COUR DU TRAVAIL DE LIEGE Section de Liège. ARRÊT Audience publique du 17 décembre 2008 AH/SC



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Transcription:

N D'ORDRE Rép. :2063 * AIDE SOCIALE AIDE FINANCIÈRE DEMANDEE POUR ACQUERIR UN MATÉRIEL INFORMATIQUE ET UNE LIAISON INTERNET NOTION DE DIGNITE HUMAINE NOTION D ETAT DE BESOIN - AH/SC COUR DU TRAVAIL DE LIEGE Section de Liège ARRÊT Audience publique du 17 décembre 2008 AH/SC R.G. : 34.415/06 5 ème Chambre EN CAUSE : V. Vincent. PARTIE APPELANTE comparaissant en personne et assisté par Maître L.MASSAUX, avocat à Bruxelles, CONTRE : LE CENTRE PUBLIC D ACTION SOCIALE (CPAS) de VERVIERS. PARTIE INTIMEE comparaissant par Maître P.HANNON, avocat à Verviers.

N D'ORDRE R.G.34.415/06 2/9 Revu l arrêt rendu entre parties le 7 mai 2008 ainsi que les pièces de procédure y visées, -les conclusions complémentaires de Mpnsieur V. après réouverture des débats reçues au greffe de la Cour par courrier le 6 juin 2008 et par fax le 9 juin 2008 et ses conclusions de synthèse ultimes y reçues le 25 août 2008, 9 juillet 2008, - les conclusions du CPAS reçues au greffe de la Cour - l ordonnance rendue le 7 août 2008 sur pied de l article 748 2 du code judiciaire fixant des délais pour conclure et une date de plaidoiries au 1 er octobre 2008,régulièrement notifiée aux parties, - l état des dépens de Monsieur V. déposé au greffe de la Cour le 26 août, 26 août ; - le dossier de Monsieur V. déposé au greffe de la Cour Entendu à l audience du 1 er octobre 2008 à laquelle les débats furent repris ab initio, les conseils des parties en leurs dires et moyens; Vu l avis avis écrit du Ministère public déposé au greffe de la Cour le 16 octobre 2008 ; octobre 2008; Vu les notifications de l avis adressées aux parties le 16 Vu les répliques de Monsieur V. reçues au greffe de la Cour respectivement les 5 novembre 2008 et 27 novembre 2008; I.- EVOLUTION DE LA PROCEDURE La Cour par son arrêt prononcé le 07/05/2008 a notamment ordonné à nouveau la réouverture des débats, afin de permettre aux parties d examiner les pièces nouvelles qu elles se sont communiquées ainsi que celles déposées en annexe à son avis par Monsieur le Premier Avocat général et par Monsieur V. en annexe à sa réplique et afin de leur permettre de s exprimer à nouveau relativement au sujet des observations

