Bordeaux, 31 octobre 2011. La formation des magistrats au management : l expérience belge Edith Van den Broeck Directeur de l Institut de formation judiciaire Avec la collaboration de Jos De Vos, conseiller Avenue Louise 54 1000 Bruxelles
Table des matières 1. Introduction : création et cadre légal de l Institut de formation judiciaire 3 1.1. Historique 3 1.2. Mission et vision de l Institut de formation judiciaire 4 2. A l aube d une réforme majeure de la justice belge 5 3. Les initiatives qu a prises l Institut de formation judiciaire belge dans le domaine de la formation des magistrats au management 7 3.1. La formation de base en management 8 3.2. La formation en management pour chefs de corps débutants 10 3.3. Le projet coaching en management 12 3.3.1. Contexte 12 3.3.2. Déroulement de la formation-action 12 3.3.3. Objectifs spécifiques de la formation-action 13 3.3.4. Description détaillée du programme et de la méthodologie 13 4. Conclusion 16 2
I. Introduction : création et cadre légal de l Institut de formation judiciaire L Institut de formation judiciaire 1 (ci-après, l IFJ) est une jeune institution qui a été créée par la loi du 31 janvier 2007 2. Nombre d autres pays de l Union européenne s étaient déjà dotés, depuis de nombreuses années, d organes spécifiques chargés de l organisation de la formation professionnelle des magistrats et des membres du personnel de l ordre judiciaire. 1.1. Historique Ce n est qu en 1991, avec la loi du 18 juillet de la même année, qu un premier pas modeste a été franchi (pour les magistrats), notamment par la réforme du stage judiciaire et la création du collège de recrutement des magistrats. Ce collège s est vu confier un rôle consultatif au sein du Service public fédéral Justice pour la formation des magistrats et des stagiaires judiciaires et a plaidé dès 1993 pour la création d un institut de formation pour la magistrature. Plus tard, avec l accord Octopus du 28 mai 1998, la volonté était de créer une «école de la magistrature». Il convient de souligner qu il y a là une différence essentielle par rapport à l idée d un institut de formation. En effet, un institut de formation ne dispense ses formations qu au personnel déjà nommé ou désigné. Suite à l accord Octopus, le «Vlaamse Interuniversitaire Raad» (Conseil interuniversitaire flamand) crée en 1998 le groupe de travail «École de la Magistrature», dont les travaux resteront finalement sans résultats. En revanche, le Conseil supérieur de la Justice n a cessé, dès sa création en 2000, de plaider pour la création d un institut de formation des magistrats, se montrant clairement contre l idée d une école de la magistrature. Il a fallu attendre le 7 novembre 2006 pour que la ministre de la Justice de l époque, Laurette Onkelinx, présente au Sénat le projet de loi qui a finalement abouti à la loi du 31 janvier 2007. Cette loi vise exclusivement la formation professionnelle et l échange d expériences professionnelles. La formation préalable à l examen ou à la nomination en tant que stagiaire judiciaire ou en tant que magistrat n est pas visée par cette loi 3. En d autres termes, le 1 Voir www.igo-ifj.be. 2 Loi du 31 janvier 2007 sur la formation judiciaire et portant création de l Institut de formation judiciaire, Moniteur belge, 2 février 2007. 3 Ces examens sont présentés devant les deux commissions de nomination et de désignation du Conseil supérieur de la Justice, en application de l article 259bis-9 du Code judiciaire. 3
législateur n a pas opté pour le modèle «école de la magistrature» 4 et a ainsi clairement fait entendre qu il n était pas favorable à une «formation unique» préalable à la nomination dans la magistrature, mais qu il souhaitait plutôt favoriser l accès à la magistrature via des voies latérales. L IFJ a finalement été créé par la loi organique du 31 janvier 2007 sur la formation judiciaire et portant création de l IFJ. Cette loi est entrée en vigueur le 2 février 2008, mais la modification législative du 24 juillet 2008 l a suspendue durant une année 5. De plus, cette loi a modifié considérablement la loi du 31 janvier 2007. D autres modifications législatives remontent au 22 décembre 2009 et au 22 mars 2010 6. De ce fait, l IFJ n est opérationnel que depuis le 1 er janvier 2009. Les premiers mois, l IFJ s est consacré à l organisation de son fonctionnement (notamment avec l installation des différents organes de l IFJ, l établissement d un budget, l occupation des locaux et leur aménagement, le recrutement de collaborateurs, etc.). En même temps, il assurait déjà les formations obligatoires en vertu de la loi pour les magistrats et les stagiaires judiciaires ainsi que la continuation des formations existantes pour le personnel de l ordre judiciaire. 