Section 1. 1. La naissance d une organisation internationale

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Chapitre I Le commerce international dans le cadre de l Organisation mondiale du commerce Documents cités et reproduits en deuxième partie* Déclaration de Marrakech du 15 avril 1994 (1) Acte final reprenant les résultats des Négociations commerciales multilatérales du Cycle d Uruguay (2) Accord instituant l Organisation mondiale du commerce (3) Déclaration ministérielle de Doha (4) Section 1 Présentation de l Organisation mondiale du commerce 1. La naissance d une organisation internationale L Organisation mondiale du commerce (OMC) a été créée le 1 er janvier 1995 à la suite de l adoption de l Accord de Marrakech qui avait conclu quelques mois plus tôt le Cycle le plus ambitieux de l histoire des négociations multilatérales commerciales, le Cycle d Uruguay (1986-1994). L OMC succède en quelque sorte au GATT, institution internationale née accidentellement d un simple accord en forme simplifiée provisoire (le GATT de 1947), à la suite de l échec de la création de l Organisation internationale du commerce (OIC) et dont * Les chiffres entre parenthèses renvoient à l ordre dans lequel les documents sont reproduits Les chiffres entre parenthèses renvoient à l ordre dans lequel les documents sont reproduits dans la deuxième partie de l ouvrage.

4 droit international économique les activités s annonçaient temporaires le temps qu une organisation en bonne et due forme soit créée. Basée à Genève dans un bâtiment initialement occupé par le Bureau international du travail et puis à partir de 1975 par le GATT et le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (UNHCR), l OMC constitue désormais l Organisation internationale de référence en matière de commerce international. Elle offre un cadre institutionnel commun pour la conduite des relations commerciales multilatérales. Dans cette optique, il n est pas étonnant de constater qu une majorité d États en soient membres (151 en date du 1 er avril 2008) et qu un nombre considérable soit en cours d accession (une trentaine en date du 1 er avril 2008). L OMC administre un budget colossal (182 millions de francs suisses en 2007) et bénéficie des services d un Secrétariat composé d environ 625 personnes. Pascal Lamy, ancien commissaire européen chargé du dossier du commerce international, a été désigné Directeur par le Conseil général de l OMC et occupe cette fonction, pour un mandat de quatre ans, depuis le 1 er septembre 2005. 2. L Accord de Marrakech Le 15 avril 1994, 124 ministres représentant divers gouvernements et les Communautés européennes adoptaient la Déclaration de Marrakech du 15 avril 1994. Par ce document, les différents ministres se félicitaient de l établissement de l OMC et déclaraient de ce fait le Cycle d Uruguay achevé. C est l adoption, le même jour, de l Acte final reprenant les résultats des Négociations commerciales multilatérales du Cycle d Uruguay et son ouverture à l acceptation par les différents États qui constituaient le point culminant de huit années de négociations commerciales internationales. À cet Acte final, une soixantaine de textes était annexée, représentant pas moins de 550 pages. Cela inclut aussi bien des décisions et des déclarations ministérielles que des accords internationaux en bonne et due forme. Ces derniers sont communément appelés «Accords de Marrakech» bien qu il s agisse en réalité d un seul accord global auquel plusieurs accords sont annexés. Il s agit d abord et avant tout de l Accord instituant l Organisation mondiale du commerce qui constitue en quelque sorte la charte ou l accord-cadre de l OMC. Sont annexés à ce dernier, tous les accords de l OMC en matière de commerce des marchandises (Annexe 1A), de commerce des services (Annexe 1B), de propriété intellectuelle (Annexe 1C), de règlement des différends (Annexe 2) et de mécanisme d examen

le commerce international 5 des politiques commerciales (Annexe 3). Ces accords multilatéraux lient tous les Membres de l OMC. Ils constituent un engagement unique auquel les États membres n ont pas le choix de se conformer. Il s agit là d une avancée majeure du droit de l OMC par rapport au GATT de 1947 puisque dans le cadre de ce dernier, les États avaient la possibilité d accepter ou non d être liés par les accords qui se sont greffés, au fil des années, à l accord principal, le GATT de 1947. À cela s ajoutent des accords plurilatéraux (Annexe 4) dont le respect n est obligatoire que pour les Membres les ayant acceptés. À l époque, il existait quatre accords plurilatéraux. Aujourd hui, seulement deux d entre eux sont encore en vigueur : l Accord sur les marchés publics et l Accord relatif au commerce des aéronefs (les deux autres ayant expiré à la fin de 1997, soit l Accord international sur le secteur laitier et l Accord international sur la viande bovine). Finalement, mentionnons que les listes d engagements des Membres de l OMC, en matière de marchandises et de services, ont aussi été annexées et font partie de l Accord de Marrakech. Ces listes représentent pas moins de 30 000 pages. Elles contiennent les engagements précis de chacun des États membres vis-à-vis des autres Membres. 3. les suites de Marrakech : le Programme de Doha pour le développement L établissement de l OMC ne constituait pas une fin en soi. La libéralisation des échanges, si elle avait connu un essor sans précédent par l aboutissement des négociations menées dans le cadre du Cycle d Uruguay, devait encore faire l objet de négociations entre les nouveaux Membres de l OMC. C est à Doha au Qatar, lors de la quatrième Conférence ministérielle en novembre 2001, que les Membres de l OMC se sont entendus sur un programme de négociation. Ce programme, appelé Programme de Doha pour le développement, est inscrit dans la Déclaration ministérielle de Doha mais a été affiné lors de chacune des Conférences ministérielles subséquentes (Cancùn en 2003, Genève en 2004 et Hong Kong en 2005). Il prévoit que les Membres de l OMC tenteront de faire des efforts dans 21 domaines tels que les services, les droits de propriété intellectuelle, l environnement, les accords commerciaux régionaux, l investissement direct étranger, les marchés publics et l agriculture. La Déclaration ministérielle de Doha a créé un Comité des négociations commerciales, demeurant sous l autorité du Conseil général et présidé par Pascal Lamy, dont le mandat consiste à établir des mécanismes