N D'ORDRE R.G.34.415/06 3/9 qu elles estiment devoir faire suite à la prise de connaissance de ces pièces. Et également afin de permettre à Monsieur V. d apporter toutes explications et de fournir toutes pièces justificatives du paiement de chacune des charges qu il dit supporter et plus particulièrement la preuve du paiement du loyer qu il dit supporter et ce depuis novembre 1992 et afin qu il précise de quelle façon, étant devenu sans abri et sans résidence, il pourrait être susceptible d utiliser le matériel informatique et la connexion à internet pour l acquisition desquels, il sollicite l aide financière du CPAS. Suite à cet arrêt Monsieur V. a déposé deux nouveaux dossiers de pièces, l un le 06/06/2008 et l autre le 26/08/2008. Les parties ont l une et l autre conclu à nouveau, Monsieur V. obtenant en vertu d une ordonnance fondée sur l article 748 du Code Judiciaire de pouvoir déposer d ultimes conclusions de synthèse. Monsieur V. sollicite à nouveau, comme il l avait fait dans ses conclusions déposées les 18 et 19/02/2008 que la Cour écarte les pièces nouvelles déposées par le CPAS, perdant de vue que la Cour dans son arrêt prononcé le 07/05/2008 a déjà dit n y avoir lieu d écarter ces pièces, et qu elle ne peut remettre cette décision en question en raison de l autorité de chose jugée qui s attache à cet arrêt. Dans ses conclusions de synthèse Monsieur V. demande à la Cour d écarter les conclusions déposées par le CPAS après l arrêt prononcé le 07/05/2008 ; il n y a pas lieu d écarter ces conclusions dont la Cour avait expressément autorisé le dépôt dans le dit arrêt, mais elle ne doivent être prises en considération, comme d ailleurs celles déposées par Monsieur V., que dans la mesure où elles sont relatives à l objet de la réouverture des débats. II.- DISCUSSION 5.1. Le document intitulé «rapport social» qui est la pièce n 1 du dossier déposé par le CPAS de VERVIERS, document daté du 31/08/2006, soit postérieur à la décision dont recours prise le 11/07/2006, n est ni un rapport d enquête sociale conforme à l article 60 3 de la loi du 08/07/1976, ni même un rapport d enquête sociale digne de ce nom ; il est dépourvu de toute force probante particulière quelconque. Comme en a justement décidé le premier juge, la décision dont recours prise par le CPAS de VERVIERS le 11/07/2006 ne répond pas à l obligation de motivation formelle déterminée par l article 2 de la loi du 29/07/1991 et doit en conséquence être annulée.

N D'ORDRE R.G.34.415/06 4/9 Le juge qui annule la décision prise par le CPAS ne peut y substituer sa propre décision qu après avoir déterminé si les conditions d octroi de l aide sociale sollicitée sont remplies. 5.2. L article 1 er de la loi du 08/07/1976, met en œuvre le droit consacré par l article 23 de la Constitution, de toute personne à mener un vie conforme à la dignité humaine, par l octroi de l aide sociale, attribuée à toute personne précisément dans l unique but de permettre de mener une vie conforme à la dignité humaine. La loi ne donne aucune définition de la vie conforme à la dignité humaine, non plus que de la dignité humaine elle-même ; contrairement à ce qu articule Monsieur V. la dignité humaine ne s apprécie pas de manière individuelle mais bien, dans une société donnée et à un moment donné de l évolution de celle-ci, en fonction d un ensemble de critères valables pour tous, étant entendu qu il existe quel que soit l état d une société, un seuil en dessous duquel la vie n est plus conforme à la dignité humaine, notion qui a d ailleurs vocation à être universelle. Ce qui par contre s apprécie de façon totalement individualisée, c est l état de besoin, la situation personnelle de chaque personne qui fait obstacle à ce qu elle atteigne, dans la société dans laquelle elle vit, le niveau où il doit être considéré que la vie est conforme à la dignité humaine. Et également, par voie de conséquence, l aide sociale qui permet de remédier à cet état de besoin qui en détermine la nature et l ampleur, doit elle aussi, être déterminée de façon individualisée. 5.3. En regard de la motivation de la demande formulée par Monsieur V., obtenir une somme d argent afin d acquérir un ordinateur, ses périphériques et un accès à l Internet, la question se pose de savoir si la possession d un tel ensemble d objets est nécessaire pour permettre à la personne de mener une vie conforme à la dignité humaine. En l état actuel de la société belge, il ne peut être considéré, à l estime de la Cour, que la possession d un ordinateur et de ses périphériques et l accès à internet soit indispensable, voire même simplement nécessaire pour permettre à la personne de mener une vie conforme à la dignité humaine. Certes l organisation sociale et l évolution de celle-ci justifie que l on considère comme très utile la disposition d un matériel informatique et l accès à internet, à condition que l on ait les connaissances nécessaires à l utilisation de ces médias techniques, mais il est incontestablement possible de mener une vie conforme à la dignité humaine sans y avoir recours, à défaut de quoi il faudrait retenir qu un nombre considérable de personnes, voire une majorité de la population, vit en dessous du seuil d une vie conforme à la dignité humaine en raison de ce qu elle n a pas à sa disposition un tel matériel ou un tel accès à internet.