1.2. Mission et vision de l Institut de formation judiciaire L IFJ se distingue par l organisation de la formation initiale et par des formations très axées sur la pratique professionnelle qu aucune autre institution ne propose. Lorsque l IFJ a été créé, il y avait peu de formations structurelles destinées au personnel de l organisation judiciaire, contrairement à la formation des magistrats. Développer de telles formations est une priorité pour la direction. Valeurs de l IFJ Compte tenu de la réalité opérationnelle et de l évolution de la société, l IFJ entend devenir une organisation animée par cinq valeurs : 1) Faire la différence : être la référence sur le marché et apporter un service à la société/citoyens en contribuant à la compétence et à la motivation des magistrats et des membres du personnel de l ordre judiciaire ; 2) Satisfaire la clientèle : viser à une satisfaction maximale et mesurable de l ensemble de nos clients. Par ailleurs, les processus internes doivent être adaptés à leurs 4 C est bien le cas dans un certain nombre de pays comme notamment l Espagne, la France, le Portugal et la Roumanie. Les «écoles» y assument des mois durant l entière responsabilité de la formation des «futurs magistrats» préalablement à leur nomination. Les «stagiaires» sont considérés comme des «employés» de l école qui verse par exemple aussi les traitements. 5 Article 9 de la loi du 24 juillet 2008 modifiant la loi du 31 janvier 2007 sur la formation judiciaire et portant création de l IFJ, Moniteur belge, 4 août 2008. 6 Loi du 22 mars 2010 modifiant la loi du 31 janvier 2007 sur la formation judiciaire et portant création de l IFJ en ce qui concerne le contrôle exercé par la Cour des comptes. 4
attentes et besoins. Enfin, les limites de la satisfaction du client doivent être déterminées par le budget, la législation et les actions entreprises ; 3) Apprendre en permanence : signifie que l on vise une amélioration continue et mesurable des compétences indispensables de nos clients et que l on doit stimuler l apprentissage en continu de l ensemble de nos collaborateurs, tant internes qu externes ; 4) Collaborer : signifie qu une bonne coopération au sein de la propre équipe constitue la base fondamentale. Il convient donc de viser une coopération irréprochable et optimale avec nos partenaires dans le cadre du processus d apprentissage. Enfin, une coopération adéquate avec l ensemble des parties prenantes doit être prioritaire dans l ensemble de nos activités ; 5) Innover : signifie l ambition constante d intégrer les méthodes et techniques les plus récentes dans nos processus d apprentissage. En tant qu organe fédéral indépendant, l IFJ souhaite contribuer à une justice de qualité en développant de façon optimale les compétences professionnelles des magistrats et des membres de l ordre judiciaire 7. L IFJ entend devenir l organe de référence par la promotion d une culture de l apprentissage qui valorise les capacités et les compétences de son public-cible en soutenant son besoin d adaptation de manière permanente. II. A l aube d une réforme majeure de la justice belge Le bon fonctionnement des institutions judiciaires constitue un des piliers de l Etat de droit. Malgré une certaine évolution positive, les baromètres de la Justice de 2003, 2007 et 2010 8 indiquent que la confiance en la Justice reste (trop) basse. Les critiques des justiciables et des professionnels sur le fonctionnement, la qualité et le service de la Justice relatives à la lenteur, la complexité, l inaccessibilité, l incompréhensibilité, l inefficacité, etc., persistent. Ces constats sont en partie liés à l actuelle organisation de la Justice. Le paysage judiciaire présente une multitude de juridictions et de parquets, une échelle géographique inadaptée et des entités beaucoup trop petites, ce qui réduit la continuité du service, la spécialisation et la mobilité. Le modèle de gestion repose sur une forte centralisation de l attribution et de l orientation des moyens au niveau du ministre de la Justice, du Service public fédéral Justice et de ses services. L autonomie de gestion des juridictions et des parquets ainsi que de leurs chefs de corps est très limitée. De ce fait, responsabilité et justification de la gestion ne sont pas suffisamment liées. Les processus de travail sont en partie dépassés et pas uniformes, le personnel et les moyens ne sont pas affectés de manière optimale, le parc informatique n est pas assez performant ni intégré. Une culture de management et une capacité de 7 Les compétences professionnelles sont : les connaissances, les aptitudes et les attitudes nécessaires pour pouvoir exercer leurs fonctions de façon effective, en fonction des intéressés. 8 Voir http://www.csj.be/doc/divers/barometer_f_2010.pdf. 5