6 droit international économique de négociation par la création d organes de négociation subsidiaires traitant des différents thèmes ainsi qu à superviser les progrès effectués. On l aura deviné, le domaine de l agriculture, ayant toujours été un sujet sensible et ayant été virtuellement évacué du GATT, a constitué le point d achoppement principal du programme de Doha et la raison pour laquelle le Cycle n a pu être conclu, comme prévu, le 1 er janvier 2005. Les négociations sont ouvertes non seulement aux Membres de l OMC, mais aussi aux États en cours d accession. 4. La structure de l OMC La structure de l OMC présente un ordre hiérarchique à plusieurs niveaux. Voici une courte description des organes occupant les trois premiers niveaux. Selon l Accord instituant l Organisation mondiale du commerce, la Conférence ministérielle constitue l organe suprême de l OMC. Elle se réunit au moins une fois aux deux ans et rassemble tous les Membres de l OMC, représentés par leur ministre du Commerce. La tenue de cette Conférence est souvent l occasion pour les différents groupes de la société civile de manifester leur mécontentement quant aux politiques néo-libérales et de revendiquer une meilleure prise en compte de certains facteurs non économiques. Depuis la création de l OMC, la conférence ministérielle s est réunie six fois : à Singapour en 1996, à Genève en 1998, à Seattle en 1999, à Doha en 2001, à Cancùn en 2003 et à Hong Kong en 2005. Le Conseil général constitue l organe de décision suprême à Genève. Il assume la tâche de la Conférence ministérielle lorsque celleci n est pas réunie. Il assure la bonne gestion de l Organisation en se réunissant environ aux deux mois, par exemple, en adoptant le règlement financier et en assurant la relation avec les autres organisations internationales. De plus, il s acquitte des fonctions de trois organes : celui du Conseil général qui agit au nom de la Conférence ministérielle lorsque celle-ci ne siège pas, de l Organe de règlement des différends afin de superviser la mise en œuvre du règlement des différends et de l Organe d examen des politiques commerciales afin d assurer la fonction de supervision et d analyse des politiques commerciales étatiques. Tous les Membres de l OMC y sont représentés par des ambassadeurs permanents. Trois conseils relèvent ensuite du Conseil général. Chacun d eux est chargé d un des trois grands domaines du commerce international

le commerce international 7 dont s est saisi l OMC : les marchandises, les services et les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce. Ils supervisent le bon fonctionnement des Accords. Des comités dont le mandat touche habituellement à des questions davantage horizontales ou transversales relèvent aussi du Conseil général. C est le cas notamment du Comité commerce et environnement, du Comité commerce et développement et du Comité sur les arrangements commerciaux régionaux. Finalement, mentionnons que deux Comités plurilatéraux s occupent de la mise en œuvre des Accords plurilatéraux encore en vigueur. Chacun de ces Comités est composé des représentants de l ensemble des Membres de l OMC, à l exception des Comités plurilatéraux qui rassemblent uniquement les représentants des Membres ayant accepté d être liés par ces Accords. Section 2 Le commerce des marchandises Documents cités et reproduits en deuxième partie 2 Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce de 1994 (GATT de 1994) (5) Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce de 1947 (GATT de 1947) (6) Accord sur la mise en œuvre de l article VI de l Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce de 1994 (7) Accord sur les subventions et les mesures compensatoires (8) Accord sur les de sauvegardes (9) Accord sur l application des mesures sanitaires et phytosanitaires (10) Accord sur les obstacles techniques au commerce (11) Décision du 28 novembre 1979 : Traitement différencié et plus favorable, réciprocité et participation plus complète des pays en voie de développement (12) Accord sur les mesures concernant les investissements et liées au commerce (13) 2. Les chiffres entre parenthèses renvoient à l ordre dans lequel les documents sont reproduits dans la seconde partie de l ouvrage.

8 droit international économique Le domaine des marchandises, tout comme celui des services, se décline selon un schéma ternaire. Le GATT de 1994 énonce les principes généraux gouvernant le commerce des marchandises. Ensuite, quelques accords viennent préciser certains secteurs (l Accord sur l agriculture et l Accord sur les textiles et les vêtements) ou certaines questions spécifiques (l Accord sur la mise en œuvre de l article VI de l Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce de 1994, l Accord sur les subventions et les mesures compensatoires, l Accord sur les sauvegardes, l Accord sur l application des mesures sanitaires et phytosanitaires et l Accord sur les obstacles techniques au commerce). Finalement, il contient les listes d engagements spécifiques qui constituent, en définitive, les engagements contraignants des Membres de l OMC. 1. La différence entre le GATT de 1947 et le GATT de 1994 Il existe une incompréhension par rapport à la distinction qui s opère entre le GATT de 1947 et celui de 1994. En fait, si l institution du GATT de 1947 est disparue lors de la création de l OMC, le texte le GATT de 1947 n est pas devenu caduc. Il a en fait été incorporé dans le nouveau GATT. C est ainsi que le GATT de 1994, qui ne fait que quelques pages, précise à son article premier que l Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce de 1994 (le GATT de 1994) comprend les dispositions de l Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce de 1947 (le GATT de 1947). Par ailleurs, le GATT de 1994 incorpore aussi d autres «acquis du GATT» de 1947. C est le cas des concessions commerciales négociées avant la date d entrée en vigueur des Accords de l OMC, de la plupart des protocoles d accession ainsi que des décisions obligatoires adoptées par les parties contractantes, y compris celles concernant les dérogations (waivers) accordées au titre de l article XXV:5 du GATT de 1947. Mentionnons que le GATT de 1994 incorpore également six nouveaux Mémorandums d accord adoptés aux termes des négociations des Accords de Marrakech. Ces derniers visent à compléter et à préciser certaines dispositions du GATT de 1947. La liste de ceux-ci se trouve au paragraphe 1c) du GATT de 1994. Finalement, le GATT de 1994 comprend le Protocole de Marrakech qui prévoit la manière dont seront colligés les résultats des négociations de chacun des Membres de l OMC sur l accès aux marchés. À ce Protocole est annexée la Liste de concessions nationales de chaque Membre qui contient ses engagements d éliminer ou de réduire les taux de droits de douane et les mesures non tarifaires.

