Mon projet artistique: Je dois produire, dans le cadre de mon cours La pratique de la peinture : les techniques, un diptyque qui questionne le support. L image produite sur les toiles doit avoir un lien, une raison ou une nécessité importante avec le format du support. Il s agit d élaborer deux tableaux explorant une thématique personnelle. Étant donné que ma pratique personnelle se résume principalement à la peinture, j ai jugé adéquat le fait de produire mon projet artistique de cette manière. De plus, l idée de jumeler deux cours afin d intégrer un volet pédagogique à mon projet artistique et ainsi doubler les contraintes me semblait être un beau défi. Mon cours de peinture me laisse beaucoup de liberté concernant le sujet et il me force à travailler selon une méthode dans laquelle je n ose pas m aventurer habituellement. C est-à-dire travailler sur un support non-conventionnel. Ce détail entre en lien avec mon volet pédagogique; j amène des gens à apprendre selon une technique qui n est pas conventionnelle pour eux, mais j y reviendrai un peu plus tard. Je travaille sur un support parfaitement rond. Déjà, je sors de mes standards et je tente de donner une raison au support. Cela dit, je travaille l autoportrait multiplié sur le format rond afin de ne pas identifier de «personnage principale». Les cinq autoportraits sont traités en cinq genres différents, du moins, le plus possibles afin de créer un plus vaste de choix de croisements de genres. On peut voir un autoportrait plus réaliste, suivi d une caricature, d un dessin de type «bande dessinée», d un autre faisant référence au «Pop Art» et finalement, un portrait ressemblant plus à une peinture à numéro. Ils sont tous disposés autour de la toile ronde énonçant aucun début et aucune fin. Je me représente en train de peindre, par contre nous ne voyons pas ce qu il y a sur les toiles des personnages. Nous pouvons supposer qu ils ne peignent pas
tous la même chose étant donné les différentes expressions sur leur visage. Je laisse donc la porte ouverte à différentes hypothèses reliant le sujet des toiles des personnages à ceux que travailleront avec moi les gens qui participeront à mon volet pédagogique. Le volet pédagogique : Il est important de savoir que lors de mes apprentissages antérieurs en arts plastiques, j ai appris à faire éclore mon talent en côtoyant et en travaillant avec des gens que je jugeais plus talentueux que moi en dessin. J avais souvent recours au mimétisme pour découvrir de nouvelles techniques. Le mimétisme est souvent négligé par les enseignants en arts. Pour ma part, je crois dur comme fer en cette technique, car elle m a apprit à maîtriser ce en quoi j avais tant d intérêts et elle me permettait d ajouter ma touche personnelle et artistique en modifiant le mimétisme préalablement pratiqué. De plus, cette technique peut permettre à des gens qui n ont jamais dessiné de leur vie à pouvoir réaliser quelque chose d esthétiquement beau et se donner à eux-mêmes une confiance en soi afin de poursuivre dans une pratique artistique. Cela dit, je fais peindre à des gens des petites toiles de la manière dont ils se sentent le plus à l aise, ou encore d une manière qu ils aimeraient éventuellement maîtriser. Je sélectionne des proches qui rêvent d avoir un talent en dessin ou en peinture, ou qui admirent mon travail et qui aimeraient en faire autant. En général, les arts visuels ne font pas parti des principaux intérêts de ces gens.
Rendre une signature réaliste : La première personne a décidé de réaliser un autoportrait également, à partir d un petit personnage qu elle dessine lorsque qu elle pratique sa signature. J ai proposé de reprendre cette naïve petite signature afin de lui donner un aspect plus réaliste selon un de mes cinq personnages représentés sur ma toile ronde. J ai d abord suggéré de dessiner son petit «bonhomme» sur la toile, mais d ajouter quelques détails très simples comme un nez ou des yeux plus complexes que de simples petits points. Ensuite, ce fut très captivant, autant pour elle que pour moi, de lui montrer comment réaliser un dessin d observation afin de dessiner une main. Cette personne a toujours trouvé très compliqué de dessiner des mains, alors nous nous sommes assis ensemble et nous avons chacun dessiné notre main positionnée de la même manière. De cette façon, mon apprenti avait le choix d observer sa propre main, ou mon propre dessin afin de s aider elle-même. Plus jeune, j ai moi-même appris à dessiner des mains en observant les miennes dans la position que j avais besoin, comme plusieurs me l avaient conseillé à l époque.