management suffisante font défaut. Des instruments de gestion adaptés, comme des données fiables et uniformes, des systèmes de mesure de la charge de travail opérationnels, une politique du personnel moderne et des systèmes d audit, de monitoring et de contrôle, ne sont pas assez développés. Ces dernières années, beaucoup d efforts ont été consentis pour renforcer et accélérer la réforme de la justice. L accord de gouvernement du 18 mars 2008 avait fait de la modernisation et du réaménagement de l organisation judiciaire une priorité et prévu que le gouvernement allait libérer les moyens nécessaires à cet effet. Au début du mois d avril 2010, un accord de base avait été conclu sur les réformes nécessaires pour une organisation moderne et une gestion plus efficace de la Justice. La chute du gouvernement, à la fin de ce même mois d avril, a toutefois empêché reporté la mise en œuvre de ces réformes. A cet égard, il est important de souligner qu au moment de la rédaction de la présente note, il n y a pas encore en Belgique, après les élections fédérales qui ont eu lieu le 13 juin 2010, un nouveau gouvernement fédéral doté de la plénitude de ses compétences. Il ne fait cependant aucun doute qu il existe un large consensus politique pour réformer la Justice en profondeur pour qu elle devienne plus rapide et plus efficace. La Justice et ses méthodes de travail doivent être modernisées, avec une nouvelle vision de l Ordre judiciaire en matière de gestion. Il s agit d améliorer l organisation des juridictions, de moderniser la gestion et de garantir un service adapté au justiciable, en utilisant de manière plus efficace le personnel et les moyens disponibles. Sans avoir l ambition d être exhaustif, quelques points de cette réforme imminente méritent d être cités, plus particulièrement par rapport à la question de savoir quelle contribution l Institut de formation judiciaire pourrait livrer pour arriver à une organisation moderne et une gestion plus efficace de la Justice. Ainsi peuvent être avancés : Dans un objectif de rationalisation, le nombre d arrondissements judiciaires sera fortement réduit. Il s agit ici de ce qu on appelle en Belgique «le réaménagement du paysage judiciaire». 9 10 Une grande réforme de décentralisation de la gestion des budgets et du personnel du pouvoir judiciaire sera mise en œuvre. Les chefs de corps auront une plus grande autonomie sur ces deux domaines. Les personnes responsables pour la réalisation des objectifs pourront ainsi décider de l engagement des moyens alloués et seront responsabilisées. 11 9 S. DE CLERCK, «Le paysage judiciaire : vers une nouvelle architecture de la Justice», note d orientation du ministre de la Justice, octobre 2009, http://www.moniteur.be/fr_htm/ordre_judiciaire/r-pj/note_d_orientation.pdf. 10 E. DI RUPO, «Un Etat fédéral plus efficace et des entités plus autonomes», note du formateur, 4 juillet 2011, p. 66, http://www.dekamer.be/kvvcr/pdf_sections/home/110704_note%20de%20base%20formateur %20DEF.pdf. 11 Ibidem, p. 66. 6
Une formation, de base et continuée, sera obligatoire pour les magistrats. 12 Dans un souci d efficacité, un tribunal de la famille sera créé pour mettre fin au morcellement des compétences en matières familiales entre le Tribunal de première instance, le juge de la jeunesse et le juge de paix. Il regroupera l ensemble des compétences judiciaires relatives aux contentieux familiaux et aux problématiques de la jeunesse. 