le commerce international 9 Le GATT de 1994 constitue la lex generalis en matière de commerce de marchandises. Une série d accords relatifs au commerce des marchandises est venue le compléter ; ils constituent la lex specialis. Il s agit de : l Accord sur l agriculture ; l Accord sur l application des mesures sanitaires et phytosanitaires ; l Accord sur les textiles et les vêtements ; l Accord sur les obstacles techniques au commerce ; l Accord sur les mesures concernant les investissements et liées au commerce ; l Accord sur la mise en œuvre de l article VI de l Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce de 1994 ; l Accord sur la mise en œuvre de l article VII de l Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce de 1994 ; l Accord sur l inspection avant expédition ; l Accord sur les règles d origine ; l Accord sur les procédures de licences d importation ; l Accord sur les subventions et les mesures compensatoires ; et l Accord sur les sauvegardes. Nous avons reproduit certains de ces Accords dans la deuxième partie du présent ouvrage 1. Les autres, pour des motifs divers tenant tantôt à un haut degré de technicité, tantôt à un souci d économie d espace, ne feront que l objet d un commentaire. 2. l Accord sur la mise en œuvre de l article VI de l Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce de 1994 (Accord antidumping) Cet Accord complète l article VI du GATT de 1994. Ce dernier prévoyait la possibilité pour une partie contractante de réagir aux pratiques déloyales des entreprises en adoptant une mesure antidumping. Toutefois, il demeurait vague. Pour cette raison, il est apparu très tôt que l article VI devait être précisé. Un Code antidumping avait été adopté à l issue du Cycle Kennedy en 1967 avant d être précisé dans le cadre du Cycle de Tokyo en 1979. Ce dernier avait l avantage de préciser certains points importants. 1. Voir la liste reproduite au début de cette section.

10 droit international économique Il présentait toutefois l inconvénient de constituer un accord multilatéral à part du GATT de 1947 et nécessitait donc l assentiment des parties contractantes pour déployer ses effets obligatoires. Dans ces circonstances, les États qui acceptaient d y être liés (26 parties contractantes au total) devaient respecter les règles qui en découlaient tandis que les autres, tout en bénéficiant des avantages que cela leur procurait, n avaient pas à s y plier. Ce phénomène, communément appelé le free ride, a heureusement disparu avec la création de l OMC et l adhésion de ses Membres à un ensemble d obligations uniques et inconditionnelles. C est ainsi que tous les Membres de l OMC doivent se plier aux obligations contenues dans l Accord antidumping. Ce dernier reprend les dispositions du Code antidumping en les précisant davantage. Par exemple, il met l accent sur le lien de causalité qui doit exister entre la pratique de dumping et le dommage causé à une branche de production nationale. De plus, il confirme l interprétation à donner à l expression «branche de production nationale». 3. l Accord sur les subventions et les mesures compensatoires (Accord SMC) Quelques articles du GATT de 1947 (VI, XVI et XXIII) appréhendaient la problématique des subventions. Ainsi, le GATT de 1947 prévoyait que l octroi d une subvention étatique pouvait donner lieu à l application de droits compensateurs. Les modalités de ce moyen de défense commerciale demeuraient toutefois assez floues. Dans cette optique, un Code avait été adopté à l issue du Cycle de Tokyo en 1979 : l Accord relatif à l interprétation et à l application des articles VI, XVI et XXIII du GATT. Il est entré en vigueur le 1 er janvier 1980 et a rallié au total 24 parties contractantes. L Accord SMC l a remplacé et apporte des précisions importantes. Il définit pour une première fois ce qu est une «subvention» en plus d introduire la notion de subvention spécifique, seul type de subvention que l Accord prohibe. L Accord établit une classification des subventions en fonction de l effet dommageable que celles-ci causent aux échanges commerciaux. De ce fait, les Membres de l OMC reconnaissent qu il existe des subventions prohibées (boîte rouge), des subventions susceptibles d être contestées (boîte orange) et des subventions ne donnant pas lieu à une contestation. Ces dernières subventions peuvent être soit non spécifiques

le commerce international 11 auquel cas, elles ne sont pas condamnées aux yeux de l OMC, soit spécifiques mais octroyées dans le dessein d aider certains types d activités (boîte verte), tels que le développement des régions, la recherche industrielle ou l adoption d un mode de production écologique. Il est à noter toutefois que les subventions de catégorie «boîte verte» appartenaient à un régime dérogatoire qui n est plus en vigueur. Cela ne signifie pas pour autant que toutes les subventions de type «boîte verte» sont nécessairement condamnées. Il s agit dorénavant de faire une étude au cas par cas afin de déceler les subventions causant des effets défavorables pour les intérêts des autres Membres. Par ailleurs, l Accord SMC prévoit un régime précis quant à la manière dont les Membres qui s estiment victimes d une subvention déloyale peuvent réagir. Ainsi, les droits compensateurs ne peuvent être appliqués qu à la suite d une enquête impartiale et objective menée par l autorité nationale compétente. En ce sens, l Accord SMC précise bien les modalités susceptibles d assurer le bon déroulement de la procédure. 4. L Accord sur les sauvegardes (Accord MS) Cet Accord complète l article XIX du GATT de 1994 qui permet à un État de réagir face à une augmentation imprévue des importations susceptible de causer un préjudice grave à une de ses branches de production nationale. Autrement dit, l article XIX du GATT de 1994 permet qu un État retire unilatéralement une concession commerciale. Bien que l article XIX expose les conditions d exercice de ce recours aux mesures de sauvegarde, l expérience du passé a démontré la nécessité d en préciser les modalités. En effet, l imprécision de la rédaction de l article XIX avait conduit à un recours abusif aux mesures de sauvegarde en plus d avoir ouvert la voie à une pratique discriminatoire, soit celle des mesures d autolimitation (aussi appelée «mesures de zone grise»). Dans cette veine, l Accord sur les sauvegardes innove en interdisant les mesures d autolimitation, en fixant une clause d extinction pour toutes les mesures existantes et, surtout, en instaurant un véritable système de contrôle multilatéral du recours aux mesures de sauvegarde.