Autoportrait par numéro : Ensuite, la deuxième personne avait pour but d être capable de peindre une toile qu elle pourrait accrocher pour décorer sa chambre. Elle a su profiter de l occasion de mon volet pédagogique pour faire elle-même une toile dont elle serait fière plutôt que de me la faire faire éventuellement. Elle a utilisé une technique faisant référence à la peinture à numéro, comme l un de mes personnages. Nous avons travaillé une vieille photo d elle à l aide du programme Photoshop en utilisant des filtres, afin de créer un effet amusant et simple à réaliser. Puis, nous avons projeté, à l aide d un projecteur, le résultat sur une toile afin que la personne puisse tracer sa photo et la peindre par la suite. Enfin, elle n a eu qu à choisir les bonnes tonalités pour pouvoir modifier les couleurs afin que l image reste tout aussi efficace que notre petit montage. Inspirée par la répétition Ma copine, quant à elle, a décidé de s inspirer, non pas de la notion d autoportrait, ou de touches de pinceaux, mais bien de l élément de répétition qui apparaît dans ma toile. Elle a commencé en illustrant quatre canettes sur une toile
carrée. Cela donne un aspect «pop» à l œuvre. J ai douté de l efficacité de faire le lien entre ma toile et la sienne, par contre, je me suis dis que si c est ce qui l a inspirée, alors pourquoi pas? D ailleurs, je ne dois pas avoir le contrôle des œuvres que je fais faire, autrement, je pourrais simplement les produire moi-même. J ai seulement proposé de traiter les quatre canettes de manières différentes afin de rendre le lien un peu plus visible. Note : Les trois dernières personnes ont travaillé ensemble lors de l activité pédagogique. Reproduire une image concrète La toile de l œil animal fut assez simple. Mon père a rapidement apprit à maîtriser les couleurs et les coups de pinceau. Pour lui, ce n était que de l observation. Le défi était de lui montrer les différentes façons d appliquer les couleurs pour les différentes surfaces, comme les poils et l intérieur de l œil à l aide des différents
pinceaux disponibles. Le plus utile fut l utilisation de glacis, afin de «fusionner» les couleurs pour laisser voir des dégradés plus fluides. Sortir de sa zone de confort Mon élève le plus difficile fut ma propre mère. Pourtant, cette dernière est selon moi, celle qui possède le talent artistique le plus développé du groupe. Son grand défaut est qu elle est beaucoup trop perfectionniste et elle a très peur de l erreur. Contrairement à mon père, ma mère a déjà développé sa propre technique en peinture. Elle travaille de temps à autres la peinture sur bois. Cela dit, mon père n ayant aucune technique, a su apprivoiser rapidement celle que je lui ai proposée, alors que pour ma mère, il a fallu qu elle se réadapte à une nouvelle technique afin qu elle puisse réaliser adéquatement l image choisie. Ce n est pas évident de changer de technique du jour au lendemain lorsqu on a été habitué à peindre toujours de la même façon. D abord, elle tenait absolument à réaliser une image qu elle pourrait peindre elle-même. Le plus difficile a été de lui faire comprendre que ma tâche était justement de l aider à produire quelque chose qu elle ne serait pas capable de faire seule, qu il s agit en fait de mon projet, pas du sien. Mon défi est d amener les gens à réaliser quelque chose qu ils ne s attendent
