Décision du Défenseur des droits n MLD/2012-152



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Transcription:

Paris, le Décision du Défenseur des droits n MLD/2012-152 Le Défenseur des droits, Vu la Constitution du 4 octobre 1958 ; Vu la loi organique n 2011-333 du 29 mars 2011 relative au Défenseur des droits ; Vu le décret n 2011-904 du 29 juillet 2011 relatif à la procédure applicable devant le Défenseur des droits ; Vu la directive 2004/113/CE du 13 décembre 2004 mettant en œuvre le principe de l égalité de traitement entre les femmes et les hommes dans l accès à des biens et services et la fourniture de biens et services ; Vu le Code des assurances ; Vu le Code pénal ; Vu la loi n 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations ; Après consultation du collège compétent en matière de lutte contre les discriminations et de promotion de l égalité ; Saisi par Madame Z d une réclamation relative au refus de son assureur X de prendre en charge les échéances de son prêt bancaire au titre de son incapacité de travail consécutive à un accident de la route au motif de la survenance de son congé maternité, le Défenseur des droits, en vue de régler la situation exposée dans la note récapitulative ci-jointe, décide de : - Demander à X la communication des pièces démontrant que ses règles de gestion internes ont été modifiées de telle sorte que désormais la survenance d un congé maternité ne prive pas ses assurées de la garantie «Arrêt de travail», dès lors que cette garantie était acquise consécutivement à une maladie ou un accident ; - Recommander à X et à Madame Z de conclure une transaction afin de réparer son préjudice matériel et moral ; - A défaut d accord dans le cadre de cette recommandation, présenter ses observations devant le Tribunal de grande instance de *** ; - Informer de sa décision la ministre des Droits des femmes, la Fédération Française des Sociétés d Assurance, le Groupement des Entreprises Mutuelles d Assurance, la Fédération bancaire française, l Association française des sociétés financières et les associations nationales de consommateurs. Le Défenseur des droits demande à X de rendre compte des suites données aux recommandations et demandes ci-dessus dans un délai de 3 mois à compter de la notification de la présente. Le Défenseur des droits Dominique Baudis

Recommandations dans le cadre des articles 25 et 28 de la loi n 2011-333 du 29 mars 2011 1. Le 14 avril 2012, le Défenseur des droits a été saisi d une réclamation de Madame Z relative au refus de son assureur X de prendre en charge les échéances de son prêt bancaire pendant la durée de son congé maternité. 2. Un prêt immobilier d un montant de 80 000 euros a été accordé à Madame Z par la Y. Afin de le garantir, la réclamante a adhéré le 23 avril 2008 à une assurance crédit auprès de X, assurance proposée par la Y. 3. La notice de ce contrat prévoit à l article 2 que le contrat d assurance a pour objet «de garantir les personnes assurées contre les risques de décès, de perte totale et irréversible d autonomie et d arrêt de travail». 4. Le 3 décembre 2010, Madame Z a été victime d un grave accident de la route (tiers responsable condamné par jugement correctionnel en date du 24 mai 2012). 5. Consécutivement à cet accident, Madame Z a souffert : d une fracture luxation C5-C6 associée à une fracture du corps de C5 ayant nécessité un traitement chirurgical, d une tétraplégie incomplète sensitivo-motrice prédominant au membre supérieur gauche avec déficit complet à la flexion du bras. 6. L état de santé de Madame Z a nécessité une hospitalisation complète du 4 décembre 2010 au 10 juin 2011. Le bulletin d'hospitalisation établi par l hôpital vaut avis d'arrêt de travail. 7. Le 4 décembre 2010, le Docteur G, Chef de Clinique au ***, a produit un certificat médical initial établissant «une incapacité temporaire totale (ITT) de 6 mois». Le 16 juin 2011, ce certificat médical a été renouvelé par le docteur G, qui précise que l état de santé de Madame Z nécessitait une prolongation d ITT de 6 mois. 8. Le 4 janvier 2011, le médecin traitant de la réclamante, a considéré sa patiente atteinte d une affection de longue durée (ALD), telle que définie par l'article L. 324-1 du Code de la sécurité sociale. En conséquence, il a établi un protocole de soins valable jusqu au 2 décembre 2013, lequel prévoit un arrêt de travail minimum de 6 mois. 9. Le 3 octobre 2011, un arrêt de travail en rapport avec une affection longue durée lui a été prescrit jusqu au 10 janvier 2012. Le 11 janvier 2012, une prolongation d avis d arrêt de travail lui a été accordée jusqu au 30 septembre 2012. 10. La réclamante a été autorisée à reprendre le travail le 30 septembre 2012. Son état de santé a entraîné une incapacité totale de travail d une durée de 22 mois à compter de la date de l accident, soit le 3 décembre 2010. Sur le refus de prise en charge intégrale opposé par l assureur X 11. Au titre de l article 8 3 relatif aux Prestations garanties de la notice, qui dispose : «Pendant la durée de l arrêt de travail et après application de la franchise mentionnée sur la proposition d assurance, l assureur prend en charge le paiement des échéances du prêt figurant sur le dernier tableau d amortissement communiqué par l assuré et venant à échéance, dans la limite du pourcentage assuré», la réclamante a demandé la prise en charge des échéances du prêt pour la période d'itt de décembre 2010 à septembre 2012. 12. L assureur X refuse la prise en charge intégrale de l ITT de Madame Z au motif que les arrêts de travail correspondants à la période du congé légal de maternité sont contractuellement exclus. 2