13 Le projet de loi portant création d un tribunal de la famille et de la jeunesse (déjà approuvé, le 20 juillet 2011, par la Chambre de représentants) prévoit notamment que les magistrats de ce tribunal devront suivre une formation spécialisée organisée par l IFJ. 14 Afin de doter les magistrats des outils indispensables à une gestion plus performante de la Justice, l IFJ a pris, ou est sur le point de prendre, plusieurs initiatives qui sont commentés ciaprès. III. Les initiatives qu a prises l Institut de formation judiciaire belge dans le domaine de la formation des magistrats au management Comme déjà exposé ci-dessus, l IFJ n est opérationnel que depuis le 1 er janvier 2009. La mise en route de l IFJ a pris un certain temps : il lui a fallu installer les organes (direction, conseil d administration et comité scientifique), trouver un bâtiment, recruter du personnel, mettre en place les divisions et services, développer les processus de travail, tout cela en même temps avec l organisation des formations obligatoires en vertu du Code judiciaire. Parmi les nombreux défis, il a été impératif de procéder à une identification et analyse des besoins en formation du public cible de l IFJ. Afin de pouvoir rencontrer adéquatement les demandes, il était bien entendu primordial de réaliser, avant toute autre chose, cette analyse pour concevoir et développer ensuite les curriculums des formations à l intention des clients de l IFJ. Il est évident qu il n est pas possible, pour une jeune institution comme l IFJ, de faire tout en une fois. Les besoins en formation à la fois des magistrats et membres du personnel de l ordre judiciaire sont, en effet, immenses. De plus, les moyens financiers, matériels et personnels sont limités. Il convient, dès lors, d étaler les efforts dans le temps et les répartir avec justesse. En outre, l inconnue persistante quant à l avenir du paysage judiciaire et son réaménagement, couplé à l autonomisation des juridictions et à l introduction du management intégré, constitue une embûche de taille. En effet, la désignation de nouveaux 12 Ibidem, p. 67. 13 Ibidem, p. 66. 14 Doc. Parl., Ch., 2010-2011, 53, n 0682/018. 7
organes et de nouveaux responsables engendrera des demandes de formation au management, de soutien à la direction et ce de manière très rapide. 15 Eu égard à ce cadre incertain et ce besoin tout à fait spécifique et urgent, l IFJ a développé des formations en management à trois niveaux différents : - une formation en management «classique» (puisqu elle a été dispensée de 1998 à 2007 ; sa reconduction était urgente dans la mesure où l entrée en vigueur de la loi du 31 janvier 2007 sur la formation judiciaire et portant création de l Institut de formation judiciaire a été reportée au 1 er janvier 2009 16, ce qui a engendré une suspension de cette formation) ; - une formation en management à l intention des chefs de corps récemment nommés, qui démarrera au printemps 2012 ; - un projet «coaching en management» qui s inscrit en cohérence avec les plans de réforme de la justice. 3.1. La formation de base en management L objectif de la formation de base en management est d apprendre aux participants à identifier clairement les techniques de management qu ils utilisent déjà de manière innée et de leur en fournir d autres. Au terme de la formation, ils sont à même d utiliser les outils adéquats de gestion des ressources humaines et matérielles, notamment en vue de l optimisation du fonctionnement d une juridiction ou d un corps. La formation comporte onze séances d un jour qui forment un tout. En cas d inscription, il convient de prendre part au cycle complet, faute de quoi l IFJ ne délivre pas le brevet qui sanctionne la participation à cette formation. Une seule absence (pour quelque raison que ce soit) est toutefois autorisée. En cas d empêchement à une séance, il est également possible de prendre part, à deux reprises au maximum, à la séance correspondant dans un autre groupe. Le programme de la formation en management comprend les sujets suivants : 1) Introduction Le rôle et les responsabilités d un magistrat manager dans le cadre de la gestion de la juridiction 2) Communication 3) avant-midi : - Types de leadership optimal - Déterminer des objectifs et aider les collaborateurs à les atteindre après-midi : - Motiver de façon efficace 4) Les démarches à suivre pour un management efficace 15 Voir «Ordre judiciaire : budget et enjeux futurs», 2010, Commission de Modernisation de l Ordre judiciaire. 16 Voir l art. 9 de la loi du 24 juillet 2008 modifiant la loi du 31 janvier 2007 sur la formation judiciaire et portant création de l'institut de formation judiciaire, M.B., 4 août 2008. 8