12 droit international économique 5. L Accord sur l agriculture (AsA) Cet Accord constitue l une des grandes réussites de l OMC. Il permet d intégrer à nouveau le secteur des produits agricoles dans le jeu du commerce international. On se rappellera que ce secteur avait été graduellement exclu des activités du GATT à la suite de l octroi d une dérogation importante à l égard des États-Unis. En effet, le GATT de 1947 prévoyait certaines dispositions réservant un traitement particulier aux produits agricoles. Par exemple, l article XI:2 du GATT de 1947 prévoyait la possibilité pour les parties contractantes d adopter, à certaines conditions, des restrictions quantitatives à l égard des produits agricoles. Toutefois, le respect des obligations particulières imposait un carcan trop serré aux goûts de certaines parties contractantes pour le développement de politiques agricoles nationales. Aussi, la pratique des parties contractantes du GATT de 1947 a-t-elle eu tôt fait de révéler la sensibilité particulière du commerce de ces produits. Le moment décisif de l histoire de l encadrement du commerce des produits agricoles par le GATT de 1947 a été l adoption, en 1955, d une dérogation demandée par les États-Unis à ses obligations au titre des articles II et XI du GATT de 1947. Une fois cette dérogation consentie, le gouvernement américain a été libéré de l obligation de respecter les critères et les limites édictés par ces articles pour imposer des restrictions quantitatives nécessaires à la protection de l efficacité des politiques de soutien à l agriculture au niveau national. Les privilèges de cette dérogation ayant été accordés au principal exportateur mondial de produits agricoles, il est devenu difficile d exiger, par la suite, que les autres parties contractantes ouvrent leurs frontières sans concession équivalente de la part du principal marché mondial de l époque. Dans les décennies qui ont suivi, les politiques agricoles nationales ont gagné en ampleur et en complexité, marginalisant d autant le secteur des échanges agricoles par rapport à la progression de la libéralisation d autres marchandises. Ce n est finalement qu avec la conclusion des négociations du Cycle d Uruguay, à Marrakech en 1994, que l agriculture a été «réintégrée» dans le giron des disciplines multilatérales. À cet égard, l AsA a contribué à rétablir la prévisibilité dans les échanges par l établissement d une structure tripartite d obligations visant l accès aux marchés, les mesures de soutien interne et les subventions à l exportation.

le commerce international 13 5.1 L accès aux marchés Au niveau de l accès aux marchés, l AsA a imposé la tarification de toutes les restrictions quantitatives imposées au moment de la signature de l Accord. Par ailleurs, les Membres de l OMC se sont engagés à ne pas rétablir de telles mesures si ce n est dans les limites établies par certaines exceptions. Ainsi, toutes les restrictions quantitatives ont dû être converties en droits de douane. Si ceux-ci ont sensiblement le même effet protecteur pour l État importateur, ils ont l avantage d être transparents et d établir une base uniforme qui facilitera l abaissement des niveaux de protection lors d éventuelles négociations. Dans cette optique, l AsA dispose d engagements de réduction des droits de douane appliqués aux produits agricoles pour une période de mise en œuvre donnée. L importance de l engagement de réduction, tout comme la période dont bénéficie le Membre pour atteindre cet engagement de réduction, varient selon qu il s agit d un pays développé ou d un pays en voie de développement. Il s agit là d une application du principe de «traitement spécial et différencié». 5.2 Les mesures de soutien interne En ce qui concerne les mesures de soutien interne, l Accord s avère un compromis entre d une part, la nécessité de réduire les politiques d aide aux agriculteurs et, d autre part, le maintien de certaines politiques répondant aux besoins particuliers des Membres dont les distorsions générées sur les échanges commerciaux sont nulles ou tout au plus minimes. L Accord différencie donc deux grandes catégories de mesures : celles dites de la catégorie «verte» qui répondent aux critères établis par l Annexe 2 de l AsA et celles prévoyant un soutien interne ne relevant pas de la catégorie «verte». Ces dernières sont encadrées par l article 6 de l AsA. Le fondement de la distinction du traitement de ces mesures de soutien réside dans les effets de distorsion sur les échanges commerciaux internationaux que sont réputées avoir ces mesures. Les mesures de la catégorie «verte» répondent à une prescription fondamentale à savoir que leurs effets de distorsion sur les échanges commerciaux internationaux soient nuls ou tout au plus minimes. Parce qu elles ne génèrent pas ou peu d effets sur les échanges internationaux, les mesures de la catégorie «verte» sont exemptées de tout engagement de réduction. Un Membre peut donc investir autant de ressources