13. Il ressort de l article 9 de la notice du contrat que sont exclus de la garantie «Arrêt de travail» «les arrêts de travail correspondants à la période du congé légal de maternité de la Sécurité sociale, que l assurée y soit ou non assujettie». 14. Madame Z était en arrêt maladie pour grossesse pathologique (du 17 septembre 2010 au 13 décembre 2010) lorsqu elle a été victime de l accident. Du 24 janvier 2011 au 2 octobre 2011, elle a été déclarée en congé maternité. 15. En l espèce, l assureur X a accepté une prise en charge des échéances de son prêt à compter du 16 décembre 2010 (franchise contractuelle de 90 jours appliquée à partir du 17 octobre 2010) jusqu au 23 janvier 2011. Il a refusé cette prise en charge du 24 janvier 2011 au 20 septembre 2011. Enfin, la prise en charge s est poursuivie à compter du 3 octobre 2011. 16. Madame Z a dès lors contesté cette décision auprès de W, la mandataire pour le compte de l organisme prêteur, et du service clientèle de X. 17. Par courrier en date du 8 août 2011, la chargée de clientèle de X, Madame C explique qu «il est contractuellement prévu au chapitre 4 du titre III Garanties exclusions, que les prestations versées par la CPAM au titre de la période prénatale et postnatale n étaient également pas indemnisables en cas de grossesse survenant pendant une période d incapacité totale de travail». 18. Elle conclut : «Par conséquent, nous vous confirmons que le versement des prestations ne pourra intervenir que lorsque Madame Z percevra à nouveau des indemnités journalières maladie ou accident au titre de son arrêt de travail du 4 décembre 2010». 19. Il convient de souligner que par courrier en date du 5 janvier 2012, la mandataire W a alerté l assureur X sur la situation de Madame Z en ces termes : «Nous vous laissons le soin d apporter la réponse qui convient, sachant que si elle n avait pas été enceinte, elle aurait bénéficié d un arrêt maladie et que nous aurions pris en charge son arrêt de travail». 20. Consécutivement à ce signalement, Madame C, par courrier en date du 11 janvier 2012, confirme à nouveau l absence de prise en charge des échéances pendant le congé maternité. 21. Enfin, par courrier en date du 8 juin 2012, Madame Z a saisi le Médiateur en assurances. 22. Dans un courrier en date du 20 juillet 2012 en réponse à la saisine du Médiateur, Monsieur M, Responsable Département service clients, a refusé la révision de la décision. 23. Il explique : «A la relecture de votre dossier il apparaît que vous êtes en incapacité de travail depuis le 17 septembre 2010 puisque vous percevez d ailleurs depuis le 20 septembre 2010 des indemnités journalières maladie. Le versement de ces prestations s est poursuivi de façon continue jusqu au 23 janvier 2011 inclus. Au-delà de cette période ces mêmes prestations vous sont toujours réglées mais au titre de la maternité. Or, le contrat prévoit au chapitre : article 9 Risques exclus, Paragraphe Pour la garantie arrêt de travail exclusivement : les arrêts de travail correspondant à la période du congé légal de maternité de la sécurité sociale». 24. Il ajoute «Ce qui souligne bien que les arrêts de travail donnant droit à des indemnités journalières au titre de la maladie sont pris en charge au titre de la garantie incapacité de travail jusqu au jour qui précède le début du congé légal de maternité. Notre indemnisation peut intervenir également à la fin de ce même congé, si l assuré bénéficie de prestations maladie de la CPAM». 25. Il conclut : «La période de votre congé légal de maternité du 24 janvier 2011 au 2 octobre 2011 reste exclue de notre garantie». 26. Le 14 septembre 2012, le Médiateur en assurances s est saisi de la réclamation de Madame Z, la décision de X étant devenue définitive et notifiée à la réclamante par courrier en date du 20 juillet 2012. 27. Le 14 septembre 2012, Madame Z, représentée par Maître Pierre D, assignait X devant le tribunal de grande instance de ***. 3

