorsque les apports n'ont pas de valeur ou d'utilité pour l'accomplissement de l'objet social. C'est le cas par exemple de l'apport d'un fond de commerce grevé d'un passif bien supérieur à sa valeur réelle. C'est par la réalisation de l'acte d'apport que la qualité d'associé est attribuée au fondateur de la société. Les apports réalisés à la société permettent de distinguer l'associé du simple salarié, ou du collaborateur Page 1 / 6
occasionnel. En contrepartie de l'apport réalisé à la société, les associés reçoivent des droits sociaux matérialisés selon la forme sociale choisie par des parts sociales ou des actions. L'acte d'apport est un acte translatif de propriété. En effet, ce ne sera plus l'actionnaire qui sera propriétaire de l'immeuble apporté mais la société. En contrepartie, l'associé ou l'actionnaire sera propriétaire de droits sociaux. L'actionnaire recevra une quote part plus ou moins importante du capital social de la société en fonction du volume d'apports qu'il aura réalisé au profit de la société. Il existe donc une proportionnalité entre la valeur de l'apport et les droits sociaux octroyés. Les apports des associés constituent le gage des créanciers de la société. Ceux-ci prêtent plus ou moins facilement à la société selon que son capital social est élevé ou non. Il convient de distinguer plusieurs types d'apports réalisés au profit d'une société : les apports en nature, en industrie, ou en numéraire. Ces apports composent le capital social de la société, à l'exception des apports en industrie. Les apports en numéraires sont réalisés par le versement au profit de la société de toute somme d'argent en monnaie fiduciaire ou en monnaie scripturale c'est à dire en chèque ou par virement. L'apport en numéraire est le type d'apport le plus simple à réaliser et le plus fréquent. L'apport doit être distingué de l'avance en compte courant, l'avance en compte courant constitue un prêt accordé à la société qui sera remboursé et qui ne se traduit pas par l'octroi de droits sociaux. Dans l'apport en société il convient de distinguer deux phases : la souscription des droits sociaux et leur libération. La souscription est matérialisée par la promesse faite par un associé de réaliser un apport en numéraire tandis que la libération des droits sociaux est réalisée par l'exécution de cette promesse (c'est à dire le versement effectif des fonds). Dans une société anonyme par exemple, la libération doit être au moins de la moitié de l'apport et il est possible de verser l'autre moitié dans un délai de 5 ans, en fonction des appels réalisés par les dirigeants de la société. L'art 1843-3 du code civil prévoit que l'associé qui ne respecte pas les délais pour libérer les sommes promises à la société est débiteur de plein droit des intérêts portant sur les sommes non encore versées. Cet associé peut de même être condamné à verser à la société des dommages et intérêts si la non libération des sommes dans le délai imparti lui a causé un préjudice. Page 2 / 6
L'apport en nature se réalise par l'apport d'un bien autre qu'une somme d'argent, cela vise tout bien meuble ou immeuble, des biens corporels ou incorporels. Il doit s'agir de tout bien susceptible d'une évaluation pécuniaire et qui présente une utilité pour la société dans la réalisation de son objet social. Il faut distinguer l'apport en propriété du simple apport en jouissance d'un bien. L'apport en propriété correspond juridiquement à une vente aussi bien pour l'associé que pour la société, la remise du bien et l'attribution de droits sociaux étant translative de propriété. La société devient donc propriétaire du bien apporté et peut en user comme un propriétaire. La société supporte les risques sur le bien apporté, ainsi si la chose venait à disparaître ou à être volée, la société perdra l'apport sans que cela ait une incidence sur l'apporteur lui-même. Il faut que la société soit dotée de la personnalité morale c'est à dire qu'elle ait été immatriculée au registre du commerce et des sociétés. La société, et elle seule, devient propriétaire du bien. En contrepartie, l'apporteur reçoit des droits sociaux correspondants à la valeur du bien apporté. 2. L'évaluation de l'apport en nature Avec l'apport en nature d'un bien se pose le problème de l'évaluation dudit bien. Il existe en effet un danger consistant en la surévaluation des apports réalisés au profit de la société. Le capital social ainsi composé de biens surévalués est artificiellement élevé. Cette technique dite du «mouillage des apports» peut avoir de lourdes conséquences. En effet, le capital social de la société constitue le seul gage des créanciers, et donc en cas de difficultés de paiement la solvabilité de la société se dégonfle comme une baudruche. La surévaluation de certains biens engendre un déséquilibre entre les associés eux-mêmes. En effet, certains associés vont recevoir des droits sociaux en plus grande quantité par rapport à la valeur réelle des apports qu'ils auront effectués. Dans les sociétés à risque illimité, les associés répondent des dettes sociales sur leur patrimoine personnel. Ainsi, une erreur d'évaluation des apports en nature ne porte par réellement préjudice aux créanciers sociaux. Ceux-ci peuvent en effet poursuivre les associés indéfiniment et solidairement sur leur patrimoine personnel. Page 3 / 6