14 droit international économique financières qu il le souhaite dans de telles mesures, pour peu qu il respecte les conditions posées à l Annexe 2 de l AsA. Les autres mesures de soutien interne, c est-à-dire celles qui ne répondent pas aux critères pour être qualifiées de catégorie «verte», sont catégorisées sous quatre appellations et sont toutes encadrées par l article 6 de l AsA : mesures de la boîte «orange», mesures de la boîte «bleue», mesures de minimis et mesures de développement. Nous l avons dit, les mesures de soutien interne qui ne relèvent pas de la catégorie «verte» sont réputées causer des distorsions aux échanges. Toutefois, seules les mesures de la boîte «orange», qui représentent la principale souscatégorie, font l objet d un engagement de réduction des mesures de soutien interne. En fait, les autres sous-catégories ont été jugées soit produire des effets de distorsion négligeables (c est le cas des subventions de minimis et de celles relevant de la boîte «bleue»), soit être nécessaires ou légitimes (c est le cas des mesures de développement). Pour évaluer le respect par les Membres de l engagement de réduction des mesures de soutien interne qui causent des distorsions sur les échanges, un indice composite, la «mesure globale du soutien» (MGS), a été élaboré dans le cadre des négociations de l AsA. Ainsi, toute mesure qui ne satisfait pas aux critères des différentes mesures épargnées par l engagement de réduction (soit les mesures des catégories «verte», «bleue», de minimis et de développement) doit être comptabilisée dans le calcul de la MGS d un État. Notons par ailleurs que l obligation de réduction du soutien interne posée par l Accord sur l agriculture s applique au montant de la mesure globale du soutien interne d un Membre et non pas à une mesure en particulier. Ce qu il convient de mettre ici en exergue, c est que les Membres de l OMC reconnaissent que toutes les mesures de soutien interne n ont pas le même impact sur les échanges internationaux. En ce sens, ils se sont préservés, à l intérieur de l AsA, une certaine flexibilité afin de pouvoir soutenir leur agriculture tout en amorçant la réduction des impacts de ces mesures de soutien sur les échanges internationaux. 5.3 Les subventions à l exportation Finalement, l AsA dispose d un régime sur les subventions à l exportation qui lui est propre. L Accord reprend certes de nombreux éléments de l Accord SMC, mais conformément à son article 21, il prévaut en tout temps lorsque deux accords sont susceptibles de s appliquer. Aussi, est-ce là un autre exemple du traitement particulier

le commerce international 15 des produits agricoles dans le commerce international. Par ailleurs, si les Membres n ont pas accepté de prohiber le recours aux subventions à l exportation en matière de produits agricoles, ils ont néanmoins convenu d une réduction tant de la valeur des subventions à l exportation que du volume des produits subventionnés. 5.4 Les négociations en cours Nous l avons mentionné plus tôt, le Programme de Doha a en grande partie été paralysé par l achoppement des négociations en matière de produits agricoles. Les négociations sur les différentes questions liées à un accroissement de la libéralisation dans les échanges internationaux de produits agricoles opposent certains groupes de pays aux positions divergentes. Par exemple, un groupe de pays formé des principaux exportateurs de produits agricoles, le groupe de Cairns, prône une plus grande ouverture du marché tandis que les Communautés européennes tentent de protéger davantage ce secteur qu elle considère multifonctionnel, c est-à-dire comme assurant non seulement une fonction alimentaire et économique, mais aussi un rôle de maintien de la communauté et de développement rural. Conformément à cette philosophie, la Communauté européenne consacre près de 50 % de son budget à la politique agricole commune (PAC). Face à cette pratique, les pays en voie de développement insistent pour une plus grande libéralisation du secteur des produits agricoles. Dans cette optique, considérant de surcroît l impact que peuvent produire de nouvelles obligations de libéralisation sur les populations vivant de l agriculture, il n est pas surprenant que la réduction des mesures de soutien interne devienne un sujet chaud et difficilement résoluble. 6. l Accord sur l application des mesures sanitaires et phytosanitaires (Accord SPS) Déjà à l époque du GATT de 1947, on acceptait que des obstacles au commerce puissent être imposés afin de protéger la santé et la vie des personnes et des animaux, et d assurer la préservation des végétaux. Ainsi, l article XX du GATT de 1947 permettait des exceptions aux règles du commerce pour que soient adoptées des mesures destinées à protéger la santé et la vie des personnes et des animaux ou la préservation des végétaux, pourvu que celles-ci ne soient évidemment pas appliquées de façon à constituer soit un moyen de discrimination arbitraire ou injustifiable entre les pays où les mêmes conditions existent, soit une restriction déguisée au commerce international.

16 droit international économique Cependant, à la suite de l abaissement constant des droits de douane au cours des dernières années, certains États ont succombé à la tentation du néo-protectionnisme en restreignant le libre commerce au moyen de mesures non tarifaires. De ce constat, un exercice de précision de l article XX du GATT de 1947 s est avéré nécessaire. Le conflit transatlantique opposant le Canada et les États-Unis aux Communautés européennes par rapport aux résidus d hormones acceptables dans la viande bovine est venu confirmer la nécessité d encadrer le pouvoir réglementaire des États. C est dans ce contexte que l Accord SPS a été négocié. Selon les termes mêmes du Préambule, l Accord SPS est destiné à limiter l impact négatif de l adoption de mesures «nécessaires à la protection de la santé et de la vie des personnes et des animaux ou la préservation des végétaux» sur le commerce international. Il met en œuvre le paragraphe XXb) du GATT de 1947 et, de ce fait, se trouve sous la gouverne des principes qui y sont énoncés. Toutefois, l Accord SPS ne se contente pas de préciser le contenu de l article XX du GATT de 1947. D abord, son champ d application est beaucoup plus restreint. Ensuite, il va plus loin et met en place un tout nouveau mécanisme d adoption des règles de protection basé sur l harmonisation des règles sanitaires et phytosanitaires nationales et, à défaut, sur la preuve scientifique. L Accord SPS fixe des conditions strictes et sévères. À défaut de suivre une norme internationale adoptée par l une des trois organisations sœurs (la Commission du Codex alimentarius, l Office international des épizooties et les différentes organisations gravitant autour de la Convention internationale pour la protection des végétaux), le Membre désirant adopter une mesure SPS doit procéder à ses frais à une évaluation des risques en bonne et due forme, impliquant de ce fait une capacité technique, scientifique et financière. Par ailleurs, le recours au principe de précaution semble difficile et strictement encadré en situation d insuffisance de preuves scientifiques et s avère exclu en situation d incertitude scientifique. Toutefois, il semble que la réputation que l Accord SPS ait acquise depuis son adoption soit en grande partie tributaire de l interprétation rigide que les groupes spéciaux et l Organe d appel lui ont donnée. Rappelons qu aucun État n a pu jusqu à maintenant justifier une mesure faisant l objet d une plainte au regard des dispositions de l Accord SPS. Autrement dit, si l Accord semble accorder une certaine marge de manœuvre aux Membres dans l adoption et la mise en œuvre de politiques sanitaires et phytosanitaires, une étude fine de la jurisprudence ayant interprété l Accord SPS nous porte à croire que les Membres se trouvent