28. Par courrier en date du 5 octobre 2012, le Médiateur en assurances s est dessaisi, une procédure contentieuse ayant été engagée et un accord de médiation n ayant pu être trouvé. Sur l incapacité de travail de Madame Z 29. L article 8 3 garantie «Arrêt de travail» de la notice définit l arrêt de travail objet de la garantie de la manière suivante : «Est considéré en arrêt de travail, l assuré se trouvant, à la suite d une maladie ou d un accident, dans l impossibilité complète, constatée médicalement, d exercer sa profession, sous réserve qu à la date d arrêt de travail, il exerce effectivement une activité professionnelle rémunérée». 30. En l espèce, Madame Z à la suite d un accident s est retrouvée dans l impossibilité complète, constatée médicalement, d exercer sa profession. Elle a été déclarée comme atteinte d une affection de longue durée, laquelle a nécessité l établissement d un protocole de soins mentionnant une interruption de travail de 6 mois. Sa situation répond à la définition de l arrêt de travail telle que donnée à l article 8 3 de la notice. Son état de santé a entrainé une incapacité de travail d une durée totale de 22 mois. 31. Cette incapacité de travail a été reconnue par la chargée de clientèle de X dans son courrier en date du 8 août 2011 lorsqu elle écrit que «l état de santé de l assurée répond à la définition de l incapacité de travail». Sur la possibilité de faire valoir a posteriori l exclusion de garantie pour suspendre les prestations accordées par la garantie «Arrêt de travail» 32. Le contrat garantit les arrêts de travail répondant à la définition donnée à l article 8 3 de la notice. Il ressort de cet article que le fait générateur résulte nécessairement de la maladie ou d un accident. Le contrat exclut à l article 9 de la garantie «Arrêt de travail» les faits générateurs résultant du congé de maternité. 33. Aux termes de l article 1964 du Code civil, le contrat d assurance est un contrat aléatoire, à savoir «une convention réciproque dont les effets, quant aux avantages et pertes, soit pour toutes les parties, soit pour l une ou plusieurs d entre elles, dépendent d un événement incertain». Il ne peut donc exister d assurance sans qu il existe un aléa sur la réalisation future de l événement assuré. 34. Dans son courrier en date du 8 octobre 2012 adressé aux services du Défenseur des droits, l assureur X indique que «le congé légal de maternité découlant de la maternité qui se déroule normalement est un évènement certain (non aléatoire), qui ne relève pas de la maladie et qui n est pas, par conséquent, garanti par notre contrat d assurance. En revanche, [...] dans l hypothèse d une grossesse pathologique, l évènement devient incertain. Dans ces conditions, les arrêts de travail qui en résulteront seront pris en charge». 35. En l espèce, Madame Z ne conteste pas la clause d exclusion des congés maternité, mais l application qui en a été faite a posteriori pour lui refuser la garantie. 36. En effet, le fait générateur du sinistre de Madame Z résulte de la survenue de l accident en date du 3 décembre 2010, qui est la cause de la réalisation du risque «Arrêt de travail». 37. La réalisation de ce risque a ouvert droit au bénéfice des prestations garanties pour Madame Z. L assureur décide cependant de ne plus prendre en charge les échéances du prêt de son assurée durant son congé maternité, la privant des prestations garanties à la date de son sinistre. 38. La survenance du congé maternité n a produit aucun effet sur la constatation médicale de son incapacité temporaire de travail. Le taux d incapacité de l assurée (incapacité totale) n a pas connu de modification. 39. L application de l exclusion de garantie en raison du congé maternité du 24 janvier 2011 au 3 octobre 2011 revient à priver de tout effet la garantie arrêt de travail sur cette même période, dont le bénéfice était acquis à Madame Z au jour du fait générateur. 4