N D'ORDRE R.G.34.415/06 5/9 Les déclarations ou courriers «toutes-boîtes» de responsables politiques, fussent-ils ministres, ne constituent pas des sources de droit et ne présentent aucun caractère obligatoire et moins encore les informations que dispense la presse ; il est difficile de retenir que la possession d un ordinateur puisse constituer effectivement «un besoin de première nécessité au même titre que l eau ou l électricité» formule qui revêt, si l on fait preuve d un tant soit peu d esprit critique, la forme d un slogan plutôt que d une opinion étayée. 5.4. Monsieur V. entend justifier le bien fondé de sa demande en invoquant d une part l utilité de l accès à internet pour faciliter ses recherches d emploi et également ses recherches dans le cadre des nombreuses procédures qu il soutient ou entend soutenir et d autre part la nécessité de rédiger de manière lisible les documents et courriers qu il produit dans le cadre et de ses recherches d emploi et des procédures qu il mène. La recherche d informations sur internet, incontestablement utile sans toutefois constituer la seule source possible d information, est accessible à Monsieur V. selon les observations non démenties présentées par le CPAS et retenues par le premier juge, dans la ville où il réside, non seulement dans des cyber-cafés mais aussi dans des établissements publics dont l accès est gratuit et rien ne démontre que ces possibilités ne permettent pas à Monsieur V. de rechercher les informations qu il souhaite. Il se comprend mal qu il éprouve le besoin d accéder à internet 24 heures sur 24 pour s informer soit en matière d emploi, soit dans le domaine du droit comme il l articule. Relativement aux recherches d emploi, la Cour constate à la lecture du dossier déposé par Monsieur V. que celui-ci a adressé entre le 18/03/2007 et le 27/07/2007, 36 lettres manuscrites de candidatures à des emplois, toutes parfaitement lisibles, candidatures spontanées ou réponses à des offres d emploi, ce qui concourt à démontrer que l accès à internet n est pas indispensable dans le cadre d une recherche d emploi. En ce qui concerne la rédaction d écrits lisibles, celle-ci peut se réaliser non seulement par l usage d un ordinateur et d une imprimante, mais aussi au moyen d une machine à écrire dont il existe de nombreux modèles peu onéreux disposant même d une fonction de traitement de texte ; par ailleurs, il existe un marché d ordinateurs et d imprimantes de seconde main sur lequel Monsieur V. pourrait sans doute acquérir le matériel qu il souhaite pour un prix modique. Il ne peut être considéré que l absence d ordinateur et de liaison internet empêcherait en quoi que ce soit l accès à un procès équitable, le principe de l égalité des armes évoqué par Monsieur V. ne s étendant pas à la disposition de l outil informatique et ce d autant moins que si Monsieur V. ne dispose pas de tels outils, cela n est pas nécessairement le cas de l avocat qui assure sa défense.