le commerce international 17 en grande partie dépossédés de leur pouvoir réglementaire au titre de l Accord SPS. 7. l Accord sur les obstacles techniques au commerce (Accord OTC) Un premier Code de la normalisation a été signé en 1979 lors du Cycle de Tokyo. Seulement quarante-six États y étaient parties. Lors des négociations ayant mené à l adoption de l Accord de Marrakech, le Code a été renforcé et clarifié. Il porte désormais le nom d Accord sur les obstacles techniques au commerce (Accord OTC). Son objectif répond à une préoccupation constante, soit celle d empêcher que des obstacles non tarifaires, utilisés à des fins protectionnistes n entravent le commerce des marchandises. L Accord OTC reconnaît la nécessité et la légitimité pour un État de réglementer les produits si cet exercice a pour finalité la réalisation d objectifs légitimes. Le cadre d application de l Accord OTC apparaît moins strict que celui imposé par l Accord SPS. Toutefois, le peu de différends l ayant concerné ne nous permet pas d évaluer son potentiel restrictif quant à la marge de manœuvre des États en matière de réglementation au regard de ses dispositions. Plus précisément, il s applique aux règlements techniques, aux normes des offices de normalisation et aux procédures d essai et d homologation. De plus, il couvre les procédés et les méthodes de production liés aux caractéristiques du produit de manière générale, ainsi que les procédés et les méthodes de production liés et non liés aux caractéristiques en matière d étiquetage. 8. la Décision du 28 novembre 1979 : Traitement différencié et plus favorable, réciprocité et participation plus complète des pays en voie de développement (Clause d habilitation ou CH) Au départ, le GATT de 1947 n accordait pas de statut particulier aux pays en voie de développement (PED). Même l adjonction de la Partie IV en 1966, intitulée «Commerce et Développement», n apporta que très peu d éléments nouveaux. Le GATT de 1947 accordait certes la possibilité aux PED de recourir à certaines exceptions, par le biais de l article XVIII et du fameux principe de non-réciprocité dans les négociations commerciales formalisé à l article XXXVI:8, mais ce n est que

18 droit international économique dans les années qui ont suivi que leur statut s est réellement précisé. D abord, en 1971, deux dérogations prises au titre de l article XXV:5 du GATT de 1947 jetèrent les bases du système généralisé de préférences (SGP) sans réciprocité en faveur des PED (décision du 25 juin 1971) et de la conclusion d arrangements commerciaux préférentiels (décision du 26 novembre 1971). À l issue du Cycle de Tokyo, les parties contractantes ont convenu de pérenniser les acquis des deux décisions de 1971 par l adoption d une décision intitulée Traitement différencié et plus favorable, réciprocité et participation plus complète des pays en voie de développement. Communément surnommée la «Clause d habilitation», cette décision donne une base juridique permanente au traitement dérogatoire dont bénéficient les PED. La Clause d habilitation prévoit ainsi que les PED peuvent déroger au principe de la clause de la nation la plus favorisée dans quatre situations : dans le cadre du SGP accordé par les pays développés, dans le cadre de mesures non tarifaires, dans le cadre d accords préférentiels de commerce entre PED et dans le cadre d un traitement spécial accordé aux pays les moins avancés. Mentionnons que cette décision, bien qu adoptée sous l égide du GATT, est incorporée dans le droit matériel de l OMC puisqu elle fait partie des «acquis du GATT» au sens du sous-alinéa 1b)iv) du GATT de 1994 et de l article XVI:1 de l Accord instituant l Organisation mondiale du commerce. Elle ne concerne toutefois que le domaine du commerce des marchandises. 9. l Accord sur la mise en œuvre de l article VII de l Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce de 1994 (Accord sur la valeur en douane) L Accord sur la valeur en douane établit, en vertu de l article VII du GATT de 1994, les règles que les pays doivent suivre pour évaluer les droits de douane des biens au moment de leur arrivée dans le pays importateur. Les valeurs d évaluation ont initialement été négociées à Tokyo et modifiées lors du Cycle d Uruguay afin d assurer plus de précision et de faciliter la tâche des douaniers dans le processus de vérification des valeurs déclarées.