5) Travailler en équipe 6) Gestion efficace du temps et du stress 7) Techniques de négociation et gestion de conflits 8) L organisation de réunions efficaces et motivantes 9) Gérer les changements 10) Évaluer les prestations 11) Présentation des travaux finaux par les participants. Pour obtenir le brevet, les participants doivent, en outre, rédiger un travail (qui doit être une application pratique des techniques enseignées). La finalité de ce travail est exposée aux participants dès le début de la formation. Tout au long de la formation, les formateurs se tiennent à leur disposition pour tout conseil ou orientation à propos de ce travail. La dernière et onzième journée de formation est une journée de présentation des travaux devant le formateur et les magistrats collègues participants. Tous les travaux sont lus préalablement par l un des formateurs, chaque participant est invité à présenter et discuter avec ses collègues le fruit de sa réflexion, et reçoit de la part du formateur un feed-back de son travail. Les magistrats participants sont répartis en quatre groupes de 15 personnes au maximum comme suit : - magistrats dirigeants du siège ; - magistrats dirigeants du parquet ; - magistrats non-dirigeants du siège ; - magistrats non-dirigeants du parquet. Cette répartition n a aucune conséquence au niveau du certificat. Le seul but est de permettre aux participants d échanger des expériences et best practices, et de réfléchir sur des applications pratiques de ce que l on apprend avec des collègues qui occupent dans leur juridiction ou corps une position similaire. Les magistrats suivant cette formation sont incités à participer de manière active, à apporter des exemples concrets tirés de leur vécu professionnel, ce qui fait que cette formation n est pas un cycle de séances théoriques, mais un ensemble cohérent axé sur et utilisable dans la pratique professionnelle. Enfin, pour assurer la cohérence entre les techniques enseignées et la réalité professionnelle des participants, un membre par groupe est chargé du rôle de relais entre son groupe, le(s) formateur(s) et l IFJ. Ainsi, l on procède tout au long de la formation, chaque fois que cela s avère nécessaire, à des évaluations informelles intermédiaires permettant d éventuels recadrages avec les formateurs (notamment en ce qui concerne le fonctionnement de la justice en général et le fonctionnement d une juridiction ou d un corps en particulier). En 2010-2011, 95 magistrats (45 magistrats du siège et 50 du ministère public) ont participé à cette formation. Pour l année judiciaire 2011-2012, 71 magistrats (41 magistrats du siège et 30 du ministère public) se sont inscrits pour suivre la formation. 9
Au fil des années, l on constate que de plus en plus, les magistrats qui ont l intention de se porter candidat à un poste vacant de chef de corps suivent cette formation de base en management avant d introduire leur candidature. Enfin, il est à signaler qu une formation similaire, avec un programme quelque peu différent, est également dispensée à l intention des greffiers et secrétaires de parquet. 3.2. La formation en management pour chefs de corps débutants Cette formation est en développement et sera dispensée pour la première fois à partir du début de l an 2012. Elle est vivement conseillée aux chefs de corps de la magistrature et greffiers en chef/secrétaires en chef, dans l année qui suit leur désignation/nomination. Cette période pourra éventuellement être étendue à deux ans en fonction des places disponibles. En fonction des places disponibles, la formation ou certains modules de la formation pourront éventuellement être ouverts à des chefs de corps et greffiers en chef/secrétaires en chef plus anciens. Il convient d observer que deux modules sont communs aux magistrats chefs de corps et aux greffiers en chef/secrétaires en chef. L objectif de cette formation consiste à fournir aux participants les compétences théoriques et surtout pratiques dans différents domaines attribués aux chefs de corps et greffiers en chef/secrétaires en chef. Après la formation, ils sont à même de diriger et de veiller au bon fonctionnement de leur corps. La formation sera organisée en formule résidentielle afin de favoriser les échanges entre les participants et comporte trois sessions, chacune de trois jours, qui forment un tout. Le programme comprend les sujets suivants : 1) Gestion administrative (3 jours) Ce module est commun aux chefs de corps de la magistrature et aux greffiers en chef et aux secrétaires en chef. Partie 1 : Connaissance de l environnement de travail (½ jour) Aperçu global des différents acteurs, partenaires et services administratifs qui peuvent contribuer à une gestion quotidienne efficace dans tous ses aspects (gestion du personnel, logistique, budget) Partie 2 : Connaissance de l environnement judiciaire international (½ jour) Les différents réseaux d expertise judiciaire La commission européenne pour l efficacité de la justice (CEPEJ) et ses outils Partie 3 : Gestion financière (1 jour) Défis futurs en matière d organisation budgétaire (en lien avec la commission pour la modernisation budgétaire) 10