pas à pouvoir faire eux-mêmes et qu ils ont envie d en avoir la capacité. De là mon choix de techniques offert par ma toile ronde. Bref, elle commence la peinture, mais avec une soixantaine de bouteilles de peinture acrylique et elle prend la majeure partie de son temps à trouver la couleur exacte de la photo qu elle veut reproduire. Malgré son immense choix de couleurs, elle n arrive pas à trouver la bonne couleur. Je me suis alors trouvé un nouveau défi : apprendre à cette personne à faire ses propres mélanges à l aide des trois couleurs primaires. Aussi, je dois lui faire comprendre que la peinture est l un des médiums qui nous donne le plus droit à l erreur. Je veux qu elle se trompe, je veux qu elle n utilise pas la bonne couleur afin de travailler ensemble sur des moyens pour régler le problème (si problème il y a). Ensuite, elle a regretté de ne pas avoir décidé d apprendre une méthode ressemblant à mon personnage caricaturale. Elle a appris que j étais là pour lui faire découvrir une technique et la sortir de sa zone de confort. Au moins, j aurai réussi à lui faire comprendre l idée de base de mon projet! Mon but étant, comme mentionné précédemment, d amener des gens à apprendre selon une technique qui n est pas conventionnel pour eux La suite des choses a été différente. J ai remarqué que ma mère avançait «à reculons». Nous avons beaucoup discuté sur qu est-ce qu elle peut bien apprendre en faisant ce travail. Comme je l ai mentionné, cette personne a beaucoup de talent en peinture sur bois. Donc, le travail qu elle faisait avec moi était en fait, presque la même chose, mais avec des contraintes qui ne fonctionnaient pas du tout avec ses méthodes. Alors, tant qu à faire, j ai décidé de lui proposé de travailler avec une touche complètement différente. Elle admirait beaucoup la peinture de l œil de loup. Alors nous allons travailler ensemble selon une nouvelle méthode. De cette façon, elle réalisera plus facilement qu elle a droit à l erreur et qu elle peut peindre spontanément sans avoir
le souci de la perfection. La toile n est pas encore commencée, mais nous comptons bien la produire ensemble très bientôt. Note : Les deux dernières personnes ont travaillé ensemble. Simplement créer une image, retrouver son talent Un autre atelier pédagogique m a beaucoup touché. C est celui où j ai fais peindre ma grand-mère atteinte légèrement d Alzheimer. Cette dernière ne sait plus écrire, et encore moins dessiner. C était pour moi un beau défi que de lui faire simplement réaliser une image concrète qui lui plairait, sans plus. Je lui ai proposé de dessiner un père-noël. Nous avons procédé ligne par ligne. C est-à-dire qu elle me suivait tranquillement en imitant mes mouvements sur sa toile. Nous avons eu à corriger quelques lignes, qui paraissaient parfois superflues, avec du blanc en guise de gomme à effacer. Ce fut un atelier très technique et peu créatif, je l admets, mais c était comme de montrer à un enfant comment dessiner dans un cahier à colorier sans dépasser, sauf qu elle a travaillé elle-même le sujet. De plus, elle est très fier du résultat. Je n aurais pas pu commencer à lui parler de s inspirer de mon projet artistique, ça n aurait fait que la mélanger. Peut-être aurait-il été intéressant de travailler le projet pédagogique
entièrement avec elle, histoire de lui faire redécouvrir ses talents d autrefois, mais je crois que cela aurait été trop lui demander. Je ne crois pas qu elle pourrait refaire la même chose seule. Elle n a peut-être pas appris à illustrer un personnage, ni à maîtriser les couleurs mais je souhaite seulement qu elle se souvienne le plus longtemps possible de ce moment passé en ma compagnie! Briser la glace en peinture Afin de ne pas terminer sur une note émotive, mon dernier sujet est un de mes amis avec qui j ai suivis la concentration arts plastique au secondaire, mais ce dernier avait prit ce cours, car il s agissait d une «option sans devoir». De plus, à l époque, je me moquais de lui, car il n était pas très doué. Nous n avions que 14 ans. Je me suis fais pardonné en lui partageant mes