le commerce international 19 Ces droits sont généralement des droits ad valorem, c est-à-dire qu ils sont proportionnels à la valeur des biens et sont représentés par un pourcentage de la valeur d importation du bien en question. L Accord indique que cette valeur devrait, en principe, être fondée sur la valeur transactionnelle. Cette dernière correspond au prix normalement payé par l importateur et constitue le critère pour déterminer le prix relatif au droit de douane imposé. Cette valeur doit être déterminée selon le prix réellement payé, incluant des frais tels que les commissions ou les frais de manutention. Il est important de noter que cet Accord permet aux autorités douanières de rejeter les valeurs déclarées, si elles ont des raisons de douter de l authenticité de la valeur déclarée. 10. L Accord sur l inspection avant expédition (Accord IAE) L Accord IAE vise à faciliter les échanges tout en garantissant aux pays importateurs que les produits ont été bien inspectés avant leur expédition. En réalité, de nombreux pays en voie de développement exigent qu une inspection soit faite sur le territoire du Membre exportateur avant l expédition. Cette exigence résulte d un souhait de contrôler la qualité, la quantité et le prix des marchandises commandées afin de prévenir entre autres la fraude commerciale et le détournement des droits de douane, et pallier le manque d effectif administratif des PED. L inspection avant expédition est souvent confiée à une entité privée spécialisée dans le contrôle de marchandises destinées à l exportation. L application de cette exigence, sans cadre international convenu, pourrait fort bien conduire à des excès et occasionner des retards non nécessaires. Dans cette optique, l Accord IAE encadre l inspection avant expédition en prescrivant de nombreuses obligations incombant aux Membres importateurs ayant exigé l inspection (dénommés par l Accord IAE, les Membres utilisateurs) telles que la non-discrimination, la transparence et la protection des renseignements commerciaux confidentiels. De plus, l Accord IAE prévoit certaines modalités nécessaires afin que soient évités les conflits d intérêts surtout entre entités d inspection, ainsi que les retards indus. Ces prescriptions sont importantes, car les Membres utilisateurs sont ceux qui octroient le contrat d inspection et déterminent en définitive les conditions de l inspection. Par ailleurs, l Accord prescrit aussi certaines obligations incombant aux Membres exportateurs. Ceux-ci doivent respecter les principes de

20 droit international économique non-discrimination et de transparence, et ils doivent fournir sur demande, l assistance technique nécessaire à la réalisation des objectifs de l Accord IAE. Notons toutefois qu ils ne sont pas tenus d autoriser les entités publiques des autres Membres à mener des activités d inspection avant expédition sur leur territoire. Chaque Membre utilisateur doit s assurer que les entités d inspection avant expédition aient établi des procédures leur permettant de recevoir des plaintes des exportateurs. À défaut d une solution mutuellement convenue entre les deux parties, dans les deux jours suivant le dépôt de la plainte, l une ou l autre d entre elles peut demander un examen indépendant. En application de l Accord IAE, un mécanisme indépendant a été créé par décision du Conseil général de l OMC le 13 décembre 1995 et une entité indépendante, composée de mandataires de la Fédération internationale des sociétés d inspection (IFIA) et de mandataires de la Chambre de commerce internationale (CCI), représentant respectivement les entités d inspection avant expédition et les exportateurs, a été mise sur pied. Il s agit en réalité d un groupe spécial d arbitrage chargé du règlement des différends susceptibles de naître de l inspection avant expédition. La procédure s avère expéditive en raison des conséquences qu un retard dans l exportation de marchandises peut occasionner à l exportateur. Le groupe spécial d arbitrage doit rendre sa décision, contraignante pour les parties, dans un délai de huit jours ouvrables à compter de la demande d examen indépendant. On notera que ce processus constitue une particularité notable de l Accord IAE, puisqu il s agit de la seule procédure administrée par l OMC permettant une saisine directe de personnes privées. 11. L Accord sur les règles d origine Dans un contexte de mondialisation, les produits traversent les frontières assez facilement. Certains d entre eux sont importés non pas aux fins de commercialisation, mais en tant que pièces détachées nécessaires à la fabrication de produits finis. Dans ces circonstances, il peut devenir difficile d établir d où provient une marchandise. En définitive, ce sont les règles d origine qui déterminent les droits et les restrictions applicables. Ainsi en fonction du lieu d origine du produit, les autorités douanières décideront, par exemple, si une marchandise entre dans un contingent, bénéficie d une préférence tarifaire ou est visée par un droit compensateur. Par ailleurs, les règles d origine sont essentielles à la compilation des données commerciales et au processus d étiquetage des produits.

le commerce international 21 Les États ont donc adopté des mesures (lois, réglementations et procédures administratives) qui déterminent le réel pays d origine d un produit. Or, le contenu de ces mesures varie d un État à l autre : tous les États ne déterminent pas l origine d un produit sur la base des mêmes critères. Il est conséquemment apparu important pour les négociateurs du Cycle d Uruguay d adopter un ensemble de règles capables d éviter que les règles d origine ne constituent des obstacles techniques au commerce et d harmoniser, à plus long terme, les différentes règles d origine. L Accord sur les règles d origine remplit cet objectif. Dans un premier temps, tenant pour acquis qu il existe un grand nombre de règles d origine différentes, il impose un cadre à respecter aux Membres : transparence, cohérence, uniformité et impartialité. Dans un deuxième temps, l Accord prévoit l adoption de règles d origine communes applicables à tous les Membres de l OMC. L Accord vise donc, à terme, une harmonisation des règles d origine. L Accord prévoyait initialement une harmonisation dans les trois ans de son adoption. Plus de dix ans suivant l expiration de ce délai, en l absence d entente, force est de constater que la question des règles d origine soulève des problèmes de fond plus difficilement surmontables que ce qui avait été anticipé. Nous noterons toutefois que l Accord sur les règles d origine ne s applique pas aux règles d origine destinées à régir les relations de traitement préférentiel (zone de libre-échange, union douanière et soutien aux pays en voie de développement par le biais du système généralisé de préférence). À cet égard, une Déclaration commune a été annexée à l Accord et traite précisément des règles d origine déterminant si une marchandise peut bénéficier d un traitement préférentiel. 12. l Accord sur les procédures de licences d importation (Accord PLI) On sait qu un des principes fondamentaux du GATT de 1994 consiste en une prohibition des restrictions quantitatives non tarifaires (article XI:1). Toutefois, certaines dispositions des Accords de l OMC permettent dans un contexte particulier, à certaines conditions et selon des formalités strictes, ce genre de restrictions. C est le cas de l AsA et de l Accord sur les sauvegardes. Les États exigent, dans certains cas comme préalable à l importation de produits, la présentation à l organe administratif compétent d une demande ou de documents autres que ceux requis aux fins douanières. L Accord PLI encadre cette exigence. Il complète l article VIII du GATT de 1994 relatif aux redevances et

