Fonctionnaires, agents non titulaires, ouvriers des établissements industriels de l État.



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Transcription:

Le cumul d activités dans la fonction publique Par Stéphanie Ricatti L article 25 de la loi n 83-634 du 13 juillet 1983, portant droits et obligations des fonctionnaires, dans sa rédaction issue des lois n 2007-148 du 2 février 2007 et n 2009-972 du 2 août 2009, impose aux fonctionnaires l obligation de consacrer l intégralité de leur activité professionnelle aux tâches qui leur sont confiées. Ils ne peuvent exercer à titre professionnel une activité privée lucrative de quelque nature que ce soit. Toutefois, si le principe de l interdiction d exercer une activité à titre privée lucrative demeure la règle, le dispositif est de plusieurs dérogations, à la fois élargies et mieux définies, qu il s agisse pour l agent d exercer une activité accessoire à son activité principale, ou bien de créer ou reprendre une entreprise pour une période limitée dans le temps. L agent public doit se consacrer exclusivement à son activité administrative ; des dérogations sont cependant prévues et encadrées La réforme issue de la loi du 2 février 2007 a consisté, d une part, à élargir le champ des agents concernés par les dérogations à l interdiction de cumul, d autre part à accroître les possibilités de cumul, en instaurant, aux côtés du cumul pour activité accessoire, sans limitation a priori dans le temps, le cumul pour création, reprise ou poursuite d activité dans une entreprise, ouvert pour une durée maximale de trois ans. L article 25 de la loi du 13 juillet 1983 prévoit que les fonctionnaires et agents non titulaires de droit public peuvent être autorisés à exercer, «à titre accessoire», une activité lucrative, auprès d une personne ou d un organisme public ou privé, «dès lors que cette activité est compatible avec les fonctions qui leur sont confiées et n affecte pas leur service». Sont concernés par ce dispositif les agents à temps complet et à temps partiel 1, pour le cumul avec une activité accessoire et pour création d entreprise, mais également les agents occupant un emploi à temps non complet ou exerçant des fonctions impliquant un service à temps incomplet, qui bénéficie d un régime assoupli de cumul avec une activité lucrative. L exercice par un agent de la fonction publique d un cumul d activités étant susceptible de porter atteinte à l intérêt du service, les modalités de son application ont été encadrées par le décret n 2007-658 du 2 mai 2007 2. Celui-ci définit les différents 1 Fonctionnaires, agents non titulaires, ouvriers des établissements industriels de l État. 2 Décret n 2007-658 du 2 mai 2007 relatif au cumul d activités des fonctionnaires, des agents non titulaires [Suite en bas de colonne suivant] types de cumul et énonce les règles applicables s agissant du cumul d activités à titre accessoire, du cumul d activités au titre de la création, de la reprise ou de la poursuite d activités au sein d une entreprise, du cumul d activités applicable aux agents à temps non complet. Le non-respect par les agents des règles portant sur le cumul d activités les expose, par ailleurs, à des sanctions. 1. L interdiction d exercer une activité privée lucrative a été fortement assouplie par la loi du 2 février 2007 1.1. Le principe de l obligation d exclusivité des fonctionnaires L article 25 de la loi n 83-634 du 13 juillet 1983 impose aux fonctionnaires de consacrer l intégralité de leur activité professionnelle aux tâches qui leur sont confiées dans l administration qui les emploie, et leur interdit, à ce titre, de cumuler leur activité principale avec une activité privée lucrative de quelque nature que ce soit. Qu elles soient ou non exercées à titre lucratif, sont interdites les activités privées suivantes : Participer aux organes de direction de sociétés ou d associations qui ne satisfont pas aux conditions fixées à l article 261-7-1 -b du code général des [Suite du bas de colonne précédent] de droit public et des ouvriers des établissements industriels de l État pris pour application de la loi du 2 février 2007. Le Courrier Juridique des Finances et de l'industrie n 62 - quatrième trimestre 2010 257