40. Enfin, les termes de la notice (notamment à l article 8 3 Fin des prestations) ne prévoient pas la possibilité de mettre fin ou de suspendre les prestations prévues par la garantie «Arrêt de travail» à la survenance d un congé maternité. En outre, une telle clause serait manifestement contraire au principe d interdiction des discriminations fondées sur le congé maternité ou la grossesse. 41. En conséquence, l exclusion de garantie ne peut être invoquée par l assureur, le fait générateur de l ITT de Madame Z ne résultant pas de son congé maternité. Sur le caractère discriminatoire du refus opposé à Madame Z 42. Le considérant 20 de la directive 2004/113/CE du 13 décembre 2004 mettant en œuvre le principe de l égalité de traitement entre les femmes et les hommes dans l accès à des biens et services et la fourniture de biens et services souligne qu «un traitement moins favorable de la femme en raison de la grossesse et de la maternité devrait être considéré comme une forme de discrimination directe fondée sur le sexe et, en conséquence, être interdit dans le cadre des services d assurance et des services financiers connexes. Les frais liés au risque de grossesse et de maternité ne devraient donc pas être supportés par les membres d un sexe uniquement». 43. L article 4 1 a) de la Directive 2004/113/CE dispose que «le principe de l égalité de traitement entre les hommes et les femmes signifie qu il ne peut y avoir de discrimination directe fondée sur le sexe, y compris un traitement moins favorable de la femme en raison de la grossesse et de la maternité». 44. Ces dispositions ont été transposées en droit interne à l article 2-3 4 de la loi n 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations. 45. L article 2-4 dispose : «Toute discrimination directe ou indirecte fondée sur le sexe est interdite en matière d'accès aux biens et services et de fourniture de biens et services». 46. L article 2-3, dispose : «Toute discrimination directe ou indirecte est interdite en raison de la grossesse ou de la maternité, y compris du congé de maternité. Ce principe ne fait pas obstacle aux mesures prises en faveur des femmes pour ces mêmes motifs». 47. L article L. 111-7 du Code des assurances tel qu issu de la loi n 2007-1774 du 17 décembre 2007 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans les domaines économique et financier dispose : «Les frais liés à la grossesse et à la maternité n'entraînent pas un traitement moins favorable des femmes en matière de primes et de prestations». 48. Enfin, les articles 225-1 et -2 du Code pénal interdisent le refus de fourniture d un bien ou d un service en raison de la «grossesse». 49. Le principe d égalité de traitement exige que des situations comparables ne soient pas traitées de manière différente et que des situations différentes ne soient pas traitées de manière égale. 50. En l espèce, les situations d un homme et d une femme en incapacité de travail médicalement constatée en raison d un accident de la route sont comparables. 51. Madame Z a été traitée différemment que ne l aurait été un homme dans une situation similaire d incapacité de travail médicalement constatée, et ce en raison de la survenance de son congé maternité. 52. Si l octroi de la prestation de la garantie «Arrêt de travail» est acquis à l homme au jour de survenance de l incapacité de travail et durant toute la période d incapacité qui lui a été médicalement reconnue, cette prestation acquise à la femme dans les mêmes conditions ne lui sera garantie qu en dehors de son congé maternité. 53. La décision de X fondée sur la seule survenance du congé maternité a pour effet de traiter moins favorablement les femmes en raison de la grossesse et de la maternité. 5

54. En conséquence, la décision de l assureur X de refuser le bénéfice des prestations de prise en charge des échéances du prêt de son assurée, caractérise une discrimination directe fondée sur le sexe, sur la grossesse ou la maternité, y compris le congé maternité, telle que prohibée par l article 2-3 et 4 de la loi n 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations et contraire à l article 4 1 a) de la Directive 2004/113/CE du 13 décembre 2004 mettant en œuvre le principe de l égalité de traitement entre les femmes et les hommes dans l accès à des biens et services et la fourniture de biens et services. 55. Ce refus caractérise également une discrimination au sens des articles 225-1 et -2 du Code pénal interdisant le refus de la fourniture d un bien ou d un service en raison de la grossesse. 56. Enfin, il apparaît que la décision de l assureur fondée sur la grossesse et la maternité de la réclamante entraîne un traitement moins favorable des femmes en matière de prestation assurantielle, contraire aux dispositions de l article L. 111-7 du Code des assurances. 57. En réponse à la note récapitulative qui lui a été adressée par courrier en date du 4 septembre 2012, l assureur X explique sa décision à l encontre de Madame Z par l application d une règle de gestion interne. 58. En effet, dans son courrier en date du 8 octobre 2012, l assureur indique «Le service de gestion de X s appuie sur une règle, mentionnée dans le contrat d assurance (article 11), selon laquelle l intervention de l assureur se fait sur production par l assuré des décomptes de la sécurité sociale (bordereaux de décompte des indemnités journalières). Une règle de gestion interne stipule que lorsque ces indemnités journalières sont qualifiées de maternité, l assurée est en congé légal de maternité, période d arrêt de travail non couverte par le contrat. 59. Si cette règle de gestion interne a permis de traiter toutes les situations soumises antérieurement au service de gestion de X, force est de constater qu elle n a pas permis de traiter la situation particulière de Madame Z, dont la période du congé légal de maternité était située à l intérieur de la durée d un arrêt de travail suite à accident». 60. En conséquence, l intervention des services du Défenseur des droits a permis de mettre en évidence un dysfonctionnement dans les règles de gestion interne de X. 61. L assureur X a précisé, concernant la règle de gestion interne en cause, que «celle-ci a été précisée afin qu une telle situation ne se renouvelle plus». Il n a toutefois pas communiqué aux services du Défenseur des droits les pièces prouvant que cette règle a été clarifiée lorsqu un congé maternité survient durant une période d incapacité de travail indemnisée au titre de la garantie «Arrêt de travail». 6