Gestion et suivi de l allocation de ressources matérielles et financières Notions de comptabilité dans la gestion des ressources Responsabilités du chef de corps/greffier ou secrétaire en chef par rapport aux frais de justice Partie 4 : Notions de gestion de projet (1 jour) Planification des stratégies et des actions Mise en œuvre, suivi et évaluation d activités 2) Gestion des ressources humaines (3 jours) Pour ce module, les participants seront répartis en quatre groupes de 15 participants maximum : chefs de corps du siège, chefs de corps du ministère public, greffiers en chef, secrétaires en chefs. Partie 1 : Organisation, évaluation et optimisation des connaissances, compétences, attitudes et performances (2,5 jours) Analyse des besoins stratégiques en ressources humaines Elaboration de fiches de fonction Définition des objectifs et des indicateurs de résultat Organisation des procédures de travail Techniques de réunion Techniques d évaluation et entretiens de fonctionnement rendre un avis d évaluation Analyse des besoins de formation, promotion d une culture de formation et de développement des compétences (IFJ, EJTN) Partie 2 : Responsabiliser et motiver les collaborateurs (½ jour) Connaissance des facteurs de motivation professionnelle Promotion du bien-être au travail 3) Compétences psychosociales (3 jours) Ce module est commun aux chefs de corps des magistrats, aux greffiers en chef et aux secrétaires en chef (par groupe de 15 participants maximum). Partie 1 : Communication interpersonnelle (2 jours) Analyse de son rôle et style de leadership Analyse et gestion des relations, des personnalités diverses, voire des conflits Principes d écoute active Partie 2 : Change management (1 jour) Accompagnement et gestion du changement pour favoriser son acceptation et l adaptation Il est évident que cette formation répondra à un besoin majeur des chefs de corps de la magistrature et des greffiers en chef et secrétaires en chef débutants, car leurs responsabilités ne cessent d augmenter dans un paysage judiciaire et un cadre réglementaire qui sont en constante évolution. 11
3.3. Le projet coaching en management L objectif général du projet «coaching en management» est de soutenir des initiatives montées conjointement par des magistrats et greffiers et/ou secrétaires de parquets qui visent à améliorer sensiblement la qualité et l efficacité de la justice à travers l application d outils ou de techniques de management. Le projet est actuellement encore en cours. 3.3.1. Contexte Cette formation-action s inscrit dans le but stratégique 5 (perspective de processus) «intégrer des connaissances nouvelles dans l organisation des formations» et le but stratégique 8 (perspective d apprentissage et de croissance) «offre de formation intégrale et de haute qualité» (point 8.1.3) du plan de gestion 17 et du plan d action 2010 de l IFJ et est en phase avec les plans de réforme de la justice. L IFJ propose, aux destinataires intéressés, de leur apporter un soutien (à travers une formation-action qui comprendra plusieurs phases dont une formation de trois jours et la mise à disposition de coachs) à un projet «qualité» qui doit répondre aux critères suivants : Il s agit d une initiative qui, par l application d outils ou de techniques de management/de gestion des ressources (matérielles, financières, humaines), permettra d améliorer sensiblement la qualité et l efficacité de la justice ; Le projet visé promeut des collaborations et échanges d informations, d outils et/ou de compétences entre professionnels de la justice. A ce titre, le projet est initié et présenté conjointement par des duos (ou groupes) composés de magistrat(s) et de greffier(s) et/ou secrétaire(s) de parquet issus d une même juridiction ou de juridictions différentes ; Le projet cadre avec les priorités prévues dans le cadre de la réforme de la justice. Le projet est réaliste. Il est suffisamment préparé (objectifs, groupes cibles, moyens et intervenants nécessaires, calendrier). Le suivi de coachs, experts en management, est particulièrement indiqué pour le mener à bien ; Le projet a une valeur d exemple et peut inspirer d autres acteurs. 3.3.2. Déroulement de la formation-action Le public cible du projet est composé de magistrats et greffiers et/ou secrétaires de parquets qui doivent s inscrire en : duo (un magistrat + un greffier ou un secrétaire de parquet) ; groupe (magistrat(s) + greffier(s) et/ou secrétaire(s) de parquet) d une même juridiction ; 17 Voir le plan de gestion de l IFJ : http://www.igo-ifj.be/sites/default/files/bestanden/fr/plan%20de%20gestion.pdf. 12