N D'ORDRE R.G.34.415/06 6/9 A défaut d avoir déposé quelques documents, que ce soit relatif à un matériel qu il aurait envisagé d acheter, voire un devis qu il aurait demandé à cet effet, Monsieur V. ne justifie en rien des montants qu il sollicite, soit de 2.500, soit à titre subsidiaire de 1.000, au titre d aide sociale. 5.5. Monsieur V. ne justifie par ailleurs nullement se trouver dans un état de besoin tel qu il ne puisse mener une vie conforme à la dignité humaine, soit dans sa thèse, dans un état de besoin qui l empêche de faire l achat du matériel informatique qu il souhaite et d accéder à une liaison internet. Monsieur V. a disposé en février 2006 d allocations de chômage pour un montant de 804,96 correspondant à 24 jours, soit un montant moyen par mois de 872,04. Monsieur V. a fait l objet le 08/10/2007 d une décision de l ONEm qui le sanctionne pour inexactitude dans la catégorie de bénéficiaire, lui retirant le droit aux allocations de chômage à partir du 15/10/2007 pour une période de 13 semaines et lui réclamant un indu pour la période prenant cours le 01/10/2004 ; cet indu sera ultérieurement chiffré à 8.978,19. Il est fait état de ce que Monsieur V. a introduit un recours contre cette décision de l ONEm. A partir du 01/06/2008 Monsieur V. a perçu à nouveau les allocations de chômage au taux journalier de 26,84 soit un montant mensuel moyen de 697,84. Relativement aux charges, Monsieur V. faisait état dans ses conclusions déposées le 11/12/2007 de ce qu il «paye un loyer comme tout le monde» ainsi que des charges qui lui incombent mensuellement citant : «loyer, nourriture, fournitures en gaz, électricité, eau courante, téléphone, télédistribution, soins médicaux (au premier rang desquels ceux optiques et dentaires), assurances habitation et voiture, essence, entretien, taxes communales et provinciales, redevances TVD,égoutsimmondices/voiries,...», ce qui avait amené la Cour a rouvrir les débats afin que Monsieur V. justifie du paiement de toutes ces charges, particulièrement du paiement du loyer, dès lors que la propriétaire de l immeuble loué était décédée depuis novembre 1992 et que l héritier présomptif de l immeuble qu il occupe est Monsieur V. lui-même. Monsieur V. n a apporté aucune preuve du paiement d un loyer et n a pas répondu à la question relative à l identité de la personne à qui il paierait ou devrait payer un loyer ; en ce qui concerne les charges Monsieur V. a bien déposé quelques pièces relatives à celles-ci mais aucune preuve de paiement sauf un montant de 14,11 payé le 05/03/2008 à un télé distributeur ainsi que la preuve de la délivrance d une carte budget pour la consommation d électricité.

N D'ORDRE R.G.34.415/06 7/9 Monsieur V. affirme, sans être contredit, qu il réside bien à VERVIERS, 26, avenue N. alors qu il a une adresse de référence au CPAS de VERVIERS ; les pièces déposées par Monsieur N. révèlent dans l immeuble en question une consommation d eau et une consommation d électricité extrêmement faible. En ce qui concerne des frais «d assurances.. voiture, essence», on apprend que Monsieur V. ne possède pas de voiture et n a d ailleurs pas de permis de conduire. Monsieur V. fait également état de nombreuses dettes mais n établit pas et n offre pas d établir qu il paie celles-ci. Il n est évidemment pas question d inciter Monsieur V. à s endetter et surtout pas au-delà de ses possibilités de remboursement, mais à côté de l achat à crédit, il existe une autre possibilité qui consiste à constituer une épargne permettant d acquérir le bien désiré. A défaut de connaître, à défaut de preuve des paiements, les charges que supporte effectivement Monsieur V., il est impossible d apprécier les possibilités qu il a de constituer une telle épargne, tout comme on ignore d ailleurs l état de son patrimoine et l éventuelle existence d une épargne dont il pourrait disposer le cas échéant. 5.6. Le CPAS de VERVIERS a pris le 28/06/2006, agissant dans les limites de son pouvoir décisionnel, une décision relative à la mise en application de l A.R. du 01/05/2006 quant à l affectation des moyens mis à sa disposition en excluant l allocation d un montant de 175 par bénéficiaire pour l achat en 2006 d un pack «Internet pour tous». Il n existe aucune disposition légale obligeant un CPAS à répercuter «à l échelon fédéral» la demande individuelle d une personne sollicitant le bénéfice d une aide sociale quelle qu elle soit. Ceci ne pourrait toutefois empêcher le juge saisi d un recours de considérer qu une décision refusant une aide sociale consistant dans l octroi de moyens nécessaires à l acquisition d un matériel informatique et/ou d un accès à internet, doit être réformée, s il aboutissait à la conclusion que ce refus ne permettrait pas à une personne de mener une vie conforme à la dignité humaine. En l espèce la Cour ne considère toutefois pas, pour les motifs précisés cidessus, que la décision dont recours contribue à priver Monsieur V. des conditions d une vie conforme à la dignité humaine ; par ailleurs la mise en œuvre des dispositions de l A.R. du 01/05/2006 n est pas ici en cause, et le débat relatif à ce sujet est en conséquence sans objet, dès lors que l aide sollicitée par Monsieur V. ne vise pas l octroi de l allocation d un montant de 175 au profit de la personne ayant fait l achat d un pack «Internet pour tous» mais un tout autre objet.