Pour toutes les sociétés dans lesquelles le risque est limité au montant de l'apport (SARL, EURL) des règles spécifiques de contrôle ont été instituées. Ainsi, l'évaluation doit être réalisée par un commissaire aux apports, lequel fixe sous sa responsabilité la valeur du bien apporté. L'associé apporteur se trouve dans la situation d'un vendeur. Il doit une garantie d'éviction et la garantie des vices cachés. Ainsi, l'apporteur d'un fond de commerce ne doit causer d'actes de concurrence au fond de commerce apporté. Un apport peut avoir lieu en usufruit en jouissance ou en nue propriété. L'apport en jouissance consiste à mettre un bien à la disposition de la société, laquelle ne peut en disposer, le céder ou le donner en garantie. La société en devient propriétaire à charge de rendre à l'apporteur en jouissance une chose équivalente au terme de la convention. Cet apport est peu fréquent dans la pratique. L'apporteur conserve l'assurance de pouvoir récupérer son bien à la dissolution de la société puisqu'il ne fait pas partie du patrimoine social, les créanciers sociaux n'ont aucun droit sur ce bien. L'apport en usufruit d'un bien est situé à mi chemin entre l'apport en propriété et l'apport en jouissance. Cet apport est réalisé par le transfert du droit réel qu'est l'usufruit. Il permet à la société d'user de ce bien et d'en tirer profit, comme le ferait un usufruitier. En revanche, la société ne peut pas en disposer et le vendre puisque l'apporteur conserve la nue propriété du bien. L'apporteur reçoit des doits sociaux à concurrence de la valeur de l'usufruit. Cet usufruit doit être limité dans le temps, et ne pet excéder une durée de 30 ans. Au terme de l'usufruit, la pleine propriété se reconstitue. L'apporteur récupère ainsi la pleine propriété de son bien. En cas d'apport en nue propriété d'un bien à la société, celle-ci dispose des droits du nu propriétaire sur le bien apporté et l'associé continue de jouir du bien en sa qualité d'usufruitier. L'apporteur reçoit en contrepartie de l'apport des droits sociaux correspondant à la valeur de la nue propriété et lors de son décès, la société devient propriétaire du bien. Attention: l'apport en usufruit d'un bien à une société réalisé dans le seul but d'échapper à l'isf entre dans Page 4 / 6
le cadre de l'abus de droit. Les prérogatives fiscales étant réparties entre l'usufruitier et le nu-propriétaire. Ainsi, il appartient, en principe, à l'usufruitier de déclarer à l'impôt sur la fortune (ISF) la valeur en pleine propriété du bien sauf si l'usufruit du bien présente un caractère professionnel. En effet, les biens qui présentent pour le contribuable un caractère professionnel peuvent être exonérés d'isf. Mais la Cour de cassation exerce, néanmoins, un contrôle sur le caractère professionnel d'un bien inscrit à l'actif du bilan d'une société ou d'une entreprise lorsque ce bien n'est pas nécessaire à son activité. Les juges écartent ainsi de nombreux montages réalisés dans le but exclusif d'éluder ou d'atténuer l'impôt et en tirent les conséquences du point de vue fiscal en établissant l'impôt d'après la situation qu'ils estiment réelle. Dans une affaire, un contribuable a réalisé l'apport en usufruit de plusieurs immeubles à une société commerciale (EURL). Ces immeubles, situés dans des stations balnéaires, étaient mis en location. La valeur de ces immeubles, inscrite au bilan de la société, n'avait pas été portée dans la déclaration d'isf du contribuable car celui-ci avait estimé que l'usufruit de ces biens présentait un caractère professionnel. Mais les juges ont considéré que l'apport en usufruit de l'un des immeubles à une société commerciale avait un but exclusivement fiscal. En effet, selon la Cour de cassation, le seul objectif de l'inscription à l'actif de la société commerciale de l'usufruit était de conférer à ce dernier un caractère professionnel afin qu'il soit exonéré d'isf. Or le caractère professionnel de l'usufruit n'était pas démontré du fait de l'offre de location extrêmement limitée de l'immeuble concerné. En effet, certaines années, aucun encaissement de recette n'avait eu lieu, le contribuable ne mettant en location le logement que dans des périodes très courtes et s'en réservait l'usage le reste du temps. Dans le cadre de la procédure d'abus de droit, la Cour de cassation a donc, par un arrêt en date du 7 décembre 2010 (pourvoi n 10-10054), décidé qu'il convenait de réintégrer la valeur de l'usufruit du bien immobilier concerné dans la déclaration d'isf du contribuable. 3. La problématique de l'apport en industrie L'apport en industrie consiste en un engagement pris par un associé et de mettre à la disposition de la société toute ou partie de son activité, de son savoir faire. Page 5 / 6
L'apporteur met à la disposition de la société ses connaissances techniques professionnelles ou son expérience. Ce type d'apport pose plusieurs problèmes : celui de la rémunération de l'apport et celui de la garantie offerte aux tiers. En effet cet apport n'est pas susceptible d'une réalisation forcée. Il est en effet impossible de forcer l'apporteur à s'exécuter. Il ne contribue donc pas à la composition du capital social. Il est interdit dans les sociétés par actions et strictement réglementé dans les SARL. A l'origine, les apports en industrie étaient réservés exclusivement entre époux. Des parts en industrie sont accordées à l'apporteur mais elles ne contribuent pas à la composition de capital social. Page 6 / 6 Powered by TCPDF (www.tcpdf.org)