groupe (magistrat(s) + greffier(s) et/ou secrétaire(s) de parquet) de différents tribunaux et parquets. La formation-action a lieu en plusieurs phases. Le processus peut être résumé comme suit : Annonce du projet ; Envoi d une manifestation d intérêt par les duos et groupes intéressés ; Formation de trois jours sur la gestion de projet (facultative) ; Lancement d un appel à projets ; Introduction des candidatures ; Sélection de 8 projets qui bénéficient d un coaching pour faciliter leur implémentation ; Réalisation des projets avec le soutien de coachs ; Partage et communication des résultats des différents projets. 3.3.3. Objectifs spécifiques de la formation-action Les objectifs spécifiques du projet consistent à : - fournir aux participants des outils de gestion de la qualité dans leur tribunal ou parquet ; - développer des collaborations : entre magistrats et greffiers ou secrétaires, d une part, entre membres de parquets ou tribunaux différents, d autre part ; - valoriser les échanges d informations, d outils, de compétences, entre professionnels de la justice à tous niveaux ; - soutenir la réalisation de projets concrets qui contribuent à la qualité et l efficacité de la justice. 3.3.4. Description détaillée du programme et de la méthodologie 1) Organisation de trois journées de formation sur la gestion de projet Cette formation n est pas obligatoire pour introduire une demande de coaching d un projet qualité. Toutefois, elle peut être utile pour conceptualiser le projet et donner aux intéressés des outils qui les aideront à le mettre en œuvre au fil de son avancement. Le programme est composé comme suit : Journée 1 : Diagnostic organisationnel, analyse des besoins et formulation d objectifs Introduction : qu est-ce que la gestion de projet/le cycle de projet (à situer dans la démarche de coaching en management)? Etablir un diagnostic/audit du fonctionnement du tribunal ou du parquet (dégager les forces et faiblesses en étudiant toutes les dimensions : humaines, organisationnelles, économiques, etc.) ; Identifier et analyser les besoins prioritaires (en cernant les réponses les plus adaptées) ; Formuler des objectifs appropriés par rapport aux besoins identifiés. 13
Journée 2 : Structuration, conceptualisation et monitoring d un projet Identifier et planifier les tâches à mener ; Identifier, rechercher et allouer les moyens et ressources (matérielles et humaines) nécessaires ; Identifier des indicateurs observables pour le suivi du projet (quoi et comment le mesurer?) Gérer et anticiper les risques ; Susciter l intérêt et la mobilisation des acteurs concernés à travers la mise en place d une démarche participative et tenant compte des principes de conduite du changement ; Méthodes et outils de monitoring d un projet. Journée 3 : Evaluer un projet + Perspectives Evaluer l impact du projet par rapport aux résultats attendus et aux résultats réels : niveaux d évaluation, outils d évaluation ; Evaluer le déroulement du projet ; Echanges et discussions sur la suite du projet : précisions quant au déroulement des prochaines étapes et expression des attentes des participants en matière de coaching. L intérêt de cette étape consiste à fournir aux participants un ensemble d outils de gestion de projet qui pourront servir de base à toute action ultérieure et seront rappelés durant le coaching. L idéal est que les participants viennent à la formation avec une ébauche de «projet qualité», pour nourrir les échanges et réflexions, et qu ils travaillent ce projet directement à l aide des outils proposés en formation. 2) Sélection de 8 duos participants à la suite de la formation en gestion de projet L IFJ a opté pour démarrer ce projet à une petite échelle. Après l évaluation qui est prévue en 2012, le nombre de duos pourrait être revu à la hausse. Le choix des participants a été opéré par un jury composé de membres de l IFJ et de plusieurs experts. Ensuite, un appel à projets a été lancé, annonçant les critères de participation, c est-à-dire : soumettre un projet d action concernant le fonctionnement du tribunal ou parquet correspondant aux critères précisés ci-dessus (voir point 3.3.1) ; s engager à mettre sur pied des réunions de projet avec les collaborateurs directs (magistrats et greffiers ou secrétaires) pour la mise en œuvre du projet qualité, entre les sessions ou après celles-ci, en fonction du rythme et de l évolution de la formation-action ; s engager à participer à un forum d échanges sur les réalisations. 14