N D'ORDRE R.G.34.415/06 8/9 5.7. Monsieur V. ne précise ni ne démontre en quoi consisterait la faute qu aurait commise le CPAS qui lui causerait un dommage, non démontré lui non plus, justifiant l octroi d un montant de 550. Le CPAS n a commis dans l exercice légitime de ses droits de défense aucune faute qui puisse être retenue par la Cour comme causant à Monsieur V. un quelconque dommage qui justifierait l octroi d un montant lui aussi totalement injustifié de 2.500. A défaut d avoir démontré l existence d une faute qu aurait commise le CPAS, Monsieur V. n est pas davantage fondé dans sa demande d octroi d un montant de 500 à titre de frais de défense, lesquels selon la jurisprudence de la Cour de Cassation qu il cite, doivent s inscrire dans un mécanisme de réparation d un dommage causé par une faute. 5.8. La Cour n estime pas devoir accueillir la demande formulée par le CPAS dès lors qu elle considère que l appel ne peut être qualifié de téméraire et vexatoire : il est du droit de Monsieur V. de présenter au juge d appel les moyens qu il développe à l encontre de la motivation retenue par le premier juge et dans la présentation de ses moyens en appel, on ne peut retenir ni une intention de nuire, ni un exercice de la voie de recours au delà de ce qui est admissible. 5.9. Le montant de base de l indemnité de procédure doit être retenu, Monsieur V. ne démontrant pas se trouver dans l une des hypothèses visées à l article 1022 du Code Judiciaire. VI.- DECISION DE LA COUR Vu les dispositions de la loi du 15 juin 1935 concernant l'emploi des langues en matière judiciaire, notamment son article 24, LA COUR, après en avoir délibéré et statuant contradictoirement : Sur avis écrit conforme de Monsieur Ph.LAURENT, Premier Avocat général, déposé en langue française,au greffe de la Cour le 16 octobre 2008, Déclare l appel recevable, Le dit non fondé. Dit non fondée la demande de Monsieur V. portant sur l octroi de dommage et intérêts, en ce compris la répétibilité des frais de défense.

N D'ORDRE R.G.34.415/06 9/9 Dit non fondée la demande du CPAS tendant à entendre condamner Monsieur V. à des dommages et intérêts pour appel téméraire et vexatoire. Condamne le CPAS de VERVIERS aux dépens liquidés en degré d appel pour Monsieur V. et fixé par la Cour à 291,50. Ainsi arrêté et signé avant la prononciation par : M. A. HAVENITH,Conseiller faisant fonction de Président M.A.GUISSE,Conseiller social au titre d employeur, M.M.PIRARD, Conseiller social au titre d ouvrier, qui ont assisté aux débats de la cause et délibéré conformément au prescrit légal, assistés de Mme S.COMPERE, greffier. Le Greffier Les Conseillers sociaux Le Président et prononcé en langue française à l'audience publique de la CINQUIEME CHAMBRE de la Cour du travail de Liège, section de Liège, en l annexe du Palais de Justice de Liège, sise rue Saint-Gilles, n 90c à 4000 LIEGE, le DIX-SEPT DECEMBRE DEUX MILLE HUIT, par le Président de chambre, assisté de Mme S.COMPERE Le Greffier Le Président S.COMPERE A.HAVENITH