L agent public peut cumuler librement certaines activités impôts. Sont ainsi interdites les fonctions d administrateur dans une société anonyme 3, les fonctions de président d une association à but non lucratif qui exerce, en réalité, une activité commerciale 4. Donner des consultations, procéder à des expertises ou plaider en justice contre l administration dans le cadre de litiges. Les agents publics ne doivent pas être amenés à prendre position dans des affaires où une personne publique est partie (sauf s ils sont mandatés par elle), ni à pratiquer des consultations ou expertise qui seraient contraires aux intérêts de toute personne publique (et pas seulement celle qui l emploie). Prendre, par eux-mêmes ou par personnes interposées, des intérêts de nature à compromettre leur indépendance au sein d une entreprise avec laquelle ils peuvent avoir des relations dans le cadre de leurs fonctions. En effet, les fonctionnaires ne doivent pas se trouver dans une situation telle que leur intérêt personnel puisse être en contradiction avec les intérêts de l État ou de la collectivité publique, dont ils doivent assurer la défense 5. 1.2. Les dérogations au principe L article 25 de la loi du 13 juillet 1983 assortit le principe de l interdiction de cumul avec une activité privée lucrative de la possibilité de dérogations. Elles sont énumérées dans le décret n 2007-658 du 2 mai 2007 et nécessitent, dans le cas le plus fréquent du cumul pour activité accessoire, une autorisation préalable de l autorité administrative dont relève l agent. Le décret du 2 mai 2007 définit le régime général du cumul dans la fonction publique. Son article 10 précise que des règles plus restrictives peuvent être instaurées à l égard de certaines catégories d agents, eu égard à la nature et à l exercice de leurs fonctions. 1.2.1. La possibilité de cumuler certaines activités sans autorisation L article 25 de la loi du 13 juillet 1983 permet aux fonctionnaires d exercer librement certaines activités : La libre détention de parts sociales et la libre gestion du patrimoine privé : un agent public peut détenir des parts sociales d une entreprise et percevoir les bénéfices qui s y attachent, à condition de ne pas assurer le rôle de dirigeant de cette entreprise. De même, il peut faire fructifier son patrimoine personnel, dès lors qu il n en fait pas un commerce. La création des œuvres de l esprit (œuvres scientifiques, littéraires ou artistiques définies par les articles L. 112-1, L. 112-2 et L. 112-3 du code de la propriété intellectuelle) : l agent doit être rémunéré à l acte et ne pas bénéficier d un véritable contrat de travail, l activité exercée ne doit pas amener l agent à être durablement lié par des liens de subordinations ou d intérêts à des organismes privés 6. L exercice des professions libérales découlant de la nature des fonctions : cette dérogation n est ouverte qu aux membres du personnel enseignant, technique ou scientifique. Le juge contrôle si les activités libérales découlent bien de la nature des fonctions exercées. Ainsi, la profession de psychanalyste exercée à titre libéral ne découle pas des fonctions d un instituteur affecté à un centre de formation des maîtres pour l enfance inadaptée pour y dispenser un enseignement sur les divers courants de la psychologie à l école 7. En revanche, l activité de psychologue découle bien de la nature des fonctions d un docteur en médecine et psychiatre enseignant la psychologie clinique dans une faculté 8. 3 CE, avis, 9 février 1949, n 245963. 4 CE, 4 mars 1994, Coutellier, n 122469. 5 CE, avis, 17 février 1954. 6 CE, 28 septembre 1988, Ministre de l éducation nationale c/ Lemennicier, n 66781. 7 CE, 22 juillet 1992, Sobol, Leb. p. 1066. 8 CE, 13 février 1987, Ministre de l éducation nationale c/ Sztulman, n 69497. 258 Le Courrier Juridique des Finances et de l'industrie n 62 - quatrième trimestre 2010

Le cumul pour activité accessoire ou pour création d entreprise ne peut se dérouler que dans le respect du fonctionnement normal du service 1.2.2. Le cumul pour activité accessoire : une liste limitative et l autorisation préalable de l administration Le décret n 2007-658 du 2 mai 2007 prévoit, pour les agents exerçant leurs fonctions à temps plein ou à temps partiel, la possibilité d exercer une ou plusieurs activités à titre accessoire par rapport à leur activité publique principale, à la condition que, selon les termes du décret, «ces activités ne portent pas atteinte au fonctionnement normal, à l indépendance ou à la neutralité du service». L article 4 du décret du 2 mai 2007 pris pour son application précise que le cumul d une activité exercée à titre accessoire avec une activité exercée à titre principal est subordonné à la délivrance d une autorisation par l autorité dont relève l agent. Les articles 2 et 3 du décret du 2 mai 2007 fixent la liste des activités qui peuvent être cumulées avec l activité de l agent public après autorisation de l administration. Il s agit des activités d expertises ou consultations auprès d une entreprise ou d un organisme privés 9, des activités d enseignement ou de formation, d activités agricoles, de travaux d extrême urgence, dont l exécution immédiate est nécessaire pour prévenir des accidents imminents ou organiser des mesures de sauvetage, des travaux ménagers de peu d importance réalisés chez des particuliers 10, d une aide à domicile à un ascendant, à un descendant, à son conjoint, à son partenaire lié par un PACS ou à son concubin, d une activité de conjoint collaborateur au sein d une entreprise artisanale ou commerciale, d une activité d intérêt général exercée 9 L article 2 du décret n 2007-658 prévoit ainsi que les missions d expertises ou de consultations auprès d une entreprise ou d un organisme privés sont susceptibles d être autorisées quand bien même, elles n interviendraient pas dans le domaine de compétence professionnel de l agent. En revanche, un agent ne peut prétendre exercer une telle activité accessoire si les expertises et les consultations délivrées se révèlent être contraires aux intérêts de quelque personne publique que ce soit. 10 Entretien de la maison, petits travaux de jardinage, gardes d enfants, livraison de repas ou de courses à domicile auprès d une personne publique ou auprès d une personne privée à but non lucratif, ou encore d une mission d intérêt public de coopération internationale auprès d organismes d intérêt général à caractère international ou d un État étranger, pour une durée limitée. L activité exercée doit demeurer accessoire par rapport à l activité publique principale de l agent. 1.2.3. Le cumul pour création ou reprise d entreprise : la décision de l administration après l avis de la commission de déontologie Le II de l article 25 institue de nouvelles exceptions à l obligation d exclusivité. Désormais, l agent peut créer ou reprendre une entreprise. Il peut également conserver une activité professionnelle privée pendant le début de sa carrière publique. Le temps partiel est accordé de droit, sur sa demande, à l agent qui crée ou reprend une entreprise 11. Un tel cumul est toutefois conditionné par un avis favorable de la commission de déontologie sur la compatibilité des projets de création, reprise ou poursuite d une activité au sein d une entreprise et les fonctions exercées par l agent. Il appartient à l administration de saisir la commission de déontologie (chapitre II du décret du 2 mai 2007). Pour bénéficier du dispositif de cumul pour création d entreprise, l agent concerné doit avoir la qualité de gérant ou de cogérant, et non de simple salarié d une entreprise 12. De même, le cumul pour poursuite d activité n est ouvert qu aux agents, dirigeants d entreprise, qui entrent pour la première fois dans l administration, par concours ou sur contrat (non aux agents qui rentrent de disponibilité et souhaitent «poursuivre» leur activité de chef d une entreprise créée par eux pendant leur disponibilité). 11 Article 37 bis de la loi n 84-16 du 11 janvier 1984, article 60 bis de la loi n 84-53 du 26 janvier 1984, article 46-1 de la loi n 86-33 du 9 janvier 1986. 12 Avis de la Commission de déontologie de la fonction publique n 09.A0198 et n 09.A0248 du 8 avril 2009. Le Courrier Juridique des Finances et de l'industrie n 62 - quatrième trimestre 2010 259

Les agents publics à temps incomplet ou non complet, compte tenu de leur mode d activité non choisi, bénéficient d un régime de cumul assoupli Toutefois, la création d une entreprise ne fait pas systématiquement entrer un agent public dans le champ des dispositions du chapitre II du décret du 2 mai 2007, dès lors que l objet de l entreprise peut se rattacher à l une des activités accessoires mentionnées dans les articles 2 et 3 du décret de 2007. L avis de la commission de déontologie n est dans ce cas pas obligatoire 13. Depuis le 1 er janvier 2009 14, toute personne physique peut exercer une activité individuelle artisanale, commerciale ou libérale sous le régime d auto-entrepreneur. Les agents publics peuvent utiliser ce régime, dans le cadre d un cumul d activités, sous certaines conditions. Il convient alors de distinguer trois situations : Les agents publics à temps complet ou à temps partiel qui créent une entreprise dans le cadre du chapitre II du décret du 2 mai 2007 peuvent bénéficier du régime de l auto-entrepreneur, quel que soit l objet de l entreprise, après avis de la commission de déontologie. Les agents à temps complet ou à temps partiel peuvent également exercer sous le régime de l auto-entrepreneur certaines activités accessoires (expertises, consultations, enseignements, formations, travaux chez les particuliers 15 ), après y avoir été autorisés, sans avis de la commission de déontologie. Il en va de même pour les agents à temps incomplet ou non complet, qui peuvent exercer une activité privée lucrative sous la forme de leur choix, y compris celle de l auto-entrepreneuriat, après en avoir préalablement informé l administration, sans avis de la commission de déontologie. 13 Rapport d activité de la Commission de déontologie de la fonction publique de 2009, p. 52. 14 La loi n 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l économie. 15 Cette liste pourrait toutefois être étendue à d autres hypothèses : voir QE, réponse ministérielle n 51220, JOAN, 28 juillet 2009, p. 7461. 1.2.4. Le cumul d activités des agents à temps non complet : l information préalable de l administration Les agents occupant un emploi à temps non complet ou exerçant des fonctions impliquant un service à temps incomplet (agents non titulaires dont la durée de travail est inférieure ou égale à 70 % de la durée d un emploi à temps plein) peuvent exercer une activité privée lucrative, en sus de leur activité publique, sans autorisation préalable de l autorité administrative dont ils relèvent (ils sont tenus à une simple obligation d information). L administration doit néanmoins vérifier que leur activité privée est compatible avec leurs obligations de service et ne porte pas atteinte au fonctionnement normal, à l indépendance ou à la neutralité du service. Ils peuvent également cumuler leur fonction avec une ou plusieurs activités publiques, dès lors que la durée totale de travail résultant de ce cumul ne dépasse pas 100 % d un emploi à temps complet (115 % pour les agents de la fonction publique territoriale). 2. La procédure à suivre et les sanctions encourues en cas de non-respect de la réglementation portant sur le cumul d activités 2.1. Le régime d autorisation du cumul pour activité accessoire (articles 4 à 8 du décret du 2 mai 2007) L agent, qui envisage de cumuler une ou des activités accessoires à son activité principale, doit effectuer une demande préalable à l autorité administrative dont il relève. Il doit faire une demande écrite. Cette dernière comporte, obligatoirement, des informations relatives à : l identité de l employeur, les conditions de rémunération ainsi que la nature, la durée et la périodicité de l activité (article 5 du décret du 2 mai 2007). L autorisation doit, en outre, comporter toutes les informations de nature à éclairer l administration sur la compatibilité des activités publique et privée. 260 Le Courrier Juridique des Finances et de l'industrie n 62 - quatrième trimestre 2010

Avant le cumul pour création ou reprise d entreprise, l avis de la commission de déontologie est obligatoire Une nouvelle demande d autorisation doit être présentée par l agent en cas de changement substantiel touchant les conditions d exercice ou de rémunération de l activité accessoire. La décision de l autorité hiérarchique doit être notifiée à l agent dans un délai d un mois à compter de la réception de la demande. Elle peut toutefois solliciter un complément d information, dans les quinze jours qui suivent la réception de la demande de cumul. Ce délai est porté à deux mois dans le cas où l agent a été invité à fournir des informations complémentaires. En l absence de décision expresse écrite, l intéressé est réputé autorisé à exercer l activité accessoire. En tout état de cause, l autorisation accordée n est jamais définitive. L administration peut à tout moment s opposer à la poursuite de l activité autorisée, dès lors que l intérêt du service le justifie, ou que les informations sur le fondement desquelles l autorisation a été donnée apparaissent erronées, ou encore lorsque l activité en cause n est plus accessoire. 2.2. Le cas particulier du cumul pour création d entreprise : l administration se prononce après avis de la commission de déontologie (articles 11 à 14 du décret du 2 mai 2007) L agent qui souhaite créer ou reprendre une entreprise 16 présente une déclaration écrite à l autorité dont il relève. Cette déclaration, faite deux mois au moins avant la date de la création ou de la reprise, mentionne la forme et l objet social de l entreprise, son secteur et sa branche d activités (article 11 du décret). L administration saisit alors la commission de déontologie, qui rend son avis dans le délai d un mois. La commission vérifie, d une part, que le cumul ne contrevient pas aux dispositions de l article 432-12 du code pénal relatives à la prise illégale d intérêts dans l exercice 16 L article 11 du décret du 2 mai 2007 ouvre le cumul à la création d une entreprise «quelle qu en soit la forme juridique», ce qui permet la création d une activité libérale. des fonctions, et d autre part, qu il ne porte pas atteinte à la dignité des fonctions publiques exercées par l agent, non plus qu au fonctionnement normal du service (article 13). L avis négatif de la commission de déontologie lie l administration, qui peut cependant demander une seconde délibération. L autorité dont relève l agent «se prononce sur la déclaration de cumul d activités au vu de l avis rendu par la commission» et «apprécie également la compatibilité du cumul [ ] au regard des obligations de service qui s imposent à l intéressé» (article 14). L agent peut donc exercer le cumul si les critères de déontologie, appréciés par la commission, et le critère du respect du fonctionnement du service, apprécié par l administration, sont remplis. L autorité compétente peut s opposer à tout moment au cumul, une fois celui-ci accordé, s il advenait que l agent ne respecte plus les critères mentionnés ci-dessus. La procédure est la même dans le cas du cumul pour poursuite d une activité de dirigeant d entreprise. La loi n 2009-972 du 2 août 2009 a porté la durée initiale du cumul pour création ou reprise d activité dans une entreprise de un à deux ans, période renouvelable une fois pour une durée maximale d un an. En 2009, la commission de déontologie a examiné plus de 1.600 demandes de cumul pour création d entreprise, dont une grande partie ne relevait pas de sa compétence, puisqu il s agissait de fonctionnaires autoentrepreneurs désirant exercer une activité accessoire d expertise d enseignement, ou de travaux chez des particuliers. 2.3. Les sanctions en cas de non-respect de la réglementation sur les cumuls La violation du principe d interdiction des cumuls d activités expose l agent à plusieurs types de sanctions. 2.3.1. Le remboursement des sommes perçues Si l agent omet de demander l autorisation de cumul ou passe outre le refus de l administration, il peut être enjoint de Le Courrier Juridique des Finances et de l'industrie n 62 - quatrième trimestre 2010 261

reverser les sommes irrégulièrement perçues à l administration qui assure le paiement de son traitement. Dans ce cas, les sommes à reverser doivent correspondre aux rémunérations de l activité accessoire 17. La rémunération principale de l intéressé doit toutefois être maintenue par l administration. 2.3.2. La sanction disciplinaire L agent est, en outre, passible de sanctions disciplinaires (avertissement, blâme, abaissement d échelon ), dans les conditions prévues par les statuts 18. Le niveau de sévérité est laissé à l appréciation de l autorité disciplinaire, en fonction du degré de gravité du manquement à l obligation de non-cumul constaté. 2.4. L action pénale L article 432-12 du code pénal sanctionne la prise illégale d intérêts dans l exercice des fonctions En cas d activité dans une entreprise avec laquelle il a une relation au titre de son emploi public, le fonctionnaire peut être poursuivi, notamment sur le fondement de l article 432-12 du code pénal, pour prise illégale d intérêt. Ce délit est sanctionné par une peine pouvant aller jusqu à cinq ans d emprisonnement et 75.000 euros d amende. Stéphanie Ricatti (Direction des affaires juridiques) 17 CAA Paris, 4 mars 2004, Lellouche, n 03PA00861. 18 Article 66 de la loi n 84-16 du 11 janvier 1984 pour la fonction publique de l État, article 89 de la loi n 84-53 du 26 janvier 1984 pour la fonction publique territoriale et article 81 de la loi n 86-33 du 9 janvier 1986 pour la fonction publique hospitalière. 262 Le Courrier Juridique des Finances et de l'industrie n 62 - quatrième trimestre 2010