connaissances en dessin et en peinture. Aujourd hui cette personne travaille en multimédia et est très habile avec les logiciels de retouche d images. Par contre, il ne fait que retoucher les images d autres artistes sans pouvoir retravailler les siennes, car il s estime sans talent de dessinateur. Je lui ai alors montré à briser la glace afin de réaliser quelque chose dont il serait fier : un autoportrait inspiré de ma touche personnel en peinture et d un de ses travaux de multimédia. Me concernant, je n ai pas été très fier de moi au début de l activité. Mon ami exprimait
tellement d insécurité qu il me demandait toujours quoi faire et comment le faire et je lui montrais. Par contre, je me disais que si j étais pour contrôler sa toile, aussi bien la faire moi-même. Il m a alors répondu que s il me plaçait devant sa batterie et qu il me demanderait de jouer, j aurais effectivement besoin qu on me dise où frapper. J ai compris sa comparaison et je lui ai suggéré des techniques afin qu il soit simplement capable de les maîtriser lui-même. Après tout, c est ça le mimétisme! Anecdote : Cet ami, qui est fanatique d hockey, n a pas écouté la partie qui jouait à la télévision au même moment et a préféré faire sa toile au grand étonnement de son frère et de moi-même! Une nouvelle passion serait-elle née? Merci à : Ginette Potvin Élizabeth Potvin-Lemay Fanny-Ève Potvin Lemay Jean Leclerc Chantal Paquette Jacqueline Germain Jean-François Lépine
Ma vision du mimétisme : On présente à l apprenti un modèle à imiter, qu il ajoute ainsi à son répertoire de connaissance. Un enfant qui dessine, par exemple, Spiderman sans cesse dès son plus jeune âge, apprendra certaines techniques importantes pour poursuivre son cheminement en dessin. Bien sur, il ne sera pas polyvalent dans sa production au début, mais il aura un acquis qu il pourra ensuite modifier avec sa touche personnelle qui prendra place avec le temps. Pour se faire, l enseignant propose des stimuli spécifiques pour aider l apprenti à créer, mais pas seulement de copier. Par exemple, lors d un stage au primaire, un enfant de six ans tenait à calquer un père-noël qu il trouvait très beau. Est-ce qu on apprend réellement avec le calquage? Je ne crois pas. Je lui ai proposé de le calquer, mais ensuite, d effacer sa barbe, sa tuque, ses pieds et ses mains afin qu il invente ces derniers éléments via le dessin qu il aura sur sa feuille. De cette façon, il découvrira sa touche personnelle et pourra la travailler à sa guise. En recopiant, on découvre et on acquière certaines habiletés que l on pourra par la suite créer avec l aide d aucun modèle. Et si le plaisir est une réponse possible à l art, le renforcement positif vient, pour sa part, sanctionner les apprentissages (Arthur D. Efland, p.25) Il y a plusieurs degrés de mimétisme selon moi. En ce qui me concerne, j ai appris à recopier des personnages de la culture populaires. De cette façon, j apprenais à dessiner des corps proportionnés et imaginaires. Ensuite, je reproduisais en peinture des images existantes. Tout cela me permet d acquérir une dextérité manuelle et de pouvoir produire par moi-même par la suite. Il en est de même pour mes collègues, à l école, que j admirais le talent et la technique. En travaillant et en discutant avec eux, j ai pu apprendre des méthodes de dessins que je n aurais jamais pratiqués sans eux. Le mimétisme, ce n est pas seulement de l imitation, c est du partage!
École des arts visuels et médiatiques Université du Québec à Montréal Projet de Création et Peinture Description du volet artistique et pédagogique par Jérémie Leclerc présenté à Sophie Castonguay dans le cadre du cours AVM-2101 La pratique de la peinture : Les techniques décembre 2009