L intérêt de cette étape est que les participants sont obligés de remettre un projet (même si on sait bien que le projet n est jamais définitif et peut évoluer en cours d exécution du projet, alors que le choix par un jury indépendant garantit un degré élevé de motivation des participants). 3) Organisation d un coaching d équipes engagées dans un «projet qualité» Le coaching n est pas imposé aux participants, il est proposé à ceux qui estiment en avoir besoin. L intensité du coaching peut varier en fonction de la nature du projet et de la disponibilité du magistrat et du greffier ou secrétaire (de 0 à 10 séances d une demi journée étalées sur 7-8 mois) : une moyenne de 6 sessions par projet. Le contenu du coaching consiste à : accompagner les différentes étapes du projet par un soutien méthodologique et aider à l utilisation des outils ; constituer un vis-à-vis, un interlocuteur de projet avec qui faire le point même entre les moments formels de rendez-vous (possibilité d échanges par mail entre les rencontres) ; questionner et interroger le bien-fondé d'actions à priori «évidentes» ; soutenir et conseiller les acteurs de projet ; rappeler des échéances, assurer une rigueur dans la gestion du temps ; évaluer les résultats intermédiaires et réorienter si nécessaire. L intérêt de cette étape est d apporter aux participants un soutien à la mise en œuvre des projets, d assurer un «fil rouge» entre les différentes étapes de leurs réalisations, de se questionner en interne avant de se confronter à un regard extérieur et d oser évaluer les résultats. 4) Organisation d un forum Le forum sera consacré à une présentation approfondie par chacun de l avancement de son projet, des difficultés rencontrées et des résultats obtenus. Les objectifs sont d analyser les facteurs de succès ou d échec, d estimer des possibilités de transfert d expériences, de mettre en lumière des apprentissages (compétences, rôles et fonctions, attitudes, etc.) et de nouveaux modes d organisation éventuels. L intérêt de cette étape est le fait que le forum garantit une visibilité des réalisations, il assure un échange approfondi (non marketing) entre les participants ; le forum est un lieu d apprentissage mutuel et la possibilité de développement de mécanismes de solidarité entre participants. 5) Possibilité de suite publique Le programme sera conclu par une publication de l IFJ. 15
L intérêt de cette dernière étape est de développer la fierté des participants (et ainsi leur motivation), et d assurer une diffusion large des résultats obtenus. IV. Conclusion L ampleur de la réforme imminente de la structure de l organisation judiciaire en Belgique démontre combien il est important que l IFJ continue à suivre de près l évolution de ces projets de réforme. Comme exposé ci-dessus, il est, en effet, indispensable que les formations au management à l intention des magistrats soient en phase avec ces réformes. Les trois types de formation au management que l IFJ a conçus jusqu à présent et tout de même en peu de temps, vu que l IFJ n a pu démarrer qu à partir du 1 er janvier 2009 sont une illustration de sa volonté explicite de réaliser sa mission fondamentale, c.-à-d. contribuer à une justice de qualité en développant de manière optimale les compétences professionnelles des magistrats et des membres du personnel de l ordre judiciaire. Les années à venir s annoncent, par conséquent, particulièrement intéressantes, non seulement pour le monde judiciaire, mais aussi pour l Institut de formation judiciaire qui se trouve face à un défi de taille, à savoir traduire les réformes judiciaires en chantier en termes de nouvelles formations au management, pour que les magistrats disposent des outils managériaux appropriés à un paysage judiciaire réaménagé, afin de pouvoir assurer une administration optimale de la justice. * * * * * * * 16