22 droit international économique formalités se rapportant à l importation et à l exportation, et met à jour l Accord relatif aux procédures en matière de licences d importation adopté à l issue du Cycle de Tokyo. L Accord PLI tente de simplifier les procédures de licences d importation. Il impose certaines disciplines de neutralité, de justice et d équité relativement à l application et à l administration des licences d importation. Par ailleurs, il prescrit une publication des règles et des procédures de présentation des demandes et exige que les formules et procédures de demande et de renouvellement soient simples. Finalement, il exige une conformité des procédures de licences d importation avec les principes du GATT de 1994 ; en ce sens, il interdit qu elles causent des distorsions inutiles dans les courants d échange. L Accord PLI prévoit des disciplines différentes en ce qui concerne les licences automatiques et celles qui sont non automatiques. Les premières sont accordées dans tous les cas sur présentation d une demande. Elles sont habituellement exigées lorsqu un État désire recueillir des données sur les flux de certains produits ou constituer une banque de données statistiques. Elles ne doivent être maintenues que temporairement le temps que l objectif pour lequel elles ont été instituées soit atteint et doivent respecter certaines garanties surtout reliées au critère de délivrance automatique, en plus des règles générales qui s appliquent à tous les types de licence que nous avons décrits sommairement ci-dessus. Les deuxièmes, les licences non automatiques, sont définies par l Accord d une manière négative : il s agit des licences qui ne sont pas automatiques. Les États y recourent pour assurer la mise en application des restrictions quantitatives conformes aux Accords de l OMC, c est-à-dire pour limiter l importation de produits qui excèdent les quantités prescrites par les restrictions. Les États peuvent aussi y recourir pour d autres motifs, comme l application de contingents tarifaires. L Accord PLI prévoit des disciplines plus rigoureuses à l égard des procédures de licences non automatiques. 13. L Accord sur les textiles et les vêtements (ATV) L ATV a été abrogé le 1 er janvier 2005. Cela signifie que le commerce des produits textiles et des vêtements est dorénavant soumis aux disciplines générales du GATT et des autres accords pertinents. L abrogation de l ATV met ainsi fin au régime spécial dont bénéficiaient les produits textiles et les vêtements.

le commerce international 23 14. l Accord sur les mesures concernant les investissements et liées au commerce (Accord MIC) Le GATT de 1947 ne prévoyait pas de règles particulières en matière d investissement. Toutefois, les parties contractantes du GATT n avaient pas complètement ignoré ce domaine, puisqu elles avaient adopté en 1955 une résolution visant à encourager les États à conclure des accords bilatéraux afin que les investissements étrangers soient protégés. Il est toutefois apparu essentiel, au début des années 80, d encadrer davantage le domaine afin que les principes fondamentaux du GATT s appliquent au domaine de l investissement direct étranger. C est dans cette optique que l Accord MIC a été négocié. L objectif de l Accord MIC est de «promouvoir l expansion et la libéralisation progressive du commerce mondial et de faciliter les investissements à travers les frontières internationales de manière à intensifier la croissance économique de tous les partenaires commerciaux, en particulier des pays en développement Membres, tout en assurant la libre concurrence». L Accord MIC s applique au commerce des marchandises. Nous noterons toutefois que l Accord général sur le commerce des services (AGCS), du fait qu il couvre la fourniture de services grâce à une «présence commerciale», c est-à-dire par une société étrangère exerçant des activités dans un pays d accueil, protège à sa manière l investissement direct étranger en matière de services. L Accord indique qu aucun Membre n appliquera de MIC incompatibles avec l article III:4 du GATT de 1994, relatif au principe de traitement national, et l article XI:1 du GATT de 1994 prévoyant l élimination des restrictions quantitatives. À l Accord, est annexée une liste non exhaustive de mesures incompatibles avec les articles III:4 et XI:1 susmentionnés. Par exemple, l Accord interdit l application de mesures imposées à des investisseurs étrangers comme condition d investissement incluant, par exemple, l obligation d acheter des produits d origine locale.

24 droit international économique Section 3 Le commerce des services Document cité et reproduit en deuxième partie* Accord général sur le commerce des services (14) 1. L Accord général sur le commerce des services (AGCS) Par l adoption de l AGCS, le droit du commerce international allait dorénavant appréhender un nouveau domaine, celui des services. Il s agissait là d une évolution normale compte tenu du fait que les pays développés perdaient de plus en plus leur part de marché en matière de commerce des marchandises au profit des PED alors qu ils développaient considérablement celui du commerce des services qu on considère constituer en moyenne de 60 à 70 % de leur produit national brut. À la fin des années 90, on considérait que le commerce des services constituait déjà un cinquième des échanges mondiaux en terme de balance des paiements (UNSD, Manuel des statistiques du commerce international des services) et provoquait plus de la moitié des flux d investissements internationaux (CNUCED, World Investment Report, 2000). Tout comme le GATT, l AGCS est fondé selon un schéma ternaire. Il constitue d abord un accord-cadre prévoyant des principes applicables au commerce des services. Certains principes sont applicables à tous les Membres et à tous les secteurs de services tandis que d autres ne trouvent application qu à l égard des Membres ayant libéralisé un secteur de services. Ensuite, il est composé des listes d engagements spécifiques établies par chacun des Membres. Il s agit là du pendant des listes de concessions annexées au GATT de 1994. Les Membres doivent indiquer, dans leur liste, leur engagement en matière d accès aux marchés et de traitement national par rapport à chacune des catégories de services et à l égard des quatre modes de fourniture de services prévus par l AGCS. Finalement, l AGCS contient des annexes portant sur des secteurs (finance et télécommunication) ou des questions liées au commerce des services (mouvement des personnes physiques). Il s agit en réalité de * Les chiffres entre parenthèses renvoient à l ordre dans lequel les documents sont reproduits Les chiffres entre parenthèses renvoient à l ordre dans lequel les documents sont reproduits dans la seconde partie